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16/02/2023 | FRANCE | N°22/01022

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 4 - chambre 7, 16 février 2023, 22/01022


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

Au nom du Peuple Français



COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 4 - Chambre 7



ARRÊT DU 16 Février 2023

(n° , 13 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 22/01022 - N° Portalis 35L7-V-B7G-CFA2K



Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 22 Décembre 2021 par le Tribunal Judiciaire de BOBIGNY - RG n° 21/00027





APPELANTE

PIN DÉVELOPPEMENT

S.A.R.L. immatriculée au RCS de [Localité 5] sous le n°440 308 930

[Adresse 3]
r>[Localité 5]

représenté par Me Stéphane DESFORGES - SELARL LE SOURD DESFORGES, avocat au barreau de PARIS, toque : K131





INTIMÉS

ETABLISSEMENT PUBLIC ILE DE FRANCE MOBILIT...

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

Au nom du Peuple Français

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 4 - Chambre 7

ARRÊT DU 16 Février 2023

(n° , 13 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 22/01022 - N° Portalis 35L7-V-B7G-CFA2K

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 22 Décembre 2021 par le Tribunal Judiciaire de BOBIGNY - RG n° 21/00027

APPELANTE

PIN DÉVELOPPEMENT

S.A.R.L. immatriculée au RCS de [Localité 5] sous le n°440 308 930

[Adresse 3]

[Localité 5]

représenté par Me Stéphane DESFORGES - SELARL LE SOURD DESFORGES, avocat au barreau de PARIS, toque : K131

INTIMÉS

ETABLISSEMENT PUBLIC ILE DE FRANCE MOBILITES (IDFM)

[Adresse 4]

[Localité 5]

représenté par Me Jonathan AZOGUI - SCP LONQUEUE - SAGALOVITSCH - EGLIE - RICHTERS & Associés, avocat au barreau de PARIS, toque : P482

DIRECTION DEPARTEMENTALE DES FINANCES PUBLIQUES DU VAL DE MARNE - COMMISSAIRE DU GOUVERNEMENT

[Adresse 1]

[Localité 13]

représentée par Madame [J] [W], en vertu d'un pouvoir général

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l'article 805 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 15 Décembre 2022, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Monsieur Hervé LOCU, Président chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Monsieur Hervé LOCU, Président

Madame Catherine LEFORT, Conseillère

Monsieur Raphaël TRARIEUX, Conseiller

Greffier : Madame Dorothée RABITA, lors des débats

ARRÊT :

- contradictoire

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Hervé LOCU, Président et par Dorothée RABITA, greffier présent lors de la mise à disposition.

***

EXPOSÉ DES FAITS ET DE LA PROCÉDURE :

Dans le cadre de l'aménagement d'une voie de bus en site propre « T Zen 5 » dans les villes de [Localité 19] et de [Localité 12] dont Ile-de-France Mobilités (IDFM) est le maître d'ouvrage, une enquête parcellaire a été menée du 2 au 19 décembre 2019.

Par arrêté inter-préfectoral du 16 décembre 2016, prorogé le 5 octobre 2021, le projet « T Zen 5 » a fait l'objet d'une déclaration d'utilité publique au profit du Syndicat des transports d'Ile-de-France (STIF), désormais dénommé Ile-de-France Mobilités (IDFM), en vue de la réalisation d'une voie de bus.

Au terme d'un arrêté préfectoral du 16 octobre 2020, les parcelles et droits réels nécessaires à la réalisation du projet « T Zen 5 » et situés sur la ville de [Localité 19] ont été déclarés cessibles au profit de IDFM, parmi lesquelles les parcelles cadastrées [Cadastre 6], [Cadastre 9] et [Cadastre 11] d'une superficie respective de 1.008 m², 222 m² et 106 m², pour une surface totale de 1.336 m².

L'ordonnance d'expropriation a été rendue le 7 mai 2021 (Pièce 1I).

Les parcelles cadastrées [Cadastre 6], [Cadastre 9] et [Cadastre 10] sont situées en zone UFi, zone affectée à l'accueil d'activités économiques excluant l'habitat nouveau. Il s'agit de parcelles issues d'une division en date du 24 juillet 2020 des parcelles originelles [Cadastre 6] et [Cadastre 7] d'une surface respective de 1.008 m² et 9.103 m². Ces parcelles sont en nature exclusive de voirie et forment un ensemble rectangulaire.

Est notamment concernée par l'opération la SARL Pin Développement, en tant que propriétaire du terrain situé [Adresse 2]), sur les parcelles cadastrées [Cadastre 6], [Cadastre 9] et [Cadastre 10].

Faute d'accord sur l'indemnisation, IDFM a saisi le juge de l'expropriation de [Localité 13] par un mémoire du 4 mars 2021 et reçu par le greffe le 8 mars 2021.

Par un jugement du 22 décembre 2021, après transport sur les lieux le 29 juin 2021, le juge de l'expropriation de [Localité 13] a :

Annexé à la décision le procès-verbal de transport du 29 juin 2021 ;

Fixé la date de référence au 22 décembre 2020 ;

Retenu la méthode d'évaluation globale par comparaison ;

Retenu une valeur unitaire de 115 euros/m² ;

Fixé l'indemnité due par IDFM à la SARL Pin Développement, au titre de la dépossession des parcelles cadastrées section [Cadastre 6], [Cadastre 9] et [Cadastre 10] sises [Adresse 2]) à la somme de 148.234 euros ;

Dit que cette indemnité de dépossession foncière se décompose de la façon suivante :

130.640 euros au titre de l'indemnité principale,

14.064 euros au titre de l'indemnité de remploi,

3.530 euros au titre de l'indemnité pour reconstitution ;

Condamné IDFM à payer à la SARL Pin Développement la somme de 3.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ;

Condamné IDFM aux dépens de l'instance ;

Rejeté toutes les autres demandes des parties.

La SARL Pin Développement a interjeté appel du jugement le 18 avril 2022 sur le prix au m² retenu pour le calcul de l'indemnité principale, l'absence d'indemnisation des emplacements de parking, le rejet de l'indemnisation du déplacement des éclairages.

Pour l'exposé complets des faits, de la procédure, des prétentions des parties, conformément à l'article 455 du code de procédure civile, il est expressément renvoyé à la décision déférée et aux écritures :

1/ adressées au greffe le 26 avril 2022 par la SARL Pin Développement, notifiées le 27 avril 2022 (AR intimé le 28 avril 2022 et AR CG le 28 avril 2022), aux termes desquelles il est demandé à la cour de :

Déclarer recevable et fondé en son appel du jugement la SARL Pin Développement par le juge de l'expropriation du tribunal judiciaire de Créteil ;

Infirmer le jugement en ce qu'il a fixé l'indemnité principale à la SARL Pin Développement à la somme de 130.640 euros ;

Confirmer le jugement en ce qu'il a alloué une indemnité de 3.530 euros au titre des frais de reconstitution du panneau ;

Confirmer ledit jugement pour le surplus et après avoir à nouveau statuer, fixer les indemnités à revenir à la SARL Pin Développement pour expropriation de son bien comme suit :

Indemnité principale : 921.840 euros,

Perte de parking : 24.000 euros,

Indemnité de remploi : 93.184 euros,

Frais de déplacement du panneau : 3.530 euros (confirmation),

Frais de déplacement du candélabre : 3.530 euros,

Outre l'article 700 du code de procédure civile :

Première instance : 3.000 euros,

En cause d'appel : 5.000 euros.

2/ adressées au greffe le 30 septembre 2022 par la SARL Pin Développement, notifiées le 3 octobre 2022 (AR intimé le 6 octobre 2022 et AR CG le 5 octobre 2022), aux termes desquelles il est demandé à la cour de :

Déclarer recevable et fondé en son appel du jugement la SARL Pin Développement par le juge de l'expropriation du tribunal judiciaire de Créteil ;

Infirmer le jugement en ce qu'il a fixé l'indemnité principale à la SARL Pin Développement à la somme de 130.640 euros ;

Confirmer le jugement en ce qu'il a alloué une indemnité de 3.530 euros au titre des frais de reconstitution du panneau ;

Confirmer ledit jugement pour le surplus et après avoir à nouveau statué, fixer les indemnités à revenir à la SARL Pin Développement pour expropriation de son bien comme suit :

Indemnité principale : 921.840 euros,

Perte de parking : 24.000 euros,

Indemnité de remploi : 93.184 euros,

Frais de déplacement du panneau : 3.530 euros (confirmation),

Frais de déplacement du candélabre : 3.530 euros,

Outre l'article 700 du code de procédure civile :

Première instance : 3.000 euros,

En cause d'appel : 5.000 euros.

3/ adressées au greffe le 3 octobre 2022 par la SARL Pin Développement, notifiées le 6 octobre 2022 (AR intimé le 10 octobre 2022 et AR CG le 14 octobre 2022), aux termes desquelles il est produit une nouvelle pièce (Pièce 27A).

4/ adressées au greffe par IDFM, intimé, le 6 juillet 2022, notifiées le 7 juillet 2022 (AR appelant le 11 juillet 2022 et AR CG le 11 juillet 2022), aux termes desquelles il est demandé à la cour de :

A titre liminaire,

Prononcer la caducité de la déclaration d'appel en raison de la tardiveté du dépôt des conclusions de l'appelant ;

Constater l'extinction de l'instance ;

A défaut,

Confirmer le jugement dans toutes ses dispositions et notamment en tant qu'il a fixé à 148.234 euros l'indemnité d'expropriation due à la SARL Pin Développement pour la dépossession des biens cadastrés section [Cadastre 6], [Cadastre 9] et [Cadastre 10] sis [Adresse 2], décomposée comme suit :

Indemnité principale : 130.640 euros,

Indemnité de remploi : 14.064 euros,

Indemnité pour frais de reconstitution (panneau publicitaire) : 3.530 euros ;

Débouter la SARL Pin Développement de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions d'appel et notamment sa demande d'indemnité pour perte de parking et déplacement du candélabre ;

En tout état de cause,

Condamner la SARL Pin Développement à verser à IDFM une somme de 4.000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens de l'instance d'appel.

4/ adressées au greffe le 13 juillet 2022 par le commissaire du gouvernement, intimé, notifiées le 15 juillet 2022 (AR appelant le 18 juillet 2022 et AR intimé le 19 juillet 2022), aux termes desquelles il forme appel incident et demande à la cour de :

A titre principal,

Déclarer la déclaration d'appel caduc ;

A titre accessoire,

Fixer à la somme de 173.534 euros l'indemnité d'éviction due à la SARL Pin Développement pour la dépossession des biens cadastrés section [Cadastre 6], [Cadastre 9] et [Cadastre 10] sis [Adresse 2], décomposée comme suit :

153.640 euros au titre de l'indemnité principale (1.336 m² x 230 euros/m² x 50%),

16.364 euros au titre de l'indemnité de remploi,

3.530 euros au titre de l'indemnité pour frais de déplacement du panneau publicitaire.

EXPOSE DES PRETENTIONS ET DES MOYENS DES PARTIES :

La SARL Pin Développement fait valoir que :

Concernant la description du bien exproprié, les parcelles d'origine ont fait l'objet d'une division cadastrale en parcelles [Cadastre 6], [Cadastre 9], [Cadastre 8] et [Cadastre 10]. L'emprise, d'une surface totale de 1.336 m², porte un certain nombre d'équipements, à savoir des allées végétalisées et deux emplacements de parking. La parcelle est libre de toute occupation. Les biens sont classés en zone UFi. Il s'agit d'une zone essentiellement dévolue à des activités industrielles et commerciales bénéficiant de grandes surfaces. La zone, en bordure de Seine, est desservie par l'autoroute A86 située à quelques mètres à peine ainsi que par les transports en communs

Concernant la valeur vénale, les terrains en emprise sont situés en zone constructible, possèdent trois façades distinctes. Une majoration de 15% pour double façade est régulièrement retenue par la jurisprudence (Pièce 24A). La situation géographique du bien est d'excellente qualité, étant situé en centre-ville, à proximité de toutes commodités et moyens de transports. Les parcelles en emprise sont entièrement goudronnées, partiellement végétalisées et aménagées en deux parkings.

Concernant les termes de comparaison produits par l'autorité expropriante, il convient d'écarter les références trop anciennes, la référence relative à un acte de vente limitant l'usage futur du bien, et la référence relative à deux parcelles enclavées. De même, s'agissant des termes de comparaison produits par le commissaire du gouvernement, il convient d'écarter la référence relative à une parcelle de forme triangulaire surplombée par un ouvrage autoroutier, la référence relative à un terrain occupé, la référence relative à une parcelle polluée comprenant des ouvrages enterrés et des servitudes, la référence relative à une parcelle enclavée par des voies ferrées, la référence relative à une parcelle de forme irrégulière sans aucun accès propre à la voie située en zone UP2i dont la cession est intervenue entre deux structures publiques avec des engagements à l'utilisation des biens, la référence relative à la cession à des conditions très particulières d'une parcelle sans accès routier et polluée par de l'amiante et des substances chimiques et radioactives, la référence relative à un terrain occupé, faisant l'objet d'une installation classée ICPE et polluée, la référence à une parcelle enclavée de seulement 29 m²,

Le premier juge a inexactement écarté trois termes de comparaison produits (DEF2, DEF3, jugements portant sur des tréfonds). De plus, il a inexactement retenu quatre termes de comparaison produits (CG1, CG2, DEM1, CG6).

Concernant l'abattement retenu, le raisonnement du premier juge est erroné. En effet, s'agissant de surface du terrain exproprié, il s'agissait initialement d'une emprise partielle sur un terrain plus vaste. Il ne peut être tenu compte de manière défavorable la surface d'un terrain résultant de l'opération d'expropriation elle-même. S'agissant du caractère inondable du bien, tel était également le cas de la totalité des références présentées, de sorte que l'abattement constitue ici une double pénalité. L'abattement doit donc être rejeté. Au contraire, la situation d'angle de la parcelle doit conduire à lui appliquer une majoration.

Concernant l'indemnité principale, celle-ci s'élève donc à 921.840 euros (1.336 m² × 690 euros/m²).

Concernant l'indemnité pour perte de parking, l'emprise comprend deux emplacements de stationnement dont l'existence n'est pas contestable (Pièce 11A). Les trois termes de comparaison produits conduisent à indemniser la perte de ses parkings sur la base d'un prix unitaire de 12.000 euros, soit 24.000 euros au total. En écartant le principe de leur indemnisation au motif de leur inexistence, le premier juge a donc commis une erreur.

Concernant l'indemnité de remploi, celle-ci doit être fixée à 93.184 euros en application de la formule suivante : 20% du montant de l'indemnité principale jusqu'à 5.000 euros, 15% entre 5.000 et 15.000 euros, et 10% au-delà de 10.000 euros.

Concernant le coût de déplacement du candélabre, deux devis avaient été fournis pour un coût de 3.350 euros (Pièce 10A) et de 2.730 euros (Pièce 12A). L'existence de ce candélabre n'est nullement contestée par les parties. Le candélabre se situant sur un terrain privé, leur propriété ne peut pas être remise en cause sans preuve. Il convient donc d'allouer une indemnité d'un montant de 3.530 euros.

Concernant les frais irrépétibles et les dépens, il est sollicité de la cour qu'elle alloue à la SARL Pin Développement une indemnité complémentaire de 5.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

La SARL Pin Développement fait valoir dans un second jeu de conclusions :

Concernant la recevabilité de l'appel, l'appelante a interjeté appel par lettre recommandée avec accusé de réception adressée le 18 janvier 2022 et reçue par le greffe le 20 janvier 2022 (Pièce 27A). Les arrêts de la deuxième chambre civile de la Cour de cassation produits par l'intimé ne sont pas applicables en l'espèce puisque l'un concerne une déclaration d'appel formé par voie électronique (17-27.206) et l'autre a été rendu en matière prud'hommale (18-24.107). Sur le fondement des dispositions et de la jurisprudence applicables en matière d'expropriation, l'appel de la concluante n'est nullement tardif, puisque le délai de trois mois imparti pour conclure court, lorsque l'appel est interjeté par lettre recommandée, à compter de la réception de la déclaration d'appel par le greffe (05-70.020, 75-70.434, Civ. 3e, 20 oct. 1981). Dès lors, en déposant ses conclusions le 20 avril 2022 (Pièce n°28A), le délai de trois mois imposé par l'article R.311-26 du code de l'expropriation a été respecté et l'appel n'est pas caduc.

A défaut, s'il devait être fait application de la solution dégagée par la deuxième chambre civile, il devra être fait application de la jurisprudence constante de la Cour de cassation qui écarte l'application des nouvelles jurisprudences aux actes accomplis antérieurement à l'intervention du revirement (20-14.352, 18-24.107, 21-11.265, 20-22.588).

Concernant les critiques formulées par l'autorité expropriante, cette dernière a également produit des références en zone UB et UC, de sorte que sa critique s'applique à ses propres références. De plus, elle ne saurait utilement se fonder sur le fait que ces décisions portaient sur la fixation d'indemnités en tréfonds, car la méthode utilisée en la matière, suppose avant toute fixation d'indemnités, l'évaluation du terrain de surface.

Concernant les justifications de l'autorité expropriante de ses termes de comparaison, la restriction drastique de l'usage futur d'un bien est de nature à avoir un impact très significatif sur la détermination du prix, de sorte qu'il convient d'écarter ces références. Par ailleurs, si la jurisprudence tend parfois à retenir les références constituées par des acquisitions opérées par des personnes publiques, tel n'est pas le cas de cessions intervenues entre deux personnes publiques pour lesquelles le libre jeu des règles du marché immobilier n'est pas assuré.

Concernant l'affectation des terrains, l'autorité expropriante insiste sur le fait que les parcelles sont en nature de voiries, alors que cette affectation s'est faite sans l'accord de l'expropriée. Aussi, la jurisprudence citée est inapplicable puisqu'elle concerne des terrains « appartenant à différents syndicats de copropriété » alors que le bien objet de la présente procédure appartient entièrement à l'expropriée. L'abattement n'est donc pas justifié.

Concernant l'indemnité pour perte de parking, il ressort d'un arrêt de la cour de [Localité 5] (Pièce 25A), que les places de stationnement ne pouvant être reconstituée devaient faire l'objet d'une indemnisation. Par ailleurs, l'existence des places de stationnement ressort des photos jointes aux présentes conclusions (Pièce 26A).

IDFM rétorque que :

Concernant la caducité de la déclaration d'appel, lorsque l'appel est effectué par voie électronique, le point de départ est la date à laquelle l'appel est formé et non celle à laquelle il est enregistré par le greffe (17-27.206). De même, le délai de trois mois dont dispose l'appelant pour remettre ses conclusions au greffe court, lorsque la déclaration d'appel est établie sur support papier et qu'elle est adressée au greffe par lettre recommandée avec demande d'avis de réception, du jour de l'expédition de cette lettre (18-24.107). Or, l'appel a été interjeté le 18 janvier 2022 (Pièce 2I). L'appelant disposait donc jusqu'au 18 avril 2022 pour, soit déposer ses conclusions d'appelant au greffe, soit les expédier par lettre recommandée avec accusé réception. Il ressort très explicitement de l'instruction de ce dossier que l'appelante a notifié le 20 avril 2022 (Pièce 3I) par RPVA ses conclusions et, par voie papier au greffe, le 26 avril 2022 (Pièce 3I). Dès lors, la notification des conclusions d'appelant postérieurement au 18 avril 2022 est donc tardive, peu important que soit retenue la date du 20 avril 2022 ou du 26 avril 2022.

Concernant la localisation du bien, Les parcelles cadastrées section [Cadastre 6], [Cadastre 15] et [Cadastre 16] sont situées le long du [Adresse 18].

Concernant la consistance et l'état du bien, les parcelles cadastrées section [Cadastre 6] et [Cadastre 7] d'une superficie respective de 1.008 m² et de 9.103 m² ont été divisées pour y prélever les parcelles nouvellement créées [Cadastre 6], [Cadastre 9] et [Cadastre 10] correspondant à une emprise de 1.336 m² de forme rectangulaire. Le bien est en nature exclusive de voirie.

Concernant la date de référence, il résulte des article L.322-2 du code de l'expropriation et L.213-4 du code de l'urbanisme que celle-ci doit en l'espèce être fixée au 22 décembre 2020, date à laquelle est devenue opposable aux tiers la dernière modification du plan local d'urbanisme de [Localité 14] [Localité 17] Seine Bièvre.

Concernant les caractéristiques juridiques et la situation locative, le bien exproprié est situé en zone UFi, laquelle est une zone d'activités économiques avec de très nombreuses restrictions comme les activités commerciales ou la création de logements qui en sont exclues. Elle est également comprise en zone inondable, dans la deuxième zone la plus à risque, ce qui limite fortement sa constructibilité. Le bien sera donc évalué en valeur libre dès lors qu'il n'existe aucun bail, l'expropriation ne portant strictement que sur de la voirie et du trottoir.

Concernant l'indemnité principale, la moyenne des huit titres de comparaison produits s'établit à 141 euros/m². Afin de tenir compte de la spécificité de ce bien qui est à usage exclusif de voirie et qui n'est donc pas utilisé par l'exproprié, il devra être retenu 20% de cette valeur, soit une valeur de 50 euros/m² rehaussé à 100 euros/m². La cour d'appel a déjà rappelé que des trottoirs sans aucune possibilité de construction méritent l'application d'un abattement minimum de 50% (20/09140). Or, en l'espèce, il convient de soulever le caractère extrêmement bâti des parcelles originelles. Son inconstructibilité se démontre en tout état de cause par sa forme longitudinale dont la largeur ne peut accueillir aucune construction. Partant compte tenu du zonage en UFi, du caractère inondable de cette zone mixte avec locaux d'activité à proximité et de la présence d'un emplacement réservé, il est proposé de retenir une valeur de 100 euros/m² pour ce terrain. L'indemnité de dépossession peut donc se calculer comme suit : 1.336 m² x 100 euros/m² = 133.600 euros. Il convient donc de confirmer le jugement qui a retenu une indemnité principale de dépossession de 130.640 euros.

S'agissant des critiques formulées par l'appelante, cette dernière ne démontre pas l'ancienneté des termes de comparaison produits. De plus, il est de jurisprudence constante que cette cession entre personnes publiques ne suffit pas à écarter la référence dès lors que la cession a été réalisée au prix du marché. Par ailleurs, concernant les modalités de la vente et ses conditions particulières, aucun élément de l'acte de vente, n'est de nature à affecter la valeur vénale des parcelles. De même, tous les termes de comparaison produits par le commissaire du gouvernement doivent être retenus.

Concernant les termes de comparaison produits par l'appelant, le premier et le deuxième terme concernent chacun une cession entre deux personnes publiques dans le cadre d'une opération d'intérêt national, ce qui justifie un prix élevé contrairement au bien exproprié. Le troisième terme date de 2015 n'est donc pas pertinent. Le quatrième, le cinquième et le sixième terme ne sont pas pertinents dès lors qu'il s'agit de la fixation judiciaire d'une indemnité pour un tréfonds. Au surplus, le zonage concerné était zones UC et UCa, qui sont, d'une part, des zones urbaines, et d'autre part, des zones non affectées par les servitudes de constructibilité liées à l'inondation.

Par ailleurs, l'exproprié ne formule aucune observation sur le fait que son bien est en nature de voirie et de trottoir exclusivement. Contrairement à ce qu'indique l'appelante, l'ensemble des termes de comparaison ne concerne jamais de simples trottoirs ou de la voirie et, au surplus, ces termes ne sont nullement compris dans la seconde zone la plus inondable au PPRI.

Concernant la demande relative à la perte de parking, la demande de l'appelante s'ajoute au dispositif des conclusions alors que le prétendu préjudice de perte de deux emplacements de parking est déjà évidemment indemnisé dans le cadre de l'indemnité principale. L'arrêt de la cour d'appel de Paris produit par l'appelante indemnisait la perte d'un droit réel pour une société propriétaire et gérante de centaines d'emplacements de parking, ce qui n'est pas le cas en l'espèce. En tout état de cause, en cause d'appel, l'exproprié échoue à rapporter la moindre preuve de l'existence de ces prétendus emplacements de stationnement qui se situeraient - en réalité - sur le trottoir.

Concernant l'indemnité de remploi, elle est calculée selon la jurisprudence habituelle (20% jusqu'à 5.000 euros, 15% de 5.000 euros à 15.000 euros et 10% au-delà de 15.000 euros) soit 14.064 euros.

Concernant l'indemnité pour travaux de reconstitution des équipements, l'indemnité pour déplacement du panneau publicitaire n'est pas contestée. En revanche, le candélabre appartient à la commune de [Localité 19], comme tout éclairage public. Dès lors, le premier juge a logiquement écarté cette demande. Au surplus, le candélabre sera soit remplacé soit compensé en termes de luminosité dans le cadre du projet « T Zen 5 ».

Concernant les frais irrépétibles et les dépens, IDFM, qui n'est manifestement n'est pas la partie perdante dans cette instance, ayant été contraint d'exposer des frais pour sa défense en cause d'appel, est bien fondée à solliciter la condamnation de l'exproprié à lui verser la somme de 4.000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ainsi que sa condamnation aux entiers dépens de l'instance d'appel.

Le commissaire du gouvernement conclut que :

Concernant la description du bien exproprié, Les biens expropriés dans le cadre de cette procédure sont les parcelles [Cadastre 6] (1.008 m²), [Cadastre 9] (222 m²) et C n°76 (106 m²) sises [Adresse 2] soit une superficie totale de 1.336 m². Les parcelles originelles cadastrées [Cadastre 6] et [Cadastre 7] étaient respectivement d'une superficie de 1.008 m² et 9.103 m². La parcelle [Cadastre 7] a fait l'objet d'une division cadastrale le 24 juillet 2020 en de nouvelles parcelles [Cadastre 8], [Cadastre 9] et [Cadastre 10]. Les parcelles sont en nature de voirie publique constituant une unité foncière rectangulaire.

Concernant la situation locative, le bien est présumé être libre d'occupation.

Concernant la date de référence, il résulte des article L.322-2 du code de l'expropriation et L.213-4 du code de l'urbanisme que celle-ci doit en l'espèce être fixée au 22 décembre 2020, date à laquelle est devenue opposable aux tiers la dernière modification du plan local d'urbanisme de [Localité 14] [Localité 17] Seine Bièvre.

Concernant la situation au regard de la réglementation d'urbanisme, les parcelles [Cadastre 6], [Cadastre 9] et [Cadastre 10] sont situées en zone UFi à la date de référence. La zone UFi est une zone d'activités économiques soumises à des risques d'inondation avec de nombreuses restrictions comme les activités commerciales qui sont exclues.

Il ressort du procès-verbal de transport que l'emprise porte sur un terrain goudronné et herbeux, correspondant à des trottoirs et de la voirie. Dès lors, les références produites par l'exproprié portant sur des emplacements de stationnement ont été écartées. Il est à noter une erreur quant à la surface retenue : dans le jugement les calculs ont été effectués en tenant compte d'une surface de 1.136 m² au lieu de 1.336 m².

Concernant la valeur vénale, la moyenne des sept termes de comparaison produits s'établit à 199 euros/m². Le prix unitaire des terrains à usage de voirie constaté est constant et sans lien direct avec les surfaces vendues ou les parties prenantes à la cession. Compte tenu de la configuration du terrain non constructible en l'état, à usage de voirie sur une zone d'activité, de la surface du terrain exproprié et de sa proximité avec les bords de Seine en zone inondable, il est proposé de retenir 50% du prix unitaire moyen constaté pour les mutations de terrain à bâtir réalisées en zone UFi et UP2i, soit un prix unitaire de 100 euros/m². En conséquence, la valeur de 115 euros/m² fixée en première instance peut, au vu de la marge d'appréciation, être confirmée.

L'expropriée reprend les termes proposés en première instance et demande la fixation de la valeur des parcelles expropriées à 690 euros/m², correspondant à un prix déterminé par rapport à des cessions de TAB dans des secteurs non comparables. Les termes de comparaison produits par l'autorité expropriante étant trop anciens ou situés dans des zones cadastrales non comparables, ils n'ont pas été retenus.

Concernant l'indemnisation des places de stationnement, il apparaît que le procès-verbal ne fait pas mention de l'existence d'emplacements de parkings. De plus, le site Google Maps et la pièce produite par l'appelante (Pièce 11A), ne montrent l'existence que d'un seul emplacement de stationnement matérialisé au sol avec un panneau mentionnant « navette Casino ». La perte d'un droit réel n'est donc pas établie.

Concernant les frais de déplacement du panneau publicitaire, le jugement sera confirmé sur ce point, les parties étant d'accord.

Concernant les frais de déplacement du candélabre, le procès-verbal de transport ne fait pas mention de ce candélabre. De plus, l'appelante n'apporte pas d'éléments à l'appui de sa demande permettant de prouver qu'il s'agit d'un équipement privé. Dès lors, il convient de confirmer le jugement entrepris sur ce point.

Concernant la demande de caducité de la déclaration d'appel, celle-ci a été notifiée au greffe du tribunal le 18 janvier 2022 et le mémoire de l'appelant le 20 avril 2022. Les délais prévus par l'article R.311-26 du code de l'expropriation n'ont donc pas été respectés. Il est donc demandé à titre principal la caducité de la déclaration d'appel.

L'indemnité totale d'expropriation s'établit donc à 173.534 euros, soit 153.640 euros au titre de l'indemnité principale (1.336 m² x 115 euros/m²), 16.364 euros au titre de l'indemnité de remploi (20% jusqu'à 5.000 euros, 15% de 5.000 euros à 15.000 euros et 10% au-delà de 15.000 euros), et 3.530 euros au titre des frais de déplacement du panneau publicitaire.

SUR CE, LA COUR

Sur la caducité de la déclaration d'appel

IDFM soulève à titre principal la caducité de l'appel de la société Pin Développement sur le fondement de l'article R311-26 du code de l'expropriation en indiquant, que la cour de cassation avait déjà jugé que, lorsque l'appel est effectué par voie électronique, le point de départ est la date à laquelle l'appel est formé et non celui à laquelle il est enregistré par le greffe (cassation 2e, 6 décembre 2018, numéro 17'27 206) et qu'elle vient par un arrêt du 8 janvier 2020 (cassation, 2e, 8 janvier 2020, numéro 18'24107), de juger qu'à l'instar de l'appel formé par RPVA que le délai 3 mois dont dispose l'appelant pour remettre ses conclusions au greffe court, lorsque la déclaration d'appel est établie sur support papier et qu'elle est adressée au greffe par lettre recommandée avec demande d'avis de réception, du jour de l'expédition de cette lettre ; qu'en l'espèce, il ressort des informations contenues dans la déclaration d'appel notifiée à IDFM que celle-ci a interjeté appel le 18 janvier 2022, que la société Pin développement disposait donc jusqu'au 18 avril 2022 pour, soit pour déposer ses conclusions d'appelant au greffe, soit les expédier par lettre recommandée avec accusé de réception.

Il ajoute quant à la notification par RPVA, qu'au regard de la réforme opérée depuis le premier janvier 2020 en matière de représentation obligatoire devant les cours d'appel en matière d'expropriation, il est désormais communément admis par celles-ci la recevabilité des conclusions d'appelant par voie électronique, dans l'attente de la position de la Cour de cassation compte tenu des imprécisions entourant les dispositions de l'article R311-26 du code de l'expropriation.

Pour autant, la société Pin Développement a notifié le 20 avril 2022 par RPVA ses conclusions et, par voie postale au greffe, le 26 avril 2022 ; dans toutes les hypothèses, la notification des conclusions d'appelant étant postérieure au 18 avril 2022 est donc tardive.

Le commissaire du gouvernement demande également à titre principal le prononcé de la caducité de la déclaration d'appel.

La société Pin Développement rétorque qu'elle a interjeté appel par lettre recommandée avec accusé de réception adressée 18 janvier 2022 reçue par le greffe le 20 janvier 2022 ; en matière d'expropriation, l'appel n'est nullement tardif, puisque le délai de 3 mois imparti pour conclure court, lorsque l'appel est interjeté par lettre recommandée, à compter de la réception de la déclaration d'appel par le greffe, conformément à la jurisprudence constante de la 3e chambre civile de la Cour de cassation chargée du contentieux de l'expropriation (civile 3e, 11 mai 2006, numéro 05-70020, civile 3e, 22 février 1977 numéro 75-70 434P et 3e, 20 octobre 1981, bulletin civil 3e, numéro 165).

En déposant ses conclusions le 20 avril 2022, elle a donc déposé ses conclusions dans le délai de 3 mois qui lui était imparti pour conclure, de sorte que l'appel n'est nullement caduc.

Elle souligne les particularités de la procédure d'expropriation, à savoir l'existence de dispense d'avocat, l'impossibilité de recourir au RPVA pour la notification des conclusions en raison de la présence du commissaire du gouvernement.

Elle ajoute que ces textes régissant les délais sont distincts et que l'extension à la procédure d'expropriation par la 3e chambre civile de la solution adoptée par la 2e chambre civile ne peut résulter que d'un raisonnement analogique ; dès lors, que la Cour de cassation opère un revirement, elle décide qu'il y a atteinte au droit au procès équitable et considère en conséquence que si même la solution peut être considérée comme juridiquement correcte, elle est écartée pour éviter qu'une partie ne se voie privée de son droit d'accès au juge dès lors qu'à la date à laquelle est accompli l'acte, la jurisprudence n'était pas encore établie (commerciale, 25 mai 2022, numéro 20'14 352, civile 2e, 9 janvier 2020, numéro 18'24 107, civile 2e, 9 juin 2022, numéro 21'11 265 et civiles deuxièmes, 9 juin 2022, numéro 20'22 588) .

1° sur le point de départ du délai d'appel

L'article R311-24 (décret numéro 2017'1255,8 août 2017) dispose que les décisions rendues en première instance ne sont pas susceptibles d'opposition.

L'appel est interjeté par les parties ou par le commissaire de gouvernement dans le délai d'un mois à compter de la notification du jugement, par déclaration faite ou adressée par lettre recommandée au greffe de la cour. La déclaration d'appel est accompagnée d'une copie de la décision.

Par arrêt du 10 novembre 2016 (2e, 10 novembre 1007, numéro 14'25 631) la Cour de cassation a dit qu'il résulte de la combinaison des articles R 13-47 du code de l'expropriation pour cause d'utilité publique (R311-24 nouveau du code de l'expropriation), 748-1, 748-3 et 748-6 du code de procédure civile et de l'article premier de l'arrêté du garde des sceaux du 5 mai 2010 relatif à la communication électronique que dans la procédure sans représentation devant la cour d'appel en matière d'expropriation pour cause d'utilité publique, la déclaration d'appel, les actes de constitution et les pièces qui leur sont associées peuvent être valablement adressées au greffe de la chambre de l'expropriation par la voie électronique par le biais du réseau privé virtuel avocats (RPVA) dans les conditions techniques fixées par l'arrêté précité.

En l'espèce, la société Pin Développement a formé appel par lettre recommandée avec accusé de réception en date du 18 janvier 2022 conformément à l'article R 311-24 du code de l'expropriation et le greffe a enregistré cette déclaration d'appel le 20 janvier 2022.

La société Pin Développement conclut qu'il convient d'appliquer la jurisprudence de la 3ème chambre civile de la Cour de cassation, chargée du contentieux de l'expropriation et elle invoque un arrêt du 11 mai 2006 numéro 05-70020, qui a dit que le délai de 2 mois pour déposer ou adresser un mémoire au greffe de la cour d'appel, imposé à peine de déchéance à l'appelant d'un jugement statuant sur des indemnités d'expropriation par l'article R 13-49 du code de l'expropriation, court à compter de la date de réception par le greffe de la juridiction de première instance de l'appel formé par lettre recommandée avec demande d'avis de réception.

Cependant :

- Par arrêt du 9 décembre 1998, la 3° chambre de la cour de cassation (M. [Z]/Direction des Services fiscaux du Gard N°97-227 ) a indiqué qu'aux termes de l'article 668 du code de procédure civile, lorsque l'appel est formé par voie postale, la date de notification est, à l'égard de celui qui y procède, celle de l'expédition de la lettre.

Elle a rappelé ce principe par arrêt du 21 mai 2015( N°14-18587)

'S'agissant des dispositions relatives à l'appel, la 2° chambre de la Cour de cassation par arrêt du 9 janvier 2020 (N°18-24107) a indiqué que le délai de trois mois dont dispose, en application de l'article 908 du code de procédure civile, pour remettre ses conclusions au greffe court, lorsque la déclaration est établie sur support papier et qu'elle est adressée au greffe par lettre recommandée avec demande d'avis de réception, du jour de l'expédition de cette lettre.

En outre, par arrêt du 21 janvier 2021 (N°19-24799), la 3ème chambre de la cour de cassation a indiqué que l'article 642 du code de procédure civile est applicable devant les juridictions de l'expropriation en vertu de l'article R211-6 du code de l'expropriation.

'En effet, l'article R 211-6 du code de l'expropriation dispose que les dispositions du livre 1° du code de procédure civile s'appliquent devant les juridictions de l'expropriation sous réserve des dispositions particulières prévues par le présent code.

'il en résulte que l'article 668 du code de procédure civile modifié par décret numéro 2005-1678, du 28 décembre 2005 est applicable, celui-ci disposant que sous réserve de l'article 647 -1, la date de la notification par voie postale, sous réserve de l'article 647-1 est, à l'égard de celui qui y procède, celle de l'expédition ; et, à l'égard de celui à qui elle est faite, la date de réception de la lettre.

En effet, l'émission d'un appel est une manifestation de volonté et ne dépend pas d'une intervention extérieure à l'émission, réception ou enregistrement par le greffe; l'appelant sait qu'il doit impérativement conclure dans les 3 mois de son appel.

En conséquence, la date pour la société Pin Développement étant appelante, est celle de la notification postale, soit le 18 janvier 2022.

'La procédure étant en l'espèce avec représentation obligatoire, s'agissant d'un appel intervenu après le 1er janvier 2020 (décret N°2019-1333 du 11 décembre 2019 : article R 311-27 du code de l'expropriation) conformément à la jurisprudence de la Cour de cassation, cette règle de l'application de l'article R211-6 du code de l'expropriation doit être connue d'un professionnel averti et ne prive pas l'appelante du droit à un procès équitable.

En conséquence le délai d'appel a couru à compter du 18 janvier 2022.

2° sur la date des conclusions

Sous l'emprise de la procédure sans représentation obligatoire, la cour de cassation a admis (2°, 19 octobre 2017, N°16-24234) la transmission par RPVA de la déclaration d'appel, des actes de constitution et des pièces qui lui sont associés, mais pas des conclusions.

Cependant, le décret numéro 2019-1333 du 11 décembre 2019 a étendu tant en première instance, comme en appel, la représentation obligatoire par avocat dans la procédure d'expropriation (Article R311-9 et R 311-17 du code de l'expropriation) ; il en résulte que conformément aux dispositions du premier alinéa de l'article 930-1 du code de procédure civile, les actes de procédure doivent, être remis à la cour par voie électronique, dès lors qu'un arrêté du garde des sceaux définit les modalités des échanges par voie électronique ; or l'arrêté du 20 mai 2020 relatif à la communication par voie électronique en matière civile devant les cours d'appel abroge dans son article 1° l'arrêté du 5 mai 2010 relatif à la communication par voie électronique dans les procédures sans représentation obligatoire devant les cours d'appel et l'arrêté du 30 mars 2011 relatif à la communication par voie électronique dans les procédures avec représentation obligatoire devant les cours d'appel ; l'article 2 de cet arrêté dispose que tous les envois, remises et notifications mentionnés à l'article 748-1 du code de procédure civile peuvent être effectués par voie électronique devant les cours d'appel, aussi bien lorsque la procédure est avec représentation obligatoire que quand elle est sans représentation obligatoire ; en conséquence, les avocats peuvent donc transmettre leurs conclusions à la cour d'appel via le RPVA dans le contentieux de l'indemnisation de l'expropriation ; cependant, s'agissant du commissaire de gouvernement qui n'a pas accès au RPVA et qui n' est pas visé par l'arrêté susvisé, l'appelant et l'intimé/appelant incident doivent établir leurs actes sur support papier et les remettre au greffe ou les lui adresser par lettre recommandée avec demande d'avis de réception, dans le délai fixé par l' alinéa 4 de l'article R311-26 du code de l'expropriation et les actes de procédure des autres parties doivent leur être notifiés .

La jurisprudence statuant sur l'irrecevabilité des actes de procédure par voie électronique n'est plus applicable à compter de la publication le 21 mai 2020 au JORF de l'arrêté du 20 mai 2020 s'agissant des avocats.

La date à retenir est donc celle de l' envoi des conclusions et pièces par RPVA le 20 avril 2022, qui en tout état de cause est antérieure à l'envoi par LRAR du 26 avril 2022.

En conséquence, l'appel étant du 18 janvier 2022, même en retenant la date du RPVA du 20 avril 2022, et non celle du 26 avril 2022, l'envoi des conclusions et pièces a été effectué au dela du délai de 3 mois fixé par l'article R311-26 du code de l'expropriation.

Il convient donc de prononcer la caducité de l'appel de la société Pin Développement.

Sur l'article 700 du code de procédure civile

L'équité commande de débouter la société Pin Développement de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel et de la condamner sur ce fondement à payer la somme de 3000 euros à IDFM.

Sur les dépens

Il convient de confirmer le jugement qui a condamné IDFM aux dépens en application de l'article L312-1 du code de l' expropriation.

La société Pin Développement perdant le procès sera condamnée aux dépens d'appel.

PAR CES MOTIFS,

La cour statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort ;

Prononce la caducité de l'appel formé par la société Pin Développement formé par lettre recommandée avec accusé de réception le 18 janvier 2022 ;

Condamne la société Pin Développement à payer à IDFM la somme de 3000 euros au titre de l' article 700 du code de procédure civile ;

Condamne la société Pin Développement aux dépens.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 4 - chambre 7
Numéro d'arrêt : 22/01022
Date de la décision : 16/02/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-02-16;22.01022 ?
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