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16/02/2023 | FRANCE | N°21/04850

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 6 - chambre 5, 16 février 2023, 21/04850


REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS





COUR D'APPEL DE PARIS



Pôle 6 - Chambre 5



ARRET DU 16 FEVRIER 2023



(n°2023/ , 17 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 21/04850 - N° Portalis 35L7-V-B7F-CDYXB



Décision déférée à la Cour : Jugement du 26 Avril 2021 -Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de BOBIGNY - RG n° 18/03567





APPELANTE



Madame [I] [C]

[Adresse 1]

[Localité 4]

née le 26 Novem

bre 1966 à [Localité 5]



Assistée de Me Tamara LOWY, avocat au barreau de SEINE-SAINT-DENIS, toque : 141

(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2021/029810 du 21/07/2021 accordée...

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 5

ARRET DU 16 FEVRIER 2023

(n°2023/ , 17 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 21/04850 - N° Portalis 35L7-V-B7F-CDYXB

Décision déférée à la Cour : Jugement du 26 Avril 2021 -Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de BOBIGNY - RG n° 18/03567

APPELANTE

Madame [I] [C]

[Adresse 1]

[Localité 4]

née le 26 Novembre 1966 à [Localité 5]

Assistée de Me Tamara LOWY, avocat au barreau de SEINE-SAINT-DENIS, toque : 141

(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2021/029810 du 21/07/2021 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de PARIS)

INTIMEE

S.A.R.L. MY ASSISTANCE 93

[Adresse 2]

[Localité 3]

Représentée par Me Claire PATRUX, avocat au barreau de PARIS, toque : C2420

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 12 janvier 2023, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Catherine BRUNET, présidente de chambre chargée du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Madame Catherine BRUNET, Présidente de chambre, Présidente de formation,

Madame Marie-José BOU, Présidente de chambre,

Madame Séverine MOUSSY, Conseillère

Greffier : Madame Cécile IMBAR, lors des débats

ARRÊT :

- contradictoire,

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile,

- signé par Madame Catherine BRUNET, Présidente et par Madame Cécile IMBAR, greffier à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire. EXPOSE DU LITIGE

Madame [I] [C] a été engagée par la société My Assistance 93 (ci-après la société) par un contrat de travail à durée indéterminée à temps partiel du 21 septembre 2012 en qualité d'assistante de vie, ce à compter du 25 septembre.

Par avenant du 1er décembre 2012, la relation de travail s'est poursuivie à temps plein.

La société occupait à titre habituel au moins onze salariés lors de la rupture des relations contractuelles et les relations contractuelles entre les parties étaient soumises à la convention collective nationale des entreprises de services à la personne.

Le 11 janvier 2016, Mme [C] a sollicité une rupture conventionnelle, refusée par l'employeur par lettre du 2 février 2016.

A compter du 16 mai 2016, Mme [C] a été placée en arrêt de travail pour maladie.

A l'issue d'une visite médicale de reprise, le médecin de travail a rendu le 6 novembre 2017 un avis d'inaptitude.

Mme [C] a été convoquée par lettre du 9 novembre 2017 à un entretien préalable fixé au 22 novembre 2017.

Par lettre du 24 novembre 2017, elle a été licenciée en ces termes :

' (...) Nous vous informons, par la présente, que nous nous trouvons dans l'obligation de procéder à votre licenciement, en raison de l'inaptitude physique à votre emploi, pour cause de maladie, déclarée par la Médecine du travail le 6/11/2017., notre entreprise ne pouvant pas procéder à votre reclassement. En effet, comme nous vous l'avons expliqué malgré notre souhait de pouvoir vous maintenir votre emploi, et après étude attentive des postes que vous seriez susceptible d'occuper en regard des disponibilités d'emploi qui sont les nôtres et celles de notre enseigne, nous ne pouvons que conclure à notre impossibilité de vous reclasser dans notre entreprise. Du fait de votre impossibilité de travailler, la rupture prend effet immédiatement. (...) '.

Contestant son licenciement et estimant ne pas être remplie de ses droits, Mme [C] a saisi le conseil de prud'hommes de Bobigny qui, par jugement du 26 avril 2021 auquel la cour renvoie pour l'exposé de la procédure antérieure et des prétentions initiales des parties, a :

- constaté que les actions relatives à l'exécution du contrat de travail sont prescrites pour les périodes antérieures au 20 novembre 2015 ;

- débouté Mme [C] de l'intégralité de ses demandes en lien avec l'exécution de son contrat de travail pour les périodes non prescrites ;

- dit que la société n'a pas manqué à son obligation de reclassement ;

- dit que le licenciement de Mme [C] pour inaptitude est fondé ;

- débouté Mme [C] de l'intégralité de ses demandes, fins ou prétentions plus amples ou contraires ;

- condamné Mme [C] à verser à la société la somme de 50 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamné Mme [C] aux dépens.

Mme [C] a régulièrement interjeté appel de ce jugement le 28 mai 2021.

Par conclusions notifiées par voie électronique le 26 décembre 2022 auxquelles la cour se réfère pour plus ample exposé des moyens et prétentions en application de l'article 455 du code de procédure civile, Mme [C] demande à la cour de :

- infirmer le jugement dans sa totalité, en ce qu'il a jugé certaines de ses demandes prescrites et en ce qu'il l'a déboutée de l'ensemble de ses demandes et l'a condamnée aux dépens ;

Et statuant à nouveau :

- juger recevable, et non prescrites, l'ensemble de ses demandes ;

- fixer la moyenne de ses salaires bruts à 1 655,92 euros, et à titre subsidiaire à 1 487,21 euros ;

- condamner la société à lui payer les sommes suivantes :

* 323,84 euros à titre de rappel de salaire au titre du complément de salaires,

* 32,38 euros au titre des congés payés afférents,

* 6 623,68 euros à titre de dommages-intérêts pour délivrance tardive des plannings et atteinte à la vie privée et familiale,

* 3 205,55 euros à titre de rappel de salaires au titre des trajets,

* 320,55 euros au titre des congés payés afférents,

* 6 623,68 euros à titre de dommages-intérêts pour non-respect du droit au repos,

* 3 311,84 euros à titre de dommages-intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail,

* 9 935,52 euros à titre d'indemnité forfaitaire pour travail dissimulé,

* 3 311,84 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis,

* 331,18 euros au titre des congés-payés afférents,

* 1 049,61 euros au titre de l'indemnité de licenciement,

* 19 871,76 euros au titre de l'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

- ordonner la délivrance des bulletins de salaires entre juin 2016 et octobre 2017 inclus, d'un certificat de travail et d'une attestation Pôle emploi conformes, et ce, sous astreinte de 100 euros par jour de retard à compter de l'arrêt à intervenir, la cour se réservant la liquidation de l'astreinte ;

- condamner la société à payer à Me [P] [F] la somme de 3 500 euros au titre de l'article 700 alinéa 2 du code de procédure civile et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 ;

- condamner la société aux entiers dépens et à régler les intérêts au taux légal.

Par conclusions notifiées par voie électronique le 15 novembre 2021 auxquelles la cour se réfère pour plus ample exposé des moyens et prétentions en application de l'article 455 du code de procédure civile, la société demande à la cour de :

- la recevoir en ses demandes, fins et conclusions ;

A titre principal,

- confirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions, en ce qu'il a :

* constaté que les actions relatives à l'exécution du contrat de travail sont prescrites pour les périodes antérieures au 20 novembre 2015,

* débouté Mme [C] de l'intégralité de ses demandes en lien avec l'exécution de son contrat de travail pour les périodes non prescrites,

* dit que la société n'a pas manqué à son obligation de reclassement,

* dit que le licenciement de Mme [C] pour inaptitude est fondé,

* débouté Mme [C] de l'intégralité de ses demandes, fins ou prétentions plus amples ou contraires,

* condamné Mme [C] à lui verser la somme de 50 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

* condamné Mme [C] aux entiers dépens ;

- condamner Mme [C] à payer à la société la somme de 2 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamner Mme [C] aux entiers dépens de l'instance,

A titre subsidiaire,

- fixer la moyenne des salaires de Mme [C] à 1 487,21 euros brut ;

- déclarer que le rappel de complément de salaire qui doit être versé par la société à Mme [C] s'élève à 195,55 euros ;

- limiter le montant des dommages et intérêts relatifs à l'exécution du contrat de travail de Mme [C] ;

- limiter le montant des dommages et intérêts pour licenciement sans cause et sérieuse à la somme de 4 461,63 euros.

L'ordonnance de clôture est intervenue le 4 janvier 2023.

MOTIVATION

Sur la recevabilité de l'action de Mme [C] portant sur l'exécution du contrat de travail

La société soutient que l'action de Mme [C] relative à l'exécution de son contrat de travail est prescrite pour la période antérieure au 20 novembre 2015.

Mme [C] fait valoir que son action n'est pas prescrite car sa demande d'aide juridictionnelle a interrompu le cours de la prescription et qu'elle a intenté son action dans les deux ans de la réponse du bureau d'aide juridictionnelle.

Aux termes de l'article L. 1471-1 du code du travail, toute action portant sur l'exécution du contrat de travail se prescrit par deux ans à compter du jour où celui qui l'exerce a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant d'exercer son droit.

L'article 38 du décret n° 91-1266 du 19 décembre 1991 dans sa rédaction applicable au litige, dispose :

Lorsqu'une action en justice ou un recours doit être intenté avant l'expiration d'un délai devant les juridictions de première instance ou d'appel, l'action ou le recours est réputé avoir été intenté dans le délai si la demande d'aide juridictionnelle s'y rapportant est adressée au bureau d'aide juridictionnelle avant l'expiration dudit délai et si la demande en justice ou le recours est introduit dans un nouveau délai de même durée à compter :

a) De la notification de la décision d'admission provisoire ;

b) De la notification de la décision constatant la caducité de la demande ;

c) De la date à laquelle le demandeur à l'aide juridictionnelle ne peut plus contester la décision d'admission ou de rejet de sa demande en application du premier alinéa de l'article 56 et de l'article 160 ou, en cas de recours de ce demandeur, de la date à laquelle la décision relative à ce recours lui a été notifiée ;

d) Ou, en cas d'admission, de la date, si elle est plus tardive, à laquelle un auxiliaire de justice a été désigné.

Lorsque la demande d'aide juridictionnelle est déposée au cours des délais impartis pour conclure ou former appel incident, mentionnés aux articles 905-2, 909 et 910 du code de procédure civile, ces délais courent dans les conditions prévues aux b, c et d.

Par dérogation aux premier et sixième alinéas du présent article, les délais mentionnés ci-dessus ne sont pas interrompus lorsque, à la suite du rejet de sa demande d'aide juridictionnelle, le demandeur présente une nouvelle demande ayant le même objet que la précédente.

Il en résulte en l'espèce, que l'action est réputée avoir été intentée dans le délai de deux ans si la demande d'aide juridictionnelle a été adressée au bureau d'aide juridictionnelle avant l'expiration de ce délai et si la demande en justice est introduite dans un nouveau délai de même durée à compter de la réponse de ce bureau.

La période de réclamation de Mme [C] au titre de l'exécution de son contrat de travail (demandes de dommages-intérêts pour délivrance tardive des plannings et atteinte à la vie privée et familiale, pour non-respect du droit au repos et pour exécution déloyale du contrat de travail) porte sur la période du mois de novembre 2014 au mois de mai 2016. Elle a déposé sa demande d'aide juridictionnelle le 20 novembre 2017, la décision du bureau d'aide juridictionnelle lui a été notifiée le 10 janvier 2018 et elle a saisi le conseil de prud'hommes le 28 novembre 2018 .

Il résulte de ces éléments que comme le soutient Mme [C], sa demande d'aide juridictionnelle a interrompu le cours de la prescription et elle a bien engagé son action prud'homale dans les deux ans de la notification de la réponse du bureau d'aide juridictionnelle.

Cependant, son action relative à l'exécution du contrat de travail à l'exception de ses demandes de rappel de salaire était d'ores et déjà prescrite pour la période antérieure au 20 novembre 2015 au moment de sa demande d'aide juridictionnelle par application des dispositions de l'article L. 1471-1 du code du travail précité.

En conséquence, il y a lieu de confirmer la décision des premiers juges en ce qu'elle a déclaré prescrites les actions de la salariée relatives à l'exécution du contrat de travail pour les périodes antérieures au 20 novembre 2015.

Sur la rémunération des temps de trajet

Mme [C] soutient que l'employeur doit considérer le temps de trajet entre deux chantiers comme du temps de travail effectif et le rémunérer. Elle souligne que le contrat de travail stipule que le temps de travail inclut le temps de transport pour se rendre du domicile d'un client à un autre.

La société fait valoir que les temps de travail figurant sur les plannings remis à la salariée, incluaient les temps de déplacement.

Les deux parties conviennent de ce que le temps de trajet entre deux clients constitue un temps de travail effectif. En outre, le contrat de travail stipule : ' De convention expresse entre les parties, le temps de travail de Madame [I] [C] inclut le temps de transport pour se rendre d'un client chez l'autre.'

Il résulte des articles L. 3171-2, L. 3171-3 et L. 3171-4 du code du travail qu'en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail accomplies, il appartient au salarié de présenter, à l'appui de sa demande, des éléments suffisamment précis quant aux heures non rémunérées qu'il prétend avoir accomplies afin de permettre à l'employeur, qui assure le contrôle des heures de travail effectuées, d'y répondre utilement en produisant ses propres éléments. Le juge forme sa conviction en tenant compte de l'ensemble de ces éléments au regard des exigences rappelées aux dispositions légales et réglementaires précitées. Après analyse des pièces produites par l'une et l'autre des parties, dans l'hypothèse où il retient l'existence d'heures supplémentaires, il évalue souverainement, sans être tenu de préciser le détail de son calcul, l'importance de celles-ci et fixe les créances salariales s'y rapportant.

En l'espèce, Mme [C] produit aux débats des documents récapitulatifs de ses temps de trajet pour la période du mois de novembre 2014 au 18 mai 2016 ainsi qu'un tableau par lequel elle compare son temps de travail effectif comprenant selon elle les heures travaillées et les heures de trajet aux heures qui lui ont été effectivement payées.

Elle présente ainsi à l'appui de sa demande, des éléments suffisamment précis quant aux heures non rémunérées qu'elle prétend avoir accomplies afin de permettre à l'employeur, qui assure le contrôle des heures de travail effectuées, d'y répondre utilement en produisant ses propres éléments.

La société produit aux débats des relevés de géolocalisation qui démontrent selon elle que le temps de trajet était inclus dans le temps d'intervention auprès du client et était ainsi rémunéré.

La cour constate que les relevés de géolocalisation sont quotidiens, mentionnent les temps de trajet et les temps d'arrêt, l'amplitude journalière et le temps de conduite. La société ne produit pas les plannings. Elle n'établit pas de comparaison entre le temps de travail payé à la salariée et le temps de travail résultant de la somme du temps de travail effectué auprès des clients et du temps de trajet relatif à ces interventions mentionné sur les relevés de géolocalisation. A titre d'exemple, pour la journée du 6 janvier 2016, le planning produit par Mme [C] montre qu'elle devait effectuer 6 heures 50 de travail correspondant à des interventions auprès de six clients. A chaque client correspond sur le planning un temps d'intervention dont le total est 6 heures 50. Le relevé de géolocalisation pour ce jour-là indique que Mme [C] a conduit pendant 3 heures 18 minutes et 46 secondes. Pour démontrer que la salariée a été remplie de ses droits quant à la rémunération des temps de trajet entre deux domiciles de client, il conviendrait que la société démontre que le temps de travail auprès des clients s'est limité à 3 heures 31 minutes et 14 secondes ce qu'elle ne fait pas alors qu'elle dispose nécessairement de ces éléments.

En conséquence, la cour retient que l'intégralité des temps de trajet n'a pas été payée à Mme [C] et qu'il lui est dû à ce titre la somme de 2 060,80 euros outre celle de 206,08 euros à titre d'indemnité compensatrice de congés payés afférents.

La décision des premiers juges sera infirmée à ce titre.

Sur la fixation du salaire mensuel

Compte tenu de ce qui précède, le salaire moyen brut de Mme [C] sera fixé à la somme de 1 618,50 euros.

Sur le complément de salaire

Mme [C] soutient que la société devait lui payer un complément de salaire durant les soixante premiers jours de son arrêt de travail, à hauteur de 90% de sa rémunération brute au cours des trente premiers jours et à hauteur des deux tiers de celle-ci au cours des trente jours suivants. Elle fait valoir que ce paiement n'est pas subordonné à une demande de la part du salarié.

La société soutient que Mme [C] n'a pas sollicité le paiement de ce complément antérieurement à la saisine du conseil de prud'hommes et qu'elle ne lui a pas communiqué le montant des indemnités journalières perçues.

Il résulte de la combinaison des articles L. 1226-1 et D. 1226-1 du code du travail que tout salarié ayant une année d'ancienneté dans l'entreprise bénéficie, en cas d'absence au travail justifiée par l'incapacité résultant de maladie ou d'accident constaté par certificat médical et contre-visite s'il y a lieu, d'une indemnité complémentaire à l'allocation journalière prévue à l'article L. 321-1 du code de la sécurité sociale calculée selon les modalités suivantes :

- 1° Pendant les trente premiers jours, 90 % de la rémunération brute que le salarié aurait perçue s'il avait continué à travailler ;

- 2° Pendant les trente jours suivants, deux tiers de cette même rémunération.

Mme [C] ne sollicitant pas de dommages et intérêts pour paiement tardif d'un complément de salaire, il n'y a pas lieu de statuer sur la remise par ses soins des relevés d'indemnités journalières qu'elle produit en tout état de cause dans le cadre du présent litige.

Ayant acquis une ancienneté d'un an au sein de la société et son absence ayant été justifiée par l'incapacité résultant d'une maladie constatée par un certificat médical, Mme [C] devait bénéficier d'un complément de salaire à hauteur de 90% de son salaire au cours des trente premiers jours et des deux tiers de celui-ci au cours des trente jours suivants par application des dispositions précitées.

Mme [C] établit le montant de ce complément de salaire sur la base d'un salaire brut de 1 655,92 euros et d'un salaire net de 1 291,61 euros alors que la société prend pour base de calcul un salaire brut de 1 487,21 euros et un salaire net de 1 160 euros.

La cour a précédemment retenu que la salariée percevait un salaire mensuel brut de 1 618,50 euros soit un salaire net de 1 262,43 euros selon le mode de calcul retenu par les deux parties sur ce point.

Compte tenu des indemnités journalières perçues au cours de la période de soixante jours par Mme [C], il convient de condamner la société à lui payer la somme brute correspondant à la somme nette de 323,84 euros outre la somme brute correspondant à la somme nette de 32,38 euros à titre d'indemnité compensatrice de congés payés afférents dans la limite de sa demande.

La décision des premiers juges sera infirmée sur ces chefs de demande.

Sur le non-respect du délai de prévenance de fourniture des plannings et l'atteinte à la vie privée et familiale

Mme [C] soutient que les plannings de ses horaires de travail n'étaient pas mensuels mais hebdomadaires, ne lui étaient pas fournis dans un délai raisonnable, étaient modifiés de manière cahotique et contraire au respect de sa vie personnelle et familiale. Elle fait valoir que cette situation a eu un impact sur sa santé.

La société soutient qu'elle a respecté les délais de transmission des plannings imposés par la convention collective applicable et que la salariée ne lui a pas fait part de difficultés relationnelles.

Mme [C] fonde sa réclamation sur les dispositions des articles L. 3121-42 et L. 1121-1 du code du travail. Le premier de ces textes est inséré dans la section 'aménagement du temps de travail sur une période supérieure à la semaine, horaire individualisés et récupération des heures perdues' comprenant l'article L. 3121-44 qui dispose qu'un accord d'entreprise ou d'établissement ou, à défaut, une convention ou un accord de branche peut définir les modalités d'aménagement du temps de travail et organiser la répartition de la durée du travail sur une période supérieure à la semaine.

En l'espèce, l'article 9 de la convention collective des entreprises de services à la personne intitulé ' Notification de la répartition du travail ' dispose :

' 9.1. Notification des horaires de travail dans le respect des plages d'indisponibilité

Les horaires de travail, pour chaque journée travaillée, sont communiqués aux salariés par la remise d'un planning prévisionnel des horaires. Ce planning est mensuel. Il est remis au salarié soit en version papier soit en version dématérialisée permettant son impression à tout moment et durant toute la période de référence.

Il est notifié aux salariés au moins sept jours avant le 1er jour de son exécution dans la mesure où les délais de prévenance en cas de modification ont été respectés.

Il précise pour chaque salarié la durée du travail et les horaires de travail déterminés par l'entreprise.

Les modalités de notification des plannings individuels sont définies par l'entreprise dans une note interne qui est remise aux salariés avant leur entrée en vigueur. En cas de modification ultérieure de ces modalités, une nouvelle note est communiquée aux salariés préalablement à leur entrée en vigueur.

Les salariés sont tenus de se conformer aux horaires tels que prévus au planning. Ils ne sont pas autorisés à modifier les heures et jours d'intervention mentionnés au planning, même à la demande ou avec l'accord du client.

Enfin, il est rappelé que chaque salarié, embauché à temps partiel ou à temps plein, bénéficie de plages d'indisponibilité telles que définies dans la CCN, afin de permettre aux salariés de concilier vie personnelle et vie professionnelle ou d'exercer un autre emploi à temps partiel.

9.2. Modification des horaires de travail dans le respect des plages d'indisponibilité

Le planning initial de travail peut faire l'objet de modifications à l'initiative de l'employeur. Le salarié est averti de cette modification dans un délai minimum de trois jours avant la date à laquelle la modification apportée au planning initial doit avoir lieu, dans le respect des plages d'indisponibilité prévues au contrat.

Toutefois, afin de faire face à la fluctuation des demandes inhérentes à l'activité et d'assurer une continuité de services, le délai d'information de la modification apportée au planning peut être réduit. Ainsi, en cas d'urgence tel que défini au chapitre II, section 2, I, i de la CCN, les salariés pourront être informés de la modification apportée à leur planning dans un délai inférieur à 3 jours et compris entre 2 jours et 1 heure.

Il est précisé que la communication des modifications apportées par l'employeur au planning initial se fait au fur et à mesure oralement par appel téléphonique ou lorsque le salarié dispose d'un téléphone portable, par message vocal laissé sur ce dernier et confirmation par écrit en renvoyant le planning mensuel ou en le modifiant dans l'interface numérique dans les meilleurs délais et de manière à permettre une traçabilité des échanges pendant toute la période de référence.

Lorsque le salarié utilise, à la demande de l'employeur, ses outils de communication personnels à des fins professionnelles, il perçoit une indemnité mensuelle minimale de 2 euros.

9.3. Contrepartie à la réduction du délai de modification des horaires (1)

En contrepartie d'un délai de modification des horaires inférieur à trois jours, dans le respect des plages d'indisponibilité, le salarié a la possibilité de refuser 3 fois sur la période de référence la modification de ses horaires, sans que ces refus ne constituent une faute ou un motif de licenciement.

Chaque acceptation par le salarié d'une modification de ses horaires dans un délai inferieur à trois jours incrémente de un son nombre de possibilités de refus.

Tout refus de modification d'horaire doit être confirmé par écrit par l'employeur et sera comptabilisé dans un compteur spécifique.'

Il en résulte que la salariée doit avoir communication de son planning mensuel au moins sept jours avant le premier jour d'exécution, que ce planning d'intervention peut être modifié trois jours avant la mise en oeuvre de cette modification sauf cas d'urgence défini conventionnellement, ce délai devant être compris entre deux jours et une heure.

Ces cas d'urgence définis à l'article I, i) section 2, chapitre II, sont les suivants :

'- absence non programmée d'un (e) collègue de travail ;

- aggravation de l'état de santé du bénéficiaire du service ;

- décès du bénéficiaire du service ;

- hospitalisation ou urgence médicale d'un bénéficiaire de service entraînant son absence ;

- arrivée en urgence non programmée d'un bénéficiaire de service ;

- maladie de l'enfant ;

- maladie de l'intervenant habituel ;

- carence du mode de garde habituel ou des services assurant habituellement cette garde ;

- absence non prévue d'un salarié intervenant auprès d'un public âgé ou dépendant ;

- besoin immédiat d'intervention auprès d'enfant dû à l'absence non prévisible de son parent.'

Il convient de rappeler que la cour a précédemment retenu que l'action de la salariée était prescrite pour ce chef de demande pour la période antérieure au 20 novembre 2015 de sorte que seuls les plannings postérieurs à cette date doivent être étudiés.

La société affirme qu'elle remettait en temps utile à la salariée des plannings mensuels et qu'elle lui remettait des plannings hebdomadaires reprenant les plannings mensuels afin d'y intégrer des informations précises sur les patients et les prestations à effectuer. Elle produit aux débats des plannings mensuels pour l'année 2016. Cependant, la cour constate qu'ils ont été édités le 28 octobre 2019 et aucun élément ne permet de retenir qu'ils ont été communiqués à la salariée au moins sept jours avant le premier jour d'exécution. La salariée produit aux débats des plannings hebdomadaires qui portent une date et une heure d'édition. Ils lui ont été nécessairement remis à cette date ou postérieurement soit dans un délai inférieur à quarante-huit heures à l'exception de deux d'entre eux. La société n'allègue ni ne justifie d'aucun des cas d'urgence prévus par la convention collective pour expliquer cette remise tardive de ces plannings. En outre, à trois reprises au cours de l'année 2016, le planning hebdomadaire a été modifié en cours d'exécution sans que la société justifie de la cause de cette modification.

En conséquence, la cour retient que la société n'a pas respecté les dispositions conventionnelles précitées ce qui a entraîné pour Mme [C] un préjudice certain notamment dans l'organisation de sa vie personnelle, qui sera indemnisé par la somme de 2 000 euros à titre de dommages et intérêts pour le non-respect du délai de prévenance de fourniture des plannings et l'atteinte à sa vie privée et familiale à compter du 20 novembre 2015, somme au paiement de laquelle la société sera condamnée.

La décision des premiers juges sera infirmée sur ce chef de demande.

Sur le droit au repos

Mme [C] soutient qu'à de nombreuses reprises son amplitude de travail a été supérieure à douze heures, qu'elle n'a pas toujours bénéficié d'un repos de onze heures consécutives et d'une pause minimale de vingt minutes. Elle fait valoir qu'elle a subi à ce titre un préjudice.

La société soutient qu'au titre de la période non prescrite, les dépassements de l'amplitude horaire maximale sont rares, celle-ci pouvant être portée à treize heures pour les activités auprès de publics fragiles ou dépendants ce qui est le cas selon elle en l'espèce.

Il résulte de l'article I, h) section 2, chapitre II de la partie 2 de la convention collective applicable que l'amplitude quotidienne de travail est d'au plus douze heures et qu'elle peut être portée à treize heures pour les activités auprès de publics fragiles et/ ou dépendants et de la partie 'organisation des temps de repos' que dès que le temps de travail quotidien atteint six heures, le salarié bénéficie d'un temps de pause d'une durée minimale de vingt minutes.

La cour constate sur les plannings communiqués par la salariée qu'elle a travaillé à vingt neuf reprises à compter du 20 novembre 2015 dans le cadre d'une amplitude horaire supérieure à douze heures. La convention collective est applicable aux entreprises qui dispensent des prestations ou des services à la personne notamment à domicile dans différents cas parmi lesquels l'aide apportée aux personnes âgées, dépendantes et /ou handicapées. Contrairement à ce que soutient la société, sa seule application n'implique donc pas que les personnes bénéficiaires de la prestation sont fragiles ou dépendantes ce qui est corroboré par le fait que ce texte prévoit une exception à l'amplitude horaire de douze heures pour ces personnes. La société produit des plannings mensuels à compter du mois de janvier 2016 édités le 28 octobre 2019 soit postérieurement à la saisine du conseil de prud'hommes. En tout état de cause, s'ils précisent pour certaines personnes une situation de fragilité et/ou de dépendance, ces personnes ne sont pas concernées par le dépassement d'amplitude. Les plannings hebdomadaires produits aux débats portent des mentions concernant les bénéficiaires de la prestation pour les jours où l'amplitude horaire est dépassée mais ne comportent pas d'indication spécifique relative à leur fragilité ou à leur dépendance qui ne peuvent pas se déduire d'une prestation d'hygiène ou de repas comme indiqué précédemment. Au surplus, la cour constate que Mme [C] a subi des amplitudes de travail supérieure à treize heures, maximum fixé par la convention collective pour des prestations auprès de personnes fragiles ou dépendantes, à dix reprises.

En conséquence, il sera retenu que Mme [C] à compter du 20 novembre 2015 a travaillé à vingt neuf reprises dans le cadre d'une amplitude horaire supérieure à douze heures en contravention à la convention collective applicable.

Aux termes de l'article L. 3121-33 du code du travail dans sa rédaction applicable au litige, dès que le temps de travail quotidien atteint six heures, le salarié bénéficie d'un temps de pause d'une durée minimale de vingt minutes. Il appartient à l'employeur de démontrer que ce temps de pause a été respecté ce qu'il ne fait pas en l'espèce.

Enfin, il résulte de l'article L. 3131-1 du code du travail dans sa rédaction applicable au litige que tout salarié bénéficie d'un repos quotidien d'une durée minimale de onze heures consécutives. La cour constate à partir des plannings produits qu'au cours de la période non prescrite, Mme [C] n'a pas bénéficié de ce repos à onze reprises.

En conséquence, il est établi que la société a manqué à ses obligations à ce titre ce qui a causé à Mme [C] un préjudice démontré par le certificat établi par Mme [L], psychologue clinicienne, évoquant un état dépressif lié à un rythme de travail particulièrement intense et précisant que 'les symptômes décrits ainsi que les circonstances de leur survenue chez une personne habituellement investie et dynamique laisse penser à un syndrome de burn out '. Dès lors, la société sera condamnée à payer à Mme [C] la somme de 3 000 euros à titre de dommages et intérêts pour non-respect du droit au repos.

La décision des premiers juges sera infirmée sur ce chef de demande.

Sur l'exécution déloyale du contrat de travail et le manquement à l'obligation de formation

Mme [C] expose que l'employeur lui a promis à plusieurs reprises une formation pour le diplôme DEAVS dont elle n'a pas bénéficié et fait valoir qu'aucune formation ne lui a été dispensée depuis le mois de décembre 2014 malgré les besoins qu'elle a exprimés régulièrement.

La société soutient que la salariée a bénéficié de formations dispensées en interne et en externe. Elle fait valoir que Mme [C] a choisi d'abandonner la formation afférente au diplôme DEAVS.

Aux termes de l'article L. 1222-1 du code du travail, le contrat de travail est exécuté de bonne foi.

Selon l'article L. 6321-1 du même code dans sa rédaction applicable au litige, l'employeur assure l'adaptation des salariés à leur poste de travail. Il veille au maintien de leur capacité à occuper un emploi, au regard notamment de l'évolution des emplois, des technologies et des organisations.

Il peut proposer des formations qui participent au développement des compétences, ainsi qu'à la lutte contre l'illettrisme.

En l'espèce, il appartient à la société de démontrer qu'elle s'est libérée de cette obligation. Or, elle ne produit aucun élément à ce titre. Elle vise dans ses écritures sa lettre de refus de la rupture conventionnelle du 2 février 2016 dans laquelle elle indique avoir 'investi' sur 'la formation et (la) professionnalisation' de Mme [C]. Cependant, il s'agit de sa part d'une affirmation qui n'est corroborée par aucun élément objectif pour la période non-prescrite. Elle ne verse aucun élément quant à un abandon par la salariée d'une formation diplômante.

En conséquence, elle sera condamnée à payer à Mme [C] la somme de 2 000 euros pour exécution déloyale du contrat de travail, somme de nature à indemniser son préjudice résultant d'un défaut de formation malgré ses besoins exprimés dans les entretiens d'évaluation afin de remplir ses obligations dans le domaine de l'aide à la personne.

La décision des premiers juges sera infirmée sur ce chef de demande.

Sur le travail dissimulé

Mme [C] fait valoir à ce titre la non-délivrance de bulletins de paie pendant les arrêts de travail pour maladie, le non-paiement et la non-déclaration de complément de salaires et des heures de trajet. Elle souligne que l'élément intentionnel est rapporté dès lors que la société établissait les plannings de travail.

La société fait valoir qu'elle a toujours délivré des bulletins de salaire à la salariée, qu'elle n'a pas pu lui payer des compléments de salaire car Mme [C] ne lui avait pas communiqué ses avis de versement des indemnités journalières et que ses temps de trajet ont été payés. Elle affirme ne pas avoir eu l'intention de se soustraire à ses obligations déclaratives.

Selon l'article L. 8221-5 du code du travail dans sa rédaction applicable au litige, est réputé travail dissimulé par dissimulation d'emploi salarié le fait pour tout employeur :

1° Soit de se soustraire intentionnellement à l'accomplissement de la formalité prévue à l'article L. 1221-10, relatif à la déclaration préalable à l'embauche ;

2° Soit de se soustraire intentionnellement à l'accomplissement de la formalité prévue à l'article L. 3243-2, relatif à la délivrance d'un bulletin de paie, ou de mentionner sur ce dernier un nombre d'heures de travail inférieur à celui réellement accompli, si cette mention ne résulte pas d'une convention ou d'un accord collectif d'aménagement du temps de travail conclu en application du titre II du livre Ier de la troisième partie ;

3° Soit de se soustraire intentionnellement aux déclarations relatives aux salaires ou aux cotisations sociales assises sur ceux-ci auprès des organismes de recouvrement des contributions et cotisations sociales ou de l'administration fiscale en vertu des dispositions légales.

Aux termes de l'article L. 8223-1 du même code, en cas de rupture de la relation de travail, le salarié auquel un employeur a eu recours dans les conditions de l'article L. 8221-3 ou en commettant les faits prévus à l'article L. 8221-5 a droit à une indemnité forfaitaire égale à six mois de salaire.

Les circonstances de l'espèce conduisent la cour à retenir qu' il n'est pas établi que la société s'est intentionnellement soustraite à ses obligations.

En conséquence, Mme [C] sera déboutée de sa demande à ce titre et la décision des premiers juges sera confirmée sur ce chef de demande.

Sur la rupture du contrat de travail

Mme [C] soutient que son licenciement est dépourvu de cause réelle et sérieuse car selon elle, en premier lieu il est la conséquence du manquement de l'employeur à son obligation de sécurité et en second lieu, la société a manqué à son obligation de reclassement.

La société soutient d'une part que le licenciement est fondé sur une cause réelle et sérieuse car elle n'a pas manqué à ses obligations et la difficulté rencontrée par la salariée est sans lien avec une carence de sa part ; d'autre part, qu'elle n'a pas manqué à son obligation de reclassement.

Aux termes de l'article L. 1226-2 du code du travail dans sa rédaction applicable au litige, lorsque le salarié victime d'une maladie ou d'un accident non professionnel est déclaré inapte par le médecin du travail, en application de l'article L. 4624-4, à reprendre l'emploi qu'il occupait précédemment, l'employeur lui propose un autre emploi approprié à ses capacités, au sein de l'entreprise ou des entreprises du groupe auquel elle appartient le cas échéant, situées sur le territoire national et dont l'organisation, les activités ou le lieu d'exploitation assurent la permutation de tout ou partie du personnel. Pour l'application du présent article, le groupe est défini conformément au I de l'article L. 2331-1. Cette proposition prend en compte, après avis des délégués du personnel lorsqu'ils existent, les conclusions écrites du médecin du travail et les indications qu'il formule sur les capacités du salarié à exercer l'une des tâches existantes dans l'entreprise. Le médecin du travail formule également des indications sur la capacité du salarié à bénéficier d'une formation le préparant à occuper un poste adapté. L'emploi proposé est aussi comparable que possible à l'emploi précédemment occupé, au besoin par la mise en oeuvre de mesures telles que mutations, aménagements, adaptations ou transformations de postes existants ou aménagement du temps de travail.

Il appartient à l'employeur de démontrer qu'il a rempli cette obligation de reclassement, de justifier des démarches précises qu'il a effectuées et de l'impossibilité de reclassement.

En l'espèce, le médecin du travail a déclaré Mme [C] inapte par un avis du 6 novembre 2017 rédigé en ces termes : ' inapte à tous postes dans l'entreprise. Pourrait occuper un poste type poste administratif, à temps partiel, sans activité d'aide à la personne, dans un autre contexte organisationnel, possibilité de formation (bilan de compétence) '.

La cour relève, comme le souligne la salariée, qu'elle a été convoquée à un entretien préalable dès le 9 novembre puis licenciée par lettre du 24 novembre 2017. Seuls dix-huit jours se sont donc écoulés entre l'avis d'inaptitude et son licenciement. D'autre part, il est établi et non contesté par la société qu'elle appartient au groupe ADHAP. Elle soutient avoir interrogé les autres entreprises de ce groupe sur les possibilités de reclassement de Mme [C] en leur sein et produit à ce titre un document intitulé ' reclassements ADHAP ' et des réponses apportées par différentes entreprises. En premier lieu, la cour relève que le premier document comporte plusieurs recherches de reclassement de la part de plusieurs entreprises du groupe dont celle concernant Mme [C]. En second lieu, elle constate que ce document est daté du 24 novembre 2017, date corroborée par deux mails de réponse, l'un de Mme [B] indiquant : ' (...) concernant votre demande de reclassement parue dans le mail hebdo du vendredi 24 novembre 2017 (...) ', l'autre de M. [G] précisant : ' (...) Réponse à la demande de reclassement en date du 24 novembre 2017 (...) '. Il s'en déduit que la société a débuté la recherche de reclassement le jour du licenciement de la salariée ce qui démontre qu'elle n'a pas respecté son obligation de reclassement.

Le licenciement de Mme [C] est en conséquence dépourvu de cause réelle et sérieuse sans qu'il soit besoin d'examiner d'autres moyens.

Sur les conséquences du licenciement

Sur l'indemnité compensatrice de préavis et le complément d'indemnité de licenciement

La société n'ayant pas respecté son obligation de reclassement, l'indemnité compensattice de préavis est due à Mme [C] soit par application des dispositions de l'article L. 1234-1 du code du travail et sur la base de la rémunération brute mensuelle retenue précédemment par la cour, la somme de 3 237 euros outre celle de 323,70 à titre d'indemnité compensatrice de congés payés afférents au paiement desquelles la société sera condamnée.

Mme [C] sollicite un complément d'indemnité de licenciement tenant compte du salaire fixé dans le cadre du présent litige sur la base d'une ancienneté de cinq ans et deux mois.

La société fait valoir que l'ancienneté à retenir est de trois ans et huit mois déduction faite des périodes d'arrêts de travail.

Il résulte de la combinaison des articles L. 1226-7 et L. 1234-8 du code du travail, que les périodes de suspension du contrat de travail pour maladie non professionnelle, ne rompent pas l'ancienneté du salarié mais n'entrent pas en compte pour la détermination de la durée d'ancienneté exigée pour bénéficier de ces dispositions.

Aux termes de l'article L. 1234-9 du même code, le salarié titulaire d'un contrat de travail à durée indéterminée, licencié alors qu'il compte 8 mois d'ancienneté ininterrompus au service du même employeur, a droit, sauf en cas de faute grave, à une indemnité de licenciement. Les modalités de calcul de cette indemnité sont fonction de la rémunération brute dont le salarié bénéficiait antérieurement à la rupture du contrat de travail. Ce taux et ces modalités sont déterminés par voie réglementaire.

Afin de déterminer si Mme [C] peut bénéficier d'une indemnité de licenciement, il convient de vérifier si elle avait bien acquis 8 mois d'ancienneté ininterrompus au service de la société, déduction faite de ses absences pour maladie ce qui est le cas.

Par contre, contrairement à ce que soutient la société, il n'y a pas lieu de déduire les périodes de suspension du contrat de travail du délai entre l'engagement de la salariée et la rupture du contrat de travail dès lors que conformément aux dispositions de l'article L. 1234-8 précitées, ces périodes ne rompent pas son ancienneté.

Sur la base d'une rémunération mensuelle brute de 1 618,50 euros et déduction faite de l'indemnité de licenciement de 1 089,29 euros perçue par la salariée, il lui est dû la somme de 1 034,96 euros à titre de complément d'indemnité de licenciement au paiement de laquelle la société sera condamnée.

La décision des premiers juges sera infirmée à ce titre.

Sur l'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse

Mme [C] demande à la cour d'écarter le barème fixé par l'article L. 1235-3 du code du travail en raison de son inconventionnalité, ce plafonnement violant selon elle les dispositions de l'article 24 de la charte sociale européenne, les articles 4 et 10 de la convention 158 de l'OIT ainsi que le droit à un procès équitable. Elle souligne que l'application de ce barème ne permet pas une indemnisation adéquate de son préjudice qu'elle détaille.

La société fait valoir que le barème n'est pas contraire aux normes conventionnelles. Elle demande à titre subsidiaire, que l'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse soit fixée à trois mois de salaire.

Aux termes de l'article L. 1235-3 du code du travail, si le licenciement d'un salarié survient pour une cause qui n'est pas réelle et sérieuse, le juge peut proposer la réintégration du salarié dans l'entreprise, avec maintien de ses avantages acquis. Si l'une ou l'autre des parties refuse cette réintégration, le juge octroie au salarié une indemnité à la charge de l'employeur, dont le montant est compris entre les montants minimaux et maximaux fixés par le même article.

Selon l'article L. 1235-3-1 du même code, l'article 1235-3 n'est pas applicable lorsque le juge constate que le licenciement est entaché d'une des nullités prévues à son deuxième alinéa. Dans ce cas, lorsque le salarié ne demande pas la poursuite de l'exécution de son contrat de travail ou que sa réintégration est impossible, le juge lui octroie une indemnité, à la charge de l'employeur, qui ne peut étre inférieure aux salaires des six derniers mois.

Enfin, selon l'article L. 1235-4 du code du travail, dans le cas prévu à l'article L. 1235-3, le juge ordonne le remboursement par l'employeur fautif aux organismes intéressés de tout ou partie des indemnités de chômage versées au salarié licencié, du jour de son licenciement au jour du jugement prononcé, dans la limite de six mois d'indemnités de chômage par salarié intéressé. Ce remboursement est ordonné d'office lorsque les organismes intéressés ne sont pas intervenus à l'instance ou n'ont pas fait connaître le montant des indemnités versées.

Aux termes de l'article 24 de la Charte sociale européenne, en vue d'assurer l'exercice effectif du droit à la protection en cas de licenciement, les parties s'engagent à reconnaître :

a) le droit des travailleurs à ne pas être licenciés sans motif valable lié à leur aptitude ou conduite, ou fondé sur les nécessités de fonctionnement de l'entreprise, de l'établissement ou du service ;

b) le droit des travailleurs licenciés sans motif valable à une indemnité adéquate ou à une autre réparation appropriée.

A cette fin les Parties s'engagent à assurer qu'un travailleur qui estime avoir fait l'objet d'une mesure de licenciement sans motif valable ait un droit de recours contre cette mesure devant un organe impartial.

L'annexe de la Charte sociale européenne précise qu'il est entendu que l'indemnité ou toute autre réparation appropriée en cas de licenciement sans motif valable doit être déterminée par la législation ou la réglementation nationales, par des conventions collectives ou de toute autre manière appropriée aux conditions nationales.

La Charte réclame des Etats qu'ils traduisent dans leurs textes nationaux les objectifs qu'elle leur fixe. En outre, le contrôle du respect de cette charte est confié au seul Comité européen des droits sociaux dont la saisine n'a pas de caractère juridictionnel et dont les décisions n'ont pas de caractère contraignant en droit français.

Sous réserve des cas où est en cause un traité international pour lequel la Cour de justice de l'Union européenne dispose d'une compétence exclusive pour déterminer s'il est d'effet direct, les stipulations d'un traité international, régulièrement introduit dans l'ordre juridique interne conformément à l'article 55 de la Constitution, sont d'effet direct dès lors qu'elles créent des droits dont les particuliers peuvent se prévaloir et que, eu égard à l'intention exprimée des parties et à l'économie générale du traité invoqué, ainsi qu'à son contenu et à ses termes, elles n'ont pas pour objet exclusif de régir les relations entre Etats et ne requièrent l'intervention d'aucun acte complémentaire pour produire des effets à l'égard des particuliers.

Il résulte dès lors de ce qui précède que l'article 24 de la Charte sociale européenne n'a pas d'effet direct en droit interne dans un litige entre particuliers de sorte que sa violation ne peut pas être valablement invoquée par Mme [C].

La cour relève que l'article 4 de la Convention n° 158 de l'Organisation internationale du travail (OIT) n'a pas trait à l'indemnisation du préjudice résultant d'un licenciement mais à sa justification.

Aux termes de l'article 10 de cette convention, si les organismes mentionnés à l'article 8 de la présente convention arrivent à la conclusion que le licenciement est injustifié, et si, compte tenu de la législation et de la pratique nationales, ils n'ont pas le pouvoir ou n'estiment pas possible dans les circonstances d'annuler le licenciement et/ou d'ordonner ou de proposer la réintégration du travailleur, ils devront être habilités à ordonner le versement d'une indemnité adéquate ou toute autre forme de réparation considérée comme appropriée.

Comme le soutient à juste titre Mme [C], ces stipulations sont d'effet direct en droit interne dès lors qu'elles créent des droits entre particuliers, qu'elles n'ont pas pour objet exclusif de régir les relations entre Etats et ne requièrent l'intervention d'aucun acte complémentaire.

Le terme 'adéquat' signifie que l'indemnité pour licenciement injustifié doit, d'une part être suffisamment dissuasive pour éviter le licenciement injustifié, et d'autre part raisonnablement permettre l'indemnisation de la perte injustifiée de l'emploi.

Il résulte des dispositions du code du travail précitées, que le salarié dont le licenciement est injustifié bénéficie d'une indemnité à la charge de l'employeur, dont le montant est compris entre des montants minimaux et maximaux variant en fonction du montant du salaire mensuel et de l'ancienneté du salarié et que le barème n'est pas applicable lorsque le licenciement du salarié est nul ce qui permet raisonnablement l'indemnisation de la perte injustifiée de l'emploi. En outre, le juge applique d'office les dispositions de l'article L. 1235-4 du code du travail. Ainsi, le caractére dissuasif des sommes mises à la charge de l'employeur est également assuré et les trois articles du code du travail précités sont de nature à permettre le versement d'une indemnité adéquate ou une réparation considérée comme appropriée au sens de l'article 10 de la Convention n° 158 de l'OIT.

Mme [C] ne développe pas de moyen au soutien d'une violation du droit à un procès équitable.

En conséquence, il n'y a pas lieu d'écarter les dispositions de l'article L. 1235-3 du code du travail qui sont compatibles avec les stipulations de l'article 10 de la Convention de l'OIT et il appartient à la cour d'apprécier la situation concrète de la salariée pour déterminer le montant de l'indemnité due entre les montants minimaux et maximaux déterminés par cet article fixés à 3 et 6 mois.

Compte tenu notamment de l'effectif de l'entreprise, des circonstances de la rupture, du montant de la rémunération versée à Mme [C], de son âge, 51 ans, de son ancienneté, 5 ans, de sa capacité à trouver un nouvel emploi eu égard à sa formation et à son expérience professionnelle et des conséquences du licenciement à son égard, tels qu'ils résultent des pièces et des explications fournies, étant précisé que Mme [C] justifie de la perception de prestations Pôle emploi jusqu'au mois de juin 2019, il y a lieu de lui allouer, en application de l'article L. 1235-3 du code du travail, une somme de 9 711 euros à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.

La décision des premiers juges sera infirmée sur ces chefs de demande.

Sur le remboursement des indemnités de chômage à Pôle emploi

Conformément aux dispositions de l'article. L.1235-4 du code du travail, il y a lieu d'ordonner à la société de rembourser à Pôle emploi les indemnités de chômage versées à Mme [C] du jour du licenciement au jour du présent arrêt, dans la limite de 6 mois d'indemnités.

Sur le cours des intérêts

En application des articles 1231-6 et 1231-7 du code civil, les créances de nature salariale produisent intérêt au taux légal à compter de la réception par l'employeur de la convocation devant le bureau de conciliation et d'orientation soit le 1er mars 2019 et les créances indemnitaires produisent intérêt au taux légal à compter de la décision qui les prononce.

Sur la remise des documents

Il sera ordonné à la société de remettre à Mme [C] une attestation Pôle emploi, un certificat de travail et des bulletins de salaire conformes à la présente décision sans qu'il y ait lieu à prononcer une astreinte.

Sur les dépens et les frais irrépétibles

Partie perdante, la société sera condamnée au paiement des dépens. Le jugement sera infirmé en ce qu'il a mis les dépens à la charge de la salariée.

La société sera condamnée à payer à Mme [C] la somme de 3 000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ; elle sera déboutée de sa demande au titre des frais irrépétibles, la décision des premiers juges étant infirmée à ces deux titres.

PAR CES MOTIFS

La cour statuant par arrêt contradictoire mis à disposition au greffe,

INFIRME le jugement sauf en ce qu'il a constaté que les actions relatives à l'exécution du contrat de travail sont prescrites pour les périodes antérieures au 20 novembre 2015 et qu'il a débouté Mme [I] [C] de sa demande au titre d'un travail dissimulé,

Et statuant à nouveau sur les chefs infirmés et y ajoutant,

FIXE le salaire moyen brut de Mme [I] [C] à la somme de 1 618,50 euros,

DIT que le licenciement de Mme [I] [C] est dépourvu de cause réelle et sérieuse,

CONDAMNE la société My Assistance 93 à payer à Mme [I] [C] les sommes suivantes :

- 2 060,80 euros à titre de rappel de salaires au titre des trajets ;

- 206,08 euros à titre d'indemnité compensatrice de congés payés afférents ;

- la somme brute correspondant à la somme nette de 323,84 euros à titre de complément de salaire ;

- la somme brute correspondant à la somme nette de 32,38 euros à titre d'indemnité compensatrice de congés payés afférents ;

- 3 237 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis ;

- 323,70 à titre d'indemnité compensatrice de congés payés afférents ;

- 1 034,96 euros à titre de complément d'indemnité de licenciement,

avec intérêts au taux légal à compter de la réception par la société My Assistance 93 de la convocation devant le bureau de conciliation et d'orientation du conseil de prud'hommes soit le 1er mars 2019 ;

CONDAMNE la société My Assistance 93 à verser à Mme [I] [C] les sommes suivantes :

- 2 000 euros à titre de dommages et intérêts pour le non-respect du délai de prévenance de fourniture des plannings et l'atteinte à sa vie privée et familiale ;

- 3 000 euros à titre de dommages et intérêts pour non-respect du droit au repos ;

- 2 000 euros pour exécution déloyale du contrat de travail;

- 9 711 euros à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

avec intérêts au taux légal à compter de la présente décision ;

ORDONNE à la société My Assistance 93 de rembourser à Pôle emploi les indemnités de chômage versées à Mme [I] [C] du jour du licenciement au jour du présent arrêt, dans la limite de 6 mois d'indemnités,

ORDONNE à la société My Assistance 93 de remettre à Mme [I] [C] une attestation Pôle emploi, un certificat de travail et des bulletins de salaire conformes à la présente décision,

DIT n'y avoir lieu à astreinte,

CONDAMNE la société My Assistance 93 à payer à Maître [P] [F] la somme de 3 000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 2017,

DÉBOUTE les parties de leurs demandes plus amples ou contraires,

CONDAMNE la société My Assistance 93 aux dépens.

LA GREFFIÈRE LA PRÉSIDENTE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 6 - chambre 5
Numéro d'arrêt : 21/04850
Date de la décision : 16/02/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-02-16;21.04850 ?
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