Copies exécutoires RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 5 - Chambre 11
ARRÊT DU 10 FEVRIER 2023
(n° , 10 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 21/07673 - N° Portalis 35L7-V-B7F-CDQ62
Décision déférée à la Cour : Jugement du 04 Mars 2021 -Tribunal de Commerce d'EVRY - RG n° 2019F00582
APPELANTS
Madame [K] [V]
Domicilé [Adresse 2]
[Localité 3]
née le 13 Mars 1984 à [Localité 7]
Représentée par Me Laurent DOUCHIN, avocat au barreau de PARIS, toque : G196
(bénéficie d'une aide juridictionnelle Partielle numéro 2021/023061 du 09/06/2021 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de PARIS)
Monsieur [T] [Z]
Domicilié [Adresse 2]
[Localité 3]
né le 18 Février 1986 à [Localité 6]
représenté par Me Laurent DOUCHIN, avocat au barreau de PARIS, toque : G196
(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2021/023072 du 09/06/2021 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de PARIS)
INTIMEES
S.A.S. FNAC DIRECT
agissant poursuites et diligences en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège
Ayant son siége social
[Adresse 8]
[Adresse 8]
[Localité 5]
N° SIRET : 377 853 536
Représentée par Me Stéphane FERTIER de l'AARPI JRF AVOCATS, avocat au barreau de PARIS, toque : L0075, Me Noémie BIBAS de l'ASSOCIATION BIARD BOUSCATEL, avocat au barreau de PARIS, toque : R146
S.A.S. ETABLISSEMENTS DARTY ET FILS
Agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège.
Ayant son siége social
[Adresse 1]
[Localité 4]
N° SIRET : 542 086 616
représentée par Me Stéphane FERTIER de l'AARPI JRF AVOCATS, avocat au barreau de PARIS, toque : L0075, Me Philippe BIARD de l'ASSOCIATION BIARD BOUSCATEL, avocat au barreau de PARIS, toque : R146, M. Noemie BIBAS, avocat plaidant
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions des articles 805 et du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 14 Décembre 2022, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Madame Marie-Sophie L'ELEU DE LA SIMONE, Conseillère, chargée du rapport.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
Monsieur Denis ARDISSON
Madame Marion PRIMEVERT
Madame Marie-Sophie L'ELEU DE LA SIMONE,
Greffier, lors des débats : Madame Sylvie MOLLÉ
ARRÊT :
- contradictoire
- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
- signé par Monsieur Denis ARDISSON, Président et par Damien GOVINDARETTY, Greffier présent lors de la mise à disposition.
Les sociétés Fnac Direct et Établissements Darty et Fils exploitent les sites internet Fnac.com et Darty.com sur lesquels sont mis place une place de marché (Marketplace) qui met en relation des vendeurs, professionnels ou particuliers, et des acquéreurs.
Mme [K] [V] s'est inscrite en qualité de vendeur sous l'enseigne Scoregame sur la plateforme Fnac Marketplace en 2016.
Reprochant à Mme [V] des signalements répétés d'acheteurs, la société Fnac Direct a désactivé ce vendeur le 22 novembre 2016 et lui a rappelé qu'elle devait traiter le service après-vente. La société Fnac Direct a été contrainte, face au silence de Mme [V], de rembourser les acquéreurs insatisfaits.
Le 30 novembre 2016 la société Benkatgame, dont la gérante était Mme [V], s'est inscrite en qualité de vendeur professionnel sur la marketplace mise en place par la société Établissements Darty et Fils. Les réclamations des acheteurs se sont multipliées à compter du mois de juin 2017 et la société Benkatgame a finalement suspendu son compte. Face à l'inertie de la société Benkatgame, la société Établissements Darty et Fils a dû rembourser directement les clients lésés.
M. [T] [Z] s'est inscrit en qualité de vendeur sous l'enseigne Onegame sur la plateforme Fnac Marketplace en 2017. A la suite de signalements répétés d'acheteurs, la société Fnac Direct a également désactivé ce vendeur et a dû rembourser les acquéreurs.
Par ailleurs, ayant eu connaissance de la création fin janvier 2018 par Mme [V] et M. [Z] d'une nouvelle structure, la société Playgame, qui s'est inscrite en qualité de vendeur professionnel sur la marketplace Fnac le 22 février 2018, et dont le président est M. [Z] d'après l'extrait Kbis fourni, la société Fnac a mis en demeure la société Playgame de s'expliquer sur les liens existants entre les sociétés Playgame, Scoregame, Onegame et Benkatgame, par lettre recommandée du 27 décembre 2018.
Par lettre recommandée du 31 décembre 2018, la société Playgame a proposé de s'acquitter des dettes des enseignes Scoregame et Onegame mais par lettre du 8 janvier 2019, la société Fnac leur a rappelé que chacune des structures devait régler ses propres dettes. Aucun règlement n'est cependant intervenu.
Suivant acte du 13 février 2019, la société Playgame a saisi le tribunal de commerce de Créteil en sollicitant la condamnation de la société Fnac Darty à lui verser diverses sommes. Par jugement du 19 janvier 2021, le tribunal de commerce de Créteil a débouté la société Playgame de l'intégralité de ses demandes et l'a condamnée à verser la somme de 3.000 euros au titre des frais irrépétibles. La société Playgame en a interjeté appel par déclaration du 26 mars 2021 mais celle-ci a été déclarée caduque par ordonnance du 9 septembre 2021.
Les sociétés Fnac Direct et Etablissements Darty et Fils ont porté plainte contre X entre les mains du Procureur de la République d'Evry le 10 janvier 2019. L'enquête est toujours en cours.
Suivant exploit du 20 février 2019, les sociétés Fnac Direct et Établissements Darty et Fils ont fait assigner Mme [V] exerçant sous l'enseigne Scoregame, M. [Z], exerçant sous l'enseigne Onegame et la société Benkatgame en réparation devant le tribunal de commerce d'Evry.
Le 14 septembre 2020, le tribunal de commerce d'Evry a placé la société Benkatgame en redressement judiciaire et désigné Maître [W] [U] en qualité de mandataire judiciaire. L'instance a été interrompue et les créances des demanderesses ont été déclarées au passif de la société Benkatgame par deux lettres recommandées avec accusés de réception du 22 octobre 2020.
La procédure de redressement judiciaire de la société Benkatgame a été convertie en liquidation judiciaire par jugement du tribunal de commerce d'Evry du 2 novembre 2020.
Maître [W] [U] ès qualités de liquidateur judiciaire de la société Benkatgame a été attrait à l'instance par assignation du 4 novembre 2020 mais a indiqué qu'il n'entendait pas se faire représenter compte-tenu de l'impécuniosité du dossier.
Par jugement du 4 mars 2021, le tribunal de commerce d'Evry a :
constaté la jonction des deux instances 2020F582 et 2019F174 et dit qu'il rendrait un seul jugement pour ces deux affaires, sous la référence 2019F174,
débouté les défendeurs de leurs demandes d'irrecevabilité,
débouté les défendeurs de leur demande de retrait de pièces,
condamné Mme [K] [V] à payer à la société Fnac Direct la somme de 7.026,26 euros au titre des commandes non conformes livrées,
condamné M. [T] [Z] à payer à la société Fnac Direct la somme de 4.862,02 euros au titre des commandes non conformes livrées,
condamné in solidum Mme [K] [V] et M. [T] [Z] à payer à la société Fnac Direct la somme de 35.000 euros à titre de dommages-intérêts en réparation des préjudices subis,
condamné la société Benkatgame à payer à la société Établissement Darty et à la Fnac la somme de 35.000 euros à titre de dommages-intérêts en réparation des préjudices subis et fixé les deux sommes au passif de la société Benkatgame,
débouté les demandeurs de leur demande de dommages-intérêts au titre de l'intention dilatoire,
débouté les défendeurs de toutes leurs demandes de dommages-intérêts,
condamné Mme [V], M. [Z] et la société Benkatgame in solidum au paiement à la société Fnac Direct de la somme de 3.000 euros et réservé solidairement aux frais de la procédure de liquidation judiciaire de la société Benkatgame la somme de 3.000 euros au profit de la société Fnac Direct sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
condamné Mme [V], M. [Z] et la société Benkatgame, représentée par Maître [U], et réservé aux frais de la procédure de liquidation judiciaire de la société Benkatgame in solidum les frais et dépens,
fixé la créance chirographaire de la société Établissements Darty et Fils et de la Fnac au passif de la liquidation judiciaire de la société Benkatgame outre intérêts au taux légal :
* 7.505,54 euros au titre des commandes non conformes livrées par la société Benkatgame et remboursées aux clients de cette dernière par la société Établissements Darty et Fils,
* 35.000 euros à titre de dommages-intérêts en réparation des préjudices subis par la société Établissements Darty et Fils,
* 3.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, attribués à la société Etablissements Darty et Fils,
* 3.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, attribués à Fnac Direct,
ordonné l'exécution provisoire, en ce compris les frais de greffe.
Mme [K] [V] et M. [T] [Z] ont formé appel du jugement par déclaration du 20 avril 2021 enregistrée le 27 avril 2021.
Par jugement du 9 avril 2021, le tribunal de commerce d'Evry a prononcé la clôture pour insuffisance d'actif de la liquidation judiciaire de la société Benkatgame. La société Benkatgame n'a pas interjeté appel du jugement du 4 mars 2021.
Suivant leurs dernières conclusions transmises par le réseau privé virtuel des avocats le 31 décembre 2021, Mme [K] [V] et M. [T] [Z] demandent à la cour :
- d'infirmer la décision déférée en ce qu'elle a :
condamné Mme [V] à payer à la société Fnac Direct la somme de 7.026,26 euros au titre de commandes non conformes livrées.
condamné M. [Z] à payer à Fnac Direct la somme de 4.862,02 euros au titre de commandes non conformes livrées.
condamné in solidum Mme [V] et M. [Z] à payer à la société Fnac Direct la somme de 35.000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation des préjudices subis.
condamné Mme [V] et M. [Z] in solidum au paiement à la société Fnac Direct de la somme de 3.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
condamné Mme [V] et M. [Z] in solidum au paiement à la société Établissements Darty et Fils de la somme de 3.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
condamné Mme [V] et M. [Z] in solidum aux frais et dépens.
ordonné l'exécution provisoire
débouté Madame [V] et Monsieur [Z] de leurs demandes reconventionnelles et
Statuant à nouveau :
Vu l'article 56 du code de procédure civile,
de dire et juger nulle l'assignation du 20 février 2019.
Vu les articles 323 et suivants et 35 et suivants du code de procédure civile,
de dire et juger irrecevables les demanderesses en leur action commune.
Vu les dispositions de la loi informatique et libertés de 1978,
d'écarter des débats les pièces des demanderesses communiquées en première instance numérotées 3 à 24 et 26 à 30.
de débouter les sociétés Fnac Direct et Darty et Fils de leur appel incident ;
de débouter les sociétés Fnac Direct et Darty et Fils de leur demande de dommages et intérêts à hauteur de 10.000 euros, et d'indemnité au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
de juger irrecevable toute demande de la société Darty et Fils à l'encontre de Monsieur [Z] et de Mme [V].
de condamner la société Fnac Direct à verser la somme de 42.000 euros à Mme [V] à titre de dommages et intérêts.
de condamner la société Fnac Direct à verser la somme de 40.000 euros à Monsieur [Z] à titre de dommages et intérêts.
de condamner la société Fnac Direct à verser la somme de 3.500 euros à Monsieur [Z] et à Mme [V] chacun au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
de condamner les demanderesses aux dépens de première instance et d'appel.
Suivant leurs dernières conclusions transmises par le réseau privé virtuel des avocats le 17 octobre 2022, la société Fnac Direct et la société Établissements Darty et Fils demandent à la cour, au visa des articles L. 622-22 et L. 631-14 du code de commerce, 1103, 1231 et suivants du code civil, et 123 du code de procédure civile :
de recevoir la société Fnac Direct en son appel incident, dans ses écritures, la dire bien fondée et y faire droit ;
de recevoir la société Établissements et Fils en son appel incident, dans ses écritures, la dire bien fondée et y faire droit ;
de confirmer le jugement dont appel en ce qu'il a condamné Madame [K] [V] à payer à la société Fnac Direct la somme de 7.026,26 euros au titre des commandes non conformes livrées ;
de confirmer le jugement dont appel en ce qu'il a Condamné Monsieur [T] [Z] à payer à la société Fnac Direct la somme de 4.862,02 euros au titre des commandes non conformes livrées ;
de confirmer le jugement dont appel en ce qu'il a Condamné in solidum Madame [K] [V] et Monsieur [T] [Z] à payer à la société Fnac Direct la somme de 35.000 euros à titre de dommages-intérêts en réparation des préjudices subis ;
d'infirmer le jugement dont appel en ce qu'il a Débouté la société Fnac Direct et la société Établissements Darty et Fils de leurs demandes de dommages intérêts au titre de l'intention dilatoire ;
de confirmer le jugement dont appel en ce qu'il a Condamné in solidum Madame [K] [V] et Monsieur [T] [Z] à payer à la société Fnac Direct la somme de 3.000 euros en vertu de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens ;
de confirmer le jugement dont appel en ce qu'il a Condamné in solidum Madame [K] [V] et Monsieur [T] [Z] à payer à la société Etablissements Darty et Fils la somme de 3.000 euros en vertu de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens ;
de confirmer le jugement dont appel en ce qu'il a Débouté Madame [K] [V] et Monsieur [T] [Z] de l'ensemble de leurs contestations, demandes, fins et conclusions ;
Et, statuant à nouveau :
de condamner solidairement Madame [K] [V] et Monsieur [T] [Z] à payer chacun à la société Fnac Direct et à la société Établissements Darty et Fils la somme de 10.000 euros à titre de dommages-intérêts pour avoir soulevé de manière dilatoire un moyen d'irrecevabilité à l'occasion de leurs conclusions n° 2 prises devant le Tribunal de commerce d'Evry ;
de débouter Madame [K] [V] et Monsieur [T] [Z] de l'ensemble de leurs contestations, demandes, fins et conclusions ;
de condamner solidairement Madame [K] [V] et Monsieur [T] [Z] à payer à la société Fnac Direct la somme de 3.000 euros en vertu de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens ;
de condamner solidairement Madame [K] [V] et Monsieur [T] [Z] à payer à la société Etablissements Darty et Fils la somme de 3.000 euros en vertu de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens qui seront recouvrés par Maître Fertier, JRF & Associés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.
*
La clôture a été prononcée suivant ordonnance en date du 24 novembre 2022.
SUR CE, LA COUR,
Sur l'assignation
Les appelants soutiennent que l'assignation qui leur a été délivrée par les sociétés Fnac Direct et Établissements Darty et Fils est nulle, sur le fondement de l'article 56 du code de procédure civile, au motif qu'aucune tentative de règlement amiable n'aurait été faite par les intimées.
Les sociétés intimées font valoir que non seulement cette mention n'est pas prescrite à peine de nullité mais encore qu'elles ont rempli cette exigence.
Aux termes de l'article 56 du code de procédure civile, dans sa version en vigueur au moment de l'assignation :
« L'assignation contient à peine de nullité, outre les mentions prescrites pour les actes d'huissier de justice :
1° L'indication de la juridiction devant laquelle la demande est portée ;
2° L'objet de la demande avec un exposé des moyens en fait et en droit ;
3° L'indication des modalités de comparution devant la juridiction et la précision que, faute pour le défendeur de comparaître, il s'expose à ce qu'un jugement soit rendu contre lui sur les seuls éléments fournis par son adversaire ;
4° Le cas échéant, les mentions relatives à la désignation des immeubles exigées pour la publication au fichier immobilier.
Elle comprend en outre l'indication des pièces sur lesquelles la demande est fondée. Ces pièces sont énumérées sur un bordereau qui lui est annexé.
Sauf justification d'un motif légitime tenant à l'urgence ou à la matière considérée, en particulier lorsqu'elle intéresse l'ordre public, l'assignation précise également les diligences entreprises en vue de parvenir à une résolution amiable du litige.
Elle vaut conclusions. ».
Il convient tout d'abord de relever que l'article 56 dans sa version alors applicable ne prévoit aucune sanction, telle que la nullité de l'assignation, en cas de non respect de cette mention dans l'acte.
En outre, l'assignation du 20 février 2019 contient une référence au décret n° 2015-282 du 11 mars 2015 tendant à à privilégier une résolution non judiciaire des différends et de nombreux courriels ont été adressés aux appelantes.
Le jugement sera par conséquent confirmé en ce qu'il a débouté Mme [V] et M. [Z] de leur demande tendant à obtenir la nullité de l'assignation.
Sur la demande d'irrecevabilité
Les appelants soulèvent au visa des articles 323 et suivants et 35 et suivants du code de procédure civile l'irrecevabilité d'une action commune des sociétés Fnac Direct et Établissements Darty et Fils.
Les sociétés intimées contestent l'irrecevabilité soulevée et réclament la condamnation de chacun des appelants à leur verser la somme de 10.000 euros à titre de dommages-intérêts en raison de son caractère dilatoire, sur le fondement de l'article 123 du code de procédure civile.
Les dispositions des articles 323 et suivants, relatifs à la pluralité des parties, et les articles 35 et suivants du code de procédure civile, relatifs à la compétence d'attribution, ne remettent pas en cause la recevabilité de l'action des sociétés Fnac Direct et Établissements Darty et Fils. En effet, le lien existant entre les Mme [V] et M. [Z] et les différentes enseignes crées pour l'occasion est tel qu'il était opportun pour les sociétés Fnac et Darty d'attraire toutes les parties par une action commune. Les demandes de la société Darty sont donc recevables, contrairement à ce que soutiennent les appelants.
Le jugement sera confirmé en ce qu'il a débouté Mme [V] et M. [Z] de leur demande d'irrecevabilité.
L'intention dilatoire des appelants, qui ont cherché à faire rejeter les prétentions adverses et ont soulevé ce moyen dans leurs conclusions n° 2, n'est pas caractérisée. Le jugement sera confirmé en ce qu'il a débouté les sociétés Fnac et Darty de leur demande de dommages-intérêts à ce titre.
Sur les pièces communiquées en première instance
Les appelants demandent à la cour d'écarter de débats les pièces des sociétés Fnac Direct et Darty et Fils communiquées en première instance numérotées 3 à 24 et 26 à 30.
Elle soutient que la société Fnac Direct et la société Darty auraient contrevenu aux dispositions de la loi informatique et libertés en croisant les données de Mme [V] avec celles de M. [Z] et de la société Benkatgame.
Il convient tout d'abord de relever que les appelants ne détaillent pas les pièces qu'ils souhaitent voir écarter des débats puisque la numérotation donnée en appel ne correspond pas forcément à celle des pièces communiquées en première instance.
En outre, la société Fnac Direct édicte une politique de protection de données personnelles, portée à la connaissance des vendeurs inscrits sur sa plateforme marketplace. Elle indique disposer d'un DPO, à savoir un délégué à la protection des données personnelles chargé de garantir la protection des données personnelles qu'elle recueille pour l'inscription de ses cocontractants. Il en est de même de la société Darty et Fils.
Le jugement sera en conséquence confirmé en ce qu'il a rejeté la demande de Mme [V] et de M. [Z] à ce titre.
Sur la demande en paiement
La société Fnac Direct déclare apporter les justificatifs des remboursements qu'elle a dû effectuer auprès des clients mécontents de Mme [V] (Scoregame) et de M. [Z] (Onegame). Elle indique avoir constaté les liens unissant les différentes structures mises en place par les consorts [V]-[Z] afin d'échapper à leurs obligations.
Mme [V] et M. [Z] contestent les éléments rapportés par la société Fnac Direct et la désactivation de leurs comptes respectifs.
Aux termes de l'article 1103 du code civil :
« Les contrats légalement formés tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faits. ».
Mme [V] et M. [Z] ont, sous les enseignes respectives Scoregame et Onegame, accepté les conditions générales d'utilisation vendeurs de la société Fnac Direct en s'inscrivant en qualité de vendeurs sur la marketplace de cette dernière. Ces conditions générales édictent un certain nombre d'obligations à la charge des vendeurs, relatives à la livraison et aux contestations relatives aux produits commandés (article 4.5 et 4.6). Elles énoncent en outre un certain niveau de performance satisfaisant (article 6) que le vendeur est tenu de maintenir vis-à-vis des clients, lesquels évaluent les vendeurs. A défaut, la société Fnac Direct peut interrompre de manière temporaire ou définitive l'accès au service du vendeur. La résiliation de la part de la Fnac Direct est également prévue en cas de manquement grave ou répété du vendeur à ses obligations (article 7.3). Les intimées produisent bien les versions des conditions générales applicables lors de la conclusion des contrats.
La société Fnac Direct a fermé le compte vendeur de Mme [V] le 22 novembre 2016 en lui rappelant l'alerte (courriel du 13 mai 2016) déjà donnée sur la vente de produits reconditionnés positionnés comme neufs. Par plusieurs courriels, elle lui a ensuite rappelé que la désactivation de son compte ne la dédouanait pas de ses obligations pour traiter le service après-vente.
Contrairement à ce que soutiennent les appelants, la société Fnac Direct verse aux débats les éléments démontrant les plaintes de clients sur les produits vendus par l'enseigne Scoregame, des produits vendus comme neufs étant en réalité d'occasion. Si Mme [V] réclamait le 30 décembre 2016 le paiement des sommes qui lui étaient dues après compensation à la suite du remboursement de ses propres clients par la Fnac, elle est malvenue à reprocher à la société Fnac Direct de ne pas avoir effectué de virement en sa faveur alors que les plaintes ont continué à être traitées par la Fnac et ont engendré de nouveaux remboursements. Mme [V] reconnaissait d'ailleurs ne pas pouvoir assurer le traitement des réclamations.
La société Fnac Direct produit les justificatifs des remboursements (compte [V]/attestation directeur comptable) opérés sur le compte de Mme [V] sous l'enseigne Scoregame à hauteur de 7.026,26 euros. Il en est de même à l'égard de M. [Z], la société Onegame étant redevable de la somme de 4.862,02 euros au titre des remboursements effectués par la Fnac auprès des clients.
D'autre part, à la suite de la lettre recommandée de la Direction juridique de la société Fnac Darty adressée à la société Playgame le 27 décembre 2018 annonçant la suspension du compte vendeur de la société et exposant les débits constatés sur les comptes Onegame et Scoregame, la société Playgame a expressément reconnu auprès de la société Fnac par lettre en réponse du 31 décembre 2018, les dettes de 7.026,26 euros de Scoregame et de 4.862,02 euros de Onegame. Elle s'est également engagée à effectuer les remboursements. La dette de la société Onegame à hauteur de 4.862,02 euros est donc également prouvée et ne résulte donc pas seulement de l'attestation de son directeur comptable, comme le soutiennent les appelants.
Le jugement sera en conséquence confirmé en ce qu'il a condamné Mme [V] à payer la somme de 7.026,26 euros et M. [Z] celle de 4.862,02 euros à la société Fnac Direct au titre des commandes non conformes livrées.
Sur les demandes de dommages-intérêts
Formées par Mme [V] et M. [Z]
Mme [V] et M. [Z] estiment que la société Fnac Direct a rompu abusivement les contrats les liant puisqu'ils n'ont pas failli dans leurs obligations. Ils considèrent n'être concernés par aucun des critères prévus aux Conditions générales d'utilisation vendeurs pour l'interruption de services sur le seuil de commandes honorées, le taux de réclamation ou l'évaluation des clients. Chacun des appelants réclame donc des dommages-intérêts.
Cependant, les appelants omettent de rappeler que diverses obligations s'imposent à eux en qualité de vendeurs professionnels ' dont celles de vendre un produit conforme et d'assurer le service après vente ' et que le manquement du vendeur à l'une quelconque de ses obligations peut entraîner la résiliation le contrat par la société Fnac Direct. En cas de fraude, la résiliation peut intervenir sans préavis. Les plaintes des clients de Mme [V] et de M. [Z], l'obligation pour la société Fnac Direct de pallier la carence des vendeurs vis-à-vis de leurs clients en remboursant les marchandises non livrées ou non conformes et d'assureur le suivi des réclamations justifient la désactivation de leurs comptes. Les rapprochements effectués entre les diverses enseignes montées successivement par les appelants après désactivation du premier compte vendeur (Scoregame ' Mme [V]) sous des noms très voisins confirment la fraude dénoncée par la société Fnac Direct et la résiliation sans préavis des contrats. Le jugement sera confirmé en ce qu'il a débouté Mme [V] et M. [Z] de leurs demandes de dommages-intérêts.
Formées par la société Fnac Direct
La société Fnac Direct expose avoir subi un préjudice important dont Mme [V] et M. [Z] sont tenus de l'indemniser, les conditions générales d'utilisation vendeurs prévoyant d'ailleurs en leur article 11 une telle responsabilité.
A cet égard, la société Fnac Direct produit des captures d'écran de plaintes de clients de la boutique Scoregame ainsi que sur le site internet 60millions-mag.com dénonçant vivement les défaillances de la marketplace de la Fnac et de Darty. L'image et la réputation de la société Fnac Direct en ont incontestablement été ternies, les consommateurs étant tentés de ne plus avoir recours à sa plateforme pour leurs futurs achats et décourageant de potentiels acquéreurs au vu des commentaires négatifs publiés. Le jugement sera par conséquent confirmé en ce qu'il a condamné in solidum Mme [V] et M. [Z], qui tous deux ont contraint la Fnac à rembourser des acquéreurs mécontents, à lui verser la somme de 35.000 euros en réparation des préjudices subis, ce montant étant raisonnable au regard du secteur concerné, extrêmement concurrentiel.
Sur les dépens et l'article 700 du code de procédure civile
Mme [V] et M. [Z] succombant à l'action, il convient de confirmer le jugement en ce qu'il a statué sur les dépens et les frais irrépétibles et statuant de ces chefs en cause d'appel, ils seront aussi condamnés in solidum aux dépens, dans les conditions prévues pour l'aide juridictionnelle, mais il n'est pas inéquitable de laisser à chacune des parties la charge de ses propres frais sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS,
CONFIRME le jugement en toutes ses dispositions déférées et y ajoutant,
CONDAMNE in solidum Mme [K] [V] et M. [T] [Z] aux dépens, dans les conditions prévues pour l'aide juridictionnelle ;
LAISSE à chacune des parties, la charge de ses propres frais engagés sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
LE GREFFIER LE PRÉSIDENT