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09/02/2023 | FRANCE | N°20/02677

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 4 - chambre 10, 09 février 2023, 20/02677


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS







COUR D'APPEL DE PARIS



Pôle 4 - Chambre 10



ARRÊT DU 09 FÉVRIER 2023



(n° , 8 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 20/02677 - N° Portalis 35L7-V-B7E-CBNW5



Décision déférée à la Cour : Jugement du 14 Novembre 2019 -Tribunal de Grande Instance de PARIS 17 RG n° 18/01612





APPELANTE



S.A. AQUABOULEVARD DE [Localité 8], agissant poursuites et diligences ses représent

ants légaux, domiciliés ès qualités audit siège

[Adresse 4]

[Localité 6]



Représentée par Me Véronique DE LA TAILLE de la SELARL RECAMIER AVOCATS ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS,...

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 4 - Chambre 10

ARRÊT DU 09 FÉVRIER 2023

(n° , 8 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 20/02677 - N° Portalis 35L7-V-B7E-CBNW5

Décision déférée à la Cour : Jugement du 14 Novembre 2019 -Tribunal de Grande Instance de PARIS 17 RG n° 18/01612

APPELANTE

S.A. AQUABOULEVARD DE [Localité 8], agissant poursuites et diligences ses représentants légaux, domiciliés ès qualités audit siège

[Adresse 4]

[Localité 6]

Représentée par Me Véronique DE LA TAILLE de la SELARL RECAMIER AVOCATS ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, toque : K0148

Assistée Me Arnaud DIZIER de la SCP DIZIER, avocat au barreau de PARIS, toque : P0369, substitué à l'audience par Me Audrey LEMAL,avocat au barreau de PARIS, toque : P0369,

INTIMÉS

Monsieur [N] [G]

né le [Date naissance 3] 1997 à [Localité 7] (91)

[Adresse 5]

[Adresse 5]

Représenté par Me Frédéric INGOLD de la SELARL INGOLD & THOMAS - AVOCATS, avocat au barreau de PARIS, toque : B1055

Assisté à l'audience de Me Franck LE CALVEZ, avocat au barreau de PARIS, toque : G0318

CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DU PUY DE DÔME, venant aux droits et obligations du RSI et de la CLDSSTI, prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés ès qualités audit siège

[Adresse 1]

[Adresse 1]

Représentée et et assistée par Me Sylvain NIEL, avocat au barreau de PARIS, toque : D2032

SAS HARMONIE MUTUELLE, prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés ès qualités audit siège

[Adresse 2]

[Localité 6]

Défaillante, régulièrement avisée le 19 juin 2020 par procès-verbal de remise à personne habilitée

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été plaidée le 08 Décembre 2022, en audience publique, devant la Cour composée de :

Mme Florence PAPIN, Présidente

Mme Valérie MORLET, Conseillère

M. Laurent NAJEM, Conseiller

qui en ont délibéré, un rapport a été présenté à l'audience par Madame [H] [D] dans les conditions prévues par l'article 804 du code de procédure civile.

Greffier, lors des débats : Mme Ekaterina RAZMAKHNINA

ARRÊT :

- réputé contradictoire

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Florence PAPIN, Présidente et par Ekaterina RAZMAKHNINA, greffier, présent lors de la mise à disposition.

***

FAITS et PROCEDURE

Monsieur [N] [G], né le [Date naissance 3] 1997, a le 1er juillet 2015 été victime d'un accident au centre aquatique Aquaboulevard de [Localité 8]. Empruntant le toboggan "Aquamikaze", il a heurté un mur à l'arrivée. En sont résultées une entorse de la cheville droite et une fracture de la cheville gauche, qui ont nécessité une intervention chirurgicale.

Monsieur [G] a par acte du 29 septembre 2016 assigné la SA AQUABOULEVARD de [Localité 8] et la compagnie PREVADIES-CAMPI, son assureur, devant le juge des référés du tribunal de grande instance de Paris aux fins d'expertise médicale. Le magistrat a par ordonnance du 28 novembre 2016 désigné Monsieur [Y] [X] en qualité d'expert.

L'expert judiciaire a clos et déposé son rapport le 10 septembre 2017.

Au vu de ce rapport et faute de solution amiable, Monsieur [G] par acte du 17 janvier 2018 assigné la société AQUABOULEVARD et la société HARMONIE MUTUELLE (venant aux droits et obligations de la compagnie PREVADIES-CAMPI) et en responsabilité et indemnisation devant le tribunal de grande instance de Paris.

La CAISSE LOCALE DELEGUEE pour la SECURITE SOCIALE des TRAVAILLEURS INDEPENDANTS (CLDSSTI), venant aux droits et obligations du REGIME SOCIAL des INDEPENDANTS (RSI), caisse dont dépend Monsieur [G], est volontairement intervenue à l'instance.

*

Le tribunal de grande instance de Paris, par jugement du 14 novembre 2019, a :

- déclaré la CLDSSTI recevable en son intervention volontaire,

- déclaré la société AQUABOULEVARD responsable de l'accident dont a été victime Monsieur [G] le 1er juillet 2015,

- condamné la société AQUABOULEVARD à indemniser Monsieur [G] des préjudices subis du fait de cet accident,

- condamné la société AQUABOULEVARD à payer à [N] [G] la somme de 3.000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

- réservé les dépens,

- ordonné l'exécution provisoire de la décision,

- renvoyé à la mise en état du Pôle de la réparation du préjudice corporel du tribunal, 19ème chambre civile, pour conclusions sur la liquidation,

- rappelé qu'il appartiendra à Monsieur [G] de mettre en cause son organisme social et/ou tout tiers payeur étant intervenu dans la prise en charge des frais induits par l'accident.

La société AQUABOULEVARD a par acte du 3 février 2020 interjeté appel de ce jugement, intimant Monsieur [G] et la compagnie HARMONIE MUTUELLE et devant la Cour. Le dossier a été enrôlé sous le n°20/2677.

La société AQUABOULEVARD a par acte du 5 février 2020 à nouveau interjeté appel de ce jugement, intimant alors la CAISSE PRIMAIRE d'ASSURANCE MALADIE (CPAM) du Puy de Dôme (venant aux droits de la CLDSSTI) devant la Cour. L'affaire a été enregistrée sous le n°20/2841.

Les deux dossiers ont été joints selon ordonnance du 9 septembre 2020, alors appelés sous le seul n°20/2677.

La société AQUABOULEVARD a par conclusions du 4 décembre 2020 saisi le juge de la mise en état de la 19ème chambre du tribunal judiciaire de Paris d'une demande de sursis à statuer sur la liquidation des préjudices de Monsieur [G] dans l'attente de l'arrêt de la Cour de céans. Il a été fait droit à sa demande par ordonnance du 6 avril 2021.

*

La société AQUABOULEVARD, dans ses dernières conclusions n°3 signifiées le 29 novembre 2022, demande à la Cour de :

- la déclarer recevable et bien fondée en son appel,

Ce faisant,

- annuler ou réformer partiellement le jugement en ce qu'il :

. l'a déclarée responsable de l'accident dont a été victime Monsieur [G] le 1er juillet 2015,

. l'a condamnée à indemniser Monsieur [G] des préjudices subis du fait de cet accident,

. l'a condamnée à payer à Monsieur [G] la somme de 3.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

. a ordonné l'exécution provisoire de la décision,

Statuant à nouveau, à titre principal,

- dire que Monsieur [G] a commis une faute, cause de son accident survenu le 1er juillet 2015 dans l'attraction "Aquamikaze",

- dire qu'elle n'est pas responsable de l'accident de Monsieur [G] survenu le 1er juillet 2015,

- en conséquence, déclarer mal fondées les demandes de Monsieur [G] et de la CPAM tendant à la voir condamner à les indemniser des préjudices subis du fait de cet accident ainsi que d'avoir à lui faire supporter l'entière charge des frais irrépétibles,

- débouter Monsieur [G] et la CPAM de toutes leurs demandes,

A titre subsidiaire, si la Cour devait décider de retenir sa responsabilité au titre d'une obligation de résultat, celle-ci ne pourra être que partielle, la faute commise par Monsieur [G] engageant manifestement la responsabilité de ce dernier en ce qu'elle est la cause de son accident et de ses conséquences en résultant,

- en conséquence, dire que la responsabilité de l'accident de Monsieur [G] et de ses conséquences sera partagée entre elle et l'intéressé dans des proportions qu'il appartiendra à la Cour d'apprécier, en ce compris pour l'indemnisation des préjudices et des différents frais exposés,

En toute hypothèse,

- condamner Monsieur [G], la CPAM et/ou toute partie succombante à lui payer la somme de 5.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner Monsieur [G], la CPAM et/ou toute partie succombante aux entiers dépens, avec distraction au profit de la SELARL RECAMIER Avocats associés (Maître Véronique de la TAILLE).

Monsieur [G], dans ses dernières conclusions signifiées le 10 novembre 2022, demande à la Cour de :

- confirmer le jugement,

Ce faisant,

- juger recevables et bien fondées les demandes dirigées à l'encontre de la société AQUABOULEVARD,

- juger que la société AQUABOULEVARD est responsable de l'accident dont il a été victime le 1er juillet 2015,

- juger qu'il n'a lui-même pas commis de faute permettant d'exonérer totalement ou partiellement la responsabilité de la société AQUABOULEVARD,

- condamner la société AQUABOULEVARD à l'indemniser des préjudices subis du fait de cet accident,

Y ajoutant,

- condamner la société AQUABOULEVARD à lui verser la somme de 5.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner la société AQUABOULEVARD aux entiers dépens y compris les frais d'expertise judiciaire (2.036,40 euros).

La CPAM du Puy de Dôme, dans ses dernières conclusions n°3 signifiées le 18 mars 2022, demande à la Cour de :

- la recevoir en son intervention et la déclarant bien-fondée,

- confirmer le jugement en ce qu'il a déclaré la société AQUABOULEVARD entièrement responsable de l'accident dont a été victime Monsieur [G] le 1er juillet 2015 et a condamné la même à l'indemniser intégralement de son préjudice,

Si la Cour décide d'évoquer la liquidation,

- infirmer le jugement,

- condamner la société AQUABOULEVARD à lui payer :

. la somme de 7.418,97 euros en remboursement des prestations en nature constitutives de dépense de santé actuelle prises en charge, avec intérêts de droit à compter de sa première demande en justice soit le 8 juin 2018,

. la somme de 1.114 euros au titre de l'indemnité forfaitaire de l'article L376-1 du code de la sécurité sociale,

- dire que les intérêts échus pour une année entière à compter de la décision produiront eux-mêmes intérêts,

- dire qu'elle exerce son recours en ce qui concerne les prestations de santé en nature prises en charge, sur le poste dépenses de santé actuelles (DSA) qui sera fixé à 7.418,97 euros,

En tout état de cause,

- condamner la société AQUABOULEVARD à lui payer la somme de 3.000 euros sur le fondement de l'article 700 code de procédure civile,

- condamner la société AQUABOULEVARD aux entiers dépens, avec distraction au profit de Maître Sylvain NIEL.

La compagnie HARMONIE MUTUELLE, régulièrement assignée devant la Cour par acte remis le 19 juin 2020 à personne habilitée à le recevoir, n'a pas constitué avocat. L'arrêt sera en conséquence réputé contradictoire.

*

La clôture de la mise en état du dossier a été ordonnée le 30 novembre 2022, l'affaire plaidée le 8 décembre 2022 et mise en délibéré au 9 février 2023.

MOTIFS

Sur la responsabilité de la société AQUABOULEVARD

Les premiers juges ont rappelé que l'exploitant du toboggan était tenu d'une obligation de résultat concernant la sécurité de ses usagers pendant la descente et constaté que Monsieur [G] avait été blessé non pendant la descente mais à l'issue de celle-ci du fait de l'insuffisance d'eau dans le bassin pour freiner son arrivée, arrivée "indivisible" de la descente, de sorte que la responsabilité de la société AQUABOULEVARD est pleinement engagée, celle-ci ne rapportant pas la preuve de la faute de la victime (et notamment de son départ alors que le feu était rouge, point non établi).

La société AQUABOULEVARD critique le jugement ainsi rendu et fait valoir l'absence de toute responsabilité de sa part. Elle rappelle le régime applicable aux toboggans, affirme que la sécurité des usagers est sa priorité, mais fait valoir le non-respect par Monsieur [G] des règles de sécurité. Elle soutient ainsi que le feu de départ se met au rouge lorsque l'eau du bassin d'arrivée est insuffisante et qu'il est démontré que ce feu fonctionnait parfaitement le jour de l'accident et précise que les réclamations de ce jour proviennent du même groupe d'amis de Monsieur [G], qui se sont engagés ensemble dans la descente. Elle ajoute que le SAMU de [Localité 8] a lui-même relevé, sur sa fiche d'intervention du jour, le non-respect du règlement.

Monsieur [G] estime quant à lui certaine la responsabilité de la société AQUABOULEVARD. Il rappelle l'obligation de sécurité, de résultat, à laquelle le parc d'attraction est tenu et les termes de la fiche de bilan du SAMU intervenu sur place et qui a relevé le non-respect du règlement par le parc du fait de l'insuffisance d'eau dans le bassin. Il affirme qu'une trappe empêche le départ lorsque le feu est rouge et qu'il n'a ainsi pas pu entamer sa descente sans attendre le feu vert.

Sur ce,

Achetant un billet pour centre aquatique, Monsieur [G] est entré en relations contractuelles avec la société AQUABOULEVARD.

Or les contrats légalement formés tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faits (article 1103 du code civil).

La société AQUABOULEVARD, exploitant d'un parc aquatique d'attraction, est tenue d'une obligation de sécurité vis-à-vis de ses visiteurs et, en l'espèce, vis-à-vis de Monsieur [G].

Le code de la consommation (article L221-1), d'une manière générale, et le code des sports, plus particulièrement pour les activités, matériels et toboggans aquatiques (articles A322-12 et 13, 22 et 23 et 33 à 35) imposent d'ailleurs à la société AQUABOULEVARD une conformité des installations aux normes européennes et à leur usage prévisible, l'installation de protections et d'espaces de protection, une conception des installations adaptée pour éviter les accidents, etc., non remises en cause en l'espèce. La qualification des surveillants des bassins, la présence d'un poste de sécurité opérationnel, la mise en place rapide des secours, etc. ne sont pas contestées.

Dans le cadre de l'utilisation d'une attraction, l'obligation de sécurité reste une obligation de moyens lorsque l'utilisateur y joue un rôle actif, mais devient une obligation de résultat lorsque son rôle n'est que passif.

Ainsi, la société AQUABOULEVARD était tenue d'une obligation de mettre en 'uvre tous les moyens nécessaires au bon départ de Monsieur [G] lorsqu'il a emprunté le toboggan "Aquamikaze" et joué, à ce moment, un rôle actif important, choisissant le moment de son départ et se lançant dans l'attraction.

Il n'appartient pas à Monsieur [G] de prouver la réalité d'un dysfonctionnement, mais à la société AQUABOULEVARD de démontrer que les moyens d'éviter un départ à un mauvais moment étaient mis en place et fonctionnaient. Nul ne conteste l'existence de l'affichage des consignes d'utilisation du toboggan "Aquamikaze" en bas de ses escaliers d'accès et à son départ et d'un feu de signalisation équipant ce point de départ. Mais les conditions exactes du départ de Monsieur [G], le 1er juillet 2015 à midi, ne sont en l'espèce pas établies. L'enregistrement vidéo produit aux débats par Monsieur [G] (diffusé sur la chaine Internet YouTube) renseigne sur le fonctionnement du toboggan en cause, mais aucunement sur la descente de l'intéressé le jour des faits. La société AQUABOULEVARD ne démontre pas qu'au jour et à l'heure précise où l'intéressé s'est lancé dans le toboggan "Aquamikaze", le feu rouge interdisant son départ fonctionnait correctement et était allumé. Les constatations d'un huissier n'ont été requises que deux semaines après l'accident, selon procès-verbal du 16 juillet 2015, et ne peuvent valoir preuve du fonctionnement correct de la sonde et du feu rouge (notamment lorsque le niveau d'eau à l'arrivée de l'attraction est insuffisante) quinze jours auparavant. La trappe empêchant d'utiliser le toboggan, observée par l'huissier, n'est pas en place lorsque l'attraction est en fonctionnement et n'a été posée qu'en suite de l'accident, pour éviter toute utilisation ultérieure pendant les investigations portant sur celui-ci (point confirmé par la vidéo précitée).

Il résulte de ces éléments que la société AQUABOULEVARD ne démontre donc pas avoir mis en 'uvre tous les moyens à sa disposition pour permettre un départ sécurisé de Monsieur [G] dans le toboggan "Aquamikaze" le 1er juillet 2015 à midi.

Contrairement aux affirmations de Monsieur [G] en ce sens, il n'est certes pas établi qu'il se soit engagé dans le toboggan alors que le feu était vert. Mais aucun élément du dossier de la société AQUABOULEVARD, non plus, ne met en évidence une faute de l'intéressé qui se serait élancé dans le toboggan alors que le feu était rouge avec d'autres utilisateurs ensemble, ou dans un temps trop rapproché, alors qu'un seul passage n'est autorisé toute les 20/25 secondes environ, ainsi que l'ont observé les premiers juges. La société AQUABOULEVARD ne saurait se prévaloir du rapport du SAMU de [Localité 8] dressé à l'arrivée de l'équipe de secours sur place, le 1er juillet 2015 qui, en réponse à la question "Y-a-t'il eu non respect du règlement" a coché la case "oui", mais n'a pas répondu à la question "Si oui de quel ordre '". L'équipe du SAMU n'a pas été témoin direct des faits, n'a pas compétence pour s'exprimer sur le respect ou non du règlement (lequel n'est par ailleurs pas identifié), par le centre aquatique ou la victime de l'accident, et la question, pré-écrite, n'est pas suffisamment précise pour comprendre si le non-respect évoqué doit s'entendre de celui du parc d'attraction ou de son utilisateur. Les procès-verbaux d'audition par les services de police, le 8 juillet 2015, d'autres adolescents ayant utilisé le toboggan en cause le 1er juillet 2015, ne permettent pas de faire la part des choses, les intéressés affirmant avoir respecté la signalisation et le feu vert et la société AQUABOULEVARD ne démontrant pas que tous se sont élancés en même temps ou dans un temps proche.

La faute de Monsieur [G] au départ du toboggan, par non-respect des consignes de sécurité, n'est en conséquence pas prouvée.

L'obligation de sécurité de la société AQUABOULEVARD est devenue une obligation de résultat au cours de la descente de Monsieur [G], alors que celui-ci avait un rôle passif ou, à tout le moins, un rôle actif très mineur. Cette obligation de résultat persiste en l'espèce particulière à l'arrivée, alors qu'aucun bassin d'accueil n'est prévu, le toboggan se prolongeant après la descente et devenant horizontal pour réduire la vitesse des utilisateurs, sans que ce dispositif ne puisse être dissocié de la descente elle-même, ainsi que l'ont justement retenu les premiers juges.

L'accident dont a été victime Monsieur [G] est intervenu à son arrivée du toboggan "Aquamikaze", après avoir pris de la vitesse pendant la descente, laquelle n'a pas été suffisamment ralentie et amortie du fait d'une insuffisance d'eau en bas de l'attraction. Monsieur [G] a heurté le mur se trouvant en fin de parcours. Cette insuffisance d'eau dans l'attraction n'est pas contestée par la société AQUABOULEVARD, qui d'ailleurs prétend sans le prouver que l'intéressé serait parti malgré le feu rouge, alerte d'un niveau d'eau trop bas.

C'est ainsi à juste titre que les premiers juges ont retenu la responsabilité de la société AQUABOULEVARD, qui n'évoque et a fortiori ne démontre aucune faute de l'intéressé pendant cette descente et l'ont condamnée à indemniser Monsieur [G] des préjudices subis du fait de cet accident.

Le jugement sera confirmé de ces chefs.

Sur la liquidation des préjudices de Monsieur [G]

Les premiers juges n'ont pas statué sur la liquidation des préjudices subis par Monsieur [G], renvoyant à cette fin le dossier à la 19ème chambre du tribunal, dont le juge de la mise en état a dit qu'il était sursis à statuer dans l'attente de l'arrêt de la présente Cour sur la responsabilité de la société AQUABOULEVARD.

Il n'y a donc pas lieu d'évoquer ladite liquidation, ce qui d'ailleurs n'est sollicité ni par Monsieur [G] ni par la société AQUABOULEVARD, et seulement évoqué par la CPAM.

Sur les dépens et frais irrépétibles

Le sens de l'arrêt conduit à la confirmation du jugement en ses dispositions relatives aux dépens, incluant les frais d'expertise judiciaire et réservés, et aux frais irrépétibles de première instance, mis la charge de la société AQUABOULEVARD au profit de Monsieur [G].

La société AQUABOULEVARD succombant en son recours, sera condamnée aux dépens d'appel, avec distraction au profit du conseil de la CPAM qui l'a réclamée, conformément aux dispositions des articles 696 et suivants du code de procédure civile. Le conseil de Monsieur [G] ne réclame pas la distraction à son profit des dépens. Il en est pris acte.

Tenue aux dépens d'appel, la société AQUABOULEVARD sera également condamnée à payer les sommes équitables de 2.500 euros à Monsieur [G] et de 1.500 euros à la CPAM, en indemnisation des frais exposés en cause d'appel et non compris dans les dépens, en application de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS,

La Cour,

Vu le jugement du tribunal de grande instance de Paris du 14 novembre 2019 (RG n°18/1612),

CONFIRME le jugement en toutes ses dispositions,

Y ajoutant,

CONDAMNE la SA AQUABOULEVARD de [Localité 8] aux dépens d'appel, avec distraction au profit de Maître Sylvain NIEL,

CONDAMNE la SA AQUABOULEVARD de [Localité 8] à payer la somme de 2.500 euros à Monsieur [N] [G] et la somme de 1.500 euros à la CAISSE PRIMAIRE d'ASSURANCE MALADIE (CPAM) du Puy de Dôme, en indemnisation de leurs frais irrépétibles d'appel.

LE GREFFIER, LA PRÉSIDENTE,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 4 - chambre 10
Numéro d'arrêt : 20/02677
Date de la décision : 09/02/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-02-09;20.02677 ?
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