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09/02/2023 | FRANCE | N°19/19904

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 4 - chambre 10, 09 février 2023, 19/19904


Copies exécutoires RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS







COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 4 - Chambre 10



ARRÊT DU 09 FÉVRIER 2023



(n° , 7 pages)





Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 19/19904 - N° Portalis 35L7-V-B7D-CA4GS



Décision déférée à la Cour : Jugement du 09 Juillet 2019 -Tribunal de Grande Instance de Paris - RG n° 17/09020





APPELANT



Monsieur [U] [S] [B] [V]

né le

12/02/1987 à [Localité 6]

[Adresse 2]

[Localité 1]



Représenté et assisté par Me Henry PICOT DE MORAS D'ALIGNY de l'AARPI Cabinet PdA, avocat au barreau de PARIS, toque : E1032, substitué à l'...

Copies exécutoires RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 4 - Chambre 10

ARRÊT DU 09 FÉVRIER 2023

(n° , 7 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 19/19904 - N° Portalis 35L7-V-B7D-CA4GS

Décision déférée à la Cour : Jugement du 09 Juillet 2019 -Tribunal de Grande Instance de Paris - RG n° 17/09020

APPELANT

Monsieur [U] [S] [B] [V]

né le 12/02/1987 à [Localité 6]

[Adresse 2]

[Localité 1]

Représenté et assisté par Me Henry PICOT DE MORAS D'ALIGNY de l'AARPI Cabinet PdA, avocat au barreau de PARIS, toque : E1032, substitué à l'audience par Me Camille BRETEAU, avocat au barreau de PARIS, toque : E1032

INTIMÉE

SARL MARNIER, prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés ès qualités audit siège

[Adresse 3]

[Localité 1]

Représentée et assistée par Me Richard ROUX de la SELARL R2X AVOCATS, avocat au barreau de PARIS, toque : D1446

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été appelée le 13 Décembre 2022, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant M. Laurent NAJEM, Conseiller, chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, entendu en son rapport, composée de :

Madame Florence PAPIN, Présidente

Madame Valérie MORLET, Conseillère

Monsieur Laurent NAJEM, Conseiller

Greffier, lors des débats : Mme Ekaterina RAZMAKHNINA

ARRÊT :

- contradictoire

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Florence PAPIN, Présidente et par Ekaterina RAZMAKHNINA, greffier, présent lors de la mise à disposition.

***

Rappel des faits et de la procédure :

Courant juin 2015, M. [U] [V] a pris contact avec la société à responsabilité limitée (SARL) Marnier, spécialisée en transactions immobilières, à la suite de la publication d'une annonce relative à un appartement à vendre dans le [Localité 1], rue des Haudriettes.

Après avoir procédé à la visite de cet appartement, M. [V] a offert de l'acquérir le 17 juin 2015, la régularisation d'un compromis de vente étant fixée au 7 Juillet 2015, en l'étude de Maître [F] [D], sis à [Localité 5].

Des discordances entre la désignation du bien et sa localisation au sein de l'ensemble immobilier étant apparues, la signature du compromis a été différée au 20 août 2015, tandis que l'acte authentique de vente est intervenu le 12 octobre suivant, comprenant le versement à la société Marnier d'une somme de 10 000 euros en règlement de ses honoraires.

M. [V], arguant de ce que les erreurs commises dans la désignation du bien lui auraient causé un préjudice financier, a sollicité de la société Marnier la restitution des honoraires ainsi perçus.

Les parties n'étant pas parvenues à trouver une solution amiable à leur litige, par exploit signifié le 14 Juin 2017, M. [V] a fait assigner la société Marnier.

Le 9 juillet 2019, le tribunal de grande instance de Paris a :

Débouté la société Marnier de sa fin de non-recevoir ;

Déclaré recevable l'action de M. [U] [V] ;

Débouté M. [U] [V] de l'ensemble de ses demandes ;

Débouté la société Marnier de sa demande de dommages et intérêts ;

Condamné M. [U] [V] à payer à la société Marnier la somme de 2 500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ;

Condamné M. [U] [V] aux entiers dépens de l'instance ;

Débouté les parties de leurs demandes plus amples ou contraires ;

Dit n'y avoir lieu à exécution provisoire.

M. [U] [V] a interjeté appel du jugement le 24 octobre 2019.

Par ses dernières conclusions, notifiées par voie électronique le 29 avril 2022, M. [U] [V] demande à la cour de :

Infirmer le Jugement rendu le 9 juillet 2019 par le Tribunal de Grande Instance de Paris en ce qu'il a débouté M. [V] de l'intégralité de ses demandes et l'a condamné à régler un article 700 à la SARL Marnier ;

Statuant à nouveau,

Condamner la SARL Marnier à restituer à M. [V] les honoraires perçus à hauteur de 10 000 euros compte tenu de ses manquements dans l'exécution de sa mission ;

Condamner la SARL Marnier à verser à M. [V] les sommes de 7 135,63 euros en indemnisation de son préjudice financier et 5 000 euros en indemnisation de son préjudice moral ;

Condamner la SARL Marnier aux entiers dépens et au paiement de la somme de 2 700 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de Procédure Civile ;

Débouter la SARL Marnier de l'ensemble de ses demandes.

Il fait valoir qu'il résulte du mandat de vente confié à la société MARNIER que son mandant doit lui communiquer tous les actes de propriété ; que la société MARNIER devait exiger tous les documents et actes nécessaires à l'opération ; que cette société a commis une faute dans l'adresse même du bien ; qu'il lui appartenait pourtant de se faire communiquer l'acte de propriété de sorte qu'il y a négligence flagrante, la société ayant agi avec légèreté.

Il souligne qu'il ne pouvait relever les erreurs alors qu'il ne disposait pas du titre de propriété et que la situation de la cave n'était pas précisée dans l'annonce.

Il estime que la société MARNIER a engagé sa responsabilité délictuelle à son égard en lui faisant visiter un bien dont la description ne correspondait pas ensuite à la désignation résultant de l'acte de propriété et en faisant reporter ces informations erronées sur l'acte de vente.

Il considère qu'au vu des fautes commises au regard de la situation du bien et des manquements à l'obligation d'information et de conseil à l'égard de l'acheteur, et des conséquences qui en résultent, il est fondé à réclamer la suppression et donc la restitution des honoraires versés.

S'agissant du préjudice financier, M. [V] fait valoir que la signature du compromis a été décalée de six semaines ; que ce report a eu une incidence sur le taux d'intérêt de son prêt ; que si la promesse avait été signée le 9 juillet, il aurait pu avoir un prêt à un taux d'intérêt préférentiel.

Pour justifier de son préjudice moral, il soutient que sa confiance a été abusée par la SARL MARNIER qui ne l'a nullement accompagné dans la vente et a même cherché à le tromper et il relève que le tribunal n'a pas tenu compte de ce qu'il existait toujours une discordance entre l'acte détenu par lui et la situation réelle du bien, les discordances n'ont pu être rectifiées au cours des six semaines séparant les deux rendez-vous de signature. Il évoque des difficultés avec son assurance qui le somme de régulariser la situation pour éviter une fausse déclaration intentionnelle et soutient qu'il ne peut pas le vendre ou le louer en l'état. Il relève qu'il n'a d'autres choix que d'engager des frais pour procéder à une telle rectification. Il allègue que cette situation lui cause stress et tracas.

Par ses dernières conclusions, notifiées par voie électronique le 24 mars 2020, la SARL MARNIER demande à la cour de :

Confirmer le jugement déféré en toutes ses dispositions ;

Débouter ce faisant M. [V] de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions avec toutes conséquences de droit ;

Condamner M. [V] à verser à la société MARNIER une somme de 3 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens.

Elle fait valoir que le transfert de propriété a effectivement été opéré, pour le bien visité, avec la précision expresse du bon niveau pour la cave ; qu'il n'y a ni faute, ni vice caché ; qu'elle a identifié que les désignations imprécises étaient dues à une mauvaise rédaction du règlement de copropriété et qu'elles étaient déjà présentes dans l'acte authentique des vendeurs ; que le notaire comme l'acquéreur ont accepté d'instrumenter en connaissance de cause.

Elle rappelle que M. [V] a visité les lieux à au moins trois reprises et que de ce fait aucun doute ne pouvait exister dans son esprit quant à la consistance de l'appartement, à sa localisation dans la partie neuve de l'immeuble, ainsi qu'à l'environnement qui l'entourait.

Elle conteste tout aléa ou risque juridique.

Elle expose que la simulation de prêt ne revêt aucun caractère contractuel et aucune proposition ferme et définitive n'est intervenue avant l'offre du 30 septembre 2015.

S'agissant du préjudice moral, elle relève que M. [V], bien qu'informé des imprécisions, a maintenu sa volonté d'acheter le bien, tout en faisant débuter les travaux dans l'appartement, avant la réitération de la vente.

Elle estime que les difficultés avec l'assurance ne sont pas étayées et que le préjudice est hypothétique. Elle soutient que les problèmes évoqués relèvent soit du notaire, soit de l'assemblée générale.

La clôture a été prononcée le 16 novembre 2022.

En dépit d'une relance par message électronique du 13 décembre 2022 avec indication d'un délai de rigueur de 8 jours, la société MARNIER n'a pas communiqué les pièces visées à son bordereau.

MOTIFS DE L'ARRÊT

Sur la demande de restitution des honoraires perçus

L'article 1165 du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016, dispose que les conventions n'ont d'effet qu'entre les parties contractantes ; elles ne nuisent point au tiers, et elles ne lui profitent que dans le cas prévu par l'article 1121.

Aux termes de l'article 1382 du même code, dans cette même rédaction :

 « Tout fait quelconque de l'homme, qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer. »

Il en résulte que les tiers à un contrat sont fondés à invoquer l'exécution défectueuse de celui-ci lorsqu'elle leur a causé un dommage, sans avoir à rapporter d'autres preuves.

L'article 1992 du même code, en son alinéa 1er, dispose que le mandataire répond non seulement du dol, mais encore des fautes qu'il commet dans sa gestion.

M. [V] fait état de ce que la simple lecture de l'acte de propriété - que l'agence immobilière aurait dû se faire transmettre - lui aurait permis de se rendre compte des discordances portant sur le numéro de lot ou encore l'erreur d'étage de la cave et celle tenant à l'adresse exacte du bien.

Il considère que la responsabilité délictuelle de la société intimée est engagée puisqu'elle lui a fait visiter un bien dont la description ne correspond pas à la désignation résultant de l'acte de propriété, et qu'elle a fait reporter ses informations erronées dans la promesse de vente, empêchant la vente au jour prévu.

Il est constant que la cave indiquée dans la promesse de vente comme étant au 3ème sous-sol est en réalité au 6ème sous-sol et que son numéro est le 625 et non le 114. L'appartement est situé à droite et non à gauche, dans le deuxième dégagement (et non le premier). Le studio est désigné comme le « 14 » et non le 21.

Ces erreurs, ne sont cependant pas le fait de l'agence : elles étaient déjà présentes dans l'acte de propriété des vendeurs.

S'agissant du numéro dans la rue, l'acte de propriété mentionne les 4-6 et [Adresse 4], de sorte que le fait d'indiquer le 6 au lieu du 4 est indifférent.

En tout état de cause, il apparaît que M. [V] a personnellement visité le bien litigieux et qu'il n'y avait pas de doute sur la consistance de l'appartement acheté et la cave qui en dépend.

Il n'existe aucun lien de causalité certain entre les imprécisions et inexactitudes relevées et le préjudice allégué ' le paiement des honoraires -, le notaire comme l'acquéreur ont finalement accepté de procéder à l'établissement de l'acte authentique, en connaissance de cause, et ces éléments ressortissent au demeurant de la seule responsabilité du notaire rédacteur de l'acte.

Le jugement déféré sera confirmé en ce qu'il a débouté M. [V] de sa demande de restitution des honoraires.

Sur le préjudice financier

M. [V] fait valoir que compte tenu des discordances dans la désignation du bien, la signature de l'acte authentique a été décalée de six semaines, entraînant un surcoût de 7135, 63 euros, le taux d'intérêt selon proposition reçue le 24 juin 2015 à 2, 15 % ayant été relevé à 2, 40 % dans l'offre signée le 30 septembre 2015.

La cour observe en premier lieu qu'il résulte de la promesse de vente que le bénéficiaire a déclaré qu'il n'entendait pas contracter d'emprunt pour le financement de son acquisition (page 11 de l'acte).

L'appelant expose à ce titre qu'il s'agissait simplement de ne pas faire du prêt une condition suspensive de son engagement. Il ne saurait néanmoins faire peser sur l'intimée les conséquences d'un financement bancaire alors même qu'il avait expressément indiqué qu'il n'entendait pas y recourir.

En tout état de cause, la simulation personnalisée établie le 24 juin 2015 ne présentait aucun caractère contractuel. Elle tient compte en outre d'un prêt « Paris Logement 0 % » qui n'est plus mentionné dans l'offre de prêt finalement acceptée, les conditions ne sont donc pas strictement similaires pour permettre une comparaison pertinente.

Dès lors, le préjudice financier allégué au titre du taux d'intérêt ne revêt aucun caractère certain.

La décision déférée sera confirmée en ce qu'elle a débouté M. [V] de sa demande à ce titre.

Sur le préjudice moral

Les discordances qui subsistent dans l'acte de vente entre l'appartement ' le numéro du studio, l'emplacement notamment - ne sont pas de la responsabilité de la société MARNIER mais du notaire instrumentaire ou de son contractant, qui ne sont pas dans la cause.

Ces discordances étaient connues de M. [V] à la date de signature de l'acte authentique. L'appelant a entendu néanmoins poursuivre la vente ; la société MARNIER relève, sans être utilement démentie, que M. [V] a d'ailleurs commencé l'exécution de travaux, avant la réitération de la vente.

Il n'existe donc aucun lien de causalité direct et certain entre le défaut de conseil et d'accompagnement allégués et le préjudice lié à l'incertitude persistante de la désignation du bien, au regard de la revente éventuelle du bien, de la copropriété ou encore de l'assurance.

La décision sera par conséquent confirmée en ce qu'elle a débouté M. [V] de l'ensemble de ses demandes.

Sur les demandes accessoires

Les condamnations prononcées en première instance au titre des dépens et frais irrépétibles seront confirmées. A hauteur d'appel, M. [V] sera condamné aux dépens mais l'équité commande de laisser à la charge de chacune des parties ses frais irrépétibles.

PAR CES MOTIFS

La Cour, statuant en dernier ressort, contradictoirement et publiquement par mise à disposition de la décision au greffe ;

Confirme le jugement en ses dispositions soumises à la cour ;

Y ajoutant,

Condamne M. [V] aux dépens de l'instance d'appel ;

Déboute les parties du surplus de leurs demandes, y compris au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

LE GREFFIER LA PRÉSIDENTE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 4 - chambre 10
Numéro d'arrêt : 19/19904
Date de la décision : 09/02/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-02-09;19.19904 ?
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