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08/02/2023 | FRANCE | N°19/01045

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 4 - chambre 2, 08 février 2023, 19/01045


Copies exécutoires REPUBLIQUE FRANCAISE

délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS







COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 4 - Chambre 2



ARRET DU 08 FEVRIER 2023



(n° , 8 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 19/01045 - N° Portalis 35L7-V-B7D-B7DEV



Décision déférée à la Cour : Jugement du 04 Décembre 2018 -Tribunal de Grande Instance de PARIS - RG n° 18/09160





APPELANTES



Société STUDIO HARCOURT

SAS immatriculé

e au RCS de Paris sous le numéro 389 202 177

[Adresse 3]

[Localité 4]



Représentée et assistée par Me Olivier LAUDE de l'ASSOCIATION Laude Esquier Champey, avocat au barreau de PARIS, ...

Copies exécutoires REPUBLIQUE FRANCAISE

délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 4 - Chambre 2

ARRET DU 08 FEVRIER 2023

(n° , 8 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 19/01045 - N° Portalis 35L7-V-B7D-B7DEV

Décision déférée à la Cour : Jugement du 04 Décembre 2018 -Tribunal de Grande Instance de PARIS - RG n° 18/09160

APPELANTES

Société STUDIO HARCOURT

SAS immatriculée au RCS de Paris sous le numéro 389 202 177

[Adresse 3]

[Localité 4]

Représentée et assistée par Me Olivier LAUDE de l'ASSOCIATION Laude Esquier Champey, avocat au barreau de PARIS, toque : R144

Société PIERRE ET LOTA

SNC immatriculée au RCS de Paris sous le numéro 803 199 140

[Adresse 3]

[Localité 4]

Représentée et assistée par Me Olivier LAUDE de l'ASSOCIATION Laude Esquier Champey, avocat au barreau de PARIS, toque : R144

INTIME

Monsieur [N] [W]

né le [Date naissance 1] 1969 à [Localité 5] (92)

[Adresse 2]

[Localité 4]

Représenté par Me Bruno REGNIER de la SCP REGNIER - BEQUET - MOISAN, avocat au barreau de PARIS, toque : L0050

Ayant pour avocat plaidant : Me Tiphaine DE PEYRONNET du CABINET PEYRONNET AVOCATS, avocat au barreau de PARIS, toque : C2141

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 16 Novembre 2022, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Madame Muriel PAGE, Conseillère, chargée du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, entendu en son rapport, composée de :

M. Jean-Loup CARRIERE, Président de Chambre

Madame Muriel PAGE, Conseillère

Madame Nathalie BRET, Conseillère

Greffier, lors des débats : Mme Dominique CARMENT

ARRET :

- CONTRADICTOIRE

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par M. Jean-Loup CARRIERE, Président de Chambre, et par Mme Dominique CARMENT, Greffière présente lors du prononcé.

* * * * * * * * * * * * *

FAITS & PROCÉDURE

M. [N] [W] est propriétaire d'un appartement au 2ème étage de l'immeuble sis [Adresse 2]. La SNC Pierre et Lota est propriétaire de l'immeuble mitoyen sis [Adresse 3] loué à la SAS Studio Harcourt depuis le mois de mai 2016.

Outre son activité de photographies artistiques, le studio Harcourt exerce une activité d'événementiel avec organisation de soirées pour les entreprises et les particuliers.

Se plaignant de nuisances sonores créées par le bruit des réceptions et manifestations organisées par le Studio Harcourt, et après vaines tentatives de trouver une solution amiable, M. [W] a saisi le Président du Tribunal de Grande Instance en référé aux fins d'obtenir la désignation d'un expert judiciaire.

Par ordonnance du 13 juin 2017, M. [H] [G] a été désigné avec mission habituelle en la matière. Celui-ci a déposé son rapport le 28 juin 2018.

Par acte d'huissier en date du 28 juillet 2018, M. [W] a assigné la SAS Harcourt et la société Pierre et Lola devant la 8ème chambre du tribunal de grande instance de Paris.

Par jugement du 4 décembre 2018 , le tribunal de grande instance de Paris a :

-condamné in solidum la SAS Studio Harcourt et la SNC Pierre et Lola à effectuer dans leurs locaux des travaux d'isolation acoustique additionnels sur les ouvrants de ses locaux notamment en procédant à leur condamnation durant l'organisation d'événements commerciaux sonorisés de nature à créer des émergences sonores dépassant les valeurs généralement admises par les textes réglementaires soit en émergences 3dB de nuit et 5 dB de jour, conformément à la réglementation en vigueur prévue par le décret du 15 décembre 1998 relatif aux établissements diffusant de la musique amplifiée et par la réglementation du 31 août 2006 relative aux bruits de voisinage avec une étude acoustique en fin de travaux attestant de leur conformité à la réglementation, dans un délai de deux mois à compter de la signification du jugement puis sous astreinte de 3.000 € par jour de retard pendant trois mois jusqu'à justification de la réalisation de l'étude acoustique conforme,

- condamné in solidum la SAS Studio Harcourt et la SNC Pierre et Lola à payer à M. [N] [W] la somme de 31.000 € au titre du préjudice de jouissance,

- débouté M. [N] [W] de l'ensemble de ses autres demandes,

- condamné in solidum la SAS Studio Harcourt et la SNC Pierre et Lola à payer à M. [N] [W] la somme de 10.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné in solidum la SAS Studio Harcourt et la SNC Pierre et Lola aux dépens, y compris les frais d'expertise, supportés par M. [N] [W] à hauteur de 9954,96 € TTC et des frais d'huissier de 866,06 € TTC,

- ordonné l'exécution provisoire.

La SAS Studio Harcourt et la SNC Pierre et Lota ont relevé appel de ce jugement par déclaration remise au greffe le 15 janvier 2019.

La procédure devant la cour a été clôturée le 2 novembre 2022.

PRÉTENTIONS DES PARTIES

Vu les conclusions en date du 31 octobre 2022 par lesquelles la SAS Studio Harcourt et la SNC Pierre et Lota, appelants, demandent à la cour, au visa des articles R.571-25 et suivants, et L.171-8 du code de l'environnement, 1240 du code civil (anciennement 1382) et le décret n°2017-1244 du 7 août 2017 de :

-infirmer le jugement déféré en ce qu'il :

' les a condamnées in solidum à payer à M. [N] [W] les sommes de 31.000 € au titre d'un préjudice de jouissance et de 10.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

' les a condamnées in solidum aux dépens, y compris les frais d'expertise, supportés par M. [N] [W] à hauteur de 9.954,96 € TTC et des frais d'huissier de 866,06 € TTC,

-confirmer le jugement déféré en ce qu'il a débouté M. [N] [W] de l'ensemble de ses autres demandes ;

-juger qu'elles ont respecté l'injonction mise à leur charge aux termes du jugement déféré ;

-débouter en conséquence M. [N] [W] de ses demandes formulées en appel tendant à :

' les voir condamner solidairement à réaliser tous les travaux d'isolation acoustiques prescrits par la société 3dB dans son étude du 16 mai 2017, par M. l'Expert judiciaire [H] [G] dans son rapport d'expertise judiciaire du 28 juin 2018 et par le Tribunal de grande instance dans le jugement entrepris rendu le 4 décembre 2018 (RG n°18/09160),

' voir interdire l'usage de la cour intérieure et des terrasses à toute réception de jour

comme de nuit,

' voir proscrire la musique dans la salle du rez-de-chaussée utilisée comme salle de danse

ou comme salle de concert,

' voir proscrire l'utilisation des caissons de basse dans l'ensemble de l'immeuble appartenant à la société Pierre et Lota et exploité par la société Studio Harcourt,

-débouter M. [N] [W] de sa demande formulée en appel tendant à les voir condamner solidairement à lui payer une somme complémentaire de 14.000 € tendant à l'actualisation du préjudice de jouissance qu'il invoque pour la période comprise entre le 18 décembre 2018 et le 1er mars 2020 ;

-débouter M. [N] [W] de l'ensemble de ses demandes et prétentions ;

-condamner M. [N] [W] à leur verser à chacune la somme de 20.000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile ;

-condamner M. [N] [W] au paiement des entiers dépens ;

Vu les conclusions en date du 19 octobre 2022 par lesquelles M. [N] [W], intimé, demande à la cour, au visa des articles R.133-30 à R. 1334-37, R.1337-6 à R.1337-10 du code de la santé publique, le décret du 15 décembre 1998 relatif aux établissements diffusant de la musique amplifiée, le principe selon lequel nul ne doit causer à autrui un trouble anormal de voisinage le rapport d'expertise de M. [H] [G] du 28 juin 2018, le jugement rendu par le tribunal de grande instance le 4 décembre 2018, de :

-débouter les sociétés Studio Harcourt et Pierre et Lota de l'ensemble de leurs demandes, fins et conclusions ;

-constater que les sociétés Studio Harcourt et Pierre et Lota n'ont pas réalisé l'ensemble des travaux d'isolation acoustique prescrits par la société 3dB, leur acousticien, l'expert judiciaire dans son rapport d'expertise du 28 juin 2018 et par le tribunal de grande instance de Paris dans son jugement du 4 décembre 2018 ;

- confirmer le jugement rendu par le tribunal de grande instance de Paris le 4 décembre 2018 en toutes ses dispositions ;

y ajoutant,

-condamner solidairement les sociétés Studio Harcourt et Pierre et Lota à réaliser tous les travaux d'isolation acoustique prescrits par la société 3dB (acousticien des sociétés Studio Harcourt et Pierre et Lota) dans son étude du 16 mai 2017, par M. [H] [G] (expert judiciaire) dans son rapport d'expertise du 28 juin 2018 et par le tribunal de grande instance dans son jugement du 4 décembre 2018 en faisant :

' isoler le mur mitoyen aux deux autres étages de réception ;

' isoler la gaine technique qui court sur la hauteur du bâtiment en désolidarisant cette gaine technique du mur mitoyen ;

' installer un isolant phonique sur les fenêtres donnant sur la cour intérieure et la rue de Lota ;

' installer un sas entre les cuisines du rez-de-chaussée et la cour intérieure ;

' boucher les cheminées ;

' poser des rideaux lourds devant tous les ouvrants sur rue et sur cour et notamment

devant la baie vitrée de l'entrée de l'immeuble appartenant à la société Pierre et Lota ;

' poser des panneaux d'obstruction sonore amovibles (sandwich bois-masse lourde

doublés d'absorbant) sur les fenêtres du rez-de-chaussée ;

le tout sous une nouvelle astreinte de 3.000 € par jour de retard à compter de la signification de l'arrêt à intervenir et jusqu'à la justification par les sociétés Studio Harcourt et Pierre et Lota de la réalisation de l'ensemble des travaux susvisés et la production d'une étude acoustique conforme ;

-interdire l'usage de la cour intérieure et des terrasses à toute réception de jour comme de nuit ;

-proscrire la musique dans la salle du rez-de-chaussée qui est actuellement utilisée comme salle de danse ou salle de concert ;

-proscrire l'utilisation des caissons de basse dans l'ensemble de l'immeuble appartenant à la société Pierre et Lota et exploité par la société Studio Harcourt ;

-condamner solidairement les sociétés Studio Harcourt et Pierre et Lota à lui payer une somme complémentaire de 14.000 € correspondant à l'actualisation de son préjudice de jouissance pour la période comprise entre le 18 décembre 2018 et le 16 mars 2020 ;

-condamner solidairement les sociétés Studio Harcourt et Pierre et Lota à lui payer une somme supplémentaire en cause d'appel de 20.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens et autoriser la SCP Regnier Bequet Moisan, Avocats à la Cour à les recouvrer dans les conditions de l'article 699 du code de procédure civile ;

SUR CE,

La cour se réfère, pour un plus ample exposé des faits, de la procédure, des moyens échangés et des prétentions des parties, à la décision déférée et aux dernières conclusions échangées en appel ;

En application de l'article 954 alinéa 3 du code de procédure civile, la cour ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif des conclusions ;

Sur les travaux et les demandes formées par M. [N] [W] en appel

Les sociétés Studio Harcourt et Pierre et Lota font valoir qu'elles ont exécuté divers travaux d'isolation acoustiques additionnels (nouvelle cloison acoustique du mur mitoyen, comblement de coffrages, pose de panneaux d'absorption acoustique en plafond), avant même que le jugement déféré ne soit rendu et que la société 3dB a posé un nouveau limiteur sonore et un nouvel enregistreur réglementaire ; que la société Studio Harcourt a installé parallèlement, des détecteurs d'ouverture sur les portes et fenêtres reliés à une centrale permettant la sonorisation du lieu uniquement lorsque les ouvrants sont fermés, et a ôté les poignées des ouvrants donnant sur la cour ; qu'elles ont communiqué un nouveau constat d'huissier attestant des travaux et une étude acoustique établissant la conformité des travaux à la réglementation applicable dans le cadre de la procédure devant le juge de l'exécution ;

Elles précisent que la cour d'appel a infirmé la décision du juge de l'exécution au motif qu'il n'était pas produit une étude d'impact mais une simple note de mesurage, mais qu'il a été constaté l'exécution de l'injonction en ce qui concerne la condamnation des ouvertures lors des événements commerciaux sonorisés ;

Elles ajoutent qu'elles ont fait installer des rideaux antibruits sur les ouvrants, puis suite à l'arrêt du 5 novembre 2020, fait réaliser d'ultimes travaux d'isolation acoustique (pose de nouvelles dalles d'isolation) puis une étude d'impact en fin de travaux remise le 10 février 2021 ;

M. [N] [W] répond que les sociétés Studio Harcourt et Pierre et Lota ne démontrent pas qu'elles ont effectué les travaux additionnels nécessaires sur tous les ouvrants ;

En l'espèce, le jugement déféré n'est pas contesté en ce qu'il a condamné, sous astreinte, in solidum la SAS Studio Harcourt et la SNC Pierre et Lola à effectuer dans leurs locaux des travaux d'isolation acoustique additionnels sur les ouvrants de ces locaux notamment en procédant à leur condamnation durant l'organisation d'événement commerciaux sonorisés de nature à créer des émergences sonores dépassant les valeurs généralement admises par les textes réglementaires soit en émergences 3dB de nuit et 5 dB de jour, conformément à la réglementation en vigueur prévue par le décret du 15 décembre 1998 relatif aux établissements diffusant de la musique amplifiée et par la réglementation du 31 août 2006 relative aux bruits de voisinage avec une étude acoustique en fin de travaux attestant de leur conformité à la réglementation ;

Pour justifier de l'exécution de cette condamnation et ainsi obtenir le débouté des demandes formées en appel par M. [N] [W], les sociétés Studio Harcourt et Pierre et Lota produisent notamment aux débats :

- une étude de la société Delta Security Solutions, dont l'objet est la 'mise en place de détecteurs d'ouverture afin de couper la sono par contact sec si un détecteur serait ouvert puis remise en marche si tous les détecteurs sont fermés', l'équipement proposé est la pose de détecteurs d'ouvertures sur les portes et fenêtres du R-1/RDC/R+1 côté cour (15 détecteurs) afin de les relier à une centrale fournissant un contact sec donnant l'accès à la musique lorsque toutes les portes et fenêtres donnant sur la cour sont fermées, si l'une reste ouverte, la musique ne peut pas se lancer, cette étude est signée par la société Studio Harcourt et prévoit une date d'installation le 15 janvier 2019

- le mandat de prélèvement SEPA complété par la société Studio Harcourt le 11 décembre 2018

- le procès-verbal de constat d'huissier du 26 mars 2019, établissant la mise en place du système informatique permettant de couper automatiquement la musique si une fenêtre ou une porte est ouverte entre 21 heures et 7 heures, et établissant :

- au niveau R-1, la présence d'un capteur d'ouverture et l'absence de poignée qui a été ôtée, sur la fenêtre à double vantaux à droite, et sur la porte à double vitrage desservant la cour intérieure

- dans le studio photo, la présence de panneaux en bois coulissant masquant deux fenêtres à doubles vantaux pourvues de capteur d'ouverture de fenêtre avec des poignées ôtées

- dans le salon de maquillage, la présence d'une fenêtre dépourvue de poignée

- la présence d'une porte qui ne s'ouvre pas dans l'entresol

- au premier étage, la présence d'une porte à double vitrage pourvue d'une capteur d'ouverture de porte, dont la poignée a été ôtée

- dans la salle de restauration, la présence d'une porte pourvue d'une capteur d'ouverture de porte

- dans le studio photo, la présence de rideaux fermés, derrière lesquels se trouve deux fenêtres pourvues de capteurs

- dans le salon de maquillage, la présence d'une porte pourvue d'un capteur

- au deuxième étage, la présence de capteurs dans chacune des 5 fenêtres du mur donnant sur la cour intérieure, dont les poignées ont été ôtées

- dans le backroom, la présence d'une fenêtre pourvue de capteur et absence d'espagnolette

- une étude d'impact de la société 3db du 10 février 2021, établissant que des panneaux sont en place devant les fenêtres de la cour et que le système de coupure du son par détection d'ouverture équipe tous les ouvrants de la cour et est fonctionnel

- la facture du 6 décembre 2019, relative à l'installation de deux rideaux antibruits

- les factures du 19 septembre 2020 et 6 décembre 2020 relatives à la pose de dalles de traitement acoustiques sur nouvelles plaques amovibles pour les fenêtres ;

Il résulte de ces pièces que les travaux additionnels d'isolation des ouvrants des locaux des sociétés Studio Harcourt et Pierre et Lota notamment en procédant à leur condamnation durant l'organisation d'événement commerciaux sonorisés, ont bien été réalisés ;

L'étude d'impact du 10 février 2021 a préconisé des réglages du limiteur en place par bandes de fréquences, ou à défaut une limitation en mode global, ayant constaté que des émergences étaient possibles chez des voisins mitoyens ;

Il résulte de l'intervention (actualisation du réglage) de la société 3dB du 26 février 2021, que les réglages préconisés (limitation en niveau global et par bandes d'octave) ont été réalisés ;

Egalement, l'étude d'impact du 10 février 2021, fait état de ce que tous les ouvrants doivent rester fermés lors des événements nocturnes, que les panneaux doivent rester en place devant les fenêtres de la cour et les rideaux acoustiques déployés ;

Aucune pièce ne vient établir que ces préconisations ne sont pas respectées par les sociétés Studio Harcourt et Pierre et Lota ;

Au surplus, il a été vu que le système de coupure du son fonctionne de 21 heures à 7 heures ;

Selon l'étude d'impact, une fois le limiteur correctement réglé et le certificat émis (un certificat de limitation doit être émis et rester présent dans l'établissement à la disposition des autorités) le Studio Harcourt peut exercer son activité dans le strict respect de la législation sans risque d'émergence illicite pour le voisinage ;

S'agissant des ouvrants en façade, l'étude mentionne cependant expressément que la musique ne doit pas s'entendre de la rue et que lorsque les portes sont ouvertes ou que le bruit de la rue est réduit, l'exploitant doit moduler le niveau sonore de sa sonorisation en conséquence ;

Néanmoins, aucune pièce ne vient établir là encore, que ces préconisations ne sont pas respectées ;

Il sera relevé que dans sa note aux parties n° 3, l'expert n'a préconisé l'installation d'isolants que sur les fenêtres donnant sur la cour ;

Au vu des travaux réalisés, de l'étude d'impact du 10 février 2021 et des réglages effectués le 26 février 2021, il n'y a pas lieu de faire droit à la demande de travaux de M. [N] [W] ;

Egalement, à défaut d'établir que la cour intérieure et les terrasses sont encore utilisées pour des réceptions de jour comme de nuit, la demande d'interdiction formée de ce chef sera rejetée ;

Il en est de même des demandes visant à proscrire la musique dans la salle du rez-de-chaussée ou l'utilisation des caissons de basse dans l'ensemble de l'immeuble, dès lors que les réglages du limiteur de son ont été actualisés ;

Sur l'indemnisation du préjudice de jouissance

A l'appui de leur appel, les sociétés Studio Harcourt et Pierre et Lota font essentiellement valoir que M. [N] [W] n'a démontré ni le nombre de soirées alléguées, ni le dépassement des seuils sonores réglementaires, ni surtout sa présence chez lui lors de ces soirées et ainsi un préjudice personnellement subi ;

L'expert judiciaire a comptabilisé 6,5 soirées en moyenne entre septembre 2017 et mars 2018, soit plus d'une soixantaine de soirées à prévoir sur une saison (dix mois entre septembre et juin), lesquelles se déroulent principalement le mercredi, vendredi et samedi ;

Il a indiqué que la gêne sonore est avérée, que les émergences sonores relevées lors de l'expertise au cours de soirées organisées par le Studio Harcourt sont élevées et fréquentes, qu'elles dépassent les valeurs généralement admises par les textes réglementaires, soit en émergence 3dB de nuit et de 5dB de jour, que les dépassements ont atteint 10 dB ;

Les sociétés Studio Harcourt et Pierre et Lota ne peuvent valablement soutenir que M. [N] [W] ne justifie pas d'un préjudice personnel, alors que son appartement, dans lequel il vit avec son épouse et ses deux enfants est mitoyen du niveau R+1 du Studio Harcourt ;

Sur le nombre de soirées organisées, l'expert a bien précisé en réponse aux dires des parties, que son approche est une évaluation de la moyenne objective sur les mois de la saison 2017-2018 et qu'il a été calculé une moyenne de 6,5 soirées par mois ;

Comme le relève M. [N] [W], les sociétés Studio Harcourt et Pierre et Lota n'ont pas produit de relevés d'émergence mensuels pour la période postérieure à juillet 2018 (pièce 20 des sociétés Studio Harcourt et Pierre et Lota) ;

Dans ces conditions, le jugement déféré sera confirmé en ce qu'il a alloué à M. [N] [W] la somme de 1.000 € par mois sur la période du 26 mai 2016 au 18 décembre 2018, en réparation de son préjudice de jouissance ;

Il résulte de l'étude d'impact produite par les sociétés Studio Harcourt et Pierre et Lota, qu'elles n'ont réalisé les réglages nécessaires pour mettre un terme aux nuisances sonores qu'en février 2021 ;

Il sera fait droit à la demande actualisée en appel de M. [N] [W] et les sociétés Studio Harcourt et Pierre et Lota seront condamnées solidairement à lui payer une somme supplémentaire de 14.000 €, soit 1.000 € par mois sur la période du 18 décembre 2018 au 16 mars 2020 ;

Sur les dépens et l'article 700 du code de procédure civile

Le sens du présent arrêt conduit à confirmer le jugement sur les dépens, en ce compris les frais d'expertise, supportés par M. [N] [W] à hauteur de 9954,96 € TTC et des frais d'huissier de 866,06 € TTC, et l'application qui y a été équitablement faite des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

Les sociétés Studio Harcourt et Pierre et Lota, parties perdantes, doivent être condamnées in solidum aux dépens d'appel ainsi qu'à payer à M. [N] [W] la somme supplémentaire de 5.000 € par application de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel ;

Le sens du présent arrêt conduit à rejeter la demande par application de l'article 700 du code de procédure civile formulée par les sociétés Studio Harcourt et Pierre et Lota ;

PAR CES MOTIFS

LA COUR

Statuant par mise à disposition au greffe, contradictoirement,

Confirme le jugement ;

Y ajoutant,

Déboute M. [N] [W] de ses demandes de travaux outre de voir interdire l'usage de la cour intérieure et des terrasses à toute réception de jour comme de nuit, voir proscrire la musique dans la salle du rez-de-chaussée utilisée comme salle de danse ou comme salle de concert ainsi que l'utilisation des caissons de basse dans l'ensemble de l'immeuble appartenant à la société Pierre et Lota et exploité par la société Studio Harcourt ;

Condamne solidairement les sociétés Studio Harcourt et Pierre et Lota à lui payer la somme supplémentaire de 14.000 € au titre de son préjudice de jouissance ;

Condamne in solidum les sociétés Studio Harcourt et Pierre et Lota aux dépens d'appel qui pourront être recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile, ainsi qu'à payer à M. [N] [W] la somme supplémentaire de 5.000 € par application de l'article 700 du même code en cause d'appel ;

Rejette toute autre demande.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 4 - chambre 2
Numéro d'arrêt : 19/01045
Date de la décision : 08/02/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-02-08;19.01045 ?
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