Copies exécutoires REPUBLIQUE FRANCAISE
délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 4 - Chambre 2
ARRET DU 08 FEVRIER 2023
(n° , 7 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 16/14167 - N° Portalis 35L7-V-B7A-BZETM
Décision déférée à la Cour : Jugement du 10 Juin 2016 -Tribunal de Grande Instance de CRETEIL - RG n° 15/08810
APPELANTE
Madame [W] [D]
née le 07 mai 1934 à [Localité 7]
[Adresse 4]
[Localité 5]
Représentée par Me Rosa BARROSO, avocat au barreau de PARIS, toque : E1838
(bénéficie d'une aide juridictionnelle partielle numéro 2019/053994 du 20/12/2019 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de PARIS)
INTIME
SYNDICAT DES COPROPRIÉTAIRES [Adresse 2] représenté par son syndic, la société CHARDON, SA immatriculée au RCS de Créteil sous le numéro B 421 218 702
C/O Société CHARDON
[Adresse 3]
[Localité 6]
Représenté par Me Marc BOISSEAU de la SELEURL MARC BOISSEAU - avocat au barreau de PARIS, toque : B1193, substitué par Me Carine CHICHE BRACKA, avocat au barreau de PARIS, toque : E0738
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 29 Novembre 2022, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Mme Nathalie BRET, Conseillère, chargée du rapport.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, entendu en son rapport, composée de :
M. Jean-Loup CARRIERE, Président de Chambre
Mme Muriel PAGE, Conseillère
Mme Nathalie BRET, Conseillère
Greffier, lors des débats : Mme Dominique CARMENT
ARRET :
- CONTRADICTOIRE
- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
- signé par M. Jean-Loup CARRIERE, Président de Chambre, et par Mme Dominique CARMENT, Greffière présente lors du prononcé.
* * * * * * * * * * * *
FAITS & PROCÉDURE
Mme [W] [D] est propriétaire des lots n°27 et 41 dans un immeuble régi par le statut de la copropriété situé au [Adresse 2].
Par acte d'huissier en date du 14 août 2015, Mme [W] [D] a assigné le syndicat des copropriétaires du [Adresse 2] représenté par son syndic la société J.J Chardon.
Par jugement du 10 juin 2016, le tribunal de grande instance de Créteil a :
-dit recevable la demande d'annulation de l'assemblée générale du 3 juin 2015,
-débouté Mme [W] [D] de toutes ses demandes,
-débouté le syndicat des copropriétaires de sa demande de dommages et intérêts,
-dit n'y avoir lieu à exécution provisoire,
-condamné Mme [W] [D] à payer au syndicat des copropriétaires la somme de 2.000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile,
-condamné Mme [W] [D] aux dépens.
Mme [W] [D] a relevé appel de ce jugement par déclaration remise au greffe le 28 juin 2016.
Par arrêt du 29 janvier 2020, la cour d'appel de Paris à :
-ordonné la révocation de l'ordonnance de clôture du 23 octobre 2019,
-ordonné le sursis à statuer de l'ensemble des demandes dans l'attente de la décision du bureau d'aide juridictionnelle du tribunal de grande instance de Paris suite au dépôt de la demande de Mme [W] [D] le 23 octobre 2019 dans la procédure l'opposant au syndicat des copropriétaires du [Adresse 2],
-rappelé que la décision de sursis à statuer interrompt le délai de préremption jusqu'à la réalisation des évènements susvisés,
-renvoyé l'affaire à l'audience de mise en état du 19 février 2020 pour envisager la fixation du nouveau calendrier de procédure.
La procédure devant la cour a été clôturée le 26 octobre 2022.
PRÉTENTIONS DES PARTIES
Vu les conclusions en date du 23 septembre 2022 par lesquelles Mme [D] [W], appelante, invite la cour, au visa de la loi du 10 juillet 1965 et du décret du 17 mars 1967 à :
-déclarer Mme [W] [D] recevable et bien fondée en ses demandes,
Confirmer le jugement en ce qu'il a :
-dit recevable la demande d'annulation de l'assemblée générale du 3 juin 2015,
-débouté le syndicat des copropriétaires de sa demande de dommages et intérêts,
Infirmer le jugement en ce qu'il a :
-débouté Mme [W] [D] de toutes ses demandes,
-condamné Mme [W] [D] au paiement d'une indemnité de 2.000 € au titre de l'article 700,
Statuant à nouveau
-prononcer l'annulation de l'assemblée générale ordinaire datée du 3 juin 2015,
-dire que la créance du syndicat à l'encontre de la demanderesse, arrêtée au 30.06.2015 était de seulement 801,34 €,
-ordonner, en conséquence, au Cabinet Chardon, syndic de la copropriété, de corriger ses écritures comptables en ce sens,
-débouter le syndicat des copropriétaires de sa demande d'article 700 formée en première instance,
En tout état de cause
-débouter le syndicat des copropriétaires de sa demande de dommages et intérêts pour procédure abusive,
-débouter le syndicat des copropriétaires de sa demande formée au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
-condamner le syndicat des copropriétaires au paiement d'une somme de 3.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
-le condamner aux entiers dépens ;
Vu les conclusions en date du 27 septembre 2022 par lesquelles le syndicat des copropriétaires du [Adresse 2], intimé, demande à la cour, au visa des articles L213-6 du code de l'organisation judicaire, L121-1 du code des procédures civiles d'exécution de :
Confirmer le jugement en toutes ses dispositions, sauf en ce qu'il :
-s'est déclaré compétent,
-a déclaré les demandes de Mme [D] recevables,
-a débouté le syndicat des copropriétaires de sa demande de dommages et intérêts,
Statuant à nouveau
-se déclarer incompétent au profit du juge de l'exécution du tribunal de grande instance de Créteil pour ce qui concerne 'la régularisation du compte de Mme [D]' concernant les frais contestés par elle au titre de l'exécution du jugement du 4 novembre 2013 rendu par la juridiction de proximité de Charenton,
-déclarer irrecevables les demandes de Mme [D] sur le 'non respect de l'article 10 du décret du 17 mars 1967", ces demandes ne concernant pas de demandes de résolution,
Subsidiairement
-déclarer mal fondées les demandes de Mme [D] et l'en débouter,
Reconventionnellement
-condamner Mme [D] à payer au syndicat des copropriétaires du [Adresse 2] :
1.000 € à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive,
3.000 € au titre de l'article 700 du cpc,
-condamner Mme [W] [D] en tous les dépens ;
SUR CE,
La cour se réfère, pour un plus ample exposé des faits, de la procédure, des moyens échangés et des prétentions des parties, à la décision déférée et aux dernières conclusions échangées en appel ;
En application de l'article 954 alinéa 2 du code de procédure civile, la cour ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif des conclusions ;
Au préalable, il convient de constater que le jugement n'est pas contesté en ce qu'il a débouté Mme [D] de sa demande de condamner la société Chardon, syndic, au paiement de dommages et intérêts ;
Sur la compétence du juge relative à la demande de Mme [D] de dire que la créance du syndicat à l'encontre de la demanderesse, arrêtée au 30.06.2015 était de seulement 801,34 € et d'ordonner, en conséquence, au cabinet Chardon, syndic de la copropriété, de corriger ses écritures comptables en ce sens
Mme [D] sollicite de dire que la créance du syndicat à son encontre, arrêtée au 30 juin 2015, était de seulement 801,34 € et en conséquence d'ordonner au cabinet Chardon, syndic de la copropriété, de corriger ses écritures comptables en ce sens ; cette somme de 801,32 € est composée de l'appel de fonds des 1er et 2ème trimestre 2015 de 763,10 €, qu'elle ne conteste pas, et du solde afférent aux causes du jugement du 4 novembre 2013 qu'elle estime s'élever à 38,24 € (763,10 + 38,24 = 801,32) ; elle conteste le solde des causes du jugement du 4 novembre 2013 calculé par le syndic, en précisant qu'il est différent de celui calculé par l'huissier ; elle estime que le syndic a enregistré au titre du solde une somme de 258,97 €, en retenant à tort la somme de 220,73 € (220,73 + 38,24 = 258,97) qui correspond à des frais de saisie-témoin-serrure que le syndic n'aurait pas dû mettre à sa charge ;
Le syndicat des copropriétaires soulève l'incompétence du tribunal de grande instance au profit du juge de l'exécution du tribunal de grande instance de Créteil, au motif que Mme [D] conteste un compte d'exécution dans le cadre d'un jugement rendu par la juridiction de proximité de Charenton du 4 novembre 2013 et que s'agissant d'un problème d'exécution, seul le juge de l'exécution est compétent par application de l'article L213-6 du COJ et de l'article L121-1 du CPCE ;
Aux termes de l'article L213-6 du code de l'organisation judiciaire, dans sa version applicable au litige, 'Le juge de l'exécution connaît, de manière exclusive, des difficultés relatives aux titres exécutoires et des contestations qui s'élèvent à l'occasion de l'exécution forcée, même si elles portent sur le fond du droit à moins qu'elles n'échappent à la compétence des juridictions de l'ordre judiciaire ...' ;
En l'espèce, il ressort des conclusions de Mme [D] qu'elle conteste la somme 220,73 € enregistrée par le syndic sur son compte au titre d'une des causes du jugement du 4 novembre 2013, en ce qu'elle estime qu'il s'agit de frais de saisie-témoin-serrure qui ne sont pas une cause du jugement à sa charge ;
Ainsi la demande de Mme [D] de dire que la créance du syndicat à l'encontre de la demanderesse, arrêtée au 30.06.2015 était de seulement 801,34 € et d'ordonner, en conséquence, au cabinet Chardon, syndic de la copropriété, de corriger ses écritures comptables en ce sens, s'analyse en une demande de dire que la somme de 220,73 € n'est pas une cause du jugement du 4 novembre 2013 qui doit être mise à sa charge ;
Or, le litige relatif aux sommes constituant les causes du jugement du 4 novembre 2013 relève de la compétence du juge de l'exécution ;
Le jugement doit donc être infirmé en ce qu'il a débouté Mme [D] de sa demande de dire que la créance du syndicat à son encontre arrêtée au 30 juin 2015 était de seulement de 801,34 € et en conséquence d'ordonner au cabinet Chardon, syndic de copropriété, de corriger ses écritures comptables en ce sens ;
Il convient de requalifier la demande de Mme [D] de dire que la créance du syndicat à l'encontre de la demanderesse, arrêtée au 30.06.2015, était de seulement 801,34 € et d'ordonner, en conséquence, au cabinet Chardon, syndic de la copropriété, de corriger ses écritures comptables en ce sens, en une demande de dire que la somme de 220,73 € n'est pas une cause du jugement du 4 novembre 2013 qui doit être mise à sa charge ;
Et il y a lieu de déclarer le tribunal de grande instance incompétent pour statuer sur la demande de Mme [D] de dire que la somme de 220,73 € n'est pas une cause du jugement du 4 novembre 2013 qui doit être mise à sa charge ;
Sur la recevabilité de la demande d'annulation de l'assemblée générale du 3 juin 2015
Le syndicat des copropriétaires soulève l'irrecevabilité de la demande de Mme [D] d'annulation de l'assemblée générale du 3 juin 2015, au motif que le syndic n'était pas tenu d'inscrire à l'ordre du jour les cinq points mentionnés dans le courrier du 28 avril 2015 puisqu'ils ne constituaient qu'une information et non une demande de résolution ;
En l'espèce, les premiers juges ont à juste titre relevé que 'La recevabilité de la demande d'annulation de l'assemblée générale n'est pas conditionnée à la reconnaissance de son bien fondé' ;
En effet, la question de savoir si les cinq points mentionnés dans le courrier du 28 avril 2015 constituaient une information ou une demande de résolution relève du fond et non de la recevabilité de la demande d'annulation de l'assemblée générale ;
En conséquence, le jugement est confirmé en ce qu'il a dit recevable la demande de Mme [D] d'annulation de l'assemblée générale du 3 juin 2015 ;
Sur la demande d'annulation de l'assemblée générale du 3 juin 2015
Mme [D] soutient l'annulation de l'assemblée générale au motif que le syndic n'a pas inscrit à 1'ordre du jour les cinq points contenus dans un courrier adressé à cet effet au syndic le 28 avril 2015 ;
Aux termes de l'article 10 du décret du 17 mars 1967, 'A tout moment, un ou plusieurs copropriétaires, ou le conseil syndical, peuvent notifier au syndic la ou les questions dont ils demandent qu'elles soient inscrites à l'ordre du jour d'une assemblée générale. Le syndic porte ces questions à l'ordre du jour de la convocation de la prochaine assemblée générale ...
Le ou les copropriétaires ou le conseil syndical qui demandent l'inscription d'une question à l'ordre du jour notifient au syndic, avec leur demande, le projet de résolution lorsque cette notification est requise en application des 7° et 8° du I de l'article 11...' ;
Les observations personnelles d'un copropriétaire n'ont pas à être soumises au vote de l'assemblée dès lors qu'elles ne constituent pas de véritables questions ;
En l'espèce, dans le courrier adressé au syndic du 28 avril 2015, Mme [D] précise :
'Voici les points que je souhaite voir ajoutés à l'ordre du jour de la prochaine assemblée générale ordinaire 2015 :
1- Information des copropriétaires concernant un jugement rendu le 4 novembre 2013 entre les parties à la présente instance
Affaire ... Mme [D] a réglé entièrement les causes du jugement auprès de Me [P], huissier de justice
2-Information des copropriétaires concernant les remboursements de l'assurance Recours juridique
Le jugement de l'affaire de Mme [D] remontant au 4 novembre 2013, explication du remboursement de l'assurance juridique dans ce dossier. Concernant le remboursement .... explication de la différence ...
3- Information des copropriétaires sur la procédure Lamy (ancien syndic)
Dans le compte 623002, on peut noter ... condamnation Lamy, information des copropriétaires sur le montant final versé par Lamy
4- Information des copropriétaires concernant le dédommagement obtenu suite à la démolition du pavillon voisin sis au [Adresse 1] ...
5- Information des copropriétaires concernant les travaux réalisés dans la cage d'escalier ...' ;
Il en ressort qu'aucun des cinq points ne constitue une véritable question au sens de l'article 10 précité ; chacun des cinq points est intitulé 'information des copropriétaires' et il ressort de leur contenu que chacun des points est constitué d'informations à l'attention des copropriétaires, incluant notamment des observations personnelles de Mme [D], qui n'ont pas à être soumises au vote de l'assemblée dès lors qu'elles ne constituent pas de véritables questions ;
C'est donc à juste titre que les premiers juges ont considéré que 'le syndic n'avait pas l'obligation d'inscrire à l'ordre du jour ces cinq points qui portaient sur des informations, et non pas sur des projets de résolutions devant être soumises au vote des copropriétaires' ;
Mme [D] ne démontre pas d'irrégularité relative à l'assemblée générale du 3 juin 2015 ;
En conséquence, le jugement est confirmé en ce qu'il a débouté Mme [D] de sa demande d'annulation de l'assemblée générale du 3 juin 2015 ;
Sur la demande de dommages et intérêts pour procédure abusive
En application des dispositions des article 1240 du code civil et 32-1 du code de procédure civile, l'exercice d'une action en justice ne dégénère en abus que s'il constitue un acte de malice ou de mauvaise foi, ou s'il s'agit d'une erreur grave équipollente au dol ; l'appréciation inexacte qu'une partie se fait de ses droits n'est pas constitutive en soi d'une faute ;
Le syndicat des copropriétaires ne rapporte pas la preuve de ce que l'action de Mme [D] aurait dégénéré en abus du droit de former un recours ;
Le jugement doit donc être confirmé en ce qu'il l'a déboutée de sa demande de dommages-intérêts ;
Sur les dépens et l'article 700 du code de procédure civile
Le sens du présent arrêt conduit à confirmer le jugement sur les dépens et l'application qui y a été équitablement faite des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;
Mme [D], partie perdante, doit être condamnée aux dépens d'appel ainsi qu'à payer au syndicat des copropriétaires la somme supplémentaire de 3.000 € par application de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel ;
Le sens du présent arrêt conduit à rejeter la demande par application de l'article 700 du code de procédure civile formulée par Mme [D] ;
PAR CES MOTIFS
LA COUR
Statuant par mise à disposition au greffe, contradictoirement,
Confirme le jugement, excepté en ce qu'il a débouté Mme [D] de sa demande de dire que la créance du syndicat à son encontre arrêtée au 30 juin 2015 était de seulement de 801,34 € et en conséquence d'ordonner au cabinet Chardon, syndic de copropriété, de corriger ses écritures comptables en ce sens ;
Statuant sur le chef réformé et y ajoutant,
Requalifie la demande de Mme [D] de dire que la créance du syndicat à l'encontre de la demanderesse, arrêtée au 30.06.2015 était de seulement 801,34 € et d'ordonner, en conséquence, au cabinet Chardon, syndic de la copropriété, de corriger ses écritures comptables en ce sens, en une demande de dire que la somme de 220,73 € n'est pas une cause du jugement du 4 novembre 2013 qui doit être mise à sa charge ;
Déclare le tribunal de grande instance incompétent pour statuer sur la demande de Mme [D] de dire que la somme de 220,73 € n'est pas une cause du jugement du 4 novembre 2013 qui doit être mise à sa charge ;
Condamne Mme [W] [D] aux dépens d'appel qui seront recouvrés conformément à la loi sur l'aide juridictionnelle, ainsi qu'à payer au syndicat des copropriétaires du [Adresse 2] la somme supplémentaire de 3.000 € par application de l'article 700 du même code en cause d'appel ;
Rejette toute autre demande.
LA GREFFIERE LE PRESIDENT