La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

03/02/2023 | FRANCE | N°17/09713

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 6 - chambre 13, 03 février 2023, 17/09713


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS







COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 13



ARRÊT DU 03 Février 2023



(n° , 5 pages)





Numéro d'inscription au répertoire général : S N° RG 17/09713 - N° Portalis 35L7-V-B7B-B3ZAB



Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 23 Mai 2017 par le Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale de BOBIGNY RG n° 15/00763





APPELANTE

URSSAF [Localité 4] - ILE DE FRANCE

Division des recours amia

bles et judiciaires

[Adresse 7]

[Localité 3]

représentée par M. [O] [G] en vertu d'un pouvoir général





INTIMEE

Société [6] ([6])

[Adresse 1]

[Localité 2]

représentée par Me Xavie...

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 13

ARRÊT DU 03 Février 2023

(n° , 5 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : S N° RG 17/09713 - N° Portalis 35L7-V-B7B-B3ZAB

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 23 Mai 2017 par le Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale de BOBIGNY RG n° 15/00763

APPELANTE

URSSAF [Localité 4] - ILE DE FRANCE

Division des recours amiables et judiciaires

[Adresse 7]

[Localité 3]

représentée par M. [O] [G] en vertu d'un pouvoir général

INTIMEE

Société [6] ([6])

[Adresse 1]

[Localité 2]

représentée par Me Xavier PIGNAUD, avocat au barreau de PARIS, toque : G0739 substitué par Me Nabil BOUBIDAR, avocat au barreau de PARIS

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 29 Novembre 2022, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Monsieur Raoul CARBONARO, Président de chambre, chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Monsieur Raoul CARBONARO, Président de chambre

Monsieur Gilles REVELLES, Conseiller

Monsieur Gilles BUFFET, Conseiller

Greffier : Madame Alice BLOYET, lors des débats

ARRET :

- CONTRADICTOIRE

- prononcé

par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

-signé par Monsieur Raoul CARBONARO, Président de chambre et par Madame Alice BLOYET, greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

La cour statue sur l'appel interjeté par l'URSSAF Île de France d'un jugement rendu le 23 mai 2017 par le tribunal des affaires de sécurité sociale de Bobigny dans un litige l'opposant à la S.A.S.U. [6].

FAITS, PROCÉDURE, PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES :

Les circonstances de la cause ayant été correctement rapportées par le tribunal dans son jugement au contenu duquel la cour entend se référer pour un plus ample exposé, il suffit de rappeler que la S.A.S.U. [6] est une entreprise de distribution du constructeur [5] ; que l'URSSAF Île de France a procédé à l'examen de la situation de la société au regard notamment de l'application de la législation de la sécurité sociale pour la période allant du 1er janvier 2011 au 31 décembre 2013 ; que ce contrôle a donné lieu à l'émission d'une lettre d'observations le 31 octobre 2014 ; que l'URSSAF Île de France a ensuite notifié une décision adminitrative le 16 décembre 2014 ; que la S.A.S.U. [6] a saisi la commission de recours amiable le 18 février 2015 puis le tribunal des affaires de sécurité sociale le 17 avril 2015.

Par jugement du 23 mai 2017, le tribunal a :

dit l'action de la S.A.S.U. [6] recevable;

dit celle-ci partiellement bien fondée ;

débouté la S.A.S.U. [6] de sa demande de communication du rapport de contrôle ;

infirmé le rejet explicite de la commission de recours amiable de l'URSSAF Île de France du 5 octobre 2016 confirmant la décision administrative du 16 décembre 2014 ;

annulé la décision administrative du 16 décembre 2014 confirmant la lettre d'observations pour l'avenir portant sur les avantages en nature : produits de l'entreprise suite au contrôle réalisé pour la période allant du 1er janvier 2011 au 31 décembre 2013 ;

dit n'y avoir lieu à l'application de l'article 700 du code de procédure civile ;

rejeté toutes conclusions plus amples ou contraires ;

ordonné l'exécution provisoire du jugement et ce pour toutes ses dispositions.

Le jugement a été notifié par lettre recommandée avec demande d'accusé de réception remise le 19 juin 2017 à l'URSSAF Île de France qui en a interjeté appel par lettre recommandée avec demande d'accusé de réception adressée le 17 juillet 2017.

Par arrêt du 11 mars 2022, la cour a infirmé le jugement et enjoint à l'URSSAF Île de France de communiquer à la S.A.S.U. [6] le procès-verbal de contrôle avec la date de sa transmission, dans le mois de la notification de l'arrêt.

Par renvoi à ses conclusions écrites visées et développées oralement lors de la précédente audience, l'URSSAF Île de France demande à la cour de :

la recevoir en son appel et le dire bien fondé ;

infirmer le jugement déféré ;

confirmer les observations pour l'avenir et la décision administrative du 16 décembre 2014 ;

condamner la société au paiement de la somme de 5 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Par renvoi à ses conclusions écrites soutenues oralement et déposées lors de la précédente audience par son conseil, la société, renonçant à ses moyens de forme, demande à la cour, de :

confirmer le jugement en ce qu'il a annulé la décision administrative du 16 décembre 2014, portant sur les « avantages en nature: produits de l'entreprise » et,

en tout état de cause, condamner l'URSSAF au paiement de la somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.

Pour un exposé complet des prétentions et moyens des parties, la cour renvoie à leurs conclusions écrites visées par le greffe à l'audience du 29 novembre 2022 qu'elles ont respectivement soutenues oralement.

SUR CE :

L'URSSAF Île de France expose que les inspecteurs du recouvrement ont relevé que les salariés de la S.A.S.U. [6] qui souhaitent acquérir un véhicule [5] et qui le financent à travers la filiale crédit/banque du groupe, bénéficient d'une réduction d'une part sur le taux d'intérêt, et d'autre part sur le tarif de l'assurance, par rapport aux taux d'intérêt et tarifs ; qu'estimant que la tolérance ministérielle était d'application stricte et ne pouvait concerner que les produits et services réalisés par l'entreprise elle-même, les inspecteurs ont informé la société contrôlée que les réductions accordées par les autres entités du groupe devront faire l'objet à l'avenir, d'une réintégration dans l'assiette des cotisations ; que cette observation a été confirmée par décision administrative du 16 décembre 2014 ; que, résultant de l'appartenance de la société à un même groupe, les avantages litigieux sont attribués en contrepartie ou à l'occasion du travail, de sorte qu'ils sont susceptibles d'entrer dans l'assiette des cotisations et contributions dues par la société.

La S.A.S.U. [6] expose que la circulaire DSS/SDFSS/5B n° 2003-07 du 7 janvier 2003, publiée au Bulletin officiel du Ministère des affaires sociales, du travail et de la solidarité n° 2003-4 du 8 février 2003 et que la circulaire DSS/SDFSS/5B n° 2005-389 du 19 août 2005, publiée au Bulletin officiel du Ministère de la santé et des solidarités n° 2005-9 du 15 octobre 2005, n'abordent pas la question, fort spécifique, des réductions tarifaires accordées sur les produits d'un groupe de sociétés. Pour autant, force est de reconnaître que ces textes n'excluent pas expressément leur application à une telle hypothèse ; qu'en principe, seules les rémunérations ou avantages versés par l'employeur à ses propres salariés sont susceptibles d'entrer dans l'assiette de calcul de ses cotisations sociales ; que cependant, la Cour de cassation déroge à ce principe en affirmant que l'assiette des cotisations sociales d'une entreprise peut intégrer les sommes ou avantages alloués à ses salariés par une autre entreprise, dès lors qu'ils leurs sont octroyés en raison de leur appartenance à la première entreprise ; qu'en d'autres termes, l'employeur va payer des charges sociales sur des sommes et avantages, alloués par des tiers, à ses salariés, comme s'il les avait lui-même accordés ; que dès lors, il convient d'en tirer toutes les conséquences et d'appliquer aux sommes et avantages provenant de l'entreprise tierce, l'ensemble des règles afférentes aux cotisations sociales, y compris les exceptions et tolérances ; qu'il serait complètement incohérent qu'une société qui alloue des avantages aux salariés d'une entité qui appartient au même groupe puisse exclure de l'assiette des charges ces avantages en tant que frais professionnels ou frais d'entreprise, de la même façon que s'il s'agissait de ses propres salariés mais ne puisse pas leur accorder des réductions tarifaires, dans le cadre de la tolérance administrative ; que la Cour de cassation n'indique nullement que la tolérance instituée par la circulaire du 7 janvier 2003 devrait être écartée mais seulement que les avantages concernés devaient être assujettis à cotisations.

Il résulte de la lettre d'observations du 31 octobre 2014 que les salariés de [5] qui souhaitent acquérir un véhicule [5], et qui le financent à travers la filiale crédit/banque du groupe, bénéficient d'une réduction d'une part sur le taux d'intérêts et d'autre part sur le tarif de l'assurance, par rapport aux taux d'intérêts et tarifs d'assurance automobile proposés aux clients. La tolérance administrative dont l'URSSAF fait application concernant les réductions tarifaires est d'interprétation stricte. Elle concerne les biens et services produits ou commercialisés par l'entreprise qui emploie le salarié et exclut les produits ou services vendus par d'autres sociétés du groupe. Aussi, les remises sur le prix des produits ou services vendus par d'autres société du groupe constituent des avantages en nature à soumettre à cotisations, conformément à la jurisprudence Calor.

Le 16 décembre 2014, l'inspecteur du recouvrement a maintenu sa position.

L'article L. 242-1 alinéa 1er du code de la sécurité sociale, seul applicable au litige, dans ses rédactions en vigueur lors de la période contrôlée, disposait que:

« Pour le calcul des cotisations des assurances sociales, des accidents du travail et des allocations familiales, sont considérées comme rémunérations toutes les sommes versées aux travailleurs en contrepartie ou à l'occasion du travail, notamment les salaires ou gains, les indemnités de congés payés, le montant des retenues pour cotisations ouvrières, les indemnités, primes, gratifications et tous autres avantages en argent, les avantages en nature, ainsi que les sommes perçues directement ou par l'entremise d'un tiers à titre de pourboire. »

Il résulte de ce texte que les avantages en nature attribués en contrepartie ou à l'occasion du travail sont compris dans l'assiette des cotisations de sécurité sociale et d'allocations familiales.

En l'espèce, résultant de l'appartenance de la société à un même groupe, les avantages litigieux résultant des réductions commerciales ou tarifs préférentiels accordés par la société employeur à ses salariés sont attribués à ceux-ci en contrepartie ou à l'occasion du travail, de sorte qu'ils sont susceptibles d'entrer dans l'assiette des cotisations et contributions dues par la société.

Par ailleurs, la tolérance administrative instituée par la circulaire n°2003/07 du 7 janvier 2003 dérogatoire au principe légal selon lequel les avantages en nature sont soumis à cotisations, est nécessairement d'interprétation stricte et ne saurait inclure les biens et services produits ou commercialisés par d'autres sociétés que celle qui emploie le salarié, quand bien même ces dernières appartiennent au même groupe (2ème Civ, 5 novembre 2015, n° 14-25.294 ; 2ème Civ, 24 novembre 2016, n° 15-25.608).

Il importe peu en la matière que l'article L 136-1-1du code de la sécurité sociale, disposant en son II 8° en vigueur depuis le 1er mars 2021 que « l'assiette de la contribution inclut notamment (') Dans la limite du seuil de revente à perte, tel que défini à l'article L. 442-5 du code de commerce, les réductions tarifaires jusqu'à 50 % du prix de vente public normal, toutes taxes comprises, dont bénéficient les salariés sur les produits initialement destinés à la vente mais qui ne peuvent pas ou ne peuvent plus être vendus par l'entreprise qui les emploie ou par toute entreprise du groupe auquel ils appartiennent, le groupe étant entendu au sens de l'article L. 2331-1 du code du travail », ait prévu que cette réduction spécifique et bien précise en raison de sa finalité dont bénéficient les salariés visés par ce texte, s'applique « aux produits vendus par l'entreprise qui les emploie ou par toute entreprise du groupe auquel ils appartiennent »,.

Il s'en déduit que les remises accordées aux salariés de la société contrôlée sur des produits ou services commercialisés par les autres sociétés de [5] constituent des avantages soumis à cotisations ; seules les remises tarifaires ou les réductions inférieures ou égales à 30% concernant les produits ou services commercialisés uniquement par la S.A.S.U. [6] ne constituent pas un avantage en nature soumis à cotisations et contributions sociales.

La société sera donc déboutée de toutes ses demandes et l'observation pour l'avenir validée.

La S.A.S.U. [6] sera condamnée à payer à l'URSSAF Île de France une somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel.

PAR CES MOTIFS :

La Cour,

CONFIRME l'observation pour l'avenir relatif à l' Evaluation de l'avantage en nature : « Produits de l'entreprise » formulée par l'URSSAF Île de France par lettre d'observations du 31 octobre 2014 ;

DÉBOUTE la S.A.S.U. [6] de ses demandes ;

CONDAMNE la S.A.S.U. [6] à payer à l'URSSAF Île de France la somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel ;

CONDAMNE la S.A.S.U. [6] aux dépens d'appel.

La greffière, Le président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 6 - chambre 13
Numéro d'arrêt : 17/09713
Date de la décision : 03/02/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-02-03;17.09713 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award