RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 1 - Chambre 10
ARRÊT DU 02 FÉVRIER 2023
(n° , 5 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général :
N° RG 22/06541 - N° Portalis 35L7-V-B7G-CFR4C
Décision déférée à la cour :
Jugement du 10 mars 2022-Juge de l'exécution de PARIS-RG n° 18/00088
APPELANTE
CAISSE DE CRÉDIT MUTUEL DES PROFESSIONS DE SANTÉ [Localité 9]
[Adresse 1]
[Localité 6]
représentée par Me Isabelle SIMONNEAU de la SELEURL IS AVOCAT, avocat au barreau de PARIS, toque : D0578
INTIMÉS
Madame [M] [T] épouse [X]
[Adresse 5]
[Localité 8]
n'a pas constitué avocat
Monsieur [H] [X]
[Adresse 5]
[Localité 8]
n'a pas constitué avocat
Monsieur [B] [W]
[Adresse 2]
[Localité 8]
n'a pas constitué avocat
Madame [C] [K] épouse [W]
[Adresse 2]
[Localité 8]
n'a pas constitué avocat
Monsieur [S] [Y]
[Adresse 4]
[Localité 7]
n'a pas constitué avocat
S.A. BNP PARIBAS
[Adresse 3]
[Localité 6]
Représentée par Me Béatrice LEOPOLD COUTURIER de la SELARL PUGET LEOPOLD COUTURIER, avocat au barreau de PARIS, toque : R029
COMPOSITION DE LA COUR
L'affaire a été débattue le 4 janvier 2023, en audience publique, devant la cour composée de :
Madame Bénédicte PRUVOST, président de chambre
Madame Catherine LEFORT, conseiller
Monsieur Raphaël TRARIEUX, conseiller
qui en ont délibéré, un rapport a été présenté à l'audience par Monsieur Raphaël TRARIEUX, conseiller, dans les conditions prévues par l'article 804 du code de procédure civile.
GREFFIER lors des débats : Monsieur Grégoire GROSPELLIER
ARRÊT
-défaut
-par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
-signé par Madame Bénédicte PRUVOST, président de chambre et par Monsieur Grégoire GROSPELLIER, greffier présent lors de la mise à disposition.
*****
La Caisse de crédit mutuel des professions de santé de [Localité 9] a procédé à la saisie réelle d'un immeuble sis [Adresse 5] appartenant à M. et Mme [X]. Un jugement d'orientation en vente forcée sera rendu le 7 juin 2018 par le juge de l'exécution de Paris et confirmé par la présente Cour le 7 février 2019.
Par jugement en date du 10 octobre 2019, qui sera publié le 27 janvier 2021, le juge de l'exécution de Paris a prononcé l'adjudication, au bénéfice de M. et Mme [W] et pour la somme de 745 000 euros, dudit immeuble. Mme [Y] a formé une surenchère et a été déclarée adjudicataire pour la somme de 819 500 euros, mais la nullité de ladite adjudication a été prononcée, motif pris de ce que l'attestation visée aux articles R 322-41 et R 322-46 du code des procédures civiles d'exécution n'avait pas été produite. La Caisse de crédit mutuel des professions de santé de [Localité 9], en sa qualité de créancier poursuivant, a établi un projet de distribution qui a été contesté le 25 août 2021 par la société BNP Paribas.
Par jugement en date du 10 mars 2022, le juge de l'exécution de Paris a :
- constaté que les frais de justice s'élèvent à 11 270,05 euros ;
- colloqué Maître Bruguier Crespy à hauteur de 11 270,05 euros ;
- colloqué le syndicat des copropriétaires à hauteur de 4 263,94 euros ;
- colloqué la Caisse de crédit mutuel des professions de santé de [Localité 9] à hauteur de 464 367,94 euros ;
- colloqué la société BNP Paribas à hauteur de 265 098,07 euros ;
- dit que l'inscription d'hypothèque judiciaire provisoire prise par la Caisse de crédit mutuel des professions de santé de [Localité 9] le 21 octobre 2010 est caduque, et ordonné sa radiation ;
- ordonné la radiation du commandement valant saisie immobilière en date du 15 décembre 2017 ;
- ordonné l'emploi des dépens en frais de distribution.
Selon déclaration en date du 29 mars 2022, signifiée aux intimés les 9, 12 et 13 mai 2022, la Caisse de crédit mutuel des professions de santé de [Localité 9] a relevé appel de ce jugement.
En ses conclusions notifiées le 7 décembre 2022, et signifiées aux parties défaillantes les 8 et 9 décembre 2022, elle a exposé :
- que le délai d'un mois édicté à l'article R 332-4 du code des procédures civiles d'exécution pour notifier le projet de distribution n'est pas sanctionné ;
- que sa créance a été fixée par l'arrêt de la Cour d'appel de Paris en date du 7 février 2019 statuant en appel du jugement d'orientation ;
- que la société BNP Paribas, en vertu d'une ordonnance datée du 6 février 2014, avait inscrit une hypothèque judiciaire provisoire sur le bien pour la somme de 237 391,63 euros ; que l'article 2427 du code civil ne s'applique pas ; que l'inscription d'hypothèque judiciaire définitive du 7 juillet 2016 ne peut rétroagir au 24 février 2014 pour la somme de 334 570,80 euros mais uniquement pour celle de 237 391,63 euros, le solde (27 706,44 euros) étant garanti au 7 juillet 2016 ;
- que quant à elle, elle a pris le 21 octobre 2010 une inscription d'hypothèque judiciaire provisoire, et le 17 juin 2014 une inscription d'hypothèque judiciaire définitive, en vertu de deux arrêts de la Cour d'appel de Paris en date des 12 décembre 2013 et 3 avril 2014, en application de l'article 2412 du code civil, la somme de 987 537,21 euros étant ainsi garantie ;
- que seule la caducité de l'inscription du 21 octobre 2010 a été prononcée si bien que la seconde, celle du 17 juin 2014, produit effet pour la somme de 27 706,44 euros ;
- que par ailleurs, elle bénéfice d'une inscription conventionnelle du 27 février 2008, renouvelée le 13 juillet 2021.
La Caisse de crédit mutuel des professions de santé de [Localité 9] a demandé à la Cour d'infirmer le jugement en ce qu'il a colloqué les créanciers comme indiqué supra et dit que l'inscription d'hypothèque judiciaire provisoire du 21 octobre 2010 est caduque, et de :
- dire que l'inscription d'hypothèque judiciaire définitive du 7 juillet 2016 rectifiée le 20 mars 2014 (sic) se substitue à l'inscription d'hypothèque judiciaire provisoire du 24 février 2014, pour la somme de 237 391,63 euros ;
- dire que la somme de 464 367,94 euros (dont 300 003,02 euros de capital) lui reste due, celle restant à distribuer s'élevant à 265 098,07 euros ;
- colloquer la société BNP Paribas pour la somme de 237 391,63 euros ;
- la colloquer pour le surplus en vertu de l'inscription d'hypothèque judiciaire du 17 juin 2014 rectifiée le 2 juillet 2014 ;
- confirmer le jugement en ce qu'il n'a pas prononcé la caducité du projet de distribution.
Dans ses conclusions notifiées le 8 décembre 2022, la société BNP Paribas a répliqué :
- que le projet de distribution établi par la Caisse de crédit mutuel des professions de santé de [Localité 9] est caduc, faute d'avoir été notifié dans le délai d'un mois édicté à l'article R 322-4 du code des procédures civiles d'exécution ;
- que la Caisse de crédit mutuel des professions de santé de [Localité 9] n'avait pas à être colloquée au titre de son inscription d'hypothèque judiciaire définitive du 17 juin 2014 (laquelle n'avait pas été régularisée sur le fondement de l'article 2412 du code civil) se substituant à l'inscription d'hypothèque judiciaire provisoire du 21 octobre 2010 ; qu'en effet cette inscription d'hypothèque judiciaire définitive n'a pas été formalisée dans les deux mois du prononcé des arrêts des 12 décembre 2013 et 3 avril 2014, comme il est dit à l'article R 533-4 du code des procédures civiles d'exécution, si bien que sa caducité est encourue en vertu de l'article R 533-6 du même code et ce de façon rétroactive ;
- qu'elle se trouve en second rang derrière l'hypothèque conventionnelle du 27 février 2008 prise par la Caisse de crédit mutuel des professions de santé de [Localité 9] ;
- que celle-ci ne conteste plus ses inscriptions ni ses déclarations de créance ; que dans son arrêt statuant en appel du jugement d'orientation cette Cour n'a rien tranché au sujet des collocations ;
- qu'elle a pris une inscription d'hypothèque judiciaire définitive le 7 juillet 2016 se substituant à l'inscription d'hypothèque judiciaire provisoire du 24 février 2014, si bien qu'elle doit être colloquée pour trois ans d'intérêts comme il est dit à l'article 2427 du code civil (sur les années 2018 à 2020, soit 47 359,62 euros).
La société BNP Paribas a demandé à la Cour d'infirmer le jugement en ce qu'il a rejeté la demande de caducité du projet de distribution, et de le confirmer pour le surplus.
Mme [Y], assignée dans les formes de l'article 659 du code de procédure civile, M. et Mme [W], assignés en l'étude de l'huissier de justice instrumentaire, et M. et Mme [X], également assignés en l'étude de l'huissier de justice instrumentaire, n'ont pas constitué avocat.
MOTIFS
Le délai d'un mois édicté à l'article R 332-4 du code des procédures civiles d'exécution, imparti au créancier poursuivant pour notifier le projet de distribution, n'est asssorti d'aucune sanction de sorte qu'il importe peu que la société Caisse de crédit mutuel des professions de santé de [Localité 9] n'ait pas respecté ce délai. Le jugement est confirmé sur ce point.
La société Caisse de crédit mutuel des professions de santé de [Localité 9] soutient dans ses conclusions qu'elle bénéfice d'une inscription conventionnelle du 27 février 2008, renouvelée le 13 juillet 2021, mais il en a été tenu compte dans le projet de distribution ; en effet sa troisième rubrique prévoit qu'en vertu de l'inscription publiée au 11ème bureau des hypothèques de Paris le 27 février 2008 volume 2008 V numéro 488, la société Caisse de crédit mutuel des professions de santé de [Localité 9] peut réclamer utilement la somme à elle due en principal (300 003,02 euros), outre intérêts conventionnels arrêtés au 5 mai 2021 (164 364,92 euros), soit un total de : 464 367,94 euros.
En vertu de l'article R 533-4 du code des procédures civiles d'exécution, la publicité définitive est effectuée dans un délai de deux mois courant selon le cas :
1° Du jour où le titre constatant les droits du créancier est passé en force de chose jugée ;
2° Si la procédure a été mise en 'uvre avec un titre exécutoire, du jour de l'expiration du délai d'un mois mentionné à l'article R. 532-6 ou, si une demande de mainlevée a été formée, du jour de la décision rejetant cette contestation ; toutefois, si le titre n'était exécutoire qu'à titre provisoire, le délai court comme il est dit au 1° ;
3° Si le caractère exécutoire du titre est subordonné à une procédure d'exequatur, du jour où la décision qui l'accorde est passée en force de chose jugée.
Le créancier présente tout document attestant que les conditions prévues ci-dessus sont remplies.
L'article R 533-6 alinéa 1er dispose qu'à défaut de confirmation dans le délai, la publicité provisoire est caduque et sa radiation peut être demandée au juge de l'exécution.
Une décision de justice est passée en force de chose jugée quand elle n'est pas susceptible d'une voie de recours ayant un effet suspensif ; la date à prendre en compte est donc, ainsi que l'a justement considéré le premier juge, celle du prononcé des arrêts de la Cour d'appel de Paris soit les 12 décembre 2013 et 3 avril 2014. Les délais expiraient donc les 12 février et 3 juin 2014. L'inscription définitive du 17 juin 2014 a ainsi été prise hors délai. Le juge de l'exécution a donc estimé à bon droit que l'inscription d'hypothèque judiciaire provisoire était caduque. Par suite l'inscription d'hypothèque judiciaire définitive du 17 juin 2014 ne peut rétroagir, et se trouve primée par l'inscription prise par la société BNP Paribas le 24 février 2014.
Par voie de conséquence la société BNP Paribas doit être colloquée à la quatrième rubrique, en lieu et place de la société Caisse de crédit mutuel des professions de santé [Localité 9], étant rappelé que les trois premières rubriques ne sont pas contestées, au titre de ses créances (355 625,53 euros, 9 334,28 euros et 8 209,49 euros, en ce compris les intérêts sur trois ans comme prévu à l'article 2432 alinéa 1er du code civil), lesquelles absorbent le solde du prix de vente restant à répartir.
La distribution des fonds, telle que prévue dans le jugement et qui n'est autrement contestée par aucune des parties, doit donc recevoir entière application. Ledit jugement est confirmé en l'ensemble de ses dispositions.
La société Caisse de crédit mutuel des professions de santé de [Localité 9] sera condamnée aux dépens d'appel.
PAR CES MOTIFS
- CONFIRME le jugement en date du 10 mars 2022 en l'ensemble de ses dispositions ;
- CONDAMNE la société Caisse de crédit mutuel des professions de santé de [Localité 9] aux dépens d'appel.
Le greffier, Le président,