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02/02/2023 | FRANCE | N°19/08955

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 6 - chambre 7, 02 février 2023, 19/08955


Copies exécutoires REPUBLIQUE FRANCAISE

délivrées le : AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS







COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 7



ARRET DU 02 FEVRIER 2023



(n° , 16 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 19/08955 - N° Portalis 35L7-V-B7D-CAQCC



Décision déférée à la Cour : Jugement du 28 Juin 2019 -Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de PARIS





APPELANTE



Société SAMSIC SECURITE

[Adresse 1]

[Localité 5]r>
Représentée par Me Sofiane HAKIKI, avocat au barreau de PARIS, toque : E1653



INTIME



Monsieur [R] [V]

[Adresse 3]

[Localité 2]

Représenté par Me Benoît PELLETIER, avocat au barreau de...

Copies exécutoires REPUBLIQUE FRANCAISE

délivrées le : AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 7

ARRET DU 02 FEVRIER 2023

(n° , 16 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 19/08955 - N° Portalis 35L7-V-B7D-CAQCC

Décision déférée à la Cour : Jugement du 28 Juin 2019 -Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de PARIS

APPELANTE

Société SAMSIC SECURITE

[Adresse 1]

[Localité 5]

Représentée par Me Sofiane HAKIKI, avocat au barreau de PARIS, toque : E1653

INTIME

Monsieur [R] [V]

[Adresse 3]

[Localité 2]

Représenté par Me Benoît PELLETIER, avocat au barreau de PARIS, toque : R260

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 10 Novembre 2022, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Madame Guillemette MEUNIER, Présidente de chambre et Monsieur Laurent ROULAUD, Conseiller, chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, entendu en son rapport, composée de :

Madame Guillemette MEUNIER, Présidente de chambre

Madame Bérénice HUMBOURG, Présidente de chambre

Monsieur Laurent ROULAUD, Conseiller

Greffier, lors des débats : Madame Joanna FABBY

ARRET :

- CONTRADICTOIRE,

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Madame Guillemette MEUNIER, Présidente de chambre, et par Madame Marie-Charlotte BEHR, Greffière en stage de préaffectation sur poste à laquelle la minute a été remise par le magistrat signataire.

FAITS, PROC''DURE ET PR''TENTIONS DES PARTIES

M. [R] [V] a été engagé par la société Samsic Sécurité (ci-après désignée la société Samsic) par contrat de travail à durée indéterminée à temps plein prenant effet le 24 mai 2011 en qualité d'agent de sécurité sur le site Air France situé à l'aéroport [Localité 5] Charles de Gaulle.

Par avenant prenant effet le 2 janvier 2014, M. [V] a été affecté à l'agence de [Localité 5] de la société.

Par avenant prenant effet le 1er juillet 2015, M. [V] était nommé agent de service sécurité incendie (SSIAP 1) et a été affecté à la tour Link.

Les relations contractuelles étaient soumises à la convention collective des entreprises de prévention et de sécurité.

Par courrier du 6 octobre 2012, la fédération des métiers de la prévention et de la sécurité de l'UNSA (ci-après désignée la FMPS-UNSA) a informé la société Samsic de la désignation de M. [V] en qualité de délégué syndical au sein de l'entreprise.

Considérant notamment que l'accord d'entreprise du 26 juin 2003 relatif à l'aménagement et à la réduction du temps de travail modifié par l'avenant du 8 janvier 2004 lui était inopposable et qu'il faisait l'objet d'une discrimination syndicale, M. [V] a saisi le conseil de prud'hommes de Paris le 10 mars 2014 aux fins d'obtenir la condamnation de la société Samsic au paiement de diverses sommes de nature salariale et indemnitaire. Le syndicat Sud prévention sécurité privée, devenu le syndicat Sud sécurité privé, est intervenu à l'instance et a sollicité de l'employeur la somme de 1.000 euros à titre de dommages-intérêts.

Par courrier du 31 janvier 2015, le syndicat Sud prévention sécurité privée a informé la société Samsic de la désignation de M. [V] en qualité de représentant de sa section syndicale.

Par jugement du 28 juin 2019, le conseil de prud'hommes a :

Déclaré l'accord d'entreprise relatif à l'aménagement et à la réduction du temps de travail du 26 juin 2003 et l'avenant à cet accord du 8 janvier 2004 inopposables à M. [V],

Condamné la société Samsic à verser à M. [V] les sommes suivantes :

- 7.380,16 euros au titre des heures supplémentaires,

- 738,01 euros au titre des congés payés afférents,

- 2.000 euros à titre de dommages-intérêts pour repos compensateurs non pris,

- 1.500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

Débouté M. [V] de ses autres demandes,

Ordonné l'exécution provisoire,

Débouté le syndicat Sud sécurité privé de ses autres demandes,

Débouté la société Samsic de sa demande d'article 700 du code de procédure civile,

Condamné la société Samsic aux entiers dépens.

Sous le n°RG 19/08955, la société Samsic a interjeté appel du jugement le 7 août 2019.

Sous le n° RG 19/08611, M. [V] a interjeté appel du jugement le 19 août 2019.

Le 12 novembre 2020, le conseiller de la mise en état a prononcé la jonction des deux procédures.

Selon ses conclusions transmises par la voie électronique le 17 février 2020, la société Samsic demande à la cour de :

Infirmer le jugement en ce qu'il :

- a déclaré l'accord d'entreprise relatif à l'aménagement et à la réduction du temps de travail du 26 juin 2003 et l'avenant à cet accord du 08 janvier 2004 inopposables à M. [V],

- l'a condamnée à verser à M. [V] les sommes suivantes : 7.380,16 euros au titre des heures supplémentaires sur la période du 1er juillet 2013 au 30 novembre 2018; 738,01 euros au titre des congés payés afférents; 2.000 euros à titre de dommages-intérêts pour repos compensateurs non pris et 1.500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- l'a déboutée de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- l'a condamnée aux entiers dépens,

Confirmer le jugement en ce qu'il a débouté M. [V] de ses autres demandes,

Et statuant à nouveau,

Dire et juger que l'accord d'entreprise relatif à l'aménagement et à la réduction du temps de travail du 26 juin 2003 et l'avenant à cet accord du 08 janvier 2004 sont opposables à M. [V],

Débouter M. [V] de l'intégralité de ses demandes à son encontre,

Condamner M. [V] à lui verser la somme de 1.200 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

Condamner M. [V] aux entiers dépens.

Selon ses conclusions transmises par la voie électronique le 5 juillet 2022, M. [V] demande à la cour de :

Juger recevables et bien fondées ses demandes,

Confirmer le jugement en ce qu'il a :

- jugé inopposables l'accord d'entreprise relatif à l'aménagement et à la réduction du temps de travail du 26 juin 2003 et son avenant du 8 janvier 2014 en vigueur au sein de la société Samsic,

- condamné la société Samsic à lui verser les sommes suivantes : 7.380,16 euros au titre des heures supplémentaires sur la période du 1er juillet 2013 au 30 novembre 2018; 738,01 euros au titre des congés payés afférents; 2.000 euros à titre de dommages-intérêts pour repos compensateurs non pris et 1.500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

Y ajoutant,

Condamner la société Samsic à lui verser :

- 5.312,46 euros au titre des heures supplémentaires (décompte arrêté au 18/09/2022),

- 531,25 euros au titre des congés payés afférents.

Infirmer le jugement en ce qu'il l'a débouté de sa demande de dommages-intérêts au titre de la discrimination syndicale subie,

Et statuant à nouveau,

Juger qu'il a fait l'objet d'une discrimination syndicale,

Annuler la sanction qui lui a été notifiée le 10 janvier 2018,

Condamner la société Samsic à lui verser les sommes suivantes :

- 20.000 euros à titre de dommages-intérêts en réparation du préjudice subi,

- 3.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

Débouter la société Samsic de toutes ses demandes, fins et conclusions contraires,

Dire et juger que l'intégralité des sommes précédemment exposées produira des intérêts au taux légal avec capitalisation à compter de la saisine du conseil de Prud'hommes,

Condamner la société Samsic aux entiers dépens.

Le syndicat Sud sécurité privé qui était partie intervenante en premier instance n'est pas dans la cause d'appel.

Pour un exposé des moyens des parties, la cour se réfère expressément aux conclusions transmises par la voie électronique.

L'instruction a été déclarée close le 7 septembre 2022.

MOTIFS :

Sur l'opposabilité au salarié de l'accord d'entreprise du 26 juin 2003 modifié par avenant du 8 janvier 2004 :

M. [V] demande la confirmation du jugement en ce qu'il a dit que l'accord d'entreprise du 26 juin 2003 modifié par avenant du 8 janvier 2004 lui étaient inopposables. Il se fonde principalement sur un courrier du 31 août 2015 par lequel l'inspection du travail a estimé que l'accord et son avenant n'étaient pas conformes à la réglementation du travail au moment de leur signature aux motifs que : 's'agissant de l'organisation par cycles, l'ancien article L. 3122-3 du code du travail ouvrait effectivement la possibilité de mise en place d'une organisation du travail par cycles par accord collectif d'entreprise mais à la condition que celui-ci fixe la durée maximale du cycle. Une telle indication, déterminante pour fixer le cadre de décompte de rémunération des heures de travail, ainsi que pour permettre une visibilité des horaires des salariés, ne figure pas dans cet accord le rendant ainsi inopposable aux salariés'.

En défense, l'employeur considère que l'accord et son avenant sont réguliers et que la durée maximale du cycle se déduit, d'une part, des dispositions des articles L. 3122-9 et L. 3122-11 du code du travail et, d'autre part, de l'article 9.3 de l'accord du 26 juin 2003 modifié.

***

L'article L. 212-7-1 du code du travail, dans sa version applicable au présent litige, devenu articles L. 3122-2, L. 3122-3 et L. 3122-5 du code du travail, dispose que :

'La durée du travail de l'entreprise ou de l'établissement peut être organisée sous forme de cycles de travail dès lors que sa répartition à l'intérieur d'un cycle se répète à l'identique d'un cycle à l'autre.

Les cycles de travail dont la durée est fixée à quelques semaines, peuvent être mis en place:

1° dans les entreprises qui fonctionnent en continu,

2° lorsque cette possibilité est autorisée par décret ou prévue par une convention ou un accord collectif étendu ou une convention ou un accord d'entreprise ou d'établissement qui doit alors fixer la durée maximale du cycle.

Lorsque sont autorisés les cycles de travail, seules sont considérées comme heures supplémentaires [...] celles qui dépassent la durée moyenne de trente-cinq heures calculée sur la durée du cycle de travail'.

Les articles du code du travail prévoyant des aménagements du temps de travail par cycles ont été abrogés par la loi n° 2008-789 du 20 août 2008 portant rénovation de la démocratie sociale et réforme du temps de travail.

Toutefois, l'article 20.V de cette loi prévoit que : 'Les accords conclus en application des articles L. 3122-3, L. 3122-9, L. 3122-19 et L. 3123-25 du code du travail (...) dans leur rédaction antérieure à la publication de la présente loi restent en vigueur'.

Dès lors, les accords concluent antérieurement au 21 août 2008, date de publication de la loi du 20 août 2008 précitée, continuent à trouver application après cette première date mais uniquement s'ils sont réguliers au regard des règles applicables à l'époque de leur signature.

Le 26 juin 2003, un accord d'entreprise relatif à l'aménagement et la réduction du temps de travail, dont il n'est pas contesté qu'il s'applique également à la société Samsic, a été conclu entre la société Novap et les organisations syndicales.

Cet accord a été modifié par l'avenant du 8 janvier 2004 qui distingue deux régimes :

- celui applicable au personnel dont le temps est organisé avec des cycles et qui est prévu aux articles 8.1 à 8.5 de l'accord modifié,

- celui applicable au personnel travaillant sur site sans cycle de travail et qui est prévu aux articles 9.1 à 9.7 de l'accord modifié.

Le contrat de travail du salarié stipule que 'la durée mensuelle de travail est de 151,67 heures, effectuées selon l'horaire en vigueur dans l'entreprise. Le cas échéant, des heures supplémentaires pourront vous être demandées, en fonction des nécessités de l'entreprise et dans le cadre des dispositions légales et conventionnelles en vigueur'.

Les avenants au contrat de travail versés aux débats ne modifient pas ces stipulations.

Il ressort des écritures des parties et des plannings individuels produits que, bien que le contrat de travail ne le mentionne pas, la durée du travail de M. [V] a été organisé sous forme de cycles de travail et ceux-ci sont donc régis par les articles 8.1 et suivants de l'accord du 26 juin 2003 modifié.

L''article 8.1 de cet accord stipule :

'Le travail est organisé sous la forme de cycles à l'exception du personnel de sécurité incendie travaillant, selon le site d'affectation, en vacations de douze heures à raison de 1 600 heures par an, et du personnel du siège social ou rattaché au siège social.

Le cycle sert à organiser la répartition du travail dans des périodes d'une même durée et permet de calculer le déclenchement des heures supplémentaires et l'acquisition des jours de repos RTT.

A l'intérieur d'un cycle, la durée du travail peut être différente d'une semaine à l'autre. De ce fait, pour déterminer s'il y a ou non dépassement de la durée hebdomadaire de 35H00, nous effectuons le calcul indiqué ci-dessous (...).

Le cycle est une période brève, multiple de la semaine, au sein de laquelle la durée du travail est répartie de façon fixe et répétitive, de telle sorte que les semaines comportant des heures au-delà de 35 heures soient strictement compensées au sein du cycle par des semaines comportant une durée hebdomadaire inférieure à cette norme.

La répartition du temps de travail doit se répéter à l'identique d'un cycle à l'autre (...).

Dix jours avant la fin de chaque mois, un planning de travail est remis au personnel (...)'.

Contrairement à l'accord initial du 26 juin 2003, qui indiquait que l'année civile comprend treize cycles, ce dont il pouvait être déduit que chaque cycle couvrait une durée maximale et unique de quatre semaines pour une année de 52 semaines, les articles 8.1 et suivants de l'accord modifié par l'avenant du 8 janvier 2004 ne mentionnent plus cette précision et ne comportent par ailleurs aucune stipulation prévoyant la durée maximale du cycle alors que, comme il a été dit précédemment, l'article L. 212-7-1 du code du travail impose à l'accord d'entreprise de fixer cette durée.

En défense, en premier lieu, c'est en vain que l'employeur invoque les dispositions des anciens articles L. 3122-9 et L. 3122-11 du code du travail qui sont relatifs à la modulation du temps de travail et non à l'organisation de celui-ci par cycles comme en l'espèce.

En second lieu, l'article 9.3. de l'accord du 26 juin 2003 modifié stipule : 'L'absence de cycle de travail ne peut avoir pour effet de déroger à la durée maximale quotidienne du travail et aux durées maximales hebdomadaires fixées à 48h00 de travail effectif par semaine en durée maximale et 46h00 en durée moyenne sur toute période de 12 semaines consécutives'.

La société Samsic soutient que 'ce texte fixe expressément la durée maximale du cycle, laquelle consiste dans les durées maximales quotidiennes et hebdomadaires légales'.

Cependant, comme le soutient utilement le salarié et comme il a été dit précédemment, l'article 9.3 de l'accord du 26 juin 2003 modifié sur lequel la société se fonde ne s'applique qu'au personnel travaillant selon une modulation du temps de travail ne répondant pas à des cycles. Or, en l'espèce, il est constant que la durée du travail de M. [V] est organisée en cycles.

Il se déduit de ce qui précède que l'accord d'entreprise du 26 juin 2003 modifié par l'avenant du 8 janvier 2004 est irrégulier au regard des dispositions de l'article L. 212-7-1 du code du travail dans la mesure où cet accord modifié ne prévoit pas, comme l'impose la loi, la durée maximale du cycle.

Dès lors, l'accord modifié est inopposable au salarié.

Le jugement sera confirmé en conséquence.

Le non-respect des conditions légales du cycle implique que les heures accomplies chaque semaine au-delà de la durée légale sont considérées comme des heures supplémentaires.

Sur les heures supplémentaires :

Aux termes de l'article L. 3171-2, alinéa 1er, du code du travail, lorsque tous les salariés occupés dans un service ou un atelier ne travaillent pas selon le même horaire collectif, l'employeur établit les documents nécessaires au décompte de la durée de travail, des repos compensateurs acquis et de leur prise effective, pour chacun des salariés concernés. Selon l'article L. 3171-3 du même code, dans sa rédaction antérieure à celle issue de la loi n° 2016-1088 du 8 août 2016, l'employeur tient à la disposition de l'inspecteur ou du contrôleur du travail les documents permettant de comptabiliser le temps de travail accompli par chaque salarié. La nature des documents et la durée pendant laquelle ils sont tenus à disposition sont déterminées par voie réglementaire.

Enfin, selon l'article L. 3171-4 du code du travail, en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail accomplies, l'employeur fournit au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié. Au vu de ces éléments et de ceux fournis par le salarié à l'appui de sa demande, le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles. Si le décompte des heures de travail accomplies par chaque salarié est assuré par un système d'enregistrement automatique, celui-ci doit être fiable et infalsifiable.

Il résulte de ces dispositions, qu'en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail accomplies, il appartient au salarié de présenter, à l'appui de sa demande, des éléments suffisamment précis quant aux heures non rémunérées qu'il prétend avoir accomplies afin de permettre à l'employeur, qui assure le contrôle des heures de travail effectuées, d'y répondre utilement en produisant ses propres éléments. Le juge forme sa conviction en tenant compte de l'ensemble de ces éléments au regard des exigences rappelées aux dispositions légales et réglementaires précitées. Après analyse des pièces produites par l'une et l'autre des parties, dans l'hypothèse où il retient l'existence d'heures supplémentaires, il évalue souverainement, sans être tenu de préciser le détail de son calcul, l'importance de celles-ci et fixe les créances salariales s'y rapportant.

Le salarié expose que la durée hebdomadaire de travail stipulée au contrat de travail est de 35 heures.

Pour la période du 1er juillet 2013 au 30 novembre 2018, il sollicite la confirmation du jugement en ce qu'il a condamné l'employeur à lui verser la somme de 7.380,16 euros à titre de rappel de salaire pour les heures supplémentaires accomplies et non rémunérées et de 738,01 euros de congés payés afférents.

Pour la période du 1er décembre 2018 au 18 septembre 2022, non examinée par le conseil de Prud'hommes, M. [V] sollicite la somme de 5.312,46 euros à titre de rappel de salaire pour les heures supplémentaires accomplies et non rémunérées et de 531,24 euros de congés payés afférents.

A l'appui de ses prétentions, le salarié produit :

- ses plannings individuels de travail pour la période du 1er janvier 2013 au 31 mai 2022 (pièces 20 à 24 et 94) mentionnant journalièrement les heures de début et de fin de travail, ainsi que la durée de la journée de travail,

- un décompte mentionnant hebdomadairement le nombre d'heures travaillés et le nombre d'heures supplémentaires bénéficiant d'une majoration de 25% ou de 50%.

M. [V] présente ainsi, à l'appui de sa demande, des éléments suffisamment précis quant aux heures non rémunérées qu'il prétend avoir accomplies afin de permettre à l'employeur, qui assure le contrôle des heures de travail effectuées, d'y répondre utilement en produisant ses propres éléments.

En défense, la société soutient que l'application de l'accord d'entreprise du 26 juin 2003 modifié justifie le fait que le salarié soit soumis à des cycles de travail excluant les demandes salariales soumises à la cour. Elle soutient également que les décomptes du salarié ne prennent pas en compte le temps de pause qui n'est pas du temps de travail effectif et qui ne peut dès lors être pris en compte dans la détermination des heures supplémentaires dues.

En premier lieu, il ressort des développements précédents que l'accord d'entreprise du 26 juin 2003 modifié est inopposable au salarié.

En second lieu, par principe les temps de pause ne sont ni rémunérés, ni pris en compte pour le calcul des heures complémentaires ou supplémentaires. Il en va autrement si pendant ses pauses le salarié est en fait à la disposition de l'employeur et doit se conformer à ses directives sans pouvoir vaquer librement à ses occupations personnelles. Dans ce cas la pause est considérée comme du temps de travail effectif.

M. [V] reconnaît ne pas avoir déduit ses temps de pause de ses décomptes mais soutient qu'il prenait systématiquement sa pause sur son site de travail, revêtu de sa tenue, en possession de son émetteur radio et qu'il était amené à répondre immédiatement à toute sollicitation pendant son temps de pause. Il en déduit que son temps de pause était du temps de travail effectif.

A l'appui de ses allégations, il verse aux débats notamment :

- un rapport mentionnant les différentes étapes de sa journée de travail du 4 octobre 2017 ne précisant pas la prise d'une pause,

- ses plannings individuels de travail pour la période du 1er janvier 2013 au 31 mai 2022 n'indiquant aucun temps de pause.

L'employeur ne produit quant à lui aucun élément déterminant, d'une part, les temps de pause du salarié au cours de la période concernée et, d'autre part, le fait que ce temps était aménagé de telle sorte que le salarié n'était plus à sa disposition pendant celui-ci.

Il se déduit de ces éléments que M. [V] était, comme il l'affirme, à la disposition de l'employeur pendant ses temps de pause, ce que la société ne conteste pas formellement dans ses écritures.

Par suite, les temps de pause du salarié sur la période concernée s'analysent en du temps de travail effectif et doivent ainsi être pris en compte pour le calcul des heures supplémentaires.

En troisième lieu, il ressort des bulletins de paye versés aux débats que des heures supplémentaires ont été versées au salarié au titre de la période concernée. Toutefois, celles-ci ne seront pas déduites du décompte produit dans la mesure où celui mentionne expressément la déduction de ces heures rémunérées du quantum d'heures supplémentaires sollicité.

Il découle ainsi des pièces produites par les deux parties que M. [V] a bien effectué les heures supplémentaires alléguées qui ne lui ont pas été rémunérées et il sera ainsi intégralement fait droit à ses demandes salariales, précision faite que les sommes allouées sont exprimées en brut.

Sur les dommages-intérêts au titre du préjudice distinct subi du fait du défaut d'information sur le droit à repos compensateur :

M. [V] sollicite la confirmation du jugement en ce qu'il lui a alloué une indemnité de 2.000 euros venant réparer le préjudice subi du fait du défaut d'information par l'employeur sur son droit à prendre un repos compensateur en application de l'article L. 3121-28 du code du travail et en contrepartie des heures supplémentaires effectuées.

En défense, la société expose que M. [V] n'a jamais dépassé le contingent annuel d'heures supplémentaires sur la période concernée par la demande d'heures supplémentaires et qu'il n'avait donc aucun droit à un repos compensateur. Elle en déduit n'avoir inexécuté aucune obligation d'information et sollicite, par voie de conséquence, l'infirmation du jugement et le rejet de la demande indemnitaire du salarié.

Selon l'article L. 3121-28 du code du travail, toute heure accomplie au-delà de la durée légale hebdomadaire ou de la durée considérée comme équivalente est une heure supplémentaire qui ouvre droit à une majoration salariale ou, le cas échéant, à un repos compensateur équivalent.

Les sommes allouées en paiement d'heures supplémentaires ne peuvent réparer le préjudice distinct subi par un salarié du fait du défaut d'information sur son droit à repos compensateur.

Il se déduit de ce qui précède que puisqu'il a été jugé dans les développements précédents que le salarié a accompli des heures supplémentaires qui ne lui ont pas été réglées, l'employeur était en conséquence tenu de l'informer sur son droit à repos compensateur, peu important le fait que le contingent annuel d'heures supplémentaires n'ait pas été dépassé.

Si le salarié établit le manquement de l'employeur à son obligation d'information, il ne justifie en revanche d'aucun préjudice distinct non réparé par le versement des heures supplémentaires allouées par la cour dans les développements précédents.

Par suite, M. [V] sera débouté de sa demande indemnitaire et le jugement sera infirmé en conséquence.

Sur la demande d'annulation de la sanction du 10 janvier 2018 :

* Sur la recevabilité de la demande d'annulation :

La société Samsic soutient, dans la partie discussion de ses écritures, qu'est irrecevable car nouvelle en cause d'appel la demande d'annulation de la mise en garde qu'elle a notifiée au salarié par courrier du 10 janvier 2018. Cette fin de non-recevoir n'est pas reprise dans le dispositif de ses conclusions qui seul saisit la cour en application des dispositions de l'article 954 du code de procédure civile.

Le salarié ne produit aucun argumentaire en défense sur ce point.

Selon l'article 564 du code de procédure civile, à peine d'irrecevabilité relevée d'office, les parties ne peuvent soumettre à la cour de nouvelles prétentions si ce n'est pour opposer compensation, faire écarter les prétentions adverses ou faire juger les questions nées de l'intervention d'un tiers, ou de la survenance ou de la révélation d'un fait.

Selon l'article 566 du code de procédure civile, les parties ne peuvent ajouter aux prétentions soumises au premier juge que les demandes qui en sont l'accessoire, la conséquence ou le complément nécessaire.

Si la société Samsic n'a pas, dans le dispositif de ses dernières conclusions, saisi la cour de la fin-de-non recevoir tirée de l'irrecevabilité de la demande d'annulation de la mise en garde litigieuse, il appartient toutefois au juge d'appel, en application des dispositions de l'article 564 du code de procédure civile, de vérifier d'office si cette demande est nouvelle en cause d'appel et, le cas échéant, de la déclarer irrecevable.

S'il ressort des termes du jugement entrepris que M. [V] n'a pas soumis sa demande d'annulation de la décision litigieuse au conseil de prud'hommes, il résulte toutefois des conclusions d'appel de ce dernier que l'irrégularité de la mise en garde constitue l'un des faits évoqués par le salarié au titre de la discrimination syndicale dont le bien-fondé a été soumis au juge de première instance. Il s'en déduit que la demande d'annulation présentée pour la première fois en cause d'appel est l'accessoire et le complément nécessaire de la demande de dommages-intérêts de M. [V] au titre de la discrimination syndicale.

Par suite, la demande d'annulation de la mise en garde du 10 janvier 2018 est recevable.

* Sur la qualification de sanction disciplinaire de la mise en garde litigieuse :

Par courrier daté du 10 janvier 2018, l'employeur a notifié au salarié une mise en garde pour avoir eu un comportement inapproprié à l'égard d'un client :

'vous intervenez pour le compte de notre société en qualité d'agent des services de sécurité incendie sur le site Les Mercuriales situé à [Localité 4]. A ce titre, vous devez toujours faire preuve de professionnalisme, sérieux et correction. Or, il a été porté à notre connaissance que vous aviez un comportement inapproprié et non professionnel à l'égard de notre client lors de votre vacation du 4 octobre 2017. En effet, ce jour-là, vous avez, à votre initiative, appelé notre client, M. [U], afin de faire le point avec lui sur la porte d'accès de l'escalier n°8 restée ouverte après le passage d'un camion de déménagement. Faisant suite à votre appel, notre client vous a rejoint au poste central de sécurité. Cependant, non content des observations exposées par M. [U], vous avez ensuite refusé tout dialogue et lui avez demandé de s'adresser à votre société s'il avait quelque chose à vous dire. Un tel comportement est d'autant plus inacceptable que c'est à la suite de votre appel que M. [U] s'est déplacé au poste central de sécurité. Nous vous rappelons qu'il vous incombe de faire preuve d'exemplarité et d'adopter une attitude courtoise et professionnelle avec toute personne que vous êtes amenée à côtoyer durant l'exercice de votre mission (...).

Par conséquent, nous tenons par la présente, à vous mettre en garde sur les conséquences de tels agissements. Ce courrier ne constitue pas une sanction disciplinaire mais nous espérons que ces remarques vous fassent prendre conscience de vos responsabilités et occasionnent un changement de comportement de votre part'.

En l'espèce, si ce courrier précise qu'il ne constitue pas une sanction disciplinaire, le juge doit, en application de l'article 12 du code de procédure civile, donner ou restituer leur exacte qualification aux faits et actes litigieux sans s'arrêter à la dénomination que les parties en auraient proposée.

Selon l'article L. 1331-1 du code du travail, constitue une sanction toute mesure dépassant la simple observation verbale prise par l'employeur à la suite d'un agissement du salarié considéré par lui comme fautif, que cette mesure soit de nature à affecter immédiatement ou non la présence du salarié dans l'entreprise, sa fonction, sa carrière ou sa rémunération.

Il ressort des termes du courrier litigieux que l'employeur a reproché au salarié, en les considérant comme fautifs, un comportement inapproprié et non professionnel à l'égard d'un client, en sorte que ce courrier constitue une sanction disciplinaire.

* Sur le bien-fondé de la mise en garde litigieuse :

En application de l'article L.1333-1 du code du travail, en cas de litige, le juge apprécie la régularité de la procédure suivie et si les faits reprochés au salarié sont de nature à justifier une sanction. L'employeur fournit au juge les éléments retenus pour prendre la sanction. Au vu de ces éléments et de ceux qui sont fournis par le salarié à l'appui de ses allégations, le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes mesures d'instruction qu'il estime utiles. Si un doute subsiste, il profite au salarié.

En l'espèce, l'employeur se réfère aux éléments suivants pour justifier le prononcé de la décision litigieuse (concl p. 25 et 30, pièces 7 à 10) :

- un courriel du 27 janvier 2015 par lequel M. [U] responsable d'exploitation de l'entreprise CBRE a indiqué : 'nous constatons que (...) M. [V] (sic) ne (fait) pas preuve d'investissement et (semble) refractaire à l'organisation mise en place (...)',

- un courriel du 26 août 2015 par lequel M. [S] responsable d'agence Samsic a reproché au salarié de lui avoir parlé sur un ton agressif et dédaigneux,

- un courriel du 11 septembre 2015 par lequel Mme [Y] de la société Samsic a indiqué : 'Pour rappel, M. [V] est en conflit avec une dizaine de personnes (ADS, IRP, chargés de clientèle, planificateurs, assistants d'exploitation) qui se plaignent régulièrement de son comportement'.

- un courriel du 11 mai 2016 par lequel Mme [L], bulding manager de l'entreprise CBRE a reproché au salarié d'être arrivé avec trois heures de retard à un rendez-vous.

Toutefois, il est rappelé que la mise en garde litigieuse porte sur le 'comportement inapproprié et non professionnel à l'égard (d'un)client lors de (la)vacation du 4 octobre 2017" du salarié. Or, les éléments produits par employeur sont antérieurs aux faits reprochés à M. [V] et sont dès lors sans lien avec la sanction qui lui a été notifiée en janvier 2018.

Faute de production d'éléments établissant les faits reprochés, la cour considère que ceux-ci ne sont pas établis.

Dès lors, la sanction du 10 janvier 2018 sera annulée.

Sur la discrimination syndicale :

M. [V] sollicite la somme de 20.000 euros à titre de dommages-intérêts pour discrimination syndicale.

La société Samsic s'oppose à cette demande.

L'article L. 1132-1 du code du travail dispose qu'aucun salarié ne peut être sanctionné, licencié ou faire l'objet d'une mesure discriminatoire, directe ou indirecte, telle que définie à l'article 1er de la loi n° 2008-496 du 27 mai 2008 portant diverses dispositions d'adaptation au droit communautaire dans le domaine de la lutte contre les discriminations, notamment en matière de rémunération, de mesures d'intéressement ou de distribution d'actions, de formation, de reclassement, d'affectation, de qualification, de classification, de promotion professionnelle, de mutation ou de renouvellement de contrat en raison de ses activités syndicales.

Sur le terrain de la preuve, il n'appartient pas au salarié qui s'estime victime d'une discrimination d'en prouver l'existence. Suivant l'article L. 1134-1, il doit seulement présenter des éléments de fait laissant supposer l'existence d'une discrimination directe ou indirecte. Au vu de ces éléments, il incombe à l'employeur de prouver que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination. Le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles.

En premier lieu, M. [V] soutient qu'il s'est vu notifier le 10 janvier 2018 une mise en garde.

Il ressort des développements précédents que ce fait est établi.

En deuxième lieu, bien qu'il ait été affecté à la tour Link par avenant prenant effet le 1er juillet 2015, M. [V] reproche à l'employeur de l'avoir affecté en doublon sur un autre site après cette date, puis uniquement sur le site de la tour Nestle du 12 décembre 2015 au 2 janvier 2016 puis, à partir du 5 janvier 2016 sur le site de la tour Mercuriales et sur des sites autres que celui de la tour Link et ce, sans avoir obtenu son accord préalable et alors que, d'une part, par courrier du 16 mars 2016, l'inspection du travail a rappelé à la société que le changement de lieu d'affectation d'un salarié ne pouvait être réalisé qu'avec son accord et, d'autre part, que M. [V] a sollicité sa réaffectation au sein de la tour Link par courriels des 18 mai et 10 juillet 2016.

Il ressort de la production de l'avenant susmentionné, des plannings individuels de travail du salarié, des courriels de ce dernier adressés à l'employeur et du courrier du 16 mars 2016 de l'inspection du travail que ces faits sont établis.

En troisième lieu, M. [V] indique avoir dû saisir en référé le conseil de prud'hommes de Paris le 23 mai 2016 pour obtenir le paiement par l'employeur de ses heures de délégation pour la période de septembre 2015 à avril 2016, ce paiement n'ayant été réalisé qu'en cours d'audience le 20 juin 2016.

La matérialité de ces faits est reconnu par l'employeur dans ses écritures (p.22).

Ils sont dès lors établis.

En quatrième lieu, M. [V] soutient ne jamais avoir bénéficié d'entretien d'évaluation professionnelle au sens de l'article 4 de l'accord du 28 juin 2005 relatif à la formation professionnelle tout au long de la vie, annexé à la convention collective applicable qui stipule:

'Chaque salarié ayant au minimum 2 années d'activité dans une même entreprise bénéficie au moins tous les deux ans, d'un entretien professionnel réalisé par l'entreprise, dans les conditions définies par le chef d'entreprise, après information du comité d'entreprise ou d'établissement ou à défaut, des délégués du personnel.

L'entretien professsionnel a pour finalité de permettre à chaque salarié d'exprimer son projet professionnel à partir de ses souhaits d'évolution dans l'entreprise, de ses aptitudes et, en fonction, de la situation de l'entreprise'.

L'employeur ne conteste pas que ce texte était applicable à M. [V] à compter du 24 mai 2013, date à laquelle le salarié disposait de deux ans d'ancienneté. Toutefois, il soutient que ces entretiens ont eu lieu en se référant à des entretiens dont M. [V] a bénéficiés les 1er juin, 21 août, 11 septembre 2015, ainsi que les 23 mai 2017 et 28 mars et 4 avril 2018 et dont seules les convocations sont versées aux débats.

Comme le soutient le salarié, il ressort des lettres de convocation précitées que les entretiens avaient seulement pour objet de déterminer le lieu d'affectation de ce dernier et non de permettre à celui-ci 'd'exprimer son projet professionnel à partir de ses souhaits d'évolution dans l'entreprise, de ses aptitudes et, en fonction, de la situation de l'entreprise'.

Par suite, il n'est établi ni que les entretiens susmentionnés étaient des entretiens professionnels au sens de l'article 4 de l'accord du 28 juin 2005 ni que de tels entretiens ont été réalisés de manière biannuelle par la société au profit du salarié.

Dès lors, les faits invoqués par le salarié sont établis.

En cinquième lieu, M. [V] reproche à l'employeur d'avoir freiné son évolution professionnelle en ne l'affectant à un poste de chef d'équipe des services de sécurité incendie (SSIAP 2) qu'à compter du 1er septembre 2020 malgré ses nombreuses candidatures à un tel poste depuis septembre 2013 et alors qu'il était titulaire du diplôme de SSIAP 2 depuis le 24 juin 2013.

Ces faits ne sont pas contestés et se déduisent des éléments produits.

En sixième lieu, M. [V] expose être titulaire d'un diplôme SSIAP 1 depuis le 5 novembre 2008 et d'un diplôme SSIAP 2 depuis le 24 juin 2013. Il précise qu'en application de l'arrêté du 2 mai 2005, ces diplômes doivent faire l'objet d'un recyclage triennal et qu'à défaut le salarié doit faire l'objet d'une remise à niveau s'il veut continuer à en bénéficier. Il expose que l'employeur n'a pas fait le nécessaire pour assurer le recyclage de ses diplômes SSIAP 1 et SSIAP 2 avant leur date d'expiration respectivement les 15 mars 2015 et 24 juin 2016, l'obligeant ainsi à une remise à niveau.

Ces faits ne sont pas contestés par l'employeur et sont dès lors établis.

En septième et dernier lieu, le salarié justifie par un échange de mails entre lui et l'employeur que ce dernier ne lui a transmis son attestation de salaire nécessaire à la prise en charge de ses frais médicaux que le 6 septembre 2019 suite à son accident du travail du 13 juillet 2019.

Par suite, ces faits non contestés par l'employeur sont établis.

Il se déduit de ce qui précéde que sont matériellement établis les faits suivants :

- l'employeur a notifié au salarié une mise en garde le 10 janvier 2018,

- l'employeur a changé le lieu d'affectation du salarié à compter du mois de juillet 2015 nonobstant la conclusion d'un avenant stipulant que ce lieu d'affectation était la tour Link,

- M. [V] a saisi en référé le conseil de prud'hommes de Paris le 23 mai 2016 pour obtenir le paiement par l'employeur de ses heures de délégation pour la période de septembre 2015 à avril 2016, ce paiement n'ayant été réalisé qu'en cours d'audience le 20 juin 2016,

- l'employeur n'a pas réalisé les entretiens professionnels biannuels prévus par l'article 4 de l'accord du 28 juin 2005,

- M. [V] n'a été affecté à un poste de SSIAP qu'à compter du 1er septembre 2020 malgré ses nombreuses candidatures à un tel poste depuis septembre 2013 et alors qu'il est titulaire du diplôme de SSIAP 2 depuis le 24 juin 2013,

- l'employeur n'a pas fait le nécessaire pour assurer le recyclage des diplômes SSIAP 1 et SSIAP 2 de M. [V] avant leur date d'expiration respectivement les 15 mars 2015 et 24 juin 2016,

- la société n'a transmis à M. [V] son attestation de salaire nécessaire à la prise en charge de ses frais médicaux que le 6 septembre 2019 suite à son accident du travail du 13 juillet 2019.

Il est constant que ces faits se sont produits alors que le salarié faisait l'objet d'un mandat syndical au sein de l'entreprise.

Par suite, M. [V] établit la matérialité d'éléments de faits laissant supposer l'existence d'une discrimination syndicale au sens des textes précités. Il appartient donc à l'employeur de démontrer que les faits matériellement établis par le salarié sont justifiés par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination.

En premier lieu, il ressort des développements précédents que la sanction du 10 janvier 2018 n'est pas justifiée par une cause objective.

En deuxième lieu, l'employeur soutient qu'il pouvait changer le lieu d'affectation de M. [V] nonobstant les stipulations de l'avenant prenant effet le 1er juillet 2015 mentionnant une affectation sur le site de la tour Link dans la mesure où :

- il s'agissait d'une affectation provisoire, le contrat de travail initial du 24 mai 2011 stipulant que 'le lieu d'exécution de la prestation de travail ne constitue en aucun cas un élément essentiel du contrat de travail. En conséquence le salarié accepte expressément tout changement de lieu de travail nécessité par l'intérêt du fonctionnement de l'entreprise sans que cela ne constitue une modification du contrat de travail selon les modalités suivantes : dans le département du 95 et dans les départements limitrophes',

- l'avenant avait pour principal objet de le nommer SSIAP et non de changer son lieu d'affectation.

En l'espèce, s'il est vrai que le contrat initial de travail comporte la clause de mobilité susmentionnée, il n'en demeure pas moins que l'avenant précité stipule expressément que le lieu d'affectation de M. [V] est le site de la Tour Link, sans mentionner le caractère provisoire de cette affectation.

Or, aucune modification de leur contrat de travail et aucun changement de leurs conditions de travail ne peuvent être imposés aux salariés protégés. Lorsque les salariés contestent leur mutation, il appartient alors à l'employeur soit de demander à l'inspection du travail l'autorisation de les licencier, soit de les maintenir sur le site.

Par suite, l'employeur ne pouvait modifier le lieu d'affectation du salarié stipulé dans l'avenant précité sans l'autorisation préalable du salarié et ce nonobstant les stipulations du contrat initial et le fait que l'avenant avait également pour objet d'affecter M. [V] à un poste SSIAP 1. Par suite, la société ne justifie le changement d'affectation du salarié par aucune cause objective, d'autant que l'inspection du travail lui avait rappelé les règles susmentionnées par courrier précité du 16 mars 2016.

En troisième lieu, l'employeur entend justifier le retard de paiement des heures de délégation du salarié par 'des raisons techniques dues à la nécessité de déclarer ses heures de délégation' sans autre précision. La société semble ici reprocher au salarié d'avoir déclaré tardivement ses heures de délégation.

Toutefois, il ressort du courrier du 26 janvier 2016 produit que M. [V] a réclamé à l'employeur ses heures de délégation pour la période de septembre à décembre 2015. De même, par courrier précité du 16 mars 2016, l'inspection du travail a demandé à l'employeur de régulariser l'absence de paiement des heures de délégation du salarié.

Il s'en déduit que la société ne justifie par aucune cause objective le fait que M. [V] a dû saisir en mai 2016 le juge des référés prudhomal aux fins d'obtenir le versement de ses heures de délégation alors que l'inspection du travail et le salarié l'avaient enjoint de régulariser cette situation plusieurs mois avant la saisine du conseil de prud'hommes.

En quatrième lieu, l'employeur ne justifie par aucune cause objective l'absence d'entretien professionnel au sens de l'article 4 de l'accord du 28 juin 2005 précité.

En cinquième lieu, s'agissant de l'absence d'affectation à un poste de SSIAP 2 entre le 24 juin 2013 (date d'obtention du diplôme de SSIAP 2) et septembre 2020 (date d'affectation à ce poste), l'employeur entend en justifier en invoquant les faits suivants :

- les rejets des candidatures du salarié entre 2013 et 2017 à un poste de SSIAP 2 sont liés à l'absence de poste vacant,

- le salarié n'a pas été traité différemment des autres salariés.

Pourtant, il ressort des éléments produits par M. [V] et notamment du registre d'entrée et de sortie de la société, des plannings collectifs et des offres d'emplois émanant de l'entreprise qu'entre 2013 et 2020, d'une part, plusieurs salariés de la société Samsic ont été affectés à des postes de SSIAP 2 et, d'autre part, que des offres de candidature de SSIAP 2 ont été proposées. De même, lors d'une réunion du 21 août 2014, les délégués du personnel de l'entreprise se sont étonnés que M. [V] n'ait pas obtenu depuis septembre 2013 une affectation conforme à son niveau de formation et ce, bien que depuis cette date des annonces avaient été passées pour recruter des agents possédant une formation équivalente. Par suite, la société ne peut utilement alléguer l'absence de poste vacant de SSIAP 2 pour justifier le rejet des candidatures de M. [V] à un tel poste.

De plus, bien que par courrier du 15 septembre 2017, la société a proposé un poste de SSIAP 2 sur le site des Mercuriales à M. [V] et que par courriel du 22 septembre 2017 ce dernier a informé la société qu'il acceptait ce poste, l'employeur ne l'a pourtant affecté à celui-ci qu'en septembre 2020 sans qu'aucune raison légitime ne soit invoquée dans les écritures de la société pour expliquer ce retard de trois ans.

Il se déduit de ce qui précède que l'employeur ne justifie par aucune cause objective le fait qu'il n'ait pas affecté le salarié à un poste SSIAP 2 au cours de la période concernée.

En sixième lieu, l'employeur soutient qu'il n'était pas tenu de s'assurer du recyclage triennal

- du diplôme SSIAP 1 avant sa date d'expiration le 15 mars 2015 dans la mesure où le salarié n'a été nommé à un tel poste que postérieurement par avenant prenant effet le 1er juillet 2015,

- du diplôme SSIAP 2 avant sa date d'expiration le 24 juin 2016 puisqu'à cette date le salarié n'était pas nommé à un tel poste.

Selon l'article L. 6321-1 du code du travail, l'employeur assure l'adaptation des salariés à leur poste de travail. Il veille au maintien de leur capacité à occuper un emploi, au regard notamment de l'évolution des emplois, des technologies et des organisations.

S'il est vrai que le salarié n'occupait pas les postes correspondant à ses diplômes à la date d'expiration de ceux-ci, il n'en demeure pas moins que, comme il a été dit précédemment, la société Samsic était informé du souhait du salarié d'occuper un poste de SSIAP 2 et du fait que ce dernier bénéficiait des diplômes SSIAP 1 et SSIAP 2.

Par suite, la société était tenue de veiller, conformément à la disposition législative précitée, au maintien de l'employabilité de M. [V] sur les postes de SSIAP et, par voie de conséquence, au recyclage triennal de ses diplômes en application de l'accord du 28 juin 2005 précité.

Il se déduit de ce qui précède que la société Samsic ne justifie par aucune cause objective l'absence de recyclage tiennal des diplômes du salarié avant leurs dates d'expiration.

En septième et dernier lieu, l'employeur ne justifie par aucune cause objective le fait qu'il n'a adressé à M. [V] l'attestation de salaire nécessaire à la prise en charge de ses frais médicaux que le 6 septembre 2019 suite à son accident du travail du 13 juillet 2019.

***

Il résulte de ce qui précède que l'employeur ne démontre pas que les faits susmentionnés et matériellement établis sont justifiés par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination.

Le jugement sera donc infirmé en ce qu'il a retenu que la preuve de la discrimination syndicale n'était pas rapportée.

Compte tenu des circonstances et de la durée de la discrimination et des conséquences dommageables pour M. [V] telles qu'elles ressortent des pièces et des explications fournies, le préjudice en résultant doit être réparé par l'allocation de la somme de 10.000 euros à titre de dommages-intérêts.

Sur les demandes accessoires :

La société Samsic qui succombe partiellement dans la présente instance, doit supporter les dépens de première instance et d'appel. Elle sera condamnée à verser à M. [V] la somme de 3.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile pour la procédure d'appel. Elle sera également déboutée de sa demande sur ce fondement.

PAR CES MOTIFS

La Cour, statuant publiquement par arrêt contradictoire et rendu en dernier ressort, mis à disposition au greffe,

INFIRME le jugement en ce qu'il a :

- débouté M. [V] de sa demande indemnitaire au titre de la discrimination syndicale,

- condamné la société Samsic Sécurité à verser à M. [R] [V] la somme de 2.000 euros à titre de dommages-intérêts pour repos compensateurs non pris,

CONFIRME le jugement pour le surplus, précision faite que les sommes allouées au salarié au titre des heures supplémentaires et des congés payés afférents sont exprimées en brut,

Statuant à nouveau des chef infirmés et y ajoutant :

ANNULE la sanction notifiée au salarié le 10 janvier 2018,

CONDAMNE la société Samsic Sécurité à verser à M. [R] [V] les sommes suivantes :

- 5.312,46 euros bruts à titre de rappel de salaire pour les heures supplémentaires accomplies pour la période du 1er décembre 2018 au 18 septembre 2022,

- 531,24 euros bruts de congés payés afférents,

- 10.000 euros de dommages-intérêts au titre de la discrimination syndicale,

- 3.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

DIT que les sommes à caractère salarial produiront intérêts au taux légal à compter de la date de convocation de l'employeur à la conciliation et que les sommes à caractère indemnitaire produiront intérêts au taux légal à compter du présent arrêt,

ORDONNE la capitalisation des intérêts dus pour une année entière,

DEBOUTE les parties de leurs autres demandes,

CONDAMNE la société Samsic Securité aux dépens d'appel.

La greffière, La présidente.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 6 - chambre 7
Numéro d'arrêt : 19/08955
Date de la décision : 02/02/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-02-02;19.08955 ?
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