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02/02/2023 | FRANCE | N°18/08929

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 6 - chambre 7, 02 février 2023, 18/08929


Copies exécutoires REPUBLIQUE FRANCAISE

délivrées le : AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS







COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 7



ARRET DU 02 FEVRIER 2023



(n° , 6 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 18/08929 - N° Portalis 35L7-V-B7C-B6D5H



Décision déférée à la Cour : Jugement du 19 Juin 2018 -Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de MEAUX - RG n° 15/00592





APPELANTE



SASU SERVICE D'ENTRETIEN ET DE NETTOYAGE INDUSTRIE

L (SENI)

[Adresse 2]

[Adresse 2]

Représentée par Me Caroline COLET, avocat au barreau de PARIS, toque : P0511





INTIME



Monsieur [Z] [G]

[Adresse 1]

[Adresse 1]

Repré...

Copies exécutoires REPUBLIQUE FRANCAISE

délivrées le : AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 7

ARRET DU 02 FEVRIER 2023

(n° , 6 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 18/08929 - N° Portalis 35L7-V-B7C-B6D5H

Décision déférée à la Cour : Jugement du 19 Juin 2018 -Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de MEAUX - RG n° 15/00592

APPELANTE

SASU SERVICE D'ENTRETIEN ET DE NETTOYAGE INDUSTRIEL (SENI)

[Adresse 2]

[Adresse 2]

Représentée par Me Caroline COLET, avocat au barreau de PARIS, toque : P0511

INTIME

Monsieur [Z] [G]

[Adresse 1]

[Adresse 1]

Représenté par Me Nathalie BAUDIN-VERVAECKE, avocat au barreau de MEAUX

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 02 Novembre 2022, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Monsieur Laurent ROULAUD, Conseiller, chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, entendu en son rapport, composée de :

Madame Bérénice HUMBOURG, Présidente de chambre

Madame Guillemette MEUNIER, Présidente de chambre

Monsieur Laurent ROULAUD, Conseiller

Greffier, lors des débats : Madame Victoria RENARD

ARRET :

- CONTRADICTOIRE,

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Madame Guillemette MEUNIER, Présidente de chambre, et par Madame Marie-Charlotte BEHR, Greffière en stage de préaffectation sur poste à laquelle la minute a été remise par le magistrat signataire.

FAITS, PROC''DURE ET PR''TENTIONS DES PARTIES

M. [Z] [G] a été engagé par la société ANER en qualité d'agent de service, d'abord par plusieurs contrats de travail à durée déterminée à temps plein successifs du 5 septembre 2008 au 30 juin 2009 puis par un contrat à durée indéterminée à compter du 1er juillet 2009.

Le 1er avril 2012, la société Service d'entretien et de nettoyage industriel (ci-après désignée la société SENI) a repris le marché de nettoyage OSICA 77 sur lequel travaillait M. [G].

Par contrat du 1er avril 2012, la société SENI a repris le contrat de travail de M. [G] en application de l'article 7 de la convention collective des entreprises de propreté applicable à la relation contractuelle, avec une reprise d'ancienneté à compter du 5 septembre 2008.

Le contrat du 1er avril 2012 stipule qu'une prime de fin d'année est versée au salarié pour 'un montant brut mensuel de 100 euros'.

Considérant que cette prime lui était due mensuellement, M. [G] a saisi le conseil de prud'hommes de Meaux le 28 mai 2015 aux fins d'obtenir la condamnation de la société SENI au paiement d'un rappel de prime de fin d'année et de congés payés afférents.

Par jugement en date du 19 juin 2018, le conseil de prud'hommes a :

Condamné la société SENI à payer à M. [G] les sommes suivantes :

- 6.700 euros au titre du rappel de primes,

- 670 euros au titre des congés payés afférents,

Dit que ces sommes porteront intérêts au taux légal à compter de la réception de la convocation devant le bureau de conciliation et que ces intérêts seront capitalisables, conformément à l'article 1343-2 du code civil,

- 1.200 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

Dit que cette somme portera intérêt au taux légal à compter du prononcé de la décision et que cet intérêt sera capitalisable, conformément à l'article 1343-2 du code civil,

Ordonné à la société SENI de faire parvenir à M. [G] un bulletin de salaire rectificatif et ce, à compter du 30 ème jour suivant la notification du jugement,

Débouté M. [G] du surplus de ses demandes,

Débouté la société SENI de sa demande reconventionnelle au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

Condamné la société SENI aux entiers dépens y compris aux éventuels frais d'exécution du jugement et par voie d'huissier de justice.

Le 13 juillet 2018, la société SENI a interjeté appel de ce jugement.

Selon ses conclusions transmises par la voie électronique le 12 octobre 2020, elle demande à la cour de :

In limine litis, cconstater que les conclusions signifiées par l'intimé sont irrecevables en application de l'article 909 du code de procédure civile,

Débouter M. [G] de ses demandes, fins et conclusions contraires,

En tout état de cause :

Infirmer le jugement entrepris,

Débouter M. [G] de sa demande à hauteur de 6.700 euros à titre de rappel de prime contractuelle et de la somme de 670 euros au titre des congés payés afférents,

Débouter M. [G] de sa demande à hauteur de 1.500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

Condamner M. [G] aux entiers dépens.

Par ordonnance du 29 juin 2021, le conseiller de la mise en état a prononcé l'irrecevabilité des conclusions de M. [G].

Pour un exposé des moyens des parties, la cour se réfère expressément aux conclusions transmises par la voie électronique.

L'instruction a été déclarée close le 7 septembre 2022.

MOTIFS

Sur la fin de non-recevoir :

Dans le dispositif de ses dernières conclusions, la société SENI demande à la cour de déclarer irrecevables les conclusions de l'intimé.

Or, comme il a été dit précédemment, le conseiller de la mise en état a, par ordonnance du 29 juin 2021, déclaré irrecevables les conclusions notifiées par M. [G].

Dès lors, la fin-de-non recevoir soulevée par la société SENI est sans objet.

***

En application de l'article 954 du code de procédure civile, la partie qui ne conclut pas ou qui, sans énoncer de nouveaux moyens, demande la confirmation du jugement est réputée s'en approprier les motifs. Les conclusions de M. [G] ayant été déclarées irrecevables par ordonnance du 29 juin 2021 susmentionnée, l'intimé est réputé s'être approprié les motifs du jugement entrepris en application de ces dispositions.

Sur le rappel de prime :

Dans les motifs du jugement entrepris que l'intimé est réputé s'être approprié, le conseil de prud'hommes a constaté que le contrat du 1er avril 2012 susmentionné conclu entre la société SENI et M. [G] stipulait une prime de fin d'année d'un montant brut mensuel de 100 euros. Le juge prud'homal a ainsi considéré que cette prime était due mensuellement par la société SENI pour la période de mai 2012 à décembre 2017. L'employeur n'ayant versé cette prime qu'en décembre 2013 et en décembre 2015, le conseil de prud'hommes a jugé que la société SENI demeurait redevable à l'égard de l'intimé de la somme de 6.700 euros à titre de rappel de prime, outre 670 euros de congés payés afférents sur la période concernée.

L'employeur ne conteste pas avoir stipulé dans le contrat du 1er avril 2012 une prime de fin d'année pour un montant brut mensuel de 100 euros. Toutefois, il soutient qu'il s'agissait là d'une simple erreur de plume et que la prime de fin d'année devait seulement être versée une seule fois en fin d'année pour un montant de 100 euros.

La société SENI expose que le salarié a également perçu une prime conventionnelle de fin d'année en sus de sa prime annuelle alors qu'en application de l'article 4 de l'accord du 3 mai 2015 relatif à la prime annuelle, cette prime conventionnelle ne pouvait se cumuler avec la prime de fin d'année.

L'employeur expose également qu'entre 2010 et 2017, la société ANER puis la société SENI n'ont versé au salarié la prime de fin d'année qu'au cours du mois de décembre.

L'employeur demande ainsi à la cour d'user de son pouvoir d'interprétation de la clause contractuelle litigieuse afin de rétablir le sens réel de celle-ci, sous peine de provoquer une rupture d'égalité entre les salariés de la société SENI et M. [G].

Il demande enfin de rejeter les demandes salariales de M. [G].

A l'appui de ses allégations, l'employeur produit :

- le contrat du 1er avril 2012 comportant la clause litigieuse et signé par le salarié et la société SENI,

- les bulletins de paie de décembre 2010 et décembre 2011 délivrés par la société ANER mentionnant le versement au salarié d'une prime de fin d'année d'un montant de 100 euros,

- les bulletins de paie de décembre 2013, décembre 2015 et décembre 2017 délivrés par la société SENI mentionnant le versement au salarié d'une prime de fin d'année d'un montant de 100 euros,

- le bulletin de paie de décembre 2014 délivré par la société SENI mentionnant le versement au salarié d'une prime de productivité d'un montant de 100 euros. L'employeur indique dans ses écritures que le libellé de la prime était erroné et que cette prime correspondait en réalité à la prime de fin d'année,

- les bulletins de paie de novembre 2015 et de novembre 2017 mentionnant le versement au salarié d'une prime annuelle,

- une attestation par laquelle Mme [V], responsable des ressources humaines adjointe de la société SENI a indiqué que le contrat du 1er avril 2012 a été établi selon une trame mentionnant par erreur le versement mensuel d'une prime de fin d'année alors que l'entreprise sortante n'avait fait mention que d'une prime de fin d'année annuelle.

***

Il résulte de la combinaison des articles L. 1221-1 du code du travail et de l'article 1134 du code civil dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016 applicable à la date de conclusion du contrat du 1er avril 2012 que la rémunération contractuelle d'un salarié constitue un élément du contrat de travail qui ne peut être modifié ni dans son montant, ni dans sa structure sans son accord.

Il est constant que le contrat du 1er avril 2012 stipule qu'en rémunération de ses services, le salarié doit percevoir une prime de fin d'année d'un montant brut mensuel de 100 euros. La cour constate que cette clause contractuelle litigieuse, qui n'est ni obscure ni ambigüe, ne nécessite pas son interprétation pour en apprécier le sens; cette clause ayant, comme l'a jugé le conseil de prud'hommes, pour objet et pour effet d'obliger l'employeur à verser au salarié une prime de fin d'année d'un montant annuel de 1.200 euros (12x100) et non de 100 euros comme le soutient la société SENI.

S'il est constant que l'employeur n'a versé à M. [G] au mieux qu'une fois l'an la prime de fin d'année de 100 euros entre 2012 et 2017, il ne résulte en revanche d'aucun élément versé aux débats que le salarié a accepté de manière claire et non équivoque une modification de la rémunération prévue au contrat du 1er avril 2012 qui, comme il a été dit précédemment, a été signé par l'appelant et par l'intimé.

Il se déduit de ce qui précède que l'employeur ne peut demander à la cour de recourir à son pouvoir d'interprétation pour modifier la rémunération litigieuse contractuellement prévue, peu important le fait que la prime de fin d'année n'ait été versée par la société ANER et par la société SENI qu'une fois l'an ou que le contrat ait été entaché d'une erreur de plume au moment de sa conclusion par les parties.

De même, si la société SENI soutient que le versement mensuel d'une prime de fin d'année à M. [G] est de nature à provoquer une rupture d'égalité entre lui et les salariés de l'entreprise, elle ne produit aucun élément justifiant de celle-ci, se bornant à procéder par voie d'affimation.

Enfin, si l'article 4 de l'accord du 3 mai 2015 relatif à la prime annuelle stipule que cette prime conventionnelle 'ne se cumule pas avec les primes ayant le même objet ou la même cause, notamment les primes à caractère annuel résultant d'un accord, d'un usage ou de stipulations contractuelles versées dans certaines entreprises en une ou plusieurs fois l'année', cette stipulation n'a pour objet que d'interdire le versement de la prime conventionnelle annuelle en cas de cumul et, par suite, n'a ni pour objet ni pour effet d'interdire le versement d'une prime de fin d'année dont le fondement juridique n'est pas l'accord du 3 mai 2015 mais le contrat du 1er avril 2012. Par suite, il est indifférent en l'espèce que la société SENI ait versé une prime conventionnelle annuelle en sus de la prime de fin d'année.

Il résulte de ce qui précède qu'en application du contrat du 1er avril 2012, la société SENI était tenue de verser mensuellement au salarié une prime de fin d'année d'un montant mensuel de 100 euros entre mai 2012 et décembre 2017, comme l'a jugé le conseil de prud'hommes dans sa décision frappée d'appel.

S'agissant du montant des sommes dues, la cour constate que le conseil de prud'hommes n'a pas pris en compte le versement en décembre 2017 d'une prime de fin d'année pour un montant de 100 euros. Ce versement doit ainsi être déduit du rappel de prime alloué par la juridiction de première instance, ainsi que des congés payés afférents alloués.

En revanche, il n'est nullement justifié par l'employeur que la prime de fin d'année de 100 euros a été versée en décembre 2014 sous le libellé de 'prime de productivité' comme il l'affirme. Par suite, le montant de celle-ci ne sera pas déduit du rappel de prime alloué par la juridiction de première instance.

Il résulte de ce qui précède que le jugement sera infirmé sur le quantum et la société SENI sera condamnée à verser à M. [G] la somme de 6.600 euros bruts à titre de rappel de prime de fin d'année, outre 660 euros bruts de congés payés afférents.

Sur les demandes accessoires :

La société SENI qui succombe dans la présente instance, doit supporter les dépens de première instance et d'appel. Elle sera déboutée de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La Cour, statuant publiquement par arrêt contradictoire et rendu en dernier ressort, mis à disposition au greffe,

INFIRME le jugement sur le quantum du rappel de prime et des congés payés afférents,

CONFIRME le jugement pour le surplus,

Et statuant à nouveau du chef infirmé et y ajoutant,

CONDAMNE la société Service d'entretien et de nettoyage industriel (SENI) à verser à M. [Z] [G] les sommes suivantes :

- 6.600 euros bruts à titre de rappel de primes pour la période de mai 2012 à décembre 2017,

- 660 euros bruts de congés payés afférents,

DIT que les créances de nature salariale porteront intérêt à compter de la convocation de l'employeur devant le conseil de prud'hommes,

DEBOUTE les parties de leurs autres demandes,

CONDAMNE la société Service d'entretien et de nettoyage industriel (SENI) aux dépens d'appel.

La greffière, La présidente.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 6 - chambre 7
Numéro d'arrêt : 18/08929
Date de la décision : 02/02/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-02-02;18.08929 ?
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