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02/02/2023 | FRANCE | N°18/07974

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 6 - chambre 7, 02 février 2023, 18/07974


Copies exécutoires REPUBLIQUE FRANCAISE

délivrées le : AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS







COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 7



ARRET DU 02 FEVRIER 2023



(n° , 15 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 18/07974 - N° Portalis 35L7-V-B7C-B56DK



Décision déférée à la Cour : Jugement du 15 Mai 2018 -Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de LONGJUMEAU - RG n° 17/00169





APPELANTE



Me [G] [B] en qualité de mandataire liquidat

eur de la Société [Y]

[Adresse 3]

[Localité 4]

Représenté par Me Pierre TONOUKOUIN, avocat au barreau de PARIS, toque : J133



INTIMES



Monsieur [N] [P]

[Adresse 2]

[Loca...

Copies exécutoires REPUBLIQUE FRANCAISE

délivrées le : AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 7

ARRET DU 02 FEVRIER 2023

(n° , 15 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 18/07974 - N° Portalis 35L7-V-B7C-B56DK

Décision déférée à la Cour : Jugement du 15 Mai 2018 -Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de LONGJUMEAU - RG n° 17/00169

APPELANTE

Me [G] [B] en qualité de mandataire liquidateur de la Société [Y]

[Adresse 3]

[Localité 4]

Représenté par Me Pierre TONOUKOUIN, avocat au barreau de PARIS, toque : J133

INTIMES

Monsieur [N] [P]

[Adresse 2]

[Localité 7]

Représenté par Me Christophe NEVOUET, avocat au barreau de PARIS, toque : G0106

UNEDIC DÉLÉGATION AGS - CGEA DE L'ILE DE FRANCE

[Adresse 1]

[Localité 5]

Représentée par Me ENSLEN Frédéric, avocat au barreau de PARIS

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 02 Novembre 2022, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Monsieur Laurent ROULAUD, Conseiller, chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, entendu en son rapport, composée de :

Madame Bérénice HUMBOURG, Présidente de chambre

Madame Guillemette MEUNIER, Présidente de chambre

Monsieur Laurent ROULAUD, Conseiller

Greffier, lors des débats : Madame Victoria RENARD

ARRET :

- CONTRADICTOIRE,

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Madame Guillemette MEUNIER, Présidente de chambre, et par Madame [J] [E], Greffière en stage de préaffectation sur poste à laquelle la minute a été remise par le magistrat signataire.

FAITS, PROC''DURE ET PR''TENTIONS DES PARTIES

La société [Y] est une entreprise de construction, soumise à la convention collective des employés, techniciens et agents de maîtrise du bâtiment (ETAM).

M. [N] [P] a été engagé par la société [Y] par contrat de travail à durée indéterminée à temps plein à compter du 4 mai 2015 en qualité de conducteur de travaux.

Par courrier du 26 janvier 2016, la société [Y] a notifié à M. [P] une mise à pied à titre conservatoire pour les faits suivants :

'- injures envers votre supérieur,

- vous avez ordonné à votre employeur de quitter le chantier sous la menace,

- vous avez perdu le bénéfice de 2 semaines de travail, vous n'avez pas respecté les plans de l'architecte et sans en référer à votre responsable, vous avez pris l'initiative de tout casser, par conséquent, cela engendre une perte énorme pour la société en terme de temps et d'argent et quand votre employeur vous en fait la remarque vous le menacez, vous l'insultez et lui ordonnez de quitter le chantier ce qui est inadmissible et impardonnable,

- ce n'est pas la première fois que votre mauvais caractère fait défaut, vous avez voulu attaquer le directeur de travaux physiquement et verbalement ainsi que le chef de chantier qui refuse de travailler avec vous'.

Par certificat médical du 27 janvier 2016, le docteur [X] du service des urgences du centre-hospitalier de [Localité 7] a délivré à M. [P] un arrêt de travail initial jusqu'au 7 février 2016 en raison d'un accident du travail survenu la veille.

Cet arrêt de travail a été prolongé à plusieurs reprises jusqu'au 31 mars 2016.

Le 1er février 2016, l'employeur a déclaré l'accident du travail de M. [P], lié à une chute sur un chantier, tout en indiquant : 'je conteste l'accident du travail de M. [P]. Celui-ci m'a menacé de mort sur le chantier en m'intimant de quitter le chantier alors que je suis son patron. Il n'y a pas eu d'altercation physique, je lui ai demandé gentiment de quitter le chantier et de rentrer chez lui en attendant que je prenne une décision le concernant'.

Par courrier du 25 février 2016, M. [P] a été convoqué à un entretien préalable fixé le 8 mars 2016 en vue d'un éventuel licenciement.

Par courrier du 15 mars 2016, la société [Y] a notifié à M. [P] un licenciement pour faute grave pour les faits suivants :

' injures, violences, menaces, irrespect envers votre employeur.

Il apparaît en effet que le 26 janvier 2016 vous avez insulté sur le chantier de [Localité 6] vers 10h et cela devant témoin votre employeur et en le menaçant de lui 'casser la gueule' et de quitter le chantier sur le champ. A la suite de cette altercation, une main courante a été déposée le 5 février 2016 et un procès-verbal le 17 février 2016 pour menace de mort de la part de M. [P] [N]'.

Par courrier du 21 mars 2016, l'Assurance maladie de Seine-et-Marne a reconnu le caractère professionnel de l'accident de travail survenu le 26 janvier 2016.

Contestant le bien fondé de son licenciement et estimant que celui-ci était en réalité fondé sur l'accident du travail qu'il avait subi, M. [P] a saisi le conseil de prud'hommes de Longjumeau le 14 mars 2017 aux fins d'obtenir la condamnation de la société [Y] au paiement de diverses sommes de nature salariale et indemnitaire.

Par jugement du 15 mai 2018, le conseil de prud'hommes a :

Dit que le licenciement prononcé par la société [Y] à l'encontre de M. [P] est dépourvu de cause réelle et sérieuse,

Condamné la société [Y] à verser à M. [P] les sommes suivantes :

- 4.000 euros à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

- 3.489,70 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis,

- 348,97 euros de congés payés afférents,

- 5.273,10 euros à titre de rappel de salaire sur mise à pied injustifiée,

- 527,31 euros de congés payés afférents,

- 1.200 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

Condamné la société [Y] à verser à M. [P] en deniers et quittance délivrée par la caisse des congés du BTP la somme de 723,69 euros au titre de l'indemnité compensatrice de congés payés,

Dit que l'exécution provisoire est de droit en application des dispositions de l'article R. 1454-28 du code du travail,

Dit qu'en application de l'article 1231-7 du code civil ces sommes porteront intérêts au taux légal à compter du prononcé du jugement,

Débouté M. [P] de toutes ses autres demandes,

Débouté la société [Y] de ses demandes reconventionnelles,

Mis les entiers dépens de l'instance à la charge de la société [Y].

Le 26 juin 2018, la société [Y] a interjeté appel de ce jugement.

Selon ses conclusions transmises par la voie électronique le 17 septembre 2018, la société [Y] demande à la cour de :

Constater que le licenciement pour faute grave prononcé à l'encontre de M. [P] est fondé sur un motif réel et sérieux,

Constater qu'elle avait apporté la preuve matérielle et formelle de la véracité des faits ayant entraîné le licenciement de M. [P],

En conséquence,

Infirmer le jugement en ce qu'il a requalifié le licenciement en licenciement sans cause réelle et sérieuse,

Infirmer ledit jugement en ce qu'il l'a condamnée au versement de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, d'indemnité compensatrice de préavis et congés payés y afférents ainsi qu'au paiement d'une somme de 1 200 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

Confirmer le jugement dans toutes ses autres dispositions,

Condamner M. [P] aux dépens,

Allouer à la société [Y] la somme de 2 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Selon ses conclusions transmises par la voie électronique le 17 décembre 2018, M. [P] demande à la cour de :

A titre principal,

Infirmer le jugement en ce qu'il l'a débouté de sa demande de voir juger son licenciement pour faute grave en licenciement nul et, statuant à nouveau, de condamner la société [Y] à lui verser la somme de 40.000 euros nets à titre de dommages-intérêts pour licenciement nul,

A titre subsidiaire,

Confirmer le jugement en ce qu'il a jugé abusif le licenciement pour faute grave prononcé par la société [Y] à son encontre,

Infirmer le jugement en ce qu'il a limité le montant des dommages-intérêts pour licenciement abusif à la somme de 4.000 euros nets et, statuant à nouveau, de condamner la société [Y] au paiement de la somme de 20.000 euros nets à titre de dommages-intérêts pour licenciement abusif,

En tout état de cause,

Confirmer le jugement en ce qu'il a condamné la société [Y] à lui verser les sommes suivantes:

- 3.489,70 euros bruts à titre d'indemnité compensatrice de préavis,

- 348,97 euros bruts au titre des congés payés afférents à l'indemnité compensatrice de préavis,

- 5.273,10 euros bruts au titre de rappel de salaire sur la mise à pied injustifiée,

- 527,31 euros bruts au titre des congés payés afférents au rappel de salaire sur la mise à pied injustifiée,

Confirmer le jugement en ce qu'il a condamné la société [Y] au paiement d'une indemnité compensatrice de congés payés et mais infirmer le jugement en ce qu'il en a limité le montant à la somme de 723,69 euros bruts et, statuant à nouveau, de condamner la société à lui verser la somme de 2.014,75 euros bruts à ce titre,

Infirmer le jugement en ce qu'il l'a débouté du surplus de ses demandes et, statuant à nouveau, de condamner la société [Y] à lui régler les sommes suivantes :

- 30.000 euros nets à titre de dommages-intérêts sur le fondement de l'article L.1152-1 du Code du travail,

- 40.000 euros nets à titre de dommages-intérêts sur le fondement de l'article L.4121-1 du code du travail,

- 674,5 euros bruts à titre de rappel d'heures supplémentaires,

- 67,45 € bruts en paiement des congés payés afférents,

- 834,72 euros bruts de prime de vacances sur le fondement de l'article 5.1.2 de la convention collective applicable,

- 83,47 € bruts en paiement des congés payés afférents,

- 1.000 euros nets de dommages-intérêts sur le fondement de l'article R. 1234-9 du code du travail,

- 173,41 euros nets de dommages-intérêts à titre de remboursement des frais professionnels,

Dire que ces sommes porteront intérêt au taux légal avec capitalisation des intérêts dans le cadre des dispositions des articles 1231-6 et suivants et 1343-2 du code civil,

Condamner la société [Y] à lui verser la somme de 3.500 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

Condamner la société [Y] aux entiers dépens.

Par jugement du 27 juillet 2020, le tribunal de commerce d'Evry a prononcé la liquidation judiciaire de la société [Y] et a désigné la société MJC2A prise en la personne de Me [B] [G] en qualité de liquidateur.

Le liquidateur de la société [Y] a été mis dans la cause par M. [P], sans néanmoins produire de nouvelles conclusions.

Selon ses conclusions transmises par la voie électronique le 27 avril 2021, l'UNEDIC Délégation AGS CGEA de l'Île-de-France (ci-après désignée l'AGS) demande à la cour de:

Infirmer le jugement en l'ensemble de ces dispositions,

Débouter M. [P] de l'ensemble de ces demandes,

Dire qu'elle ne devra sa garantie au titre des créances visées aux articles L. 3253-8 et suivants du code du travail que dans les termes et les conditions résultant des dispositions des articles L. 3253-19 et suivants et L. 3253-17 du code du travail,

Limiter l'éventuelle exécution provisoire, à supposer qu'intervienne une fixation de créances, aux hypothèses prévues aux articles R. 1454-14 et R. 1454-28 du code du travail,

Rappeler que la somme éventuellement due au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'une éventuelle astreinte, qu'elle soit ou non liquidée n'entrent pas dans le champ de sa garantie,

Statuer ce que de droit sur les dépens.

Pour un exposé des moyens des parties, la cour se réfère expressément aux conclusions transmises par la voie électronique.

L'instruction a été déclarée close le 21 septembre 2022.

MOTIFS

Sur les heures supplémentaires :

Aux termes de l'article L. 3171-2, alinéa 1er, du code du travail, lorsque tous les salariés occupés dans un service ou un atelier ne travaillent pas selon le même horaire collectif, l'employeur établit les documents nécessaires au décompte de la durée de travail, des repos compensateurs acquis et de leur prise effective, pour chacun des salariés concernés. Selon l'article L. 3171-3 du même code, dans sa rédaction antérieure à celle issue de la loi n° 2016-1088 du 8 août 2016, l'employeur tient à la disposition de l'inspecteur ou du contrôleur du travail les documents permettant de comptabiliser le temps de travail accompli par chaque salarié. La nature des documents et la durée pendant laquelle ils sont tenus à disposition sont déterminées par voie réglementaire.

Enfin, selon l'article L. 3171-4 du code du travail, en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail accomplies, l'employeur fournit au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié. Au vu de ces éléments et de ceux fournis par le salarié à l'appui de sa demande, le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles. Si le décompte des heures de travail accomplies par chaque salarié est assuré par un système d'enregistrement automatique, celui-ci doit être fiable et infalsifiable.

Il résulte de ces dispositions, qu'en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail accomplies, il appartient au salarié de présenter, à l'appui de sa demande, des éléments suffisamment précis quant aux heures non rémunérées qu'il prétend avoir accomplies afin de permettre à l'employeur, qui assure le contrôle des heures de travail effectuées, d'y répondre utilement en produisant ses propres éléments. Le juge forme sa conviction en tenant compte de l'ensemble de ces éléments au regard des exigences rappelées aux dispositions légales et réglementaires précitées. Après analyse des pièces produites par l'une et l'autre des parties, dans l'hypothèse où il retient l'existence d'heures supplémentaires, il évalue souverainement, sans être tenu de préciser le détail de son calcul, l'importance de celles-ci et fixe les créances salariales s'y rapportant.

Le salarié expose que la durée du travail était de 39 heures et qu'il a accompli 24 heures supplémentaires non payé par l'employeur au cours du mois d'août 2015. Il réclame ainsi la somme de 674,5 euros bruts à titre de rappel de salaires, outre 67,5 euros bruts de congés payés afférents.

A l'appui de ses demandes, il produit :

- un tableau mentionnant qu'il a travaillé 46 heures lors de la semaine du 3 au 9 août, 48 heures lors de la semaine du 10 au 16 août et 47 heures lors de la semaine du 17 au 23 août,

- une copie illisible (pièce 26) d'un document que le salarié intitule 'relevé d'heures supplémentaires' et dont l'original serait, selon M. [P], en possession de l'employeur.

Le salarié présente ainsi, à l'appui de sa demande, des éléments suffisamment précis quant aux heures non rémunérées qu'elle prétend avoir accomplies afin de permettre à l'employeur, qui assure le contrôle des heures de travail effectuées, d'y répondre utilement en produisant ses propres éléments.

L'employeur et l'AGS ne produient aucun argumentaire en défense.

En outre, le bulletin de paye d'août 2015 produit ne mentionne pas le versement d'heures supplémentaires.

Dès lors, il sera intégralement fait droit aux demandes pécuniaires du salarié, les sommes ainsi allouées à ce dernier étant inscrites au passif de la liquidation judiciaire de la société [Y].

Le jugement sera infirmé en ce qu'il a débouté M. [P] de ses demandes au titre des heures supplémentaires.

Sur l'indemnité compensatrice de congés payés :

M. [P] expose que l'employeur lui a décompté à tort 12,5 jours de congés en septembre 2015 alors qu'il ne les avait pas pris. Il sollicite à ce titre la somme de 2.014,75 euros bruts et l'infirmation du jugement en ce qu'il ne lui a alloué de ce chef que la somme de 723,69 euros.

Dans le dispositif de ses conclusions, l'employeur demande la confirmation du jugement sur ce point et ne produit aucun argumentaire de ce chef.

Dans le dispositif de ses conclusions, l'AGS demande l'infirmation du jugement sur ce point et le débouté de la demande pécuniaire du salarié. Toutefois, elle ne produit aucun argumentaire à cette fin.

La charge de la preuve de la prise effective des congés repose sur l'employeur, lequel a l'obligation de prendre les mesures propres à assurer au salarié la possibilité d'exercer effectivement son droit à congé et, en cas de contestation, de justifier qu'il a accompli à cette fin les diligences qui lui incombent légalement.

S'il ressort du bulletin de salaire de septembre 2015 que le salarié a pris 12,5 jours de congés, il ne peut se déduire de cette seule mention, qui n'a qu'une valeur indicative, que M. [P] les a effectivement pris alors que ce dernier le conteste dans ses écritures.

Par suite, il sera intégralement fait droit à la demande pécuniaire de M. [P], selon le détail du calcul mentionné dans ses conclusions qui n'est contesté ni par l'appelante ni par l'AGS dans leurs écritures. Les sommes ainsi allouées au salarié seront inscrites au passif de la liquidation judiciaire de la société [Y].

Le jugement sera infirmé en conséquence.

Sur la prime de vacance :

Selon l'article 5.1.2. de la convention collective applicable, une prime de vacances égale à 30 % de l'indemnité de congés correspondant aux 24 jours ouvrables de congés, institués par la loi du 16 mai 1969, acquis sur la base de 2 jours ouvrables de congés par mois de travail, est versée aux employés, techniciens et agents de maîtrise du bâtimen (ETAM) après 6 mois de présence dans une ou plusieurs entreprises relevant d'une caisse de congés payés du bâtiment ou des travaux publics.

M. [P] soutient qu'il n'a jamais bénéficié de la prime de vacance prévue à l'article 5.1.2. précité et sollicite à ce titre la somme de 834,72 euros bruts à titre de rappel de prime, outre 83,47 euros bruts de congés payés afférents.

Dans le dispositif de ses conclusions, l'employeur demande la confirmation du jugement en ce qu'il a débouté le salarié de cette demande, sans toutefois produire un argumentaire en défense à cette fin.

Dans le dispositif de ses conclusions, l'AGS demande le débouté de la demande pécuniaire du salarié sans produire le moindre argumentaire à cette fin.

Il ressort des stipulations de l'article 5.1.2. précité que M. [P] ne peut bénéficier d'une prime de vacances qu'après 6 mois de présence dans une entreprise relevant d'une caisse de congés payés du bâtiment ou des travaux publics.

En l'espèce, il n'est nullement contesté que la société [Y] est une telle entreprise.

Par suite, M. [P] ayant été engagé à compter du 4 mai 2015, il bénéficiait de l'ancienneté requise pour bénéficier de la prime de vacances à compter du 4 novembre 2015.

Or, il n'est ni allégué ni justifié par l'employeur et l'AGS que M. [P] a bénéficié de la prime de vacance qui lui était due pour la période postérieure au 3 novembre 2015.

Par suite, il sera intégralement fait droit à la demande pécuniaire de M. [P] selon le détail du calcul mentionné dans ses conclusions selon le détail du calcul mentionné dans ses conclusions qui n'est contesté ni par l'appelante ni par l'AGS dans leurs écritures. Les sommes ainsi allouées au salarié seront inscrites au passif de la liquidation judiciaire de la société [Y].

Le jugement sera infirmé en conséquence.

Sur le licenciement :

La lettre de licenciement, qui fixe les limites du litige, doit être suffisamment motivée et viser des faits et griefs matériellement vérifiables, sous peine de rendre le licenciement dénué de cause réelle et sérieuse.

La faute grave qui seule peut justifier une mise à pied conservatoire est celle qui résulte d'un fait ou d'un ensemble de faits imputables au salarié qui constituent une violation des obligations résultant du contrat de travail ou des relations de travail d'une importance telle qu'elle rend impossible le maintien du salarié dans l'entreprise. Il appartient à l'employeur qui l'invoque, de rapporter la preuve de l'existence d'une faute grave.

M. [P] expose que la mise à pied à titre à titre conservatoire qui lui a été notifiée par l'employeur doît être requalifiée en mise à pied disciplinaire puisqu'il a été convoqué à un entretien prélable à un éventuel licenciement plus de 30 jours après le prononcé de la mesure provisoire, que les faits sanctionnant la mise à pied conservatoire sont les mêmes que ceux invoqués à l'appui de son licenciement disciplinaire et qu'en vertu du principe non bis in idem l'employeur ne peut le sanctionner deux fois pour les mêmes faits. M. [P] expose également que les faits à l'origine de son licenciement disciplinaire ne sont pas établis.

En défense, l'employeur expose que la mise à pied conservatoire et le licenciement disciplinaire prononcé à l'encontre de M. [P] sont justifiés.

***

En l'espèce, il est constant que le 26 janvier 2016, l'employeur a notifié au salarié une mise à pied à titre conservatoire engageant ensuite la procédure de licenciement pour faute grave par courrier du 25 février 2016, laissant ainsi s'écouler un délai de près d'un mois entre les deux mesures.

Il est également constant que les faits sanctionnés par le licenciement disciplinaire fondent également la mise à pied conservatoire.

Ainsi, faute d'avoir été concomitamment suivie de l'ouverture d'une procédure disciplinaire, la mise à pied du 26 janvier 2016 présente un caractère disciplinaire, l'employeur ne mentionnant dans ses écritures aucun motif justifiant le délai de près d'un mois relevé précedemment entre le prononcé de la mise à pied et l'engagement de la procédure de licenciement pour faute grave.

Il s'en déduit que l'employeur ne pouvait sanctionner une nouvelle fois le salarié pour les mêmes faits en prononçant ultérieurement le licenciement disciplinaire litigieux.

Dès lors, le licenciement est dépourvu de cause réelle et sérieuse.

Sur la nullité du licenciement :

M. [P] soutient que son licenciement est nul en application des dispositions de l'article L. 1226-13 du code du travail, celui-ci ayant été prononcé alors qu'il faisait l'objet d'une suspension de son contrat de travail en raison de son accident du travail survenu le 26 janvier 2016. Il soutient également à l'appui de sa demande en nullité que le motif réel de son licenciement est son accident du travail.

En défense, l'employeur s'oppose à cette demande d'annulation du licenciement.

***

Selon l'article L. 1226-13 du code du travail, toute rupture du contrat de travail prononcée en méconnaissance des dispositions des articles L. 1226-9 et L. 1226-18 est nulle.

Selon l'article L. 1226-9 du code du travail, au cours des périodes de suspension du contrat de travail, l'employeur ne peut rompre ce dernier que s'il justifie soit d'une faute grave de l'intéressé, soit de son impossibilité de maintenir ce contrat pour un motif étranger à l'accident ou à la maladie.

***

Il ressort des certificats médicaux produits que M. [P] a fait l'objet d'arrêts de travail de manière continue du 27 janvier au 31 mars 2016. Il s'en déduit que l'employeur a notifié le licenciement pour faute grave le 15 mars 2016 pendant une période de suspension du contrat de travail.

Il résulte des développements précédents que le licenciement pour faute grave notifié à la M. [P] est dépourvu de cause réelle et sérieuse. En outre, il n'est ni allégué ni justifié par l'employeur de l'impossibilité de maintenir le contrat de travail pour un motif non lié à l'accident du travail.

Dès lors, l'employeur a méconnu les dispositions de l'article L. 1226-9 du code du travail en prononçant le licenciement de M. [P].

Par suite, il sera fait droit à la demande d'annulation du salarié en application des dispositions de l'article L. 1226-13 du code du travail et le jugement sera infirmé en conséquence.

Sur les conséquences de la rupture :

Au préalable, il résulte des bulletins de paye et de l'attestation Pôle emploi versé aux débats que la rémunération mensuelle moyenne du salarié, après prise en compte des heures supplémentaires accordées à ce dernier dans les développements précédents, doit être fixée à la somme de 3.650 euros bruts. Il n'est nullement contesté par les parties que la société [Y] employait à titre habituel au moins onze salariés. Enfin, le salarié bénéficiait au moment de la rupture d'une ancienneté de 10 mois et trois jours.

En premier lieu, l'employeur et M. [P] demandent la confirmation du jugement en ce qu'il a condamné la société [Y] à verser au salarié les sommes suivantes :

- 5.273,10 euros bruts à titre de rappel de salaire sur la mise à pied injustifiée,

- 527,31 euros bruts de congés payés afférents.

Par suite, il sera fait droit aux demandes de M. [P].

Les sommes ainsi allouées à ce dernier devant être inscrites au passif de la liquidation judiciaire de la société [Y], le jugement sera infirmé en conséquence.

En deuxième lieu, M. [P] demande la confirmation du jugement en ce qu'il a condamné la société [Y] à lui verser les sommes de 3.489,70 euros bruts à titre d'indemnité compensatrice de préavis et de 348,97 euros bruts de congés payés afférents.

L'employeur et l'AGS s'opposent à cette demande.

Selon l'article L. 1234-1 du code du travail, le salarié qui justifie chez le même employeur d'une ancienneté de services continus comprise entre six mois et moins de deux ans a droit à un préavis d'un mois.

Par suite, il sera intégralement fait droit à la demande salariale de M. [P].

Les sommes ainsi allouées à ce dernier devant être inscrites au passif de la liquidation judiciaire de la société [Y], le jugement sera infirmé en conséquence.

En troisième et dernier lieu, M. [P] sollicite la somme de 40.000 euros à titre d'indemnité pour licenciement nul et demande ainsi l'infirmation du jugement qui l'a débouté de ce chef.

L'employeur et l'AGS s'opposent à cette demande.

Lorsque le salarié dont le licenciement est nul ne demande pas sa réintégration dans son poste, il a droit, d'une part, aux indemnités de rupture et, d'autre part, à une indemnité réparant l'intégralité du préjudice résultant du caractère illicite du licenciement et au moins égale à celle prévue par l'article L. 1235-3 du code du travail, dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance n° 2017-1387 du 22 septembre 2017, quelles que soient son ancienneté et la taille de l'entreprise.

Compte tenu de l'ancienneté du salarié, de sa rémunération mensuelle brute moyenne, de son âge au moment de la rupture (51 ans) et en l'absence d'élement sur sa situation personnelle postérieure à la rupture, il lui sera alloué une indemnité pour licenciement nul d'un montant de 24.000 euros. Cette somme sera inscrite au passif de la liquidation judiciaire de la société [Y].

Le jugement sera infirmé en conséquence.

Sur le remboursement des indemnités de chômage :

Selon les dispositions de l'article L. 1235-4 du code du travail, dans sa rédaction antérieure à la loi n°2016-1088 du 8 août 2016 applicable au litige, dans les cas prévus aux articles L. 1235-3 et L. 1235-11, le juge ordonne le remboursement par l'employeur fautif aux organismes intéressés de tout ou partie des indemnités de chômage versées au salarié licencié, du jour de son licenciement au jour du jugement prononcé, dans la limite de six mois d'indemnités de chômage par salarié intéressé. Ce remboursement est ordonné d'office lorsque les organismes intéressés ne sont pas intervenus à l'instance ou n'ont pas fait connaître le montant des indemnités versées

La nullité du licenciement du salarié ayant été prononcée en application du l'article L. 1226-13 du code du travail auquel ne renvoie pas l'article L. 1235-4 du même code, il n'y a dès lors pas lieu d'ordonner d'office à l'employeur le remboursement aux organismes intéressés des indemnités de chômage versées à M. [P].

Sur le manquement à l'obligation de sécurité :

M. [P] reproche à l'employeur d'avoir refusé de déclarer son accident de travail. Ce refus est caractérisé, selon les écritures du salarié, par le fait que, d'une part, l'employeur a indiqué sur le formulaire Cerfa de déclaration qu'il refusait de signer le document et de valider la déclaration et, d'autre part, la société [Y] n'a pas exercé de recours à l'encontre de la décision du 21 mars 2016 par laquelle l'Assurance maladie de Seine-et-Marne a reconnu le caractère professionnel de l'accident de travail survenu le 26 janvier 2016. M. [P] en déduit que l'employeur a manqué à son obligation de sécurité et sollicite à ce titre la somme de 40.000 euros en réparation du préjudice subi du fait de ce manquement.

L'employeur sollicite la confirmation du jugement en ce qu'il a débouté le salarié de cette demande indemnitaire.

Selon l'article L. 441-1 du code de la sécurité sociale, la victime d'un accident du travail doit, dans un délai déterminé, sauf le cas de force majeure, d'impossibilité absolue ou de motifs légitimes, en informer ou en faire informer l'employeur ou l'un de ses préposés.

Selon l'article L. 441-2 du code de la sécurité sociale, l'employeur ou l'un de ses préposés doit déclarer tout accident dont il a eu connaissance à la caisse primaire d'assurance maladie dont relève la victime selon des modalités et dans un délai déterminés. La déclaration à la caisse peut être faite par la victime ou ses représentants jusqu'à l'expiration de la deuxième année qui suit l'accident.

En l'espèce, il ressort des pièces versées aux débats que l'employeur a bien rempli le document Cerfa de déclaration de l'accident du travail survenu le 27 janvier 2016. S'il est vrai que dans ce document, l'employeur a indiqué refuser de le signer et a contesté le caractère professionnel de l'accident, il n'en demeure pas moins qu'il n'est ni allégué ni justifié par le salarié que l'employeur n'a pas adressé le document de déclaration à la caisse primaire d'assurance maladie dont relève la victime selon les formes et les délais requis par l'article L. 441-2 du code de la sécurité sociale précité.

En outre, le fait que l'Assurance maladie de Seine-et-Marne a reconnu le caractère professionnel de l'accident du travail moins de deux mois après la date mentionnée sur le formulaire de déclaration établi par l'employeur, à savoir le 1er février 2016, démontre au contraire que la société [Y] s'est acquittée de l'obligation prescrite par l'article L. 441-2 précité.

Il se déduit de ce qui précède que la société [Y] n'a point méconnu les obligations mises à sa charge par les dispositions de l'article L. 441-2 du code de la sécurité sociale et, par suite, n'a pas manqué à son obligation de sécurité telle que prescrite par l'article L. 4121-1 du code du travail, peu important le fait que l'employeur ait refusé de signer le document de déclaration et qu'il ait contesté sur ce document le caractère professionnel de l'accident sans exercer ultérieurement un recours contre la décision précitée de l'assurance maladie.

Dès lors, M. [Y] sera débouté de sa demande indemnitaire et le jugement sera confirmé en conséquence.

Sur les dommages-intérêts pour remise tardive des documents de fin de contrat :

M. [P] expose que l'employeur ne lui a communiqué ses documents de fin de contrat que le 21 avril 2016, soit un mois et quatre jours après son licenciement. Il sollicite ainsi la somme de 1.000 euros en réparation du préjudice qu'il a ainsi subi.

Dans le dispositif de ses conclusions, l'employeur demande la confirmation du jugement en ce qu'il a débouté le salarié de cette demande, sans toutefois produire un argumentaire en défense à cette fin.

Dans le dispositif de ses écritures, l'AGS conclut au débouté de la demande pécuniaire du salarié sans produire le moindre argumentaire à cette fin.

Selon l'article R. 1234-9 dans sa rédaction applicable au litige, l'employeur délivre au salarié, au moment de l'expiration ou de la rupture du contrat de travail, les attestations et justifications qui lui permettent d'exercer ses droits aux prestations mentionnées à l'article L. 5421-2 et transmet sans délai ces mêmes attestations à Pôle emploi

En l'espèce, si le salarié expose sans être contredit que l'employeur ne lui a pas délivré les documents de fin de contrat à la date de notification de son licenciement pour faute grave comme l'imposait les dispositions de l'article R. 1234-9 du code du travail, il ne justifie en revanche d'aucun préjudice dont la remise tardive de ces documents serait à l'origine.

Par suite, il sera débouté de sa demande indemnitaire et le jugement sera confirmé en conséquence.

Sur le remboursement des frais professionnels :

M. [P] demande la somme de 173,41 euros nets en réparation du préjudice subi du fait de l'absence de remboursement des frais professionnels suivants :

- frais d'essence : 271,04 euros,

- frais de téléphone : 50 euros.

Dans le dispositif de ses conclusions, l'employeur demande la confirmation du jugement en ce qu'il a débouté le salarié de cette demande, sans toutefois produire un argumentaire en défense à cette fin.

Dans le dispositif de ses écritures, l'AGS conclut au débouté de la demande pécuniaire du salarié sans produire le moindre argumentaire à cette fin.

Le salarié produit à l'appui de ses allégations, d'une part, un courrier sollicitant de l'employeur le remboursement de ses frais et, d'autre part, des tickets d'autoroute, de paiement à une station Total, de paiement au restaurant Pacha Grill, de paiement au magasin Intermarché, ainsi que deux tickets de carte bancaire.

Toutefois, il ne résulte pas des pièces produites que les dépenses ainsi réalisées l'ont été au titre des missions confiées au salarié dans le cadre de son contrat de travail.

Il sera donc débouté de sa demande indemnitaire et le jugement sera confirmé en conséquence.

Sur le harcèlement moral :

M. [P] soutient qu'il a été victime d'agissements de harcèlement moral imputables à la société [Y]. Il sollicite à ce titre la somme de 30.000 euros nets de dommages-intérêts et l'infirmation du jugement en ce qu'il l'a débouté de sa demande indemnitaire.

Dans le dispositif de ses conclusions, l'employeur demande la confirmation du jugement en ce qu'il a débouté le salarié de cette demande, sans toutefois produire un argumentaire en défense à cette fin.

Dans le dispositif de ses écritures, l'AGS conclut au débouté de la demande pécuniaire du salarié sans produire le moindre argumentaire à cette fin.

***

Aux termes de l'article L.1152-1 du code du travail, aucun salarié ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de travail susceptibles de porter atteinte à ses droits et sa dignité, d'altérer sa santé physique, mentale ou de compromettre son avenir professionnel.

L'article L.1154-1 de ce même code prévoit qu'en cas de litige, le salarié concerné présente des éléments de faits permettant de présumer l'existence d'un harcèlement et il incombe alors à l'employeur, au vu de ces éléments, de prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs d'un tel harcèlement et que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement.

***

S'agissant de la dégradation de son état de santé, M. [P] ne produit que des éléments relatifs à son suivi médical lié à l'accident du travail du 26 janvier 2016 et attestant d'un traumatisme sérieux de la hanche et du flanc gauche.

***

S'agissant des agissements de harcèlement moral invoqués, M. [P] expose, en premier lieu, que :

- l'employeur ne lui a pas réglé ses heures supplémentaires au titre du mois d'août 2015,

- a faussement indiqué sur sa fiche de paye de septembre 2015 qu'il avait pris 12,5 jours de congés,

- a remis de manière tardive au regard des dispositions de l'article R. 1234-9 du code du travail ses documents de fin de contrats.

Il résulte des développements précédents que ces faits sont matériellements établis.

En deuxième lieu, le salarié expose que l'employeur a refusé de déclarer son accident du travail survenu le 26 janvier 2016.

Il résulte des développements précédents que ce fait n'est pas matériellements établi.

En troisième lieu, M. [P] produit un avertissement que la société lui a notifié le 2 octobre 2015 et dont il conteste le bien-fondé.

Ce fait est matériellement établi.

En quatrième lieu, M. [P] soutient que l'employeur a procédé en janvier 2016 à une retenue sur salaire de 500 euros dont il conteste le bien-fondé.

Il produit à cette fin son bulletin de paie de janvier 2016 mentionnant une retenue sur salaire de 500 euros sous le libellé 'acompte' sans autre précision.

Ce fait est matériellement établi.

En cinquième et dernier lieu, M. [P] expose qu'il était régulièrement contraint de remplacer d'autres salariés et d'effectuer des fonctions autres que celles de conducteur de travaux pour lesquelles il avait été engagé par la société [Y].

Cependant, le salarié ne produit aucun élément à l'appui de ces allégations.

Il s'en déduit que ce fait n'est pas matériellement établi.

***

Il résulte de ce qui précède que sont matériellement établis les faits suivants :

- l'employeur n'a pas réglé au salarié ses heures supplémentaires au titre du mois d'août 2015,

- la société a faussement indiqué sur la fiche de paye de septembre 2015 que M. [P] avait pris 12,5 jours de congés,

- l'employeur a remis de manière tardive au salarié ses documents de fin de contrats,

- la société a procédé à une retenue sur salaire de 500 euros au titre du mois de janvier 2016 dont le salarié conteste le bien-fondé,

- l'employeur a notifié au salarié un avertissement le 2 octobre 2015 dont ce dernier conteste le bien-fondé.

Ces éléments pris dans leur ensemble permettent de présumer l'existence de faits constitutifs d'un harcèlement moral et il appartient donc à l'employeur de prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs d'un tel harcèlement et que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement.

Comme il a été dit précédemment, l'employeur et l'AGS ne produisent aucun argumentaire en défense.

Dès lors, l'employeur échoue à démontrer que les faits matériellement établis par M. [P] sont justifiés par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement. Le harcèlement moral dénoncé par le salarié est donc établi.

Compte tenu des circonstances du harcèlement subi, de sa durée et des conséquences dommageables en résultant pour M. [P] telles qu'elles ressortent des pièces et des explications fournies, le préjudice est évalué à la somme de 1.000 euros nets. Cette somme sera inscrite au passif de la liquidation judiciaire de la société [Y].

Sur les demandes accessoires :

La procédure collective dont la société [Y] fait l'objet ayant arrêté le cours des intérêts légaux, les demandes du salarié portant sur le prononcé de tels intérêts à l'égard des sommes prononcées par le présent arrêt et sur leur capitalisation seront dès lors rejetées.

Dans les limites légales et réglementaires, les créances fixées au profit de M. [P] seront garanties par l'AGS.

Les dépens d'appel seront supportés par le liquidateur de la société [Y] et toutes les demandes de frais irrépétibles seront rejetées.

PAR CES MOTIFS

La Cour, statuant publiquement par arrêt contradictoire et rendu en dernier ressort, mis à disposition au greffe,

CONFIRME le jugement en ce qui a :

- débouté M. [N] [P] de ses demandes indemnitaires au titre du manquement à l'obligation de sécurité, de la remise tardive des documents de fin de contrat et du remboursement des frais professionnels,

- débouté la société [Y] de ses demandes reconventionnelles,

- mis les dépens de première instance à la charge de la société [Y],

INFIRME le jugement pour le surplus,

Statuant à nouveau et y ajoutant,

PRONONCE la nullité du licenciement pour faute grave prononcé à l'encontre de M. [N] [P],

FIXE au passif de la procédure de liquidation judiciare de la société [Y] les sommes suivantes:

- 647,50 euros bruts au titre des heures supplémentaires,

- 67,50 euros bruts de congés payés afférents,

- 2.014,75 euros bruts d'indemnité compensatrice de congés payés,

- 834,72 euros bruts de rappel de prime de vacance,

- 83,47 euros bruts de congés payés afférents,

- 5.273,10 euros bruts de rappel de salaire pour mise à pied injustifiée,

- 527,31 euros bruts de congés payés afférents,

- 3.489,70 euros bruts d'indemnité compensatrice de préavis,

- 348,97 euros bruts de congés payés afférents,

- 24.000 euros d'indemnité pour licenciement nul,

- 1.000 euros nets de dommages-intérêts au titre du harcèlement,

RAPPELLE que le jugement du tribunal de commerce d'Evry en date du 27 juillet 2020 qui a prononcé l'ouverture d'une procédure collective à l'encontre de la société [Y] a arrêté le cours des intérêts légaux;

DÉCLARE le présent arrêt opposable à l'UNEDIC Délégation AGS CGEA de l'Île-de-France dans les limites de sa garantie légal, laquelle ne comprend pas l'indemnité de procédure ,et dit que cet organisme ne devra faire l'avance de la somme représentant les créances garanties que sur présentation d'un relevé par le mandataire judiciaire et justification par celui-ci de l'absence de fonds disposnibles entre ses mains pour procéder à son paiement,

DÉBOUTE les parties de leurs autres demandes,

DIT que les dépens d'appel seront supportés par la société MJC2A prise en la personne de Me [B] [G] en qualité de liquidateur de la société [Y].

La greffière, La présidente.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 6 - chambre 7
Numéro d'arrêt : 18/07974
Date de la décision : 02/02/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-02-02;18.07974 ?
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