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01/02/2023 | FRANCE | N°20/05433

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 6 - chambre 4, 01 février 2023, 20/05433


Copies exécutoires REPUBLIQUE FRANCAISE

délivrées le : AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS



COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 4



ARRET DU 1ER FEVRIER 2023



(n° , 5 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 20/05433 - N° Portalis 35L7-V-B7E-CCIFF



Décision déférée à la Cour : Jugement du 30 Juin 2020 -Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de BOBIGNY - RG n° 19/01957



APPELANTE



Madame [T] [Z]

[Adresse 2]

[Localité 6]

Représen

tée par Me Nicolas PEYRÉ, avocat au barreau de SEINE-SAINT-DENIS, toque : 188



INTIMEES



SELARL [K] MJ prise en la personne de Maître [L] [K] ès qualité de mandataire liquidat...

Copies exécutoires REPUBLIQUE FRANCAISE

délivrées le : AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 4

ARRET DU 1ER FEVRIER 2023

(n° , 5 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 20/05433 - N° Portalis 35L7-V-B7E-CCIFF

Décision déférée à la Cour : Jugement du 30 Juin 2020 -Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de BOBIGNY - RG n° 19/01957

APPELANTE

Madame [T] [Z]

[Adresse 2]

[Localité 6]

Représentée par Me Nicolas PEYRÉ, avocat au barreau de SEINE-SAINT-DENIS, toque : 188

INTIMEES

SELARL [K] MJ prise en la personne de Maître [L] [K] ès qualité de mandataire liquidateur de l'Association Formation Gestion Développement Structure d'Accueil Petite Enfance (AFGED)

[Adresse 3]

[Localité 5]

Représentée par Me Maria-christina GOURDAIN, avocat au barreau de PARIS

Association DELEGATION UNEDIC AGS ILE DE FRANCE EST

[Adresse 1]

[Localité 4]

Représentée par Me Vanina FELICI, avocat au barreau de PARIS, toque : C1985

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 07 Novembre 2022, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Monsieur Jean-François DE CHANVILLE, président, chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, entendu en son rapport, composée de :

Monsieur Jean-François DE CHANVILLE, président

Madame Anne-Ga'l BLANC, conseillère

Madame Florence MARQUES, conseillère

Greffier, lors des débats : Mme Victoria RENARD

ARRET :

- contradictoire

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Jean-François DE CHANVILLE, Président de chambre et par Victoria RENARD, Greffière, présente lors de la mise à disposition.

EXPOSÉ DU LITIGE :

L'association Formation Gestion Développement Structure d'Accueil Petite Enfance désignée sous le sigle AFGED, était une association créée le 25 mai 2007 et spécialisée dans le secteur d'activité de l'accueil de jeunes enfants.

Elle a été fermée par arrêté préfectoral le 23 juillet 2014 puis a fait l'objet d'une procédure de liquidation judiciaire ouverte par jugement du tribunal de grande instance de Bobigny le 1er octobre 2015. Me [K], de la SELARL [K] SCP Canet, ès qualité, a été désigné en qualité de mandataire liquidateur de l'association.

Mme [T] [Z] a été engagée par l'AFGED, par un contrat de travail à durée indéterminée du 2 juillet 2012, en qualité d'aide animatrice.

Les relations contractuelles entre les parties étaient soumises à la convention collective nationale de travail des établissements et services pour personnes inadaptées et handicapées.

Mme [T] [Z] a été gréviste le 26 novembre 2013.

Elle a été convoquée à un entretien préalable fixé au 20 janvier 2014. Elle a ensuite été licenciée pour cause réelle et sérieuse par lettre datée du 28 janvier 2014, pour ne pas avoir trié des yaourts périmés destinés aux enfants. La relation de travail a pris fin le 4 mars 2014.

L'AFGED occupait à titre habituel plus de dix salariés.

Mme [T] [Z] a saisi le 24 juin 2019 le conseil de prud'hommes de Bobigny aux fins de voir juger son licenciement nul pour atteinte au droit de grève, ou, subsidiairement, sans cause réelle et sérieuse, et fixer au passif de l'employeur les sommes suivantes, rendues opposable à l'AGS :

-1 450,91 euros de dommages-intérêts pour non-respect de la procédure de licenciement ;

- 39 174,57 euros de rappel de salaire ;

- 3 917,46 euros d'indemnité de congés payés y afférents ;

- 10 093,50 euros d'indemnité pour licenciement nul ou à tout le moins sans cause réelle et sérieuse.

Par jugement du 30 juin 2020, auquel la cour se réfère pour l'exposé de la procédure antérieure et des prétentions initiales des parties, le conseil de prud'hommes de Bobigny a déclaré le licenciement dénué de cause réelle et sérieuse et a fixé au passif de l'AFGED les créances suivantes en faveur de la demanderesse :

- 1 450,91 euros de dommages-intérêts pour non-respect de la procédure ;

- 1 450,91 euros de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

- avec intérêts au taux légal à compter du 27 juin 2015, date de réception par la défenderesse de sa convocation devant le bureau de conciliation du conseil des prud'hommes et jusqu'au 1er octobre 2015, date du jugement de liquidation.

La salariée a été déboutée du surplus de ses demandes, la décision a été déclarée opposable à l'AGS CGEA IDF Est dans les limites de ses garanties et la limite de ses garanties.

Les dépens ont été mis à la charge de la SELARL [K], ès qualité.

Par déclaration du 7 août 2020, Mme [T] [Z] a interjeté appel de cette décision, notifiée par lettre du greffe adressée aux parties le 16 juillet 2020.

Dans ses dernières conclusions, adressées au greffe par le réseau privé virtuel des avocats le 5 novembre 2020, Mme [T] [Z] demande à la cour de confirmer le jugement sur la condamnation au paiement de dommages-intérêts pour irrégularité de la procédure, l'infirmation pour le surplus et reprend ses prétentions de première instance.

Dans ses dernières conclusions, adressées au greffe par le réseau privé virtuel des avocats le 10 novembre 2020, la SELARL [K] SCP Canet, és qualité, demande à la cour de confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a débouté la salariée et de ses demandes et entend vois rejeter l'ensemble des prétentions de celle-ci. Subsidiairement elle prie la cour de limiter le montant des dommages-intérêts pour licenciement nul à six mois de salaire et l'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse à un mois de salaire.

Dans ses dernières conclusions, adressées au greffe par le réseau privé virtuel des avocats le 13 novembre 2020, l'AGS CGEA IDF Est formule les mêmes demandes que le liquidateur, ès qualité.

En tout état de cause, elle demande à la cour d'écarter de sa garantie les salaires postérieurs à la liquidation judiciaire, les demandes au titre de l'astreinte, de l'article 700 du code de procédure civile et des dépens et de juger qu'elle ne devra procéder à l'avance des éventuelles créances visées aux articles L. 3253-8 et suivants du code du travail que dans les termes et conditions des articles L. 3253-15 à L. 3253-21 du même code.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 6 septembre 2022 et l'affaire a été fixée à l'audience du 7 novembre 2022.

Pour un plus ample exposé des faits, des prétentions et des moyens des parties, la cour se réfère à leurs conclusions écrites conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile.

MOTIFS :

1 : Sur la nullité du licenciement

Mme [T] [Z] invoque la nullité du licenciement en ce qu'il est causé par la grève à laquelle elle a participé.

L'AFGED et l'AGS CGEA IDF Est répondent que la grève est sans lien avec la rupture.

Aux termes de l'article L. 2511-1 du Code du travail, l'exercice du droit de grève ne peut justifier la rupture du contrat de travail, sauf faute lourde imputable au salarié.

Son exercice ne peut donner lieu à aucune mesure discriminatoire telle que mentionnée à l'article L. 1132-2, notamment en matière de rémunérations et d'avantages sociaux.

Aux termes de l'article L. 1132-2 du Code du travail aucun salarié ne peut être sanctionné, licencié ou faire l'objet d'une mesure discriminatoire mentionnée à l'article L. 1132-1 en raison de l'exercice normal du droit de grève.

Tout licenciement prononcé en absence de faute lourde est nul de plein droit.

Aux termes de l'article L 1132-1 du Code du travail, aucune personne ne peut être écartée d'une procédure de recrutement ou de l'accès à un stage ou à une période de formation, aucune salarié ne peut être sanctionné, licencié ou faire l'objet d'une mesure discriminatoire, directe ou indirecte, telle que définie par l'article 1er de la loi n° 2008-496 du 27 mai 2008, notamment en matière de rémunération, au sens de l'article L 3221-3, de mesures d'intéressement ou de distribution d'actions, de formation, de reclassement, d'affectation, de qualification, de classification, de promotion professionnelle, de mutation ou de renouvellement de contrat en raison de son origine, de son sexe, de ses moeurs, de son orientation sexuelle, de son âge, de sa situation de famille ou de sa grossesse, de ses caractéristiques génétiques, de son appartenance ou de sa non-appartenance, vraie ou supposée, à une ethnie, une nation ou une race, de ses opinions politiques, de ses activités syndicales ou mutualiste, de ses convictions religieuses, de son apparence physique, de son nom de famille ou en raison de son état de santé ou de son handicap.

L'article L 1134-1 du Code du travail prévoit qu'en cas de litige relatif à l'application de ce texte, le salarié concerné présente des éléments de fait laissant supposer l'existence d'une discrimination directe ou indirecte telle que définie à l'article 1er de la loi n° 2008-496 du 27 mai 2008, au vu desquels il incombe à l'employeur de prouver que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination, et le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles.

Le licenciement postérieur de plus de deux mois à la grève alléguée apparaît sans lien avec celle-ci.

Aucun élément ne laisse supposer l'existence d'une discrimination à raison de l'exercice du droit de grève.

Par suite la demande d'annulation du licenciement et la demande non motivée paraissant fondée sur cette nullité en paiement d'un rappel de salaire seront rejetées.

2 : Sur la prétendue cause réelle et sérieuse du licenciement

La salariée soulève l'imprécision des motifs énoncés dans la lettre de licenciement et récuse les griefs qu'elle renferme. Elle prétend que ce serait la situation économique de l'entreprise qui serait la cause réelle de la rupture.

La SELARL [K], ès qualité, et l'AGS CGEA IDF Est font valoir que la salariée, chargée du tri des stocks et de la vérification des dates de péremption des denrées alimentaires proposées aux enfants, a conservé des yaourts périmés, alors qu'elle avait déjà fait l'objet de remontrances de ce fait plusieurs fois auparavant, et qu'elle a attendu 16 mois pour contester la rupture.

Si les faits reprochés sont décrits de manière précise dans la lettre de licenciement, la SELARL [K], ès qualité, ne fournit aucun élément de preuve à l'appui.

Le licenciement sera donc déclaré dénué de cause réelle et sérieuse.

3 : Sur les conséquences du licenciement

Il appartient à l'employeur de prouver que les effectifs de l'entreprise étaient habituellement de moins de onze salariés à la date du licenciement, ce qu'il ne fait pas.

Par conséquent, la cour retiendra que l'AFGED employait au moins onze salariés.

Mme [T] [Z] ne justifie pas de sa situation à l'issue de la rupture.

Compte tenu notamment de l'effectif de l'entreprise, des circonstances de la rupture, du montant de la rémunération versée à Mme [T] [Z], de son âge, de son ancienneté, de sa capacité à trouver un nouvel emploi eu égard à sa formation et à son expérience professionnelle et des conséquences du licenciement à son égard, tels qu'ils résultent des pièces et des explications fournies, il ya lieu de lui allouer, en application de l'article L 1235-3 du Code du travail une somme de 8 705,46 euros à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.

En application de l'article L. 622-28 du Code de commerce, le cours des intérêts se trouve interrompu depuis le jour du jugement d'ouverture de la procédure collective soit du jugement du 1er octobre 2015 et ne sont, dés lors, pas dus, dans la mesure où les intérêts de dommages-intérêts alloués ne courent qu'à compter de leur prononcé.

La demande de dommages-intérêts pour irrégularité de la procédure sera rejetée, car elle ne se cumule pas avec les dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse d'un salarié ayant plus de deux ans d'ancienneté, licencié par un employeur employant habituellement au moins onze salariés.

En application de l'article L 1235-4 du Code du travail, il sera ordonné la fixation au passif de l'AFGED le remboursement à Pôle-Emploi des indemnités de chômage versées au salarié dans la limite d'un mois à compter du jour de son licenciement, dès lors qu'il ne s'agit pas du licenciement d'un salarié de moins de deux ans d'ancienneté opéré dans une entreprise employant habituellement moins de onze salariés.

4 : Sur l'intervention de l'AGS CGEA IDF Est

Il conviendra de donner acte à l'AGS CGEA IDF Est des limites de sa garantie.

5 : Sur les dépens

La SELARL [K], ès qualité, sera condamné aux dépens, dès lors qu'elle succombe.

PAR CES MOTIFS :

La Cour statuant contradictoirement, par mise à disposition au greffe et en dernier ressort ;

Confirme le jugement déféré sauf sur les demandes de dommages-intérêts pour irrégularité de la procédure et de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

Statuant à nouveau ;

Rejette la demande de dommages-intérêts pour irrégularité de la procédure ;

Fixe au passif de l'AFGED, une créance de 8 705,46 euros en faveur de Mme [T] [Z] à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

Constate l'arrêt du cours des intérêts depuis le 1er octobre 2015 ;

Donne acte à l'AGS CGEA IDF Est des limites de sa garantie ;

Y ajoutant ;

Fixe au passif de l'AFGED le remboursement à Pôle-Emploi des indemnités de chômage versées à Mme [T] [Z] à compter du jour du licenciement dans la limite d'un mois ;

Condamne la SELARL [K] prise en qualité de liquidateur de l'AFGED aux dépens.

LA GREFFIÈRE LE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 6 - chambre 4
Numéro d'arrêt : 20/05433
Date de la décision : 01/02/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-02-01;20.05433 ?
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