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01/02/2023 | FRANCE | N°19/10742

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 6 - chambre 4, 01 février 2023, 19/10742


Copies exécutoires REPUBLIQUE FRANCAISE

délivrées le : AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS



COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 4



ARRET DU 01 FEVRIER 2023



(n° , 5 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 19/10742 - N° Portalis 35L7-V-B7D-CA3ED



Décision déférée à la Cour : Jugement du 13 Septembre 2019 -Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de CRETEIL - RG n° 16/00764



APPELANTE



SASU ELIOR SERVICES PROPRETE ET SANTE venant aux droits de la sociÃ

©té SAS SFGH HOPITAL SERVICE

[Adresse 4]

[Adresse 4]

Représentée par Me Guillaume ROLAND, avocat au barreau de PARIS, toque : P14



INTIMEE



Madame [Y] [C...

Copies exécutoires REPUBLIQUE FRANCAISE

délivrées le : AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 4

ARRET DU 01 FEVRIER 2023

(n° , 5 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 19/10742 - N° Portalis 35L7-V-B7D-CA3ED

Décision déférée à la Cour : Jugement du 13 Septembre 2019 -Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de CRETEIL - RG n° 16/00764

APPELANTE

SASU ELIOR SERVICES PROPRETE ET SANTE venant aux droits de la société SAS SFGH HOPITAL SERVICE

[Adresse 4]

[Adresse 4]

Représentée par Me Guillaume ROLAND, avocat au barreau de PARIS, toque : P14

INTIMEE

Madame [Y] [C]

[Adresse 1]

[Adresse 1]

Représentée par Me Sylvain NIEL, avocat au barreau de PARIS, toque : D2032

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 21 Novembre 2022, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Madame Anne-Ga'l BLANC, conseillère, chargée du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, entendu en son rapport, composée de :

Monsieur Jean-François DE CHANVILLE, président

Madame Anne-Ga'l BLANC, conseillère

Madame Florence MARQUES, conseillère

Greffier, lors des débats : Mme Victoria RENARD

ARRET :

- contradictoire

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Jean-François DE CHANVILLE, Président de chambre et par Victoria RENARD, Greffière présente lors de la mise à disposition.

RAPPEL DES FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES :

Par contrat de travail à durée indéterminée à effets au 1er février 2008, Mme [Y] [C] a été engagée par la société Sodexo en qualité d'employée de service. Elle était affectée sur le site de l'hôpital privé [3] à [Localité 2]. Le 1er janvier 2010, la société Sodexo a perdu le marché de nettoyage de ce site au profit de la société Hôpital services.

Un avenant à son contrat avec la société Sodexo prévoyant des primes dites d'activité continue et de service minimum, la salariée a refusé de signer un nouveau contrat de travail avec la société Hôpital services qui ne reprenait pas ces avantages. Elle a néanmoins continué à travailler de fait pour le compte de cette société aux droits de laquelle vient désormais la SASU Elior services propreté et santé.

Le 2 mars 2016, réclamant le paiement de rappels de primes et de dommages et intérêts à la société Elior services propreté, au motif que son contrat avec la société Sodexo lui aurait été transféré, Mme [C] a saisi le conseil de prud'hommes de Créteil.

Par jugement du 13 septembre 2019, considérant que le contrat lui avait été légalement transféré, le conseil a condamné la société Elior services propreté et santé au paiement de 5.500 euros au titre de la prime d'activité continue, 2.420 euros au titre de la prime de service minimum, 205,30 euros au titre de la prime d'ancienneté, 2.500 euros de dommages et intérêts, outre 1.300 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, avec intérêts au taux légal à compter de la saisine du conseil et capitalisation.

Le 24 octobre 2019, la société Elior a fait appel de cette décision qui lui avait été notifiée le 3 précédent.

Dans ses dernières conclusions, adressées au greffe par le réseau privé virtuel des avocats le 28 octobre 2022, la société Elior services propreté et santé demande à la cour de :

- déclarer irrecevables les prétentions formulées dans les conclusions du 16 septembre 2022 au titre de l'actualisation des demandes de prime d'activité continue, de prime de service minimum et des congés payés y afférents ;

- d'infirmer le jugement en toutes ses dispositions et, statuant à nouveau et y ajoutant, de débouter Mme [C] de l'ensemble de ses demandes et la condamner à lui payer la somme de 500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.

Dans ses dernières conclusions, adressées au greffe par le réseau privé virtuel des avocats le 7 novembre 2022, Mme [C] demande à la cour, de confirmer le jugement sauf en ce qu'il condamne la société Elior services propreté et santé au paiement de la somme de 2.500 euros de dommages et intérêts, l'infirmant sur ce point et statuant à nouveau, de :

- condamner la société Elior Services Propreté et Santé à lui payer 15.000 euros de dommages et intérêts ;

et y ajoutant, de :

- juger recevables ses demandes actualisées ;

- condamner la société Elior Services Propreté et Santé à lui payer 812, 53 euros brut de rappel de congés payés sur les primes d'activité continue et de service minimum sur la période de janvier 2010 à février 2019 ainsi que la prime d'ancienneté sur la période de février 2012 à décembre 2013 ;

- condamner la société Elior Services Propreté et Santé à lui payer 2.200 euros brut au titre de la prime d'activité continue pour la période de mars 2019 à novembre 2022 ;

- condamner la société Elior Services Propreté et Santé à lui payer 968 euros brut au titre de la prime de service minimum pour la période de mars 2019 à novembre 2022 ;

- condamner la société Elior Services Propreté et Santé à lui payer 316, 80 euros brut au titre des congés payés afférents aux primes d'activité continue et de service minimum pour la période de mars 2019 à novembre 2022 ;

- condamner la société Elior Services Propreté et Santé à lui payer la prime de service minimum à hauteur de 22 euros mensuels et la prime d'activité continue à hauteur de 50 euros mensuels pour la période de décembre 2022 à la décision à intervenir, outre 10 % du total de ces primes au titre des congés payés afférents ;

- condamner la société Elior Services Propreté et Santé à payer à Maître Sylvain Niel une somme de 3.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 15 novembre 2022 et l'affaire a été fixée à l'audience du 21 novembre 2022, 9h.

Pour l'exposé des moyens des parties, la cour se réfère à leurs conclusions écrites conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile.

MOTIFS DE LA DÉCISION :

1 : Sur l'exception d'irrecevabilité

L'article 910-4 du code de procédure civile dispose qu'à peine d'irrecevabilité, relevée d'office, les parties doivent présenter, dès les conclusions mentionnées aux articles 905-2 et 908 à 910, l'ensemble de leurs prétentions sur le fond. L'irrecevabilité peut également être invoquée par la partie contre laquelle sont formées des prétentions ultérieures. Néanmoins, et sans préjudice de l'alinéa 2 de l'article 783, demeurent recevables, dans les limites des chefs du jugement critiqués, les prétentions destinées à répliquer aux conclusions et pièces adverses ou à faire juger les questions nées, postérieurement aux premières conclusions, de l'intervention d'un tiers ou de la survenance ou de la révélation d'un fait.

En l'espèce, les demandes de l'intimée, qui ne figuraient pas dans ses premières conclusions, tendent uniquement à l'actualisation de ses prétentions initiales en sorte qu'en application de l'article 802 du code de procédure civile, elles sont recevables, même après la clôture et ce y compris si elles ne figuraient pas dans les premières conclusions remises dans le délai de l'article 908.

La fin de non-recevoir invoquée par l'appelant sera donc rejetée et le jugement complété en ce sens.

2 : Sur le transfert du contrat de travail

2.1 : Sur l'absence de transfert légal du contrat de travail en application de l'article L.1224-1 du code du travail

Aux termes de l'article L.1224-1 du code du travail, lorsque survient une modification dans la situation juridique de l'employeur, notamment par succession, vente, fusion, transformation du fonds, mise en société de l'entreprise, tous les contrats de travail en cours au jour de la modification subsistent entre le nouvel employeur et le personnel de l'entreprise.

Il est de principe que la seule perte d'un marché n'emporte pas application de l'article L. 1224-1 du code du travail. Ce texte, interprété à la lumière de la directive n° 2001/23/CE du 12 mars 2001, n'est en effet applicable qu'en en cas de transfert d'une entité économique autonome, définie comme un ensemble organisé de personnes et d'éléments corporels ou incorporels permettant l'exercice d'une activité économique qui poursuit un objectif propre, dont l'activité est poursuivie ou reprise en conservant son identité.

Les conditions tenant au transfert de personnels, d'une part, et d'éléments corporels ou incorporels, d'autre part, sont cumulatives.

Dès lors, au cas présent, s'agissant d'une activité de nettoyage, en l'absence de transfert d'éléments corporels ou incorporels permettant l'exercice d'une activité économique, qui ne saurait être caractérisé par le seul fait que les méthodes de travail et le savoir-faire ont été transmis, cette condition est manquante et le transfert d'une entité économique autonome n'est pas caractérisé.

Ainsi, le contrat de travail de Mme [C] n'a pas été légalement transféré au sens de l'article L. 1224-1 du code du travail.

2.2 : Sur l'absence de transfert conventionnel du contrat de travail

Aux termes de son article 1, l'accord du 29 mars 1990 portant garantie d'emploi et continuité du contrat de travail du personnel en cas de changement de prestataire n'est applicable qu'aux employeurs et aux salariés des entreprises ou établissements exerçant une activité classée sous le numéro de code APE 87-08, qui sont appelées à se succéder lors d'un changement de prestataire pour des travaux effectués dans les mêmes locaux, par suite de la cessation du contrat commercial ou du marché public ou en cas de sous-traitance de l'exécution du marché à une entreprise ayant une activité relevant du code APE 81.2 lorsqu'il y a succession de prestataires pour des travaux effectués dans les mêmes locaux.

Le code APE 87-08, devenu 8121Z, est attribué aux entreprises exerçant à titre principal une activité de propreté et de nettoyage ce qui n'est pas le cas de la société Sodexo dont l'activité principale est la restauration collective et qui relève à ce titre de la convention collective de la restauration de collectivité, étant rappelé que la convention collective applicable aux salariés d'une entreprise est celle dont relève l'activité principale exercée par l'employeur, peu important les fonctions assumées par les salariés sauf dans l'hypothèse où les salariés exercent une activité nettement différenciée dans un centre d'activité autonome, ce qui n'est pas le cas en l'espèce.

Dès lors, le contrat de travail de Mme [C] n'a pu être transféré de la société Sodexo à la société Hôpital services aux droits de laquelle vient désormais la société Elior services propreté et santé par application de l'accord susmentionné, ces deux sociétés ne relevant pas de la même convention collective.

2.3 : Sur les conséquences de l'absence de transfert légal ou conventionnel du contrat de travail

I1 résulte de ce qui précède qu'en l'absence de transfert légal ou conventionnel de son contrat de travail, Mme [C] devait soit demeurer salariée de la société Sodexo, à charge pour celle-ci de lui trouver une nouvelle affectation, ce qui n'a pas été le cas, soit conclure un nouveau contrat avec le repreneur, ce qu'elle a refusé.

En continuant néanmoins à occuper son poste et à percevoir la rémunération afférente, elle est devenue de fait salariée de la société Elior services propreté et santé mais sans qu'un contrat de travail écrit soit formalisé.

Dès lors, en l'absence de transfert ou de nouvelles dispositions contractuelles le prévoyant, la salariée ne peut prétendre au maintien des avantages tirés de son précédent contrat, qui a pris fin le 1er janvier 2010.

Ainsi, elle doit être déboutée de l'ensemble de ses demandes de rappels au titre des différentes primes, ainsi de sa demande subséquente de dommages et intérêts.

Le jugement qui a condamné la société Elior à ce titre doit donc être infirmé.

3 : Sur les demandes accessoires

Au regard du sens de la présente décision, le jugement sera infirmé sur les dépens et les frais irrépétibles. La salariée, partie perdante, supportera les éventuels dépens de la première instance comme de l'appel

L'équité commande de débouter la société Elior de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS :

La cour :

- Rejette la fin de non-recevoir tirée de l'article 910-4 du code de procédure civile ;

- Infirme le jugement du conseil de prud'hommes de Créteil du 13 septembre 2019 en toutes ses dispositions ;

Statuant à nouveau et y ajoutant :

- Déboute Mme [Y] [C] de sa demande de dommages et intérêts ;

- Déboute Mme [Y] [C] de ses demandes au titre de la prime d'activité continue, de la prime de service minimum et de congés payés afférents ;

- Déboute Mme [Y] [C] de sa demande au titre de la prime d'ancienneté ;

- Rejette les demandes au titre des frais irrépétibles ;

- Condamne Mme [Y] [C] aux éventuels dépens de première instance et d'appel.

LA GREFFIÈRE LE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 6 - chambre 4
Numéro d'arrêt : 19/10742
Date de la décision : 01/02/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-02-01;19.10742 ?
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