Copies exécutoires RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 5 - Chambre 10
ARRÊT DU 30 JANVIER 2023
(n° , 12 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 21/05031 - N° Portalis 35L7-V-B7F-CDJTH
Décision déférée à la Cour : Jugement du 16 Février 2021 -Tribunal de Commerce de CRETEIL - RG n° 2018F01013
APPELANTE
S.A.S. EXPERTS ET ENTREPRENDRE [Localité 4]
N° SIRET : 393 318 647
Ayant son siège social
[Adresse 2]
[Localité 4]
Prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège
Représentée par Me Charlotte ABATI de la SELARL AYRTON AVOCATS, avocat au barreau de PARIS, toque : C1289, Me Christian COURTAGET Avocat au barreau de PARIS
INTIMEE
S.A.S. GROUPE OPTIM
immatriculée au RCS de CRETEIL sous le numéro 519 092 050,
Ayant son siège social
[Adresse 1]
[Localité 3]
Prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège
Représentée par Me Sandra OHANA de l'AARPI OHANA ZERHAT, avocat au barreau de PARIS, toque : C1050, Me Florence ARCON Avocat au Barreau
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions des articles 805 et du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 17 Novembre 2022, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Monsieur Jacques LE VAILLANT, Conseiller, chargé du rapport.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
Monsieur Edouard LOOS, Président,
Madame Christine SIMON-ROSSENTHAL, Présidente
Monsieur Jacques LE VAILLANT, Conseiller
Greffier, lors des débats : Madame Sylvie MOLLÉ
ARRÊT :
- contradictoire
- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
- signé par Edouard LOOS, Président et par Sylvie MOLLÉ, Greffier présent lors du prononcé.
FAITS ET PROCEDURE
Suivant lettre de mission en date du 11 février 2008, la société Groupe Optim a confié à la société par actions simplifiées Expertise & performance, à présent dénommée Experts et entreprendre [Localité 4] (ci-après désignée la société 'E et E'), la mission d'expertise comptable de présentation de ses comptes annuels et de ceux de ses filiales.
Les sociétés Groupe Optim et Expertise & performance sont convenues d'une mission complémentaire de gestion de la paie, suivant lettre de mission du 21 juin 2013.
La société Groupe Optim ayant contracté avec la société Expertise & performance a ultérieurement changé de dénomination, pour devenir la société Optim solutions, puis a été dissoute par suite d'une transmission universelle de son patrimoine à une autre société dénommée Groupe Optim laquelle a été également dissoute par suite d'une transmission universelle de patrimoine au profit d'une troisième société dénommée Groupe Optim, laquelle est partie à la présente instance.
Les relations contractuelles entre la société Groupe Optim et la société Expertise & performance ont pris fin dans le courant de l'année 2015.
Invoquant des factures impayées, la société Expertise & performance a adressé une mise en demeure de payer la somme totale de 14 974 euros à la société Optim solutions par lettre recommandée avec demande d'avis de réception du 24 novembre 2015.
Elle a déposé une requête en injonction de payer auprès du tribunal de commerce de Créteil le 4 octobre 2018, à laquelle il a été fait droit par ordonnance du 16 octobre 2018.
La société Groupe Optim a formé opposition à l'encontre de cette ordonnance d'injonction de payer et, par jugement du 16 février 2021, le tribunal de commerce de Créteil a statué comme suit:
'- Dit recevable et bien fondée en son opposition la société Groupe Optim et déboute la société Expertise et performance de l'ensemble de ses demandes.
- Condamne la société Expertise et performance à payer à la société Groupe Optim la somme de 1 536 euros au titre de la régularisation de la facturation de la mission sociale.
- Déboute les parties pour le surplus de leurs demandes.
- Dit qu'il n'y a pas lieu de faire application de l'article 700 du code de procédure civile et déboute les parties de leurs demandes formées de ce chef.
- Ordonne l'exécution provisoire de ce jugement.
- Condamne la société Expertise et performance à supporter les dépens, lesquels comprendront les frais de l'ordonnance d'injonction de payer.
- Liquide les dépens à recouvrer par le greffe à la somme de 139,75 euros TTC (dont 20,00% de TVA).'
Par déclaration du 15 mars 2021, la société Experts et entreprendre [Localité 4] ( E et E) a interjeté appel du jugement.
Par dernières conclusions notifiées par voie électronique le 4 juin 2021, auxquelles il est renvoyé pour un plus ample exposé des moyens soulevés, la société E et E demande à la cour de :
'Vu les articles 1103 et suivants du code civil,
Infirmer le jugement rendue en première instance et :
- Condamner la société Groupe Optim à verser à la société Experts et entreprendre [Localité 4] la somme de 12 936 euros au titre du paiement des factures non réglées.
- Condamner la société Groupe Optim à verser à la société Experts et entreprendre [Localité 4] la somme de 80 euros au titre de l'indemnité forfaitaire pour frais de recouvrement ;
- Condamner la société Groupe Optim à verser à la société Experts et entreprendre [Localité 4] la somme de 8 566 euros au titre des intérêts de retard ;
- Condamner la société Groupe Optim à verser à la société Experts et entreprendre [Localité 4] la somme de 5 000 euros au titre de la résistance abusive ;
- Débouter la société Groupe Optim de sa demande au titre de la régularisation de la facturation de la mission sociale.
Confirmer le jugement rendu en première instance en ce qu'il a débouté la société Groupe Optim du surplus de ses demandes.
En tout état de cause, il est demandé à la cour d'appel de :
- Condamner la société Groupe Optim à verser à la société Experts et entreprendre [Localité 4] la somme de 2 500 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
- Condamner la société Groupe Optim aux entiers dépens.'
Par conclusions d'intimée et d'appel incident notifiées par voie électronique le 27 juillet 2021, la société Groupe Optim demande à la cour de :
Vu les articles 1134, 1135, 1147, 1149, 1315, 2220 anciens du code civil, les articles 2224, 2254 du code civil, les articles 148, 155 et 156 du code de déontologie des professionnels de l'expertise comptable, les articles 699 et 700 du code de procédure civile,
Recevoir la société Groupe Optim, anciennement Optim Solutions, en son action et la déclarer bien fondée,
Confirmer le jugement rendu en date du 16 février 2021 sous le RG n°2018F01013 par le tribunal de commerce de Créteil en ce qu'il a :
- Condamné la société Experts et entreprendre [Localité 4] au paiement de la somme de 1 536 euros au titre de la restitution à la suite de la régularisation des factures émises dans le cadre de la mission sociale de janvier 2014 à février 2015,
-Débouté la société Experts et entreprendre [Localité 4] de l'ensemble de ses demandes,
L'infirmer sur le surplus,
Statuant de nouveau,
- Constater que la société Groupe Optim n'est débitrice d'aucune somme au profit de la société Expertise et performance, désormais Experts et entreprendre [Localité 4],
En conséquence,
- Prendre acte de la renonciation de la société Experts et entreprendre [Localité 4] de sa demande de paiement à l'encontre de la société Groupe Optim de ses 4 factures (n° 16474, 16805, 17014 et 17243) émises entre les 2 mars et 2 juin 2015 pour un montant total de
1 440 euros TTC,
- Débouter la société Experts et Entreprendre [Localité 4] de ses demandes, fins et prétentions,
À titre reconventionnel,
- Constater que la société Experts et Entreprendre [Localité 4] a manqué à ses obligations de diligences et de conseil dans le cadre de l'exécution de sa mission sociale et de sa mission comptable,
- Dire que ses manquements ont causé un préjudice à la société Groupe Optim,
En conséquence,
- Condamner la société Experts et Entreprendre [Localité 4] au paiement des sommes de :
* 20 000 euros en réparation du préjudice lié à l'atteinte à l'image et à la réputation de la société Groupe Optim,
* 13 680 euros en réparation du préjudice lié au surcoût interne de la société Groupe Optim,
* 10 000 euros en réparation du préjudice lié au dysfonctionnement et à la perte de rentabilité de la société Groupe Optim,
* 2 000 euros en réparation du préjudice lié au surcoût du nouveau gestionnaire de paye de la société Groupe Optim au titre de son intervention sur les bulletins édités aux mois de janvier et février 2015,
* 19 738,33 euros en réparation du préjudice lié au versement de l'indemnité transactionnelle versée à M. [S] par la société Groupe Optim, ou subsidiairement à la somme de 5 080 euros,
* 504 euros au titre de la restitution à la suite de la régularisation des factures émises dans le cadre de la mission sociale 2013,
* 5 000 euros à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive,
* 5 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens de première instance.
- Condamner la société Experts et entreprendre [Localité 4] à garantir la société Groupe Optim de toutes les condamnations qui pourraient être prononcées contre elle pour des demandes liées directement à la défaillance de la société Experts et entreprendre Paris dans l'exercice de sa mission,
En tout état de cause,
- Condamner la société Experts et entreprendre [Localité 4] au paiement de la somme de 5 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel ainsi qu'aux entiers dépens d'instance.'
L'ordonnance de clôture est intervenue le 19 septembre 2022.
MOTIVATION
1. Rappel préalable
La société Groupe Optim demande à la cour de prendre acte de la renonciation de la société E et E de sa demande de paiement à l'encontre de la société Groupe Optim de ses quatre factures n° 16474, 16805, 17014 et 17243 émises entre les 2 mars et 2 juin 2015 pour un montant total de 1 440 euros TTC.
La cour rappelle toutefois que les demandes de constatation et de 'donner acte' ne saisissent pas la cour de prétentions au sens des articles 4 et 954 du code de procédure civile.
2.- Sur les demandes en paiement de la société E et E
La société E et E demande le paiement par la société Groupe Optim de deux factures relatives à la mission comptable qui lui a été confiée le 11 février 2008, à savoir une facture n°14120 du 3 juin 2014 d'un montant de 10 200 euros TTC intitulée 'ajustement temps passés au 2.06.14" portant sur les postes 'Bilan 2013 groupe/ Bilan 2013 analytique avec répartition par BU (Business unit)/ Consolidation dont traitement des opérations de fusion' et une facture n°16101 du 31 décembre 2014 d'un montant de 2 736 euros TTC intitulée 'Mission comptable assistance pour préparation bilan 2014 : intervention décalée en décembre 2014".
Les parties s'accordent sur le fait qu'un forfait de facturation des prestations fournies au titre de la lettre de mission du 11 février 2008 a été convenu entre elles à compter du mois de septembre 2013 (pièce n°21 de l'intimée) alors qu'initialement ces prestations devaient être facturées au temps passé (pièce n° 2 de l'appelante et n°1 de l'intimée).
Il est ainsi précisé dans le courriel émanant de la société E et E du 6 septembre 2013 que : 'Pour la révision des bilans en fin d'année nous avons opté pour tout facturer sur Groupe Optim :
- Assistance pour le bilan et liasse fiscale des sociétés du groupe : 8 000 euros
- Consolidation du groupe : 8 000 euros.'
L'accord de forfait n'exclut pas la facturation de prestations complémentaires à celles entrant dans la mission comptable convenue le 11 février 2008, éventuellement sous la modalité d'un calcul au temps passé.
Toutefois, en application des articles 1134 et 1315 du code civil pris dans leur version applicable aux actes en litige, il appartient à la société E et E qui invoque l'obligation de paiement de la société Groupe Optim de prestations d'expertise comptable facturées sur une base différente du forfait convenu, d'apporter la preuve que les parties sont convenues de l'exécution de missions complémentaires hors forfait et de leurs modalités de paiement.
La société E et E ne produit aucune pièce de nature à apporter la preuve d'une telle obligation de la société Groupe Optim.
Il sera au surplus observé que la facture n°14120 du 3 juin 2014 ne contient aucun calcul du prix des prestations qui y sont énumérées sur une base précédemment convenue entre les parties puisqu'il s'agit d'une facturation de chaque prestation pour un prix global par prestation qui ne correspond ni à ce qui a été convenu dans la lettre de mission du 11 février 2008 ni à la rémunération forfaitaire convenue selon les termes de l'accord modificatif dont fait preuve le courriel précité du 6 septembre 2013.
La facture n°16101 du 31 décembre 2014 opère un retour à la facturation au temps passé de la prestation d'établissement de comptes pour l'année 2014, en contradiction avec l'accord de rémunération forfaitaire intervenu en septembre 2013. La société E et E soutient qu'il s'agit de la rémunération due en raison d'une intervention anticipée par rapport à la date normale d'établissement des comptes mais ne produit aucune pièce afin d'en justifier et de caractériser un accord de la société Groupe Optim pour une rémunération additionnelle au forfait annuel convenu.
Pour ces motifs et pour les motifs exacts et pertinents des premiers juges que la cour adopte, les demandes en paiement formées par la société E et E de la somme de 12 936 euros au titre des factures n°14120 et n°16101, de la somme de 80 euros à titre d'indemnité forfaitaire pour frais de recouvrement et de la somme de 8 566 euros à titre d'intérêts de retard ne sont pas fondées.
La demande de dommages et intérêts pour résistance abusive de la société Groupe Optim est sans objet en l'absence de preuve d'un manquement de sa part à son obligation de paiement de prestations exécutées au titre de la mission comptable convenue entre les parties le 11 février 2008.
Par suite, le jugement déféré sera confirmé en ce qu'il a débouté la société E et E de toutes ses demandes.
3.- Sur les demandes reconventionnelles de la société Groupe Optim
3.1.- Sur la demande de remboursement de sommes facturées au titre de la mission de gestion de paye
La société E et E soutient qu'un accord entre les parties est intervenu pour qu'il soit procédé à la facturation forfaitaire des prestations d'établissement et d'émission de bulletins de salaire pour les salariés de la société Groupe Optim à concurrence de quinze bulletins par mois facturés au prix unitaire de 20 euros soit 300 euros par mois et 3 600 euros par an.
La société Groupe Optim conteste qu'un tel accord soit intervenu, soulignant que la lettre de mission du 21 juin 2013 relative à la gestion de paye prévoit uniquement une facturation unitaire par bulletin de paye émis et ne fait mention d'aucun forfait mensuel afférent aux bulletins de salaire.
Il ressort de la lettre de mission relative à la gestion de la paye que les honoraires sont stipulés comme étant déterminés en fonction du temps passé sur la base de 18 euros HT par bulletin de salaire augmentés de 2 euros HT pièce pour l'envoi des bulletins de salaire par courrier.
La lettre de mission précise ce qui suit : 'La facturation sera émise mensuellement sur la base d'une provision mensuelle fonction du nombre de salariés présents en début de période. Une régularisation sera faite au moins une fois par an en fonction du nombre réel de salaires traités'.
Il en résulte que la facturation mensuelle de la société E et E au titre de ses prestations de gestion de paye correspond à la facturation d'une provision et non à la facturation d'un forfait convenu entre les parties.
Procédant ainsi à une facturation provisionnelle, il appartenait à la société E et E d'établir en fin d'exercice et d'année civile, c'est-à-dire au plus tard au 31 décembre de chaque année, à l'établissement d'un compte définitif au vu du nombre de bulletins de salaire réellement établis chaque mois pour aboutir à l'émission soit d'un avoir soit d'une facture complémentaire.
Or, la société E et E n'a pas établi de comptes définitifs pour la période en litige allant de juin 2013 à février 2015.
C'est par des motifs pertinents que la cour adopte que les premiers juges ont retenu, d'une part, que la prescription quinquennale de la demande de remboursement des honoraires trop facturés à titre de provision pour la période allant de juin à décembre 2013 est acquise, la demande en restitution ayant été formée par la société Groupe Optim pour la première fois par conclusions déposées le 21 mai 2019 alors qu'elle a connu ou aurait dû connaître le défaut de régularisation des facturations provisionnelles de 2013 au plus tard le 31 décembre 2013, et, d'autre part, que soixante quatre bulletins de salaire ont été facturés en trop pour la période allant de janvier 2014 à février 2015 après avoir exactement constaté que 146 bulletins avaient été émis alors que les facturations provisionnelles avaient porté sur 210 bulletins de salaire.
Le jugement déféré sera donc confirmé en ce qu'il a condamné la société E et E à rembourser la somme de 1 536 euros à la société Groupe Optim et en ce qu'il a débouté cette dernière du surplus de sa demande de restitution, soit la somme de 504 euros.
3.2.- Sur les demandes indemnitaires de la société Groupe Optim
3.2.1. Sur la forclusion du droit d'agir
La lettre de mission d'expertise-comptable du 11 février 2008 précise ce qui suit : 'Nos relations seront réglées sur le plan juridique tant par les termes de cette lettre que par les conditions générales d'intervention établies par notre profession (jointes en annexes).'
Un document établi à l'entête de la société Expertise & performance intitulé 'Mission de présentation des comptes annuels. Conditions générales' est joint à cette lettre de mission. Chaque page de ce document a été paraphée par le représentant de la société Groupe Optim.
Ces conditions générales d'intervention contiennent un article 8 intitulé 'Responsabilité' qui stipule, en son deuxième paragraphe, que : ' Toute demande de dommages-intérêts ne pourra être produite que pendant la période de prescription légale. Elle devra être introduite dans les trois mois suivant la date à laquelle le client aura eu connaissance du sinistre.'
La société Groupe Optim ne conteste pas que cette clause lui soit opposable pour les litiges nés dans le cadre de la mission d'établissement des comptes mais elle soutient que cette clause est nulle car, d'une part, elle n'est ni claire ni précise et, d'autre part, elle ne peut être qualifiée de clause de forclusion mais est au contraire une clause réduisant le délai de prescription en violation des dispositions de l'ancien article 2220 du code civil.
Or, lorsqu'un délai est stipulé pour initier une instance ou exercer un recours, son expiration est sanctionnée par la forclusion et non par la prescription qui affecte l'existence de l'obligation dont l'exécution ou l'inexécution, en matière contractuelle, fonde le droit d'agir.
La clause susvisée fixe un terme au droit d'agir, à savoir trois mois à compter de la date à laquelle le client de l'expert-comptable a eu connaissance du sinistre.
Cette stipulation est dépourvue d'équivoque dès lors que, lue conjointement avec la première phrase de la clause susvisée, elle se réfère clairement au délai dans lequel une demande en dommages et intérêts liée à un manquement imputable à l'expert-comptable doit être introduite c'est-à-dire faire l'objet d'une action en justice.
Il s'agit donc d'une clause claire et précise instituant un délai de forclusion qui n'est atteinte par aucune cause de nullité.
Les premiers juges ont donc fait une exacte application de cette clause aux demandes indemnitaires formées par la société Groupe Option pour cause de manquements de la société E et E à ses obligations nées de la lettre de mission de présentation de comptes du 11 février 2008 après avoir constaté que les faits dommageables invoqués au soutien de ces demandes étaient tous antérieurs de plus de trois mois aux conclusions par laquelle elles ont été formées en justice.
La lettre de mission de gestion de paye du 21 juin 2013 précise ce qui suit : 'Nos relations seront réglées sur le plan juridique tant par les termes de cette lettre que par les conditions générales d'intervention établies par notre profession'.
Il n'est pas établi, ni même soutenu, par la société E et E que les conditions générales auxquelles il est fait référence dans cette clause aient été jointes à la lettre de mission du 21 juin 2013 ou remises à la société Groupe Optim au plus tard au moment de la conclusion du contrat de prestation de service de gestion de la paie.
Il n'est pas pertinent de soutenir, comme le fait la société E et E, que les conditions générales d'intervention visées dans cette clause sont des conditions générales établies par la profession d'expert-comptable identiques à celles qui étaient jointes à la lettre de mission du 11 février 2008 et qui étaient de ce fait connues de la société Groupe Optim, dès lors que ces dernières précisaient expressément qu'elles ne régissaient que les missions comptables et que les interventions de la société E et E en matière sociale étaient qualifiées par la lettre de mission elle-même 'd'interventions complémentaires' requérant une demande expresse de la société Groupe Optim pour avoir à être fournies.
Il ne peut donc être retenu que les conditions générales d'intervention jointes à la lettre de mission du 11 février 2008 sont également applicables à la relation contractuelle née de la lettre de mission du 21 juin 2013 portant sur la mission complémentaire de gestion de paye.
La clause de forclusion stipulée à l'article 8 des conditions générales relatives à la mission de présentation des comptes n'est donc pas applicable à la mission de gestion de paye.
Le jugement déféré sera donc infirmé en ce qu'il a déclaré forcloses les demandes indemnitaires formées par la société Groupe Optim pour cause de manquements de la société E et E imputables à l'exécution de la mission sociale.
3.2.2.- Sur la responsabilité de la société E et E au titre de l'exécution de la mission de gestion de paye
En application de l'article 1147 du code civil, pris dans sa rédaction en vigueur à la date de conclusion de la lettre de mission en litige, l'expert-comptable qui a souscrit une mission de suivi social consistant dans l'établissement de bulletins de salaire et charges sociales pour le compte de son client, est tenu à son égard à un devoir de diligence et aux obligations de moyen d'information, de conseil et de mise en garde.
- Sur l'application erroné de charges sociales sur le revenu versé à M. [T] [S]
La société Groupe Optim soutient que la société E et E a commis une faute en appliquant des charges sociales sur un complément d'allocations d'invalidité versé au titre d'une assurance de prévoyance à l'un de ses salariés, M. [T] [S], alors que seuls devaient être appliqués les prélèvements dus au titre de la CSG, de la CRDS et de la CASA.
La société E et E ne conteste pas l'application des charges sociales qui lui est reproché pour la période allant de juin 2013 à décembre 2014 mais ne reconnaît pas avoir commis une faute ce faisant.
La société Groupe Optim justifie que M. [T] [S] a engagé une action à son encontre devant le conseil de prud'hommes de Montpellier par requête du 19 juillet 2017 (pièce n°25 de l'intimée).
Les demandes de condamnations à paiement formées par M. [S] étaient les suivantes :
'- remboursement des cotisations sociales indûment perçues : 19 118,65 euros,
- dommages et intérêts pour défaut de visite médicale de reprise : 10 000 euros,
- article 700 du code de procédure civile : 2 000 euros.'
La société Groupe Optim expose qu'une transaction est intervenue entre elle et M. [S] et qu'elle a donné lieu au versement d'une indemnité transactionnelle d'un montant brut de 19738,33 euros, soit 16 000 euros net. Elle produit un bulletin de paye en date du 7 novembre 2018 afin d'en justifier (pièce n°5 de l'intimée).
L'objet de la transaction n'est pas établi puisqu'elle n'est pas versée aux débats.
Il en résulte en revanche que l'obligation de remboursement de charges sociales indûment prélevées n'est pas établie par une décision de justice définitive.
La faute de la société E et E ne peut donc être déduite en l'espèce de la réclamation de M. [S], contrairement à ce que soutient la société Groupe Optim.
Il lui incombe donc de caractériser, dans la cadre de la présente instance, la faute commise par la société E et E en procédant à l'imputation de charges sociales sur le revenu versé à M. [S].
Or, elle ne présente aucun moyen de droit tiré des règles du droit du travail ou de la sécurité sociale au soutien de sa demande.
Par suite, la société Groupe Optim est défaillante à apporter la preuve qui lui incombe du manquement qu'elle impute à la société E et E dans l'exécution de ses obligations au titre de l'établissement des bulletins de paye de M. [T] [S]. Elle sera donc déboutée de sa demande indemnitaire formée à ce titre.
- Sur les manquements au devoir de diligence dans l'exécution de la mission de gestion de paye
La société Groupe Optim justifie que la société E et E n'a pas mis en oeuvre la régularisation annuelle des facturations provisionnelles des bulletins de salaire réellement établis prévue par la lettre de mission du 21 juin 2013.
Elle justifie également, pour les bulletins de salaire émis au mois de décembre 2014 que plusieurs erreurs ont été commises par la société E et E dans le traitement de l'arrêt maladie d'une salariée avec maintien du salaire (pièce n°19 de l'intimée), dans la mention du statut d'un salarié (pièce n°17 de l'intimée), dans le versement de la contribution de l'employeur aux frais de transport de salariés et dans l'indication de la nature exacte du congé pris par des salariés (pièces n°8 et 16 de l'intimée).
En revanche, le caractère répété de ces erreurs depuis le mois de juin 2013 n'est pas établi les courriels du 27 juin 2013 et 8 décembre 2014 (pièces n°13 et 15 de l'intimée) caractérisant seulement des échanges entre le directeur financier de la société Groupe Optim et la société E et E pour la transmission, pour partie tardive, d'informations à prendre en compte par la société E et E pour l'établissement des bulletins de paye ou de corrections d'informations erronées précédemment communiquées à la société E et E et la formulation de demandes d'éclaircissements auxquelles la société E et E a répondu en retour de courriel.
La société Groupe Optim ne verse aux débats aucune pièce de nature à établir le lien de causalité entre les manquements de la société E et E à son obligation de diligence qu'elle caractérise pour le mois de décembre 2014 et les préjudices liés à une atteinte à l'image et la réputation, à un surcoût interne, à un dysfonctionnement et à une perte de rentabilité de la société Groupe Optim et à un surcoût pour l'intervention du nouveau gestionnaire de paie à compter du mois de janvier 2015.
Elle ne produit au demeurant aucune pièce prouvant la réalité des dommages qu'elle invoque et des préjudices qu'elle se contente d'alléguer sans produire aucun élément comptable.
Par suite, la société Groupe Optim sera déboutée de toutes ses demandes indemnitaires afférentes à des manquements de la société E et E à ses obligations au titre de la mission de gestion de paye.
4.- Sur la demande en garantie formée par la société Groupe Optim
La société Groupe Optim ne présente aucun moyen de droit et de fait au soutien de cette demande en garantie par la société E et E de réclamations hypothétiques qui pourraient être formées à son encontre du fait des interventions de la société E et E.
Le jugement déféré sera donc confirmé en ce qu'il a débouté la société Groupe Optim de cette demande.
5.- Sur la demande de la société Groupe Optim de dommages et intérêts pour procédure abusive
C'est par de juste motifs que la cour adopte que les premiers juges ont débouté la société Groupe Optim de cette demande indemnitaire.
Il sera simplement ajouté que l'erreur que la société E et E a pu commettre sur l'étendue de ses droits ne suffit pas à caractériser un quelconque abus dans l'exercice de son droit d'action.
Le jugement déféré sera donc confirmé en ce qu'il a débouté la société Groupe Optim de cette demande.
6.- Sur le frais du procès
Le jugement déféré étant confirmé dans l'essentiel de ses dispositions, l'appréciation souveraine qu'ont portée les premiers juges sur l'application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile en première instance ne peut être contestée en cause d'appel.
Echouant en son appel principal, la société E et E sera condamnée aux dépens en application des articles 695 et suivants du code de procédure civile.
Pour ce motif, la société E et E sera déboutée de sa demande formée au titre de l'article 700 du code de procédure civile et sera condamnée à payer la somme de 3 000 euros à la société Groupe Optim à titre d'indemnité de procédure en considération des frais de justice que cette dernière a dû exposer en appel afin d'assurer la défense de ses intérêts.
PAR CES MOTIFS
la cour
CONFIRME le jugement déféré en ses dispositions soumises à la cour sauf en ce qu'il a rejeté les demandes indemnitaires de la société Groupe Optim formées au titre de la mission de gestion de paye pour cause de forclusion,
Statuant à nouveau du chef infirmé :
DÉCLARE la société par actions simplifié Groupe Optim recevable en ses demandes indemnitaires formées au titre de la mission de gestion de paye,
DÉBOUTE la société par actions simplifié Groupe Optim de ses demandes indemnitaires formées au titre de la mission de gestion de paye,
Y ajoutant,
CONDAMNE la société par actions simplifiée Experts et entreprendre [Localité 4] aux dépens de l'instance d'appel,
DÉBOUTE la société par actions simplifiée Experts et entreprendre [Localité 4] de sa demande formée au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
CONDAMNE la société par actions simplifiée Experts et entreprendre [Localité 4] à payer la somme de 3 000 euros à la société par actions simplifié Groupe Optim en application de l'article 700 du code de procédure civile,
LA GREFFIÈRE, LE PRÉSIDENT
S.MOLLÉ E.LOOS