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26/01/2023 | FRANCE | N°20/00155

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 6 - chambre 5, 26 janvier 2023, 20/00155


REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS





COUR D'APPEL DE PARIS



Pôle 6 - Chambre 5



ARRET DU 26 JANVIER 2023



(n°2023/ , 7 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 20/00155 - N° Portalis 35L7-V-B7E-CBGXD



Décision déférée à la Cour : Jugement du 09 Décembre 2019 -Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de MEAUX - RG n° 18/00406





APPELANTE



Madame [O] [Y]

[Adresse 3]

[Localité 2]

née le 31 Mars

1981 à [Localité 4]



Représentée par Me Claire KOLLEN, avocat au barreau de MEAUX



INTIMEE



SASU LA CLINIQUE DE [Localité 5]

[Adresse 1]

[Localité 5]



Représentée par Me Valérie BEBON...

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 5

ARRET DU 26 JANVIER 2023

(n°2023/ , 7 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 20/00155 - N° Portalis 35L7-V-B7E-CBGXD

Décision déférée à la Cour : Jugement du 09 Décembre 2019 -Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de MEAUX - RG n° 18/00406

APPELANTE

Madame [O] [Y]

[Adresse 3]

[Localité 2]

née le 31 Mars 1981 à [Localité 4]

Représentée par Me Claire KOLLEN, avocat au barreau de MEAUX

INTIMEE

SASU LA CLINIQUE DE [Localité 5]

[Adresse 1]

[Localité 5]

Représentée par Me Valérie BEBON, avocat au barreau de PARIS, toque : P0002

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 13 octobre 2022, en audience publique, devant la Cour composée de :

Madame Marie-Christine HERVIER, Présidente de chambre, Présidente de formation,

Madame Marie-José BOU, Présidente de chambre,

Madame Séverine MOUSSY, Conseillère

qui en ont délibéré, un rapport a été présenté à l'audience par Madame Marie-Christine HERVIER, dans les conditions prévues par l'article 804 du code de procédure civile.

Greffier : Madame Cécile IMBAR, lors des débats

ARRÊT :

- contradictoire,

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile, prorogé à ce jour,

- signé par Madame Marie-Christine HERVIER, Présidente et par Madame Cécile IMBAR, greffier à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

EXPOSE DU LITIGE

Par contrat à durée indéterminée du 20 février 2012, Mme [O] [Y] a été engagée par la société Clinique de [Localité 5], (ci après la clinique de [Localité 5]) en qualité d'aide soignante, filière soignante, position I, niveau employé qualifié, groupe A, coefficient 208 pour une durée de travail à temps plein de 35 heures par semaine. Dans le dernier état de la relation contractuelle, elle percevait une rémunération mensuelle moyenne de 1 766,11 euros brut.

Le 3 juin 2016, Mme [Y] a été élue membre suppléant de la délégation unique du personnel.

Le 24 janvier 2017, Mme [Y] a saisi le conseil de prud'hommes de Meaux en résiliation judiciaire de son contrat travail afin d'obtenir essentiellement la condamnation de l'employeur à lui payer des dommages-intérêts pour harcèlement moral, non-respect de son obligation de prévention du harcèlement moral et des indemnités de rupture.

À compter du 18 juillet 2016, Mme [Y] a présenté des arrêts de travail pour maladie et son contrat de travail a été suspendu jusqu'au 2 février 2017, date de la visite de reprise à l'issue de laquelle le médecin du travail l'a déclarée inapte à son poste dans les termes suivants : 'Inaptitude au poste actuel. Tout maintien de la salariée dans un emploi serait gravement préjudiciable à sa santé'. L'inspecteur du travail a autorisé son licenciement par décision du 10 décembre 2018. Mme [Y] a été licenciée pour inaptitude physique et impossibilité de reclassement par courrier recommandé du 14 décembre 2018.

Par jugement du 9 décembre 2019 auquel la cour renvoie pour plus ample exposé des demandes initiales et de la procédure antérieure, le conseil de prud'hommes de Meaux retenant que le licenciement était fondé sur une cause réelle et sérieuse a débouté Mme [Y] de l'ensemble de ses demandes.

Mme [Y] a régulièrement relevé appel du jugement le 31 décembre 2019.

Aux termes de ses dernières conclusions d'appelante n° 1, transmises par voie électronique le 31 mars 2020 auxquelles la cour renvoie pour plus ample exposé des prétentions et moyens conformément à l'article 455 du code de procédure civile, Mme [Y] prie la cour de :

- infirmer le jugement dans toutes ses dispositions,

- dire que son licenciement est nul, subsidiairement sans cause réelle et sérieuse,

- condamner la société Clinique de [Localité 5] à lui verser les sommes de :

* 31'789,98 euros à titre d'indemnité pour licenciement nul, subsidiairement sans cause réelle et sérieuse,

* 3 532,22 euros au titre de l'indemnité compensatrice de préavis outre 352,22 euros à titre d'indemnité compensatrice de congés payés sur préavis,

* 30'000 euros de dommages-intérêts pour harcèlement moral,

* 20'000 euros de dommages-intérêts pour non-respect de l'obligation de prévention du harcèlement moral,

* 52'983,33 euros à titre d'indemnité pour violation du statut protecteur,

* 4 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner la société Clinique de [Localité 5] aux dépens.

Aux termes de ses dernières conclusions transmises par voie électronique le 3 avril 2020, auxquelles la cour renvoie pour plus ample exposé des prétentions et moyens conformément à l'article 455 du code de procédure civile, la société Clinique de [Localité 5] prie la cour de :

- confirmer le jugement en toutes ses dispositions,

- débouter Mme [Y] de l'ensemble de ses demandes,

- la condamner à lui verser la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens.

L'ordonnance de clôture est intervenue le 21 septembre 2022.

MOTIVATION':

Sur l'exécution du contrat de travail':

Sur le harcèlement moral :

Aux termes de l'article L.1152-1 du code du travail, aucun salarié ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel.

L'article L.1154-1 du même code prévoit qu'en cas de litige, le salarié concerné présente des éléments de fait laissant supposer l'existence d'un harcèlement et il incombe alors à l'employeur, au vu de ces éléments, de prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs d'un tel harcèlement et que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement.

Il en résulte que lorsque le salarié établit la matérialité de faits précis et concordants constituant selon lui un harcèlement, il appartient tout d'abord au juge d'apprécier si ces éléments pris dans leur ensemble permettent de présumer l'existence d'un harcèlement moral.

Mme [Y] présente les éléments de faits suivants :

En premier lieu, elle soutient avoir subi un comportement agressif et dénigrant de la part de ses collègues et plus particulièrement de l'infirmière Mme [L] avec laquelle elle travaillait en binôme, celle-ci tenant des propos vexatoires et dénigrants à son égard. Elle verse aux débats l'attestation de Mme [S] [B] qui explique avoir rencontré elle-même des difficultés avec cette infirmière, l'attestation de M. [I], délégué du personnel qui certifie exacts le comportement et les propos vexatoires que Mme [Y] a pu citer lors des entretiens. Elle soutient également que cette collègue refusait de lui transmettre des informations sur les patients, versant au débat un mail de sa part adressée à une personne prénommée [D] le 11 février 2016 ainsi qu'un mail du même jour adressé par elle à une personne dénommée C. [Z] dont il se déduit des pièces communiquées qu'elle était la directrice des soins. La cour considère ces éléments insuffisants pour établir la matérialité de fait précis et concordants relatifs au comportement allégué, dès lors que l'attestation de Mme [B] évoque le comportement de Mme [L] à son égard et non les constatations qu'elle a faites s'agissant de Mme [Y], qu'il ne ressort pas de l'attestation de M. [I] qu'il a constaté lui-même les éléments qu'il rapporte et que les propres écrits de Mme [Y] ne sont pas corroborés par des éléments objectifs de sorte qu'ils ne sont as probants. Les faits présentés par Mme [Y] à ce titre ne sont donc pas matériellement établis.

En second lieu, Mme [Y] soutient que lui a été imposée l'exécution de tâches étrangères à ses attributions, sans contrepartie financière alors qu'à ce jour, deux aides-soignantes accomplissent ces tâches et bénéficient d'un jour de RTT par mois en compensation. Elle verse aux débats outre sa fiche de poste, une attestation de Mme [C] [A], infirmière de jour ayant travaillé à la clinique de [Localité 5] d'octobre 2012 à juin 2014, listant les tâches effectuées à l'époque par Mme [Y] ainsi qu'un mail de sa part adressée à Mme [Z] le 4 octobre 2015 faisant état de tâches supplémentaires qu'on lui a confiées (stockage du linge de lit, commande du linge, rangement des tenues du personnel, réapprovisionnement des locaux de linge propre dans les étages avec manipulation des chariots, brancardage des patients pour des examens d'urgence), ainsi que la copie d'une attestation émanant de M. [R], psychologue en date du 6 janvier 2017, dont la cour relève qu'elle est partiellement tronquée et reflète les déclarations de la patiente et non les propres constatations de son auteur. Enfin, elle s'appuie sur un mail adressé par elle-même, le 5 octobre 2015, au syndicat CGT faisant état des tâches rajoutées. La cour considère qu'ainsi Mme [Y] établit qu'elle a effectué des taches supplémentaires relatives au linge et au brancardage mais qu'elle n'apporte aucun élément de comparaison par rapport aux salariés lesquels ne sont même pas identifiés qui se seraient vu attribuer des jours de réduction de temps de travail au titre de ces mêmes tâches, contrairement à elle de sorte qu'elle ne présente pas de faits susceptibles d'établir une différence de traitement.

En troisième lieu, Mme [Y] fait valoir qu'elle a été mise à l'écart en invoquant :

- l'annonce de la suppression de son poste lors d'un entretien individuel qui s'est tenu le 30 septembre 2015 au cours duquel Mme [Z] lui a annoncé qu'elle serait amenée à travailler en horaires discontinus en hospitalisation complète au lieu et place de l'hôpital de jour. Elle s'appuie dans ses écritures sur l'attestation déjà citée de M. [V], sur le courrier recommandé que lui a adressé le directeur de la clinique le 20 novembre 2013 lui proposant de réintégrer le service de l'hospitalisation de jour à compter du 6 janvier 2014 du lundi au vendredi de 9 heures à 13 heures et de 14 heures à 15h30 avec une heure de pause et lui annonçant qu'au vu de l'activité de ce service, en progression, ils sont amenés à avoir une aide-soignante en continu. Elle vise également dans ses écritures un mail de Mme [Z] adressée à une prénommée [N] le 14 octobre 2015 lui disant qu'il faudrait planifier une réunion sur l'organisation de l'hospitalisation de jour et plus spécifiquement sur la répartition des tâches entre IDE et secrétaire, dont la cour relève qu'elles sont inopérantes pour établir la suppression alléguée ainsi que sur un mail de Mme [Z] du 21 octobre 2015 lui envoyant le relevé de ce qu'elles avaient vu ensemble ce matin également inopérant et enfin un mail de Mme [Z] du 27 octobre 2015 adressé à plusieurs personnes dont les qualités ne sont pas connues faisant état de ce que '[N]' et elle-même avaient travaillé sur la possibilité de basculer des tâches sur le futur secrétariat HDJ, également inopérant. Enfin, Mme [Y] vise dans ses écritures une note de proposition d'emploi disponible en CDI faisant état d'une date limite des candidatures au 4 décembre 2015 pour le recrutement d'une ASD jour à temps complet en horaires discontinus. La cour considère ces éléments insuffisants pour établir la réalité de la suppression de poste alléguée.

- la privation de ses outils de travail, elle fait valoir qu'à compter du mois d'octobre 2015 elle n'a plus eu accès au planning 'patients' pour modifier, entrer ou sortir informatiquement les données relatives aux patients, expliquant que lors d'une de ses absences, un code d'accès a été mis en place à la demande d'une de ses collègues, qu'elle en a sollicité la communication à trois reprises sans réponse, qu'elle a informé la direction de cette difficulté sans réaction et qu'elle n'a pu avoir accès au code susmentionné qu'un mois plus tard. Elle s'appuie sur des mails qu'elle a adressés à Mme [Z] les 19 et 22 octobre 2015 par lesquels elle se plaint de ne pas avoir le code d'accès ainsi qu'un mail de sa part en date du 20 novembre 2015 dans lequel elle confirme qu'elle a reçu le code et s'en étonne.

- son absence de participation aux réunions de travail relatives à l'organisation de l'hôpital de jour contrairement à Mme [L] et ce alors même qu'elles travaillent en binôme. Elle s'appuie sur des mails de Mme [Z] faisant état d'une réunion avec '[N]' sur l'organisation de l'hôpital de jour en date des 14, 21, 27 octobre 2015 et de M. [E] du 18 novembre 2015 et un mail de sa part du 11 février 2016 adressé à M. [V] selon lequel aucune transmission ne lui était faite.

- le retrait de certaines tâches qu'elle n'effectuait plus que lorsque sa collègue était absente et son cantonnement à des tâches sans lien avec ses fonctions d'aide soignante comme la gestion du linge. Elle s'appuie sur l'attestation de l'infirmière de jour Mme [C] [A] listant les tâches que la salariée accomplissait de janvier à juin 2014 déjà citée et sur l'attestation de M. [V] certifiant l'exactitude de la mise en place de tâches ne correspondant pas aux fonctions de l'aide-soignante sans préciser s'il rapporte des propos et dans quelles circonstances il a constaté les faits de sorte que comme il a été dit ci-dessus la valeur probante de cette attestation n'est pas retenue. Par ailleurs aucun élément n'est produit concernant les tâches précises qui auraient été supprimées à Mme [Y]. Les faits ne sont donc pas matériellement établis. Mme [Y] s'appuie également sur un entretien individuel qui s'est tenu le 16 décembre 2015 au cours duquel elle a signalé les difficultés qu'elle rencontrait dont il ressort que l'employeur a voulu remettre à Mme [Y] une fiche de poste modifiée concernant la gestion du linge et lui précise qu'elle n'a pas à effectuer le brancadage des patients puisqu'elle n'est ni habilitée ni protégée pour ce faire et qu'un brancardier est à disposition.

La cour considère que les faits matériellement établis, pris dans leur ensemble laissent supposer des agissements de harcèlement moral et il appartient à l'employeur de démontrer qu'ils sont justifiés par des éléments objectifs qui y sont étrangers.

L'employeur de son côté fait valoir que :

Sur l'attribution de tâches étrangères à celle de la salariée, la gestion du linge fait partie intégrante des fonctions d'un aide-soignant ainsi que cela ressort de l'arrêté du 25 janvier 2005 relatif aux modalités d'organisation de la validation des acquis de l'expérience pour l'obtention du diplôme professionnel d'aide-soignant, dans le cadre de la fonction « assurer l'entretien de l'environnement immédiat de la personne et la réfection des lits » l'aide-soignant doit ainsi et notamment : « évacuer le linge sale en respectant les circuits » refaire les lits, trier le linge. Il précise que cette tâche a été confiée à Mme [Y] à compter du mois de décembre 2014 sans difficultés, s'appuyant sur la fiche de fonction rédigée par Mme [Z] le 19 novembre 2013 mentionnant bien la gestion du linge dans les fonctions d'une aide-soignante. Par ailleurs, s'agissant du brancadrage, l'employeur établit par le compte rendu de l'entretien qui s'est tenu en décembre 2015 que Mme [Y] n'a effectué que 5 brancardages en deux ans, donc très ponctuellement dans des situations non circonstanciées, faisant cependant référence à l'urgence, qui n'ont donc pas eu un caractère habituel et qu'il lui a expliqué qu'elle n'avait pas à le faire et qu'un brancardier se tenait à disposition. La cour considère qu'ainsi, l'employeur établit que les faits sont justifiés par des éléments objectifs, étrangers à tous agissements de harcèlement moral.

Sur la mise à l'écart, aucune annonce n'a été faite à Mme [Y] de la suppression de son poste, il souhaitait que Mme [Y] travaille sur la base d'horaire de 7h30 à 15h30, mais comme, invoquant des contraintes familiales, elle refusait de tels horaires mais ne souhaitait pas davantage être affectée dans un autre service, finalement ses horaires n'ont pas été modifiés. L'employeur se réfère au compte rendu de l'entretien 'information HDI' établi par le délégué syndical, M. [V] et fait valoir qu'il a été répondu à toutes les interrogations de Mme [Y] lors de l'entretien du 16 décembre 2015 avec la directrice des soins en présence du délégué syndical. Enfin, il soutient que les codes d'accès, mis en place en raison d'un 'bug' pendant une absence de Mme [Y], lui ont été fournis, le délai pris s'expliquant par le fait que la directrice des soins ayant vu Mme [Y] devant un planning pensait qu'elle avait obtenu cet accès, et celle-ci confirmant qu'en effet, elle pouvait les lire. La cour considère qu'ainsi l'employeur démontre que les faits sont justifiés par des éléments objectifs étrangers à tous agissements de harcèlement moral. S'agissant de la mise en écart des réunions, l'employeur réplique que Mme [Y] n'a pas été écartée de la vie de la clinique puisqu'elle participait à des groupes de travails ou à une formation et qu'elle était considérée comme un bon élément comme le démontrent ces entretiens annuels. La cour observe toutefois que l'employeur reste taisant sur les réunions organisées entre [N] et Mme [Z] dont Mme [Y] a été écartée.

En définitive, il résulte de ce qui précède que l'employeur échoue à démontrer que Mme [Y] a été écartée de certaines réunions pour des raisons objectives étrangères à tout agissements de harcèlement moral. cependant cet élément à lui seul ne permet pas d'établir l'existence d'agissements répétés de harcèlement moral de sorte que la demande de dommages-intérêts présentée par Mme [Y] à ce titre est rejetée.

Sur le manquement à l'obligation de prévention :

L'article L. 1152-4 du code du travail impose à l'employeur de prendre toutes les dispositions nécessaires en vue de prévenir les agissements de harcèlement moral.

Mme [Y] explique avoir attiré à plusieurs reprises l'attention de son employeur sur le traitement que lui réservait sa collègue Mme [L] ou sur la mise à l'écart dont elle faisait l'objet et lui reproche de n'avoir jamais accordé la moindre attention aux souffrances qu'elle exprimait et n'avoir jamais mis en place un dispositif au sein de l'entreprise aux fins de prévenir les agissements de harcèlement moral.

L'employeur conclut au débouté en faisant valoir que Mme [Y] dans ses divers écrits n'a jamais employé le terme de harcèlement moral.

La cour observe en outre que contrairement à ce que prétend la salariée, ses différentes doléances ont bien donné lieu à des échanges et à une réponse de la part de la direction comme il a été vu ci-dessus, qu'une enquête a été diligentée par le CHSCT dont les conclusions ne sont pas connues mais qui est évoquée par l'inspecteur du travail lors de l'autorisation de licenciement et par ailleurs la cour n'a pas retenu que Mme [Y] avait été victime d'agissements de harcèlement moral. Elle ne justifie donc pas d'un préjudice quelconque au titre du manquement allégué à l'obligation de prévention du harcèlement. Elle est donc déboutée de ce chef de demande et le jugement est confirmé sur ce point.

Sur la rupture du contrat travail :

Sur la demande de nullité du licenciement :

Mme [Y] soutient que son licenciement doit être annulé dès lors que le harcèlement moral qu'elle a subi est à l'origine de son inaptitude au travail. La cour n'ayant pas retenu qu'elle avait été victime d'agissements de harcèlement moral, ce moyen de nullité est écarté et Mme [Y] est déboutée de la demande qu'elle présentait au titre de la nullité du licenciement.

Sur l'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse :

Mme [Y] reproche à l'employeur d'avoir manqué à son obligation de reclassement en ne recherchant pas loyalement et sérieusement à la reclasser en violation des dispositions de l'article L. 1226'2 du code du travail.

La clinique de [Localité 5] s'oppose à la demande en faisant valoir que la cour n'est pas compétente pour apprécier la demande en vertu du principe de séparation des pouvoirs dès lors que l'inspecteur du travail a autorisé le licenciement. À titre subsidiaire, elle fait valoir qu'elle n'avait pas à procéder à une recherche de reclassement en application de l'article R. 4624'42 du code du travail dès lors que le médecin du travail avait spécifié dans son avis d'inaptitude du 2 février 2017 quel'état de santé faisait obstacle à tout reclassement dans un emploi, toute disposition issue de la loi 2016'1088 du 8 août 2016 entrée en vigueur le 1er janvier 2017.

Comme le soutient à juste titre la clinique de [Localité 5], il n'appartient qu'au juge administratif en vertu du principe de séparation des pouvoirs d'apprécier le caractère réel et sérieux du motif de licenciement et en conséquence le respect de l'obligation de reclassement étant observé qu'en l'espèce, l'inspecteur du travail s'est prononcé expressément sur ce point. La cour n'est donc pas compétente pour statuer sur l'absence de cause réelle et sérieuse du licenciement. Le moyen soulevé à l'appui de la demande d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse étant inopérant, la demande d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse est rejetée. Le jugement est confirmé de ce chef.

Sur l'indemnité forfaitaire au titre de la violation du statut protecteur :

Eu égard à la solution du litige, la demande de nullité du contrat de travail du licenciement étant rejetée, la demande d'indemnité au titre de la violation du statut protecteur est rejetée. Le jugement est confirmé en ce qu'il a débouté Mme [Y] de ce chef de demande.

Sur les autres demandes :

Mme [Y], partie perdante est condamnée aux dépens.

Il n'y a pas lieu de faire application de l'article 700 du code de procédure civile en faveur de l'une ou l'autre des parties.

PAR CES MOTIFS':

La cour statuant contradictoirement et par mise à disposition au greffe,

CONFIRME le jugement dans toutes ses dispositions,

DÉBOUTE Mme [O] [Y] de l'ensemble de ses demandes,

Y ajoutant

DIT n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile en faveur de l'une ou l'autre des parties,

CONDAMNE Mme [O] [Y] aux dépens.

LA GREFFIÈRE LA PRÉSIDENTE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 6 - chambre 5
Numéro d'arrêt : 20/00155
Date de la décision : 26/01/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-01-26;20.00155 ?
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