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20/01/2023 | FRANCE | N°18/09720

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 6 - chambre 12, 20 janvier 2023, 18/09720


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS







COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 12



ARRÊT DU 20 Janvier 2023



(n° , 7 pages)





Numéro d'inscription au répertoire général : S N° RG 18/09720 - N° Portalis 35L7-V-B7C-B6H3X



Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 01 Mars 2018 par le Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale de BOBIGNY RG n° 17/01026



APPELANTE

URSSAF ILE DE FRANCE

Division des recours amiables et judiciaires
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[Localité 3]

représentée par Mme [K] [J] en vertu d'un pouvoir général



INTIMEE

S.A.S. [4]

[Adresse 1]

[Localité 2]

représentée par Me Nelly JEAN-MARIE, avocat au b...

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 12

ARRÊT DU 20 Janvier 2023

(n° , 7 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : S N° RG 18/09720 - N° Portalis 35L7-V-B7C-B6H3X

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 01 Mars 2018 par le Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale de BOBIGNY RG n° 17/01026

APPELANTE

URSSAF ILE DE FRANCE

Division des recours amiables et judiciaires

[Adresse 5]

[Localité 3]

représentée par Mme [K] [J] en vertu d'un pouvoir général

INTIMEE

S.A.S. [4]

[Adresse 1]

[Localité 2]

représentée par Me Nelly JEAN-MARIE, avocat au barreau de PARIS, toque : L0307

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 06 Octobre 2022, en audience publique et en double rappoteur, les parties ne s'y étant pas opposées, devant M. Raoul CARBONARO, Président de chambre et M. Gilles REVELLES, Conseiller, chargés du rapport.

Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

M. Raoul CARBONARO, Président de chambre

M. Gilles REVELLES, Conseiller

M. Gilles BUFFET, Conseiller

Greffier : Mme Claire BECCAVIN, lors des débats

ARRET :

- CONTRADICTOIRE

- prononcé

par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

-signé par M. Raoul CARBONARO, Président de chambre et par Mme Claire BECCAVIN, greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

La cour statue sur l'appel régulièrement interjeté par l'Union pour le Recouvrement des cotisations de Sécurité Sociale et d'Allocations Familiales d'Île-de-France (l'Urssaf) d'un jugement rendu le 1er mars 2018 par le tribunal des affaires de sécurité sociale de Bobigny dans un litige l'opposant à la S.A.S. [4] (la société).

FAITS, PROCÉDURE, PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES

Les circonstances de la cause ayant été correctement rapportés par le tribunal dans son jugement au contenu duquel la cour entend se référer pour un plus ample exposé, il suffit de rappeler qu'à la suite d'un contrôle de l'application de la législation de sécurité sociale sur la période du 1er janvier 2013 au 31 décembre 2015, le service du contrôle a notifié à la société une lettre d'observations du 18 octobre 2016 faisant état de 42 chefs pour un redressement envisagé d'un montant total de cotisations et contributions de sécurité sociale, d'assurance chômage et d'AGS de 597 430 euros ; qu'à la suite d'un échange contradictoire, le service du contrôle a maintenu le 25 novembre 2016 le montant total du redressement envisagé ; que le 14 décembre 2007, l'Urssaf a notifié à la société une mise en demeure valant redressement pour la somme de 675 682 euros incluant 78 252 euros de majorations de retard provisoires ; que le 20 janvier 2017, la société a saisi la commission de recours amiable compétente (CRA) et procédé au paiement du montant total figurant dans la mise en demeure ; qu'en outre, elle a sollicité la remise des majorations de retard ; que le 31 mars 2017, la CRA a rejeté les requêtes au titre des chefs de redressement numéros 6, 13 et 14 ; que le 28 juin 2017, la société a porté le litige devant le tribunal des affaires de sécurité sociale de Bobigny.

Par jugement du 1er mars 2018, le tribunal a :

- Déclarer le recours de la société recevable et partiellement bien-fondé ;

- Débouté la société de sa demande d'annulation du redressement notifié par la lettre d'observations du 18 octobre 2016 pour manquement au principe du contradictoire ;

- Validé le chef de redressement n°1 notifié par l'Urssaf dans sa lettre d'observations du 18 octobre 2016 au titre de la réduction générale des cotisations pour un montant de 12 253 euros ;

- Validé le chef de redressement n°18 notifié par l'Urssaf dans sa lettre d'observations du 18 octobre 2018 au titre de la réduction du taux de la cotisation d'allocations familiales pour un montant de 7 138euros ;

- Validé le chef de redressement n°41 notifié par l'Urssaf dans sa lettre d'observations du 14 octobre 2016 au titre de la réduction générale des cotisations pour un montant de 12 921 euros ;

- Validé le chef de redressement n°42 notifié par l'Urssaf dans sa lettre d'observations du 18 octobre 2016 au titre de la réduction du taux de la cotisation d'allocations familiales pour un montant de 3 869 euros ;

- Annulé le chef de redressement n°6 notifié par l'Urssaf dans sa lettre d'observations du 18 octobre 2016 au titre des cotisations dues sur la rupture conventionnelle du contrat de travail de [O] [M] en raison de l'âge du salarié, et condamné l'Urssaf au remboursement des cotisations résultant de cette annulation, outre les majorations de retard afférentes, et validé le chef de redressement n°6 pour le surplus, soit pour la rupture du contrat de travail de [L] [B] et de [I] [P] ;

- Renvoyé le dossier à l'Urssaf afin qu'il soit procédé au calcul du nouveau montant de cotisations et au remboursement dû en raison de l'annulation partielle du chef de redressement n°6 ;

- Annulé le chef de redressement n°13 notifié par l'Urssaf dans sa lettre d'observations du 18 octobre 2016 au titre de l'abattement d'assiette plafonné en matière de temps partiel pour un montant de 16 085 euros, outre les majorations de retard afférentes ;

- Condamné en conséquence l'Urssaf à rembourser à la société la somme de 16 085 euros, outre les majorations de retard correspondantes, au titre du chef de redressement n°13 annulé ;

- Annulé le chef de redressement n°14 notifié par l'Urssaf dans sa lettre d'observations du 18 octobre 2016 au titre de l'abattement d'assiette plafonné pour les cadres au forfait pour un montant de 83 773 euros, outre les majorations de retard afférentes ;

- Condamné en conséquence l'Urssaf à rembourser à la société la somme de 83 773 euros, outre les majorations de retard correspondantes, au titre du chef de redressement n°14 annulé ;

- Ordonné la remise des majorations de retard non annulées par la présente décision et, en conséquence, condamné l'Urssaf à les rembourser à la société ;

- Débouté la société de sa demande de condamnation de l'Urssaf sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

- Débouté les parties de leurs demandes plus amples ou contraires ;

- Dit n'y avoir lieu au prononcé de l'exécution provisoire.

Pour statuer ainsi, le tribunal a relevé que la lettre d'observations mentionnait les documents pris en compte par les inspecteurs du recouvrement, identifié les erreurs commises, calculé pour chaque année les différences de montants et exposé la formule de calcul applicable pour chaque chef de redressement, de telle sorte que les dispositions de l'article R. 243-59 du code de la sécurité sociale avaient été respectées. S'agissant du chef de redressement n°6, le tribunal a indiqué que [O] [M] avait signé une rupture conventionnelle alors qu'il était âgé de 56 ans et 11 mois et qu'il avait débuté son activité professionnelle à 16 ans alors qu'il ne comptabilisait que 151 trimestres au régime général des retraites et ne pouvait pas bénéficier d'une retraite anticipée compte tenu des textes applicables, de telle sorte que les indemnités versées n'étaient pas éligibles à une exonération de cotisations. S'agissant des autres salariés, le tribunal a fait reproche à l'Urssaf de ne pas démontrer qu'ils n'étaient pas en droit de bénéficier d'une pension de retraite du régime légalement obligatoire lors de la signature de la rupture conventionnelle. S'agissant du chef de redressement n°13, le tribunal a reproché à l'Urssaf sa méthode de calcul de l'abattement d'assiette plafonné qui n'est pas conforme aux textes. S'agissant du chef de redressement n°14, le tribunal a estimé que la société justifiait, contrairement à ce qui était soutenu par l'Urssaf, que les salariés concernés observaient contractuellement une durée de travail mensuelle inférieure à la durée mensuelle résultante de l'application, durant cette période, de la durée légale du travail, de telle sorte que la durée du temps de travail était déterminable ou déterminée sur une base horaire, rendant possible le calcul d'abattement. S'agissant de la demande de remise de majoration de retard, le tribunal a relevé que la société, après avoir demandé au directeur d'y procéder, avaient payé l'intégralité du redressement et des majorations de retard, les conditions étant remplies.

L'Urssaf a interjeté appel de ce jugement le 2 août 2018, lequel lui avait été notifié le 20 juillet 2018, en précisant que cet appel ne portait que sur les dispositions relatives aux chefs de redressement n°6, 13 et 14 correspondant aux trois chefs contestés devant la CRA.

L'Urssaf a fait déposer et soutenir oralement des conclusions par son représentant, précisant que l'appel ne portait que sur le chef n°14, demandant à la cour de :

- Déclarer son appel recevable et bien-fondé ;

Y faisant droit,

- Infirmer le jugement attaqué en ce qu'il a annulé le redressement n°14 relatif au « plafond temps partiel : abattements d'assiette plafonnée (cadres au forfait) » ;

Statuant à nouveau,

- Confirmer la décision rendue par la commission de recours amiable sur ce point le 31 mars 2017 ;

- Condamner la société à lui payer la somme de 1 500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.

La société fait soutenir et déposer par son conseil des conclusions écrites demandant à la cour, au visa des articles L. 242-8 et R. 242-7 du code de la sécurité sociale, L. 3123-1 du code du travail et 700 du code de procédure civile, de :

- Confirmer le jugement du tribunal des affaires de sécurité sociale de Bobigny du 1er mars 2018 notamment en ce qu'il a annulé le chef de redressement n°14 notifié par l'Urssaf, outre les majorations de retard y afférentes ;

En conséquence,

- Juger qu'elle a valablement appliqué l'abattement d'assiette sur les rémunérations des salariés au forfait jour ;

- Annuler le chef de redressement n°14 de la lettre d'observations notifiée par l'Urssaf en date du 18 octobre 2016, relatif à l'application d'un abattement d'assiette sur les rémunérations des salariés cadres au forfait jour, correspondant à un montant de 83 773 euros ;

- Ordonner le remboursement par l'Urssaf des sommes indûment payées pour un montant total de 83 773 euros au titre de l'annulation du chef de redressement n°14 ;

En tout état de cause,

- Annuler l'ensemble des chefs de redressement non contesté par l'Urssaf (chefs de redressement n°6 et n°13) ;

- Ordonner le remboursement par l'Urssaf des sommes indûment payés au titre des chefs de redressement n°6 et n°13, outre les majorations de retard y afférents ;

- Débouter l'Urssaf de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions ;

- Condamner l'Urssaf à lui payer la somme de 8 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- Condamner l'Urssaf aux entiers dépens.

Il est renvoyé aux conclusions déposées par les parties pour un plus ample exposé des moyens développés au soutien de leurs prétentions.

SUR CE,

L'article L. 242-8 du code de la sécurité sociale, dans sa version applicable, disposait que :

« Pour le calcul des cotisations de sécurité sociale dues au titre des salariés employés à temps partiel, au sens de l'article L. 212-4-2 du code du travail, et qui sont déterminées compte tenu du plafond prévu à l'article L. 241-3, il est opéré un abattement d'assiette destiné à compenser la différence entre le montant des cotisations dues au titre de chacun de ces salariés et le montant des cotisations qui seraient dues pour une durée de travail identique dans le cas où chacun d'eux travaillerait à temps complet. »

L'article L. 242-9 du code de la sécurité sociale, dans sa version applicable, disposait que :

« À chaque échéance de versement des cotisations, l'employeur procède à l'abattement d'assiette mentionné à l'article L. 242-8.

« L'abattement d'assiette prévu par l'article L. 242-8 ne peut être maintenu au bénéfice des employeurs, pour ceux de leurs salariés qui auront accompli au-delà de la durée fixée par le contrat de travail définie au premier alinéa de l'article L. 212-4-3 du code du travail, un nombre d'heures complémentaires tel que la durée hebdomadaire effective accomplie par ces salariés est égale à la durée normale du travail dans l'établissement.

« Un arrêté interministériel fixe les conditions d'application du présent article. »

L'article R. 242-7 du code de la sécurité sociale, abrogé, dans sa rédaction applicable, disposait que :

« Pour le calcul des cotisations de sécurité sociale qui sont à la charge de l'employeur et qui, par application de l'article L. 241-3, sont assises sur les rémunérations perçues par les assurés dans la limite d'un plafond, l'employeur est en droit d'opérer, à chaque échéance de paie, un abattement sur les rémunérations des salariés à temps partiel au sens de l'article L. 3123-1 du code du travail du code du travail, à l'exclusion de ceux qui sont énumérés à l'article L. 242-10 du présent code.

« Toutefois cet abattement ne peut être effectué que dans les cas où la rémunération que le salarié aurait perçue s'il avait occupé son poste ou son emploi à temps complet aurait été supérieure au plafond applicable, pour la période considérée, au calcul des cotisations de sécurité sociale.

« Pour l'application de la présente section, la rémunération qu'un salarié à temps partiel aurait perçue s'il avait été employé à temps complet est égale au produit de la rémunération brute et du rapport entre la durée légale du travail ou, si elle lui est inférieure, la durée de travail fixée conventionnellement pour la branche ou l'entreprise ou la durée de travail applicable dans l'établissement, rapportée à la période considérée, et, selon que cette durée est exprimée en jours ou en heures, le nombre de jours ou le nombre d'heures rémunérés afférents à cette même période. La rémunération brute prise en compte est constituée des rémunérations telle que définies à l'article L. 242-1 versées au salarié au titre de la période d'activité considérée. »

L'article L. 212-4-2 du code du travail, abrogé, recodifié sous l'article L. 3123-1 du même code, dans sa version applicable, disposait que :

« Dans les entreprises, professions et organismes mentionnés à l'article L. 212-4-1, des horaires de travail à temps partiel peuvent être pratiqués sur la base d'une convention collective ou d'un accord de branche étendu ou d'une convention ou d'un accord d'entreprise ou d'établissement. En l'absence d'accord, ils peuvent être pratiqués après avis du comité d'entreprise ou, à défaut, des délégués du personnel. Cet avis est transmis dans un délai de quinze jours à l'inspecteur du travail. En l'absence de représentation du personnel, les horaires de travail à temps partiel peuvent être pratiqués à l'initiative du chef d'entreprise ou à la demande des salariés après information de l'inspecteur du travail.

« Sont considérés comme salariés à temps partiel les salariés dont la durée du travail est inférieure :

« - à la durée légale du travail ou, lorsque ces durées sont inférieures à la durée légale, à la durée du travail fixée conventionnellement pour la branche ou l'entreprise ou aux durées du travail applicables dans l'établissement ;

« - à la durée mensuelle résultant de l'application, sur cette période, de la durée légale du travail ou, si elles sont inférieures, de la durée du travail fixée conventionnellement pour la branche ou l'entreprise ou des durées du travail applicables dans l'établissement ;

« - à la durée de travail annuelle résultant de l'application sur cette période de la durée légale du travail, soit 1 607 heures, ou, si elles sont inférieures, de la durée du travail fixée conventionnellement pour la branche ou l'entreprise ou des durées du travail applicables dans l'établissement. »

Il résulte de ces textes que pour le calcul des cotisations de sécurité sociale plafonnées des salariés employés à temps partiel, il est opéré un abattement d'assiette destiné à compenser la différence entre le montant des cotisations dues au titre de chacun de ces salariés et le montant de cotisations qui seraient dues pour une durée de travail identique dans le cas où ceux-ci travailleraient à temps complet. Les employeurs occupant des travailleurs à temps partiel ont ainsi la faculté de procéder à un abattement d'assiette pour le calcul des cotisations plafonnées. En outre, la durée du travail des salariés à temps partiel est fixée en heures à un niveau inférieur à la durée légale ou conventionnelle hebdomadaire, mensuelle ou annuelle. Enfin, le nombre de 218 jours de travail par an fixé par la loi ne correspond pas à un temps plein annuel mais à un plafond maximal de jours annuel pouvant être fixé par accord.

Au terme de la lettre-circulaire de l'ACOSS 2004-136 du 8 octobre 2004 « les salariés qui peuvent voir leur durée de travail exprimée en jours en application de l'article L. 215-15-3, III du code du travail, ne sont pas des salariés à temps partiel et cela quel que soit le nombre de jours de travail figurant dans leur convention de forfait ». La doctrine administrative, jusqu'en 2021, en conclut que les salariés signataires d'une convention de forfait en jours sont exclus du bénéfice de l'abattement.

En effet, à compter du 1er avril 2021, l'administration considère que le plafond applicable aux salariés soumis à un régime de forfait annuel en jours dont la durée est inférieure à 218 jours sur l'année peut être réduit dans les mêmes conditions que pour les salariés à temps partiel (Bulletin officiel de la sécurité sociale, principes, Assiette générale, Chapitre 6 Le plafond de la sécurité sociale, Section 2 Détermination de l'assiette plafonnée). Toutefois, cette lettre-circulaire, opposable à l'Urssaf, n'a pas pour autant d'effet rétroactif et ne peut lui être opposée au titre des exercices 2013 à 2015.

En droit, la Cour de cassation a considéré que ce dispositif d'abattement n'est pas applicable aux salariés ayant conclu une convention de forfait en jours à temps réduit car ils ne sont pas des salariés à temps partiel (Cass., civ. 2, 1er décembre 2011, n°10-19710 ; Cass., civ. 2, 28 mai 2015, n°14-15695 ; Cass., civ. 2, 12 juillet 2018, n°17-22511). La Cour de cassation a également estimé que cette exclusion ne viole pas les principes d'égalité devant la loi et l'impôt, rejetant la transmission d'une QPC (Cass., civ. 2, 11 juillet 2013, n°13-40025).

En l'espèce, les inspecteurs du recouvrement ont constaté que les salariés qui relèvent de la classification 5C et plus sont en forfait jour et que le nombre de jours maximum travaillés dans le cadre de ce forfait s'élève à 211 jours jusqu'au 31 décembre 2013, puis à 210 jours à compter du 1er janvier 2014 à la suite de la négociation annuelle obligatoire signée en décembre 2013.

Certains salariés, en accord avec l'employeur, ont opté pour un nombre de jours forfaitaires travaillés inférieur à ces 211 jours ou 210 jours. Ainsi, par exemple, une salariée, [V] [C] a choisi un forfait annuel de 174 jours (pièce n°10 de la société). La société a appliqué pour ces derniers salariés un abattement d'assiettes plafonné considérant qu'il s'agissait de salariés à temps partiel au sens de l'article L. 3123-1 du code du travail.

Or, en application des dispositions de l'article L. 3123-1 du code du travail interprété à la lumière de la directive 97/81/CE du Conseil du 15 décembre 1997 et de l'accord-cadre qui y est annexé, les salariés ayant conclu des conventions de forfait en jours sur l'année dont le nombre est inférieur à 218, ne peuvent être considérés comme salariés à temps partiel de sorte qu'il s'ensuit que l'article L. 242-8 du code de la sécurité sociale ne s'applique pas au calcul des cotisations y afférent (Cass, Civ. 2, 28 mai 2015, n°14-15695).

Dès lors, seuls les salariés employés à temps partiel au sens du code du travail, c'est-à-dire les salariés dont la durée de travail est obligatoirement fixée en heure à un niveau inférieur à la durée légale ou conventionnelle hebdomadaire, mensuelle ou annuelle, pouvant bénéficier de l'abattement en cause, les salariés dont la durée du travail est exprimée en jour ne sont pas concernés par cette mesure et ne pouvaient pas faire l'objet de l'abattement en cause au titre des exercices 2013 à 2015.

L'argumentation de la société selon laquelle la position de l'Urssaf serait contraire au droit de l'Union européenne en ce qu'elle méconnaît la définition des travailleurs à temps partiel au sens de la directive du 15 décembre 1997, et qu'elle constituerait une discrimination indirecte dès lors que la majorité de ces travailleurs sont des femmes, est sans emport sur la solution du litige.

Dans ces conditions, c'est à juste titre que les inspecteurs du recouvrement ont annulé l'abattement de l'assiette plafonnée et calculé un rehaussement de cotisations de sécurité sociale ayant donné lieu au redressement contesté.

Le jugement sera infirmé sur ce seul point.

Les chefs de redressements n°6 et 13 annulés par le tribunal n'étant pas contestés par l'Urssaf, il n'y a pas lieu de les annuler, le jugement étant confirmé pour le surplus. Les demandes de la société formées à ce titre sont sans objet.

Il n'y a pas lieu de faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

LA COUR,

DÉCLARE l'appel recevable ;

INFIRME le jugement déféré en ce qu'il a annulé le chef de redressement n°14 relatif au « plafond temps partiel : abattement d'assiette plafonnée (cadres au forfait) », le confirme pour le surplus ;

Statuant à nouveau sur le seul chef infirmé,

VALIDE le chef de redressement n°14 notifié par l'Urssaf dans sa lettre d'observations du 18 octobre 2016 relatif au « plafond temps partiel : abattement d'assiette plafonnée (cadres au forfait) » correspondant au montant de 83 773 euros en cotisations ;

REJETTE les demandes de la S.A.S. [4] en annulation du chef de redressement n°14 notifié par l'Urssaf dans sa lettre d'observations du 18 octobre 2016 relatif au « plafond temps partiel : abattement d'assiette plafonnée (cadres au forfait) » et en remboursement de la somme de 83 773 euros en cotisations ;

DIT que les demandes de la S.A.S. [4] relatives aux chefs de redressement n°6 et 13 sont sans objet ;

DIT n'y avoir lieu de faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

CONDAMNE la S.A.S. [4] aux dépens d'appel.

La greffière Le président


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 6 - chambre 12
Numéro d'arrêt : 18/09720
Date de la décision : 20/01/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-01-20;18.09720 ?
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