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19/01/2023 | FRANCE | N°21/09490

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 4 - chambre 11, 19 janvier 2023, 21/09490


REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS



COUR D'APPEL DE PARIS



Pôle 4 - Chambre 11



ARRET DU 19 JANVIER 2023



(n° , pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 21/09490

N° Portalis 35L7-V-B7F-CDWHQ



Décision déférée à la Cour : Jugement du 04 Mai 2021 -TJ de PARIS - RG n° 18/05184



APPELANT



Monsieur [Z] [L]

[Adresse 2]

[Localité 10]

né le [Date naissance 1] 1975 à [Localité 8] (France)

Représenté

par Me Jean-Claude CHEVILLER, avocat au barreau de PARIS, toque : D0945

Assisté par Hidaya BOUKERFA, avocat au barreau de PARIS



INTIMES



S.A. MMA IARD

[Adresse 3]

[Localité 6]

Représentée p...

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 4 - Chambre 11

ARRET DU 19 JANVIER 2023

(n° , pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 21/09490

N° Portalis 35L7-V-B7F-CDWHQ

Décision déférée à la Cour : Jugement du 04 Mai 2021 -TJ de PARIS - RG n° 18/05184

APPELANT

Monsieur [Z] [L]

[Adresse 2]

[Localité 10]

né le [Date naissance 1] 1975 à [Localité 8] (France)

Représenté par Me Jean-Claude CHEVILLER, avocat au barreau de PARIS, toque : D0945

Assisté par Hidaya BOUKERFA, avocat au barreau de PARIS

INTIMES

S.A. MMA IARD

[Adresse 3]

[Localité 6]

Représentée par Me Patrice ITTAH de la SCP LETU ITTAH ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, toque : P0120

assistée par Me Cynthia PERRET, avocat au barreau de PARIS

MUTUELLE SANTE UMT

[Adresse 4]

[Localité 7]

n'a pas constitué avocat

CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DE TOLOUSE

[Adresse 5]

[Localité 10]

n'a pas constitué avocat

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 10 Novembre 2022, en audience publique, devant la Cour composée de :

Mme Françoise GILLY-ESCOFFIER, présidente de chambre

Mme Nina TOUATI, présidente de chambre

Mme Dorothée DIBIE, conseillère

qui en ont délibéré, un rapport a été présenté à l'audience par Madame [P] [G] dans les conditions prévues par l'article 804 du code de procédure civile.

Greffier lors des débats : Mme Roxanne THERASSE

ARRET :

- Réputé contradictoire

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Françoise GILLY-ESCOFFIER, présidente de chambre et par Roxanne THERASSE, greffière, présente lors de la mise à disposition à laquelle la minute a été remise par le magistrat signataire.

FAITS ET PROCEDURE

Le 24 juin 2008, alors qu'il était piéton, M. [Z] [L], né le [Date naissance 1] 1975, a été victime d'un accident de la circulation dans lequel était impliqué le véhicule conduit par Mme [V] [B] épouse [R] et assuré auprès de la société Mutuelle du Mans assurance (la société MMA).

A la suite de cet accident, M. [L] a notamment subi un écrasement des deux membres inférieurs ayant nécessité une amputation bilatérale à l'union tiers moyen-tiers supérieur ainsi qu'une fracture du col du fémur avec syndrome des loges ayant nécessité une ostéosynthèse par enclouage centromédullaire avec reprises chirurgicales ainsi qu'une fracture de l'omoplate gauche et de l'arc moyen de la première côte gauche.

Le 23 juin 2009, un rapport d'expertise amiable contradictoire de M. [L] a été établi par les Docteurs [K] et [F] qui mentionnent que le problème prothétique a été apprécié par M. [N] qui après avoir examiné M. [L] le 20 mars 2009, a rédigé un rapport détaillé concernant l'appareillage.

Le 16 décembre 2009, sur la base du rapport d'expertise, une transaction portant sur la liquidation des préjudices de M. [L] est intervenue entre celui-ci et la société MMA, pour un montant de 786 032,93 euros, outre une rente mensuelle de 617,50 euros s'agissant de la tierce personne.

M. [L] ayant allégué une aggravation de son état, une expertise amiable a été réalisée par les Docteurs [U] et [K] qui ont remis un pré-rapport le 19 février 2015 dans lequel ils relèvent que « le problème dominant est celui de l'appareillage » et que l'avis de M. [N] sera recherché.

La société MMA, considérant que l'état de santé de M. [L] n'était pas aggravé l'a, par courriel du 14 novembre 2016, informé de son refus de prendre en charge de nouvelles prothèses.

M. [L] a alors saisi le juge des référés du tribunal de grande instance de Paris qui, par ordonnance du 27 février 2017, a ordonné une expertise médicale en aggravation et désigné le Docteur [T].

Celui-ci a établi son rapport le 22 septembre 2017.

Par exploits des 18, 23 et 25 avril 2018, M. [L] a fait assigner devant le tribunal de grande instance de Paris la société MMA, la caisse primaire d'assurance maladie de la Haute-Garonne (la CPAM) ainsi que la Mutuelle santé UMT, aux fins de voir indemniser son préjudice en aggravation et de faire réserver le poste de dépenses de santé futures.

Par ordonnance du 16 avril 2019, le juge de la mise en état du tribunal de grande instance de Paris a ordonné une mesure d'expertise confiée à M. [N] qui a établi son rapport le 9 décembre 2019.

Par jugement du 4 mai 2021, le tribunal judiciaire de Paris a :

- déclaré irrecevables les demandes d'indemnisation formées par M. [L],

- déclaré le présent jugement commun à la CPAM à la société Mutuelle santé UMT,

- condamné M. [L] aux dépens qui comprendront les frais d'expertise,

- débouté M. [L] de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- dit n'y avoir lieu au prononcé de l'exécution provisoire du présent jugement,

- débouté les parties de leurs demandes plus amples ou contraires.

Par déclaration du 26 mai 2021, M. [L] a interjeté appel de cette décision en visant toutes ses dispositions.

La CPAM, ainsi que la société Mutuelle santé UMT, auxquelles la déclaration d'appel a été signifiée respectivement les 6 et 7 juillet 2021, par actes d'huissier délivrés à personne habilitée, n'ont pas constitué avocat. La CPAM a, par lettre du 24 juin 2021, fait savoir qu'elle n'entendait pas intervenir à l'instance.

PRETENTIONS ET MOYENS DES PARTIES

Vu les conclusions de M. [L], notifiées le 6 septembre 2022, aux termes desquelles il demande à la cour, au visa de la loi du 5 juillet 1985, de :

- infirmer le jugement rendu le 4 mai 2021 qui a déclaré irrecevables ses demandes d'indemnisation,

Ce faisant,

- condamner la société MMA à lui verser les sommes suivantes :

- 51 131,25 euros au titre du déficit fonctionnel temporaire

- 40 000 euros au titre des souffrances endurées

- 25 699,79 euros au titre des dépenses de santé actuelles (sauf à parfaire)

- 388 096,53 euros au titre des dépenses de santé futures au-delà de la créance de la CPAM,

- condamner la société MMA à lui verser la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner la société MMA aux entiers dépens de l'instance comprenant les frais d'expertise judiciaire,

- déclarer la décision à intervenir opposable à la société MMA et commun aux organismes sociaux appelés dans la cause.

Vu les conclusions de la société MMA, notifiées le 1er septembre 2022, aux termes desquelles elle demande à la cour, au visa des articles 122, 1355, 2044 et 2052 du code de procédure civile, de :

- recevoir la société MMA en ses conclusions et y faisant droit,

- confirmer le jugement du tribunal judiciaire de Paris en date du 4 mai 2021 dans toutes ses dispositions,

Par conséquent,

- juger que l'état de santé de M. [L] ne fait pas l'objet d'une aggravation,

- déclarer irrecevables les demandes formulées par M. [L] car se heurtant à l'autorité de la chose jugée,

- débouter M. [L] de l'ensemble de ses demandes, fins de conclusions,

A titre infiniment subsidiaire et dans l'hypothèse où était reconnue l'aggravation de l'état de santé de M. [L],

- fixer le préjudice de M. [L] tel qu'exposé dans le corps des présentes :

- déficit fonctionnel temporaire : 49 086 euros

- souffrances endurées : 25 000 euros

- dépenses de santé futures : 43 252,98 euros + 9 105,04 euros de rente annuelle

A titre subsidiaire : 368 849,21 euros

- réserver l'indemnisation des postes de préjudice dépenses de santé actuelles dans l'attente de la production des justificatifs de remboursement des organismes sociaux et des devis et factures s'y rattachant,

- débouter M. [L] de ses demandes, fins et conclusions plus amples et/ou contraires dirigées à l'encontre de la société MMA,

En tout état de cause,

- débouter M. [L] de sa demande de condamnation au titre de l'article 700 du code de procédure civile et des dépens,

- condamner M. [L] à verser à la société MMA la somme de 2 000 euros,

- condamner M. [L] aux entiers dépens.

MOTIFS DE LA DECISION

Sur la fin de non-recevoir tirée de l'autorité de la chose jugée

Le tribunal a déclaré irrecevables les demandes de M. [L] au regard de l'autorité de chose jugée attachée à la transaction acceptée le 16 décembre 2009, dans la mesure où il n'est pas établi que les interventions qu'il a subies à partir du 25 mai 2010, qui visaient à améliorer son état et son autonomie, aient été rendues nécessaires par une aggravation de son état de santé et que les soins importants qui ont suivi sont liés aux complications, notamment infectieuses, survenues dans les suites des interventions d'ostéo-intégration.

M. [L] soutient que face à l'intolérance aux prothèses, les complications des ostéo-intégrations, réalisées les 26 mai et 29 juin 2010, s'analysent comme une aggravation dans la mesure où elles étaient inéluctables et non évaluables lors de l'expertise du 23 juin 2009 sur laquelle est fondée la transaction du 16 décembre 2009. Il souligne que le Docteur [T] après avoir constaté une évolution et une aggravation de son état de santé a fixé la date de la nouvelle consolidation au 4 juillet 2017, étant précisé que la date de consolidation du dommage initial avait été fixée au 31 mai 2009.

La société MMA conteste le fait que les infections nosocomiales développées dans les suites des ostéo-intégrations réalisées en Allemagne relèvent d'une aggravation.

Elle précise que ces opérations ont été pratiquées, à l'initiative de M. [L] et sans qu'il ne rapporte la preuve de leur justification médicale, pour améliorer sa qualité de vie et son état tel qu'il avait été indemnisé.

Elle ajoute qu'au moment de la transaction, les symptômes (douleurs persistantes et mouvements difficiles) l'ayant conduit à de telles interventions étaient connus et qu'ils ont été pris en considération dans l'indemnisation de ses préjudices définitifs.

Elle conclut également que M. [L] ne démontre pas l'existence d'une aggravation de son état clinique qui s'est au contraire amélioré.

Sur ce, il résulte de l'article 2044 du code civil, dans sa rédaction applicable à la date de la signature de la transaction, que «  La transaction est un contrat par lequel les parties terminent une contestation née, ou préviennent une contestation à naître. Ce contrat doit être rédigé par écrit » de l'article 2052 de ce code, dans sa rédaction alors applicable, que « Les transactions ont, entre les parties, l'autorité de la chose jugée en dernier ressort. Elles ne peuvent être attaquées pour cause d'erreur de droit, ni pour cause de lésion ».

La transaction du 16 décembre 2009 précise que « si dans l'avenir, il était constaté par rapport aux conclusions de l'expertise médicale, une aggravation en relation directe avec l'accident et entraînant un préjudice nouveau, cette aggravation pourrait faire l'objet d'une nouvelle indemnisation sans que la présente transaction puisse être remise en cause ».

L'aggravation du dommage initial causé par un accident peut découler de nouveaux préjudices résultant des soins qui ont été prodigués à la victime postérieurement à sa consolidation en vue d'améliorer son état séquellaire causé par cet accident.

Le Docteur [T] a indiqué dans son rapport définitif du 22 septembre 2017 que M. [X] déclare « qu'il rencontre de nombreux ennuis à l'utilisation des prothèses et a le désir d'améliorer son autonomie locomotrice par la technique d'ostéo-intégration » et qu'avant l'intervention, plusieurs examens médicaux ont été réalisés (le 7 septembre 2009, un scanner des membres inférieurs « pour bilan avant chirurgie » à la demande du Docteur [W], spécialisé dans la chirurgie des implants à [Localité 9], le 11 septembre 2009, une scintigraphie osseuse du corps entier, le 24 septembre 2009, une IRM de la cuisse gauche, le 22 avril 2010, il a consulté le Docteur [A], chirurgien orthopédique à [Localité 10]). Le rapport relève également que de nombreuses complications infectieuses ont suivi les interventions des 26 mai et 29 juin 2010 et a conclu que : « Les interventions d'ostéo-intégration réalisées depuis la dernière expertise qui se sont compliquées d'infections nécessitant de nombreuses reprises chirurgicales, de nouvelles implantations, une nouvelle ablation à gauche sont une aggravation du préjudice subi depuis la dernière consolidation elles sont en relation directe et certaine avec les faits.

Les interventions sur le fémur gauche, ablation du clou, traitement de l'infection, chirurgie plastique de traitement des adhérences, constituent une aggravation en relation directe et certaine avec les faits (...) ».

En outre, le Docteur [W]-[C], chirurgien orthopédique et traumatologique qui « certifie avoir pris en charge M. [L] dans les suites d'une double amputation tibiale traumatique », atteste, le 8 juin 2017, non pas de manière générale mais concernant son patient, M. [L], qu'il « avait été appareillé de façon classique avec emboîture et avait du mal à contenir une marche normale avec une double amputation. Il est vrai que les emboîtures donnent de bons résultats, mais sur les doubles amputations la marche et le déroulement du pas sont compliqués, notamment sur le plan de l'équilibre et également au niveau de la peau, qui est soumise à des variations et à des plaies chroniques qui provoquent une marche et une endurance très faibles ».

« Les douleurs au niveau des extrémités des moignons, notamment au contact, avec amyotrophie » et les « difficultés pour mettre en place ses manchons » sont également retenues par les Docteurs [K] et [F] dans leur expertise du 25 novembre 2018.

Il est ainsi établi que c'est en raison des gênes et douleurs liées aux enclouages médullaires et aux adhérences de la cuisse gauche puis à l'utilisation des deux prothèses classiques, limitant son autonomie, et afin d'améliorer son état séquellaire que M. [L], a eu recours aux interventions d'ostéo-intégration en mai et juin 2010, soit après la consolidation de son état initialement fixée au 31 mai 2009, de sorte que les préjudices résultant de ces soins et de leurs complications relèvent d'une aggravation en relation directe avec l'accident et sont indemnisables selon les termes mêmes de la transaction conclue entre les parties.

Le jugement sera infirmé en ce qu'il a déclaré M. [L] irrecevable en ses demandes.

Sur la réparation du préjudice aggravé

Préjudices patrimoniaux temporaires (avant consolidation)

- Dépenses de santé actuelles

M. [L] sollicite le remboursement des frais médicaux non pris en charge par les tiers payeurs à hauteur de 25 699,79 euros sauf à parfaire.

La société MMA demande à ce que ce poste de préjudice soit réservé dans l'attente de la production des justificatifs de remboursement des organismes sociaux.

Sur ce, la date de la consolidation du dommage aggravé a été fixée par l'expert au 4 juillet 2017 ; M. [L] a produit trois factures du 31 août 2010, du 8 juin 2010 et du 17 février 2011 relatifs aux frais médicaux engagés en Allemagne pour un total de 25 699,79 euros correspondant à des frais d'hospitalisation et d'appareillage, ainsi que divers états de débours de la CPAM et deux attestations de la mutuelle Harmonie mutuelle, l'une en date du 4 mai 2018 selon laquelle celle-ci indique qu'en raison de nombreuses migrations informatiques elle n'est pas en mesure de chiffrer le montant de ses débours l'autre du 18 mai 2018 relative au remboursement des frais de santé engagés du 1er avril 2017 au 18 mai 2018 à hauteur de 1 093,60 euros.

Au vu de ces pièces, la cour est en mesure de fixer les dépenses de santé actuelles restées à la charge de M. [L] à la somme de : 25'699,79 euros (8 612,97 + 10 428,26 + 6 658,56).

Préjudices patrimoniaux permanents (après consolidation)

- Dépenses de santé futures

M. [L] sollicite la somme de 388 096,53 euros au titre de la prise en charge de l'acquisition et du renouvellement de :

- la prothèse de marche, prothèse principale pour ostéo-intégration ;

- la prothèse de secours, pour ostéo-intégration ;

- la prothèse de bain avec un surcoût pour l'ostéo-intégration ;

- la prothèse de sport avec un surcoût pour l'ostéo-intégration ;

outre l'ostéo-intégration elle-même.

La société MMA offre la somme de 43 252,98 euros versée sous forme de capital et une rente annuelle de 9 105,04 euros non au regard de la capacité de gestion de son patrimoine par M. [L] mais de l'impossibilité d'envisager ce type de prothèse de façon viagère compte tenu de son âge et de son état physique. A titre subsidiaire, elle propose un capital de 368 849,21 euros.

Sur ce, il résulte des éléments du dossier qu'à la suite d'infections, l'ostéo-intégration pratiquée sur le jambe gauche a dû être retirée et que ne demeure que l'implant à droite. Le Docteur [T] précise d'ailleurs que « les frais liés à l'aggravation sont essentiellement la fourniture d'une prothèse à droite adaptée à l'implant d'ostéo-intégration ».

M. [N], expert en appareillage de haute technologie, désigné par ordonnance du 16 avril 2019, a conclu dans son rapport du 9 décembre 2019 à la nécessité :

- d'une prothèse de marche, prothèse principale pour ostéo-intégration moyennant un coût de 10.935,07 euros pour trois ans non pris en charge par la CPAM sachant que le prix initial de la prothèse est de 6 764,38 euros,

- d'une prothèse de marche, prothèse de secours pour ostéo-intégration renouvelée tous les six ans pour un total de 14.293,66 euros non pris en charge par la CPAM sachant que le prix initial de la prothèse est de 6 764,38 euros,

- d'une prothèse de bain avec un surcoût pour l'ostéo-intégration de 2.063,84 euros et son suivi pour trois ans non pris en charge par la CPAM,

- d'une prothèse de sport avec un surcoût pour l'ostéo-intégration de 345,26 euros et son suivi pour quatre ans non pris en charge par la CPAM.

Il ajoute qu'en « ce qui concerne l'ostéo-intégration elle-même, il faudrait prévoir, tous les quatre ans, le changement de l'emboutement et de la vis pour un coût de 7.400 euros concernant le matériel selon devis et au milieu de cette période de quatre ans, soit à deux ans, il faudrait prévoir un changement de vis pour un coût de 1.850 euros prix de ce matériel selon devis ».

Il en résulte un coût d'acquisition du matériel nécessaire de 15 937,86 euros (6 764,38 + 6 764,38 + 2.063,84 + 345,26).

Les parties s'accordent sur un coût total de renouvellement annuel de l'ensemble de ces prothèses de 9 105,04 euros de sorte que le montant :

- des arrérages échus du 4 juillet 2017 à la liquidation est de 45 525,20 euros (9 105,04 x 5 ans) - de la capitalisation à compter de la liquidation, la société MMA échouant à justifier de son refus de verser un capital, en retenant l'euro de rente viager pour un homme de 47 ans selon le Barème de la Gazette du Palais 2020, qui est le plus approprié pour assurer la réparation intégrale du préjudice de M. [X] : 9 105,04 x 33,573 = 305 683,51 euros.

Il sera ainsi alloué à M. [L] la somme totale de 321 621,37 euros (15 937,86 euros + 305 683,51 euros).

Préjudices extra-patrimoniaux temporaires (avant consolidation)

- Déficit fonctionnel temporaire

Ce poste de préjudice indemnise l'incapacité fonctionnelle totale ou partielle ainsi que le temps d'hospitalisation et les pertes de la qualité de vie et des joies usuelles de la vie courante durant la maladie traumatique, y compris les préjudices d'agrément et sexuel temporaires.

M. [L] sollicite la prise en compte, du 25 mai 2010 au 4 juillet 2010, des périodes d'hospitalisation à 100 % et des périodes entre celles-ci à hauteur de 75 % pour un total de 51 131,25 euros en retenant un taux de 25 euros par jour.

La société MMA offre la somme de 49.086 euros en retenant un taux de 24 euros par jour.

Sur ce, l'expert retient un déficit fonctionnel temporaire total lié à l'aggravation durant toutes les périodes d'hospitalisations, à savoir :

- Du 25 mai 2010 au 11 juin 2010, soit 18 jours

- Du 27 mars 2011 au 15 avril 2011, soit 20 jours

- Du 27 au 29 novembre 2011, soit 3 jours

- Du 26 février 2012 au 8 mars 2012, soit 12 jours

- Le 21 mai 2012, soit 1 jour

- Le 27 août 2012, soit 1 jour

- Du 25 au 29 septembre 2012, soit 5 jours

- Du 14 au 20 novembre 2012, soit 7 jours

- Du 12 au 20 décembre 2012, soit 9 jours

- Du 20 décembre 2012 au 02 juin 2013, soit 165 jours

- Le 3 juin 2013, soit 1 jour

- Du 4 juin 2013 au 15 juillet 2013, soit 42 jours

- Du 16 juillet 2013 au 22 juillet 2013, soit 7 jours

- Du 23 juillet au 25 juillet 2013, soit 3 jours

- Le 24 octobre 2013, soit 1 jour

- Du 26 janvier 2014 au 6 février 2014, soit 12 jours

- Du 7 février 2014 jusqu'au 7 avril 2014, soit 60 jours

- Du 2 au 3 octobre 2014, soit 2 jours

- Du 11 au 20 mars 2015, soit 10 jours

- Du 30 avril 2015 au 1er mai 2015, soit 2 jours

- Du 28 juin 2015 au 5 juillet 2015, soit 8 jours

- Le 1er juin 2017, soit 1 jour

Soit un total de 390 jours que ne conteste pas la société MMA.

Il retient également un déficit fonctionnel temporaire partiel à 75% entre les hospitalisations et jusqu'au 4 juillet 2017, date de consolidation, à savoir :

- Du 12 juin 2010 au 26 mars 2011, soit 286 jours

- Du 16 avril 2011 au 26 novembre 2011, soit 225 jours

- Du 30 novembre 2011 au 25 février 2012, soit 88 jours

- Du 9 mars 2012 au 20 mai 2012, soit 73 jours

- Du 22 mai 2012 au 26 août 2012, soit 97 jours

- Du 28 août 2012 au 24 septembre 2012, soit 28 jours

- Du 30 septembre 2012 au 13 novembre 2012, soit 45 jours

- Du 21 novembre 2012 au 11 décembre 2012, soit 21 jours

- Du 26 juillet 2013 au 23 octobre 2013, soit 90 jours

- Du 25 octobre 2013 au 25 janvier 2014, soit 93 jours

- Du 8 avril 2014 au 1er octobre 2014, soit 177 jours

- Du 4 octobre 2014 au 10 mars 2015, soit 158 jours

- Du 21 mars 2015 au 29 avril 2015, soit 40 jours

- Du 2 mai 2015 au 27 juin 2015, soit 57 jours

- Du 6 juillet 2015 au 31 mai 2017, soit 696 jours

- Du 2 juin 2017 au 4 juillet 2017, soit 33 jours

Soit un total de 2 207 jours que ne conteste pas la société MMA.

Eu égard à l'incapacité fonctionnelle subie par M. [L] et aux troubles apportés à ses conditions d'existence avant la date de consolidation, ce poste de préjudice sera calculé conformément à la demande de la victime sur une base journalière de 25 euros, sollicitée en demande, pour les périodes de déficit fonctionnel total et proportionnellement pour les périodes de déficit fonctionnel partiel.

Le déficit fonctionnel temporaire doit ainsi être évalué comme suit :

- 390 jours x 25 euros = 9 750 euros pour les périodes de déficit fonctionnel temporaire total

- 2 207 jours x 25 euros x 0,75 = 41 381, 25 euros pour les périodes de déficit fonctionnel temporaire partiel.

Soit une somme globale de 51 131,25 euros qui sera allouée à M. [L].

- Souffrances endurées

Ce poste de préjudice indemnise les souffrances physiques et psychiques et les troubles associés que la victime endure pendant la maladie traumatique, y compris la souffrance morale liée à un sentiment de dévalorisation sociale ressenti pendant les périodes d'arrêt de travail et la pénibilité accrue liée à la reprise de son activité professionnelle avant la date de consolidation.

M. [L] fait valoir qu'il a subi 24 hospitalisations et quasiment autant d'actes opératoires. Il sollicite la somme de 40 000 euros.

La société MMA offre la somme de 25 000 euros.

Sur ce, le Docteur [T] a côté les souffrances endurées par M. [L] à 5/7 au regard des multiples interventions en secteur chirurgical et de rééducation et de leurs répercutions morales de sorte qu'il sera alloué à M. [L] la somme de 35.000 euros.

Sur les demandes annexes

Il n'y a pas lieu de déclarer l'arrêt opposable à la CPAM et à la mutuelle Harmonie mutuelle qui sont en la cause.

Les dispositions du jugement relatives aux dépens et aux frais irrépétibles doivent être infirmées.

La société MMA qui succombe en ses prétentions et qui est tenue à indemnisation supportera la charge des dépens de première instance et d'appel.

L'équité commande enfin d'allouer à M. [L] en application de l'article 700 du code de procédure civile une indemnité globale de 2 000 euros au titre de ses frais irrépétibles.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant publiquement, par arrêt réputé contradictoire, par mise à disposition au greffe,

- Infirme le jugement en l'ensemble de ses dispositions,

Statuant à nouveau et y ajoutant :

- Déclare recevable la demande d'indemnisation de M. [Z] [L] des préjudices résultant de l'aggravation de son état consolidée au 4 juillet 2017,

- Condamne la société Mutuelle du Mans assurance à payer à M. [Z] [L] les sommes suivantes au titre des postes de préjudice ci-après, avec intérêts au taux légal à compter du présent arrêt :

- dépenses de santé actuelles : 25'699,79 euros

- dépenses de santé futures : 321 621,37 euros

- déficit fonctionnel temporaire : 51 131,25 euros

- souffrances endurées : 35 000 euros,

- Condamne la société Mutuelle du Mans assurance à payer à M. [Z] [L] en application de l'article 700 du code de procédure civile la somme de 2 000 euros au titre des frais irrépétibles exposés en première instance et en cause d'appel,

- Condamne la société Mutuelle du Mans assurance aux dépens de première instance et d'appel.

LA GREFFIÈRE LA PRÉSIDENTE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 4 - chambre 11
Numéro d'arrêt : 21/09490
Date de la décision : 19/01/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-01-19;21.09490 ?
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