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18/01/2023 | FRANCE | N°19/11417

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 6 - chambre 10, 18 janvier 2023, 19/11417


Copies exécutoires REPUBLIQUE FRANCAISE

délivrées le : AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS







COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 10



ARRET DU 18 JANVIER 2023



(n° , 1 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 19/11417 - N° Portalis 35L7-V-B7D-CA6YZ



Décision déférée à la Cour : Jugement du 11 Octobre 2019 -Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de PARIS - RG n° F 18/07832





APPELANTE



Madame [S] [T] divorcée [G]

[Adresse

1]

[Localité 4]

Représentée par Me Valérie COLIN, avocat au barreau de PARIS, toque : E0959







INTIMEE



SARL LE BISTRO D'OLIVER Enseigne : 'le Monsigny'

[Adresse 2]

[Localit...

Copies exécutoires REPUBLIQUE FRANCAISE

délivrées le : AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 10

ARRET DU 18 JANVIER 2023

(n° , 1 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 19/11417 - N° Portalis 35L7-V-B7D-CA6YZ

Décision déférée à la Cour : Jugement du 11 Octobre 2019 -Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de PARIS - RG n° F 18/07832

APPELANTE

Madame [S] [T] divorcée [G]

[Adresse 1]

[Localité 4]

Représentée par Me Valérie COLIN, avocat au barreau de PARIS, toque : E0959

INTIMEE

SARL LE BISTRO D'OLIVER Enseigne : 'le Monsigny'

[Adresse 2]

[Localité 3]

non représenté

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 26 Octobre 2022, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Madame Véronique BOST, Vice-Présidente faisant fonction de Conseillère, chargée du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, entendu en son rapport, composée de :

Monsieur Nicolas TRUC, président

Madame Carine SONNOIS, Présidente de la chambre

Madame Véronique BOST, Vice-Présidente faisant fonction de Conseillère

Greffier, lors des débats : Mme Joanna FABBY

ARRET :

- réputé contradictoire

-- mis à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Monsieur Nicolas TRUC, Président et par Sonia BERKANE, Greffière, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

EXPOSÉ DU LITIGE

Madame [S] [T] a été embauchée par Monsieur [Y] qui exploitait le restaurant LE MONSIGNY ([Localité 5]), par contrat à durée indéterminée du 1er septembre 1983, en qualité de serveuse.

Le 1er août 2007, son contrat de travail a été repris par la société LE BISTROT D'OLIVIER.

La convention collective applicable est la convention collective nationale des Hôtels, Cafés, Restaurants.

Le 12 mars 2015, Mme [T] a été victime d'un accident de trajet, reconnu et pris en charge par la CPAM.

Le 30 juillet 2016, avant toute reprise, Mme [T] a fait une rechute d'un précédent accident de travail, survenu le 17 décembre 1971.

Mme [T] a été arrêtée sans interruption jusqu'au 13 septembre 2018.

Par lettre recommandée avec avis de réception du 25 septembre 2018, la société LE BISTROT D'OLIVIER a notifié à Mme [T] son licenciement pour faute grave à effet immédiat pour « absence injustifiée ».

Le 27 septembre 2018, la salariée a été déclarée inapte par le médecin du travail, suite à une étude de poste faite le 20 septembre 2018.

Contestant son licenciement, Mme [T] a saisi le conseil de prud'hommes de Paris, le 18 octobre 2018.

Par jugement du 11 octobre 2019, notifié à Mme [T] par courrier daté du 25 octobre 2019, le conseil de prud'hommes de Paris a :

- jugé l'inaptitude de Madame [S] [T] divorcée [G] non professionnelle ;

- condamné la société LE BISTROT D'OLIVIER à verser à Madame [S] [T] divorcée [G] les sommes suivantes :

* 2 083,22 euros à titre d'indemnité pour non-respect de la procédure ;

* 4 166,44 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis ;

* 22 571,68 euros à titre d'indemnité de licenciement pour inaptitude ;

* 4 203,42 euros au titre des congés payés acquis ;

* 1 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- accordé à la partie défenderesse un échéancier sur 24 mois pour s'acquitter des sommes indemnitaires suivant les dispositions de l'article 1244-1 du code civil ;

- ordonné la remise des bulletins de paie de mai à septembre 2018 conformes et du bulletin de paie afférent au préavis ainsi que du certificat de travail ;

- débouté la partie demanderesse du surplus de ses demandes ;

- débouté la partie défenderesse au titre de sa demande reconventionnelle et de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamné la société LE BISTROT D'OLIVIER aux dépens.

Mme [T] a interjeté appel de ce jugement par déclaration déposée par voie électronique le 14 novembre 2019.

Aux termes de ses dernières conclusions notifiées par RPVA le janvier 2020, Mme [T] demande à la cour de :

- la dire recevable et bien fondée en son appel ;

- infirmer le jugement en ce qu'il a jugé son inaptitude non professionnelle et l'a déboutée de ses demandes tendant à :

- voir reconnaître la nullité du licenciement,

- condamner la société LE BISTROT D'OLIVIER à lui verser :

* 12499,32 euros à titre d'indemnité en raison de la nullité du licenciement,

* 45 143,37 euros à titre d'indemnité spéciale de licenciement pour inaptitude professionnelle,

* 4 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- dire et juger le licenciement nul,

- dire et juger son inaptitude professionnelle,

- condamner la société LE BISTROT D'OLIVIER à lui verser :

* 12 499,32 euros à titre d'indemnité en raison de la nullité du licenciement,

* 45 143,37 euros à titre d'indemnité spéciale de licenciement pour inaptitude professionnelle,

*

13 813,83 euros au titre des congés payés acquis à la date de la rupture, ou subsidiairement la somme de 7 572,75 euros

* 4 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

le tout avec intérêts au taux légal,

- subsidiairement, confirmer la décision entreprise et condamner la société LE BISTROT D'OLIVIER à lui payer les sommes de :

* 2 083,22 euros à titre d'indemnité pour non-respect de la procédure ;

* 4 166,44 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis ;

* 22 571,68 euros à titre d'indemnité de licenciement pour inaptitude ;

* 4 203,42 euros au titre des congés payés acquis ;

-

dans tous les cas, confirmer le jugement en ce qu'il a condamné la société LE BISTROT D'OLIVER à lui remettre ses bulletins de paie de mai à septembre 2018, le bulletin de paie afférent au préavis, son certificat de travail et l'attestation destinée à Pôle Emploi,

- infirmer la décision entreprise en ce qu'elle a accordé à la société LE BISTROT D'OLIVER 24 mois de délais pour s'acquitter des sommes indemnitaires ;

- condamner la société LE BISTROT D'OLIVER aux entiers dépens.

Elle fait valoir que :

- son absence était justifiée ; toutefois, à partir de février 2018, elle s'est trompée et a envoyé ses arrêts de travail à son précédent employeur de 1971 ;

- par courrier recommandé du 28 septembre 2018, elle a informé son employeur de cette erreur en envoyant ses derniers arrêts de travail et lui a demandé de revenir sur sa décision de licenciement ;

- en mai 2018, le BISTROT D'OLIVIER lui a envoyé ses bulletins de paie de décembre 2016 à avril 2018 mentionnant « arrêt de travail tout le mois » ;

- son inaptitude est d'origine professionnelle en ce qu'elle fait suite à une rechute le 30 juillet 2016 d'un accident de travail du 17 décembre 1971 qui a nécessité l'amputation de plusieurs phalanges de sa main.

La déclaration d'appel et les conclusions d'appelant ont été signifiées le 29 janvier 2020 à l'intimée.

Cette dernière n'a pas constitué avocat.

L'ordonnance de clôture est intervenue le 16 mars 2022.

SUR CE,

Aux termes de l'article 472 du code de procédure civile, si le défendeur ne comparaît pas, il est néanmoins statué sur le fond. Le juge ne fait droit à la demande que dans la mesure où il l'estime régulière, recevable et bien fondée.

En application du dernier alinéa de l'article 954 du code de procédure civile, la partie qui ne conclut pas ou qui, sans énoncer de nouveaux moyens, demande la confirmation du jugement est réputé s'en approprier les motifs.

Sur le licenciement

L'article L.1226-9 du code du travail dispose qu'au cours des périodes de suspension du contrat de travail, l'employeur ne peut rompre celui-ci que s'il justifie soit d'une faute grave de l'intéressé, soit de son impossibilité de maintenir ce contrat pour un motif étranger à l'accident ou à la maladie.

En application de l'article L.1226-13 du même code, la rupture du contrat de travail prononcée en méconnaissance de l'article précédemment rappelé est nulle.

En l'espèce, la lettre de licenciement qui fixe les termes du litige est ainsi rédigée:

« J'ai le regret de vous notifier votre licenciement pour faute grave pour les motifs suivants.

Vous êtes en arrêt de travail depuis bientôt 3 ans et j'ai régulièrement vos justificatifs jusqu'à la fin du mois de janvier 2018.

Depuis le mois de février 2018 jusqu'à ce jour, je n'ai reçu aucun arrêt ni justificatif de vos absences.

Comme vous le savez, je ne pouvais procéder à votre licenciement avant la visite de reprise.

Par courrier du 11 septembre 2018, vous m'informiez de votre reprise le 13 septembre 2018 après la visite de reprise auprès du médecin du travail. Cette visite m'a été confirmée par le médecin du travail.

Cela étant, en vertu du code du travail, le licenciement peut procéder au licenciement pour faute grave d'un salarié en accident du travail, dès lors que la visite de reprise a eu lieu.

J'ai dû vous remplacer à plusieurs reprises et pour la dernière fois, par un serveur pour une durée déterminée en attendant votre reprise en février 2018.

Votre absence injustifiée m'a causé d'énormes problèmes de gestion de mon petit restaurant et je trouve inadmissible de ne pas avoir de vos nouvelles ni de justificatif de votre absence et d'être contraint d'attendre que vous passiez la visite de reprise pour retrouver mon droit de sanctionner cette absence injustifiée.

En conséquence, votre maintien dans l'entreprise s'avère impossible en raison de cette faute grave. »

Mme [T] fait valoir que son employeur l'a licenciée durant une période de suspension de son contrat de travail à la suite de l'accident qu'elle avait subi le 12 mars 2015 puis de la rechute depuis le 30 juillet 2016 d'un précédent accident de travail.

Les premiers juges ont retenu que Mme [T] s'était présentée à la médecine du travail le 13 septembre 2018 et que « l'état de santé de Mme [G], selon la médecine du travail, ne lui permettait pas de reprendre son travail et M. [V] gérant a reçu un arrêt de travail initial établi par le médecin traitant de Mme [G] pour une période allant du 13 septembre au 26 septembre 2018 ».

Les premiers juges ont également retenu que « la société a continué à envoyer les fiches de paie au domicile de Mme [G] et n'a donc pas procédé à la finalité du licenciement de Mme [G], cette dernière faisant toujours partie du personnel de la société ».

Ils ont considéré que Mme [G] avait été licenciée pour inaptitude et lui ont alloué une indemnité de licenciement pour inaptitude ainsi que des dommages et intérêts pour non-respect de la procédure de licenciement et une indemnité compensatrice de préavis.

C'est à tort que les premiers juges ont retenu que la société n'avait pas été au terme de la procédure de licenciement.

L'employeur n'ayant pas constitué avocat en cause d'appel, il n'a été produit aux débats aucun bulletin de paie postérieur à avril 2018. Aucun élément ne vient corroborer le fait que ce dernier aurait renoncé au licenciement.

La lettre du 25 septembre 2018 était une lettre de licenciement qui a mis fin au contrat.

Lorsque l'employeur a adressé cette lettre à Mme [T], cette dernière était en période de suspension de son contrat de travail. Mme [T] a été déclarée inapte le 27 septembre 2018 à la suite du seconde visite médicale.

Il ressort des termes de la lettre que Mme [T] avait informé son employeur de son intention de reprendre le travail. C'est dans ce contexte qu'une visite de reprise a été organisée.

Mme [T] ne conteste pas de ne plus avoir envoyé d'arrêts de travail à la société LE BISTROT D'OLIVIER après février 2018 expliquant les avoir adressés à son précédent employeur. Toutefois, la société LE BISTROT D'OLIVIER n'a adressé à Mme [T] aucune mise en demeure de justifier de sa situation ou de reprendre le travail.

Aucune faute grave n'est caractérisée.

En l'absence de faute grave, le licenciement étant intervenu pendant une période de suspension du contrat de travail, le licenciement de Mme [T] est nul.

Sur les conséquences de la rupture

Aux termes du dispositif de ses conclusions, Mme [T] sollicite l'infirmation du jugement en ce qu'il l'a déboutée de ses demandes d'indemnité pour licenciement nul et d'indemnité spéciale de licenciement. Même si elle formule sa demande de confirmation du jugement « à titre subsidiaire », elle n'a pas sollicité l'infirmation des chefs de jugement ayant condamné la société LE BISTROT D'OLIVIER à lui payer la somme de 2 083,22 euros à titre d'indemnité pour non-respect de la procédure, une indemnité compensatrice de préavis et une indemnité pour licenciement pour inaptidude.

La cour relève que l'indemnité qualifiée par le conseil de prud'hommes d'indemnité de licenciement pour inaptitude correspond à l'indemnité légale de licenciement à laquelle Mme [T] pouvait prétendre.

Il convient de faire droit à la demande de Mme [T] au titre du licenciement nul et de lui allouer la somme de 12 499,32 euros soit six mois de salaire.

Mme [T] n'a pas été licenciée pour inaptitude mais pour faute grave avant que le médecin du travail ne rende un avis d'inaptitude.

Elle ne peut donc prétendre au paiement de l'indemnité spéciale de licenciement. Elle sera déboutée de sa demande à ce titre.

Sur la demande de Mme [T] à titre de rappel de congés payés

Aux termes du dispositif de ses conclusions d'appelante, Mme [T] demande la condamnation de la société LE BISTROT D'OLIVIER à la somme de 13 813,83 euros au titre des congés payés acquis à la date de la rupture ou subsidiairement à la somme de 7 572,75 euros.

Toutefois, elle n'a pas saisi la cour d'une demande d'infirmation du chef de jugement ayant condamné la société LE BISTROT D'OLIVIER au paiement de la somme de 4 203,42 euros au titre des congés payés acquis. Ce chef de dispositif n'entre pas dans la dévolution de la cour.

Dans ces conditions, la cour ne peut statuer sur la demande de Mme [T] au titre des congés payés.

Sur les frais de procédure

La société LE BISTROT D'OLIVIER sera condamnée aux dépens.

Elle sera également condamnée au paiement de la somme de 1 500 euros au titre des frais irrépétibles à hauteur d'appel.

PAR CES MOTIFS,

La cour,

Confirme le jugement sauf en ce qu'il a débouté Mme [T] de sa demande pour licenciement nul,

Statuant à nouveau et y ajoutant

Condamne la société LE BISTROT D'OLIVIER à payer à Mme [S] [T] les sommes de :

* 12 499,32 euros pour licenciement nul,

* 1 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile à hauteur d'appel,

Rappelle que les créances indemnitaires portent intérêts au taux légal à compter du jour du prononcé de l'arrêt et que les créances salariales portent intérêts au taux légal à compter de la réception par la partie défenderesse de la convocation devant le bureau de conciliation et que la capitalisation est de droit conformément à l'article 1343-2 du code civil,

Condamne la société LE BISTROT D'OLIVIER aux dépens.

LA GREFFIERE LE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 6 - chambre 10
Numéro d'arrêt : 19/11417
Date de la décision : 18/01/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-01-18;19.11417 ?
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