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12/01/2023 | FRANCE | N°22/11374

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 1 - chambre 2, 12 janvier 2023, 22/11374


Copies exécutoires RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS





COUR D'APPEL DE PARIS



Pôle 1 - Chambre 2



ARRÊT DU 12 JANVIER 2023



(n° , 6 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 22/11374 - N° Portalis 35L7-V-B7G-CF7NI



Décision déférée à la Cour : Ordonnance du 19 Mai 2022 -Président du TC de Bobigny - RG n° 2022R00140





APPELANTE



S.A.S. L'ATELIER DES COMPAGNONS, RCS de Bobigny n°332 03

5 690, prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège



[Adresse 1]

[Localité 5]



Représentée par Me Edmond FROMANTIN, avocat au barreau ...

Copies exécutoires RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 1 - Chambre 2

ARRÊT DU 12 JANVIER 2023

(n° , 6 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 22/11374 - N° Portalis 35L7-V-B7G-CF7NI

Décision déférée à la Cour : Ordonnance du 19 Mai 2022 -Président du TC de Bobigny - RG n° 2022R00140

APPELANTE

S.A.S. L'ATELIER DES COMPAGNONS, RCS de Bobigny n°332 035 690, prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

[Adresse 1]

[Localité 5]

Représentée par Me Edmond FROMANTIN, avocat au barreau de PARIS, toque : J151

Assistée à l'audience par Me Gauthier CRIQUET, avocat au barreau de PARIS, toque : R010, substituant Me Lucie DU HAYS

INTIMEE

S.A.R.L. TECHNISOL, RCS de VERSAILLES n°424 408 615

[Adresse 2]

[Localité 3]

Représentée et assistée par Me Stéphanie DUGOURD de la SELARL HDLA - AVOCATS, avocat au barreau de PARIS, toque : P0344

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 01 Décembre 2022, en audience publique, devant la Cour composée de :

Marie-Hélène MASSERON, Présidente de chambre

Thomas RONDEAU, Conseiller

Michèle CHOPIN, Conseillère

qui en ont délibéré, un rapport a été présenté à l'audience par Michèle CHOPIN, Conseillère, dans les conditions prévues par l'article 804 du code de procédure civile.

Greffier, lors des débats : Saveria MAUREL

ARRÊT :

- CONTRADICTOIRE

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Thomas RONDEAU, Conseiller, pour la Présidente de chambre empêchée et par Saveria MAUREL, Greffière, présente lors de la mise à disposition.

*****

EXPOSE DU LITIGE

La société Technisol est une entreprise du bâtiment, spécialisée dans les travaux de fourniture et de pose de revêtements sols souples, sols durs.

Dans le cadre de cette activité, la société l'Atelier des Compagnons a, à plusieurs reprises, fait appel à la société Technisol en qualité de sous-traitante.

Elles ont ainsi formalisé un contrat cadre pour une période allant du 1er janvier 2019 au 31 décembre 2019.

Dans le cadre de leur relation, l'Atelier des Compagnons a confié, par commande en date du 2 octobre 2019, des travaux de fourniture et de pose de revêtements de sols durs, sols souples dans les bâtiments B et C d'un chantier visant la réhabilitation d'un immeuble sis [Adresse 4]) pour un montant total de 537.981, 26 euros.

Par exploit du 17 février 2022, la société Technisol a fait assigner la société l'Atelier des Compagnons devant le juge des référés du tribunal de commerce de Bobigny aux fins de voir :

- dire qu'elle est recevable et bien fondée en l'ensemble de ses demandes, fins et prétentions ;

Y faisant droit,

- condamner la société l'Atelier des Compagnons au paiement de la somme de 93.489,69 euros, outre celle de 40 euros de frais de recouvrement, soit la somme totale de 93.529,69 euros, avec intérêts à compter du 15 mai 2021, date à laquelle les sommes dues au titre du décompte général définitif auraient dû être réglées ;

- condamner la société l'Atelier des Compagnons à payer à la société Technisol la somme de 4.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamner la société l'Atelier des Compagnons aux entiers dépens.

Par ordonnance du 19 mai 2022, le juge des référés du tribunal de commerce de Bobigny a :

- ordonné à la société l'Atelier des Compagnons de payer à la société Technisol les sommes de :

' 41.673,84 euros, outre les intérêts au taux légal à compter du 15 mai 2021,

' 1.250 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et débouté le demandeur du surplus de sa demande à ce titre,

- débouté les parties de toutes leurs prétentions incompatibles avec la motivation ci-dessus retenue ou le présent dispositif ;

- dit que les entiers dépens sont à la charge de la société l'Atelier des Compagnons ;

- liquidé les dépens à recouvrer par le greffe à la somme de 41,98 euros TTC (dont 7 euros de TVA) ;

- rappelé que l'exécution provisoire est de droit.

Par déclaration du 15 juin 2022, la société l'Atelier des compagnons a relevé appel de cette décision.

Dans ses dernières conclusions remises et notifiées le 10 novembre 2022, l'Atelier des Compagnons demande à la cour de :

- débouter la société Technisol de toutes ses demandes, fins et conclusions ;

- infirmer l'ordonnance dont appel en toutes ses dispositions et notamment en ce qu'elle a :

' ordonné à celle-ci de payer à la société Technisol les sommes de :

' 41.673,84 euros montant de la provision qu'il a accordé, outre les intérêts au taux légal à compter du 15 mai 2021,

' 1.250 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et débouté le demandeur du surplus de sa demande à ce titre,

' débouté les parties de toutes leurs prétentions incompatibles avec la motivation ci-dessus retenue ou le présente dispositif,

' dit que les entiers dépens sont à sa charge,

Statuant à nouveau,

- la déclarer recevable et bien fondée en ce que la demande de provision formulée par la société Technisol se heurte à une contestation sérieuse car le présent litige impose pour être tranché un examen au fond ;

- la déclarer recevable et bien fondée en ce que la demande de provision formulée par la société Technisol se heurte à une contestation sérieuse tirée de la possible compensation de ses créances entre les opérations Ternes et Skema ;

- la déclarer recevable et bien fondée en ce que la demande de provision formulée par la société Technisol se heurte à une contestation sérieuse car la créance litigieuse n'est pas certaine dans son quantum ;

- débouter en conséquence de sa demande provisionnelle la société Technisol en ce qu'elle se heurte à de multiples contestations sérieuses ;

- condamner en conséquence la société Technisol à lui restituer la somme totale de 41.990,56 euros, correspondant au montant de la provision réglée avec les intérêts ;

- condamner au surplus la société Technisol à mieux se pourvoir devant le juge du fond ;

- condamner la société Technisol, outre aux entiers dépens, à lui verser la somme de 4.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

La société l'Atelier des compagnons soutient en substance que :

- la demande de provision formulée par la société Technisol se heurte à plusieurs contestations sérieuses et nécessite pour être tranchée un examen au fond du dossier pour lequel seul le juge du fond est compétent,

- le cadre contractuel applicable à l'espèce, qui autorise une compensation financière, est en lui-même une contestation sérieuse,

- la demande provisionnelle n'est pas justifiée dans son quantum.

Dans ses dernières conclusions remises et notifiées le 27 septembre 2022, la société Technisol demande à la cour de :

- la dire recevable et bien fondée en l'ensemble de ses demandes, fins et prétentions ;

Y faisant droit,

- confirmer en toutes ses dispositions l'ordonnance du tribunal de commerce de Bobigny en date du 19 mai 2022 et notamment en ce qu'elle a condamné la société l'Atelier des Compagnons à lui payer à titre provisionnel la somme de 41. 673,84 euros outre les intérêts au taux légal à compter du 15 mai 2021 et la somme de 1.250 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- rejeter toute demande de la société l'Atelier des Compagnons ;

- condamner la société l'Atelier des Compagnons à lui payer la somme de 3.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamner la société l'Atelier des Compagnons aux entiers dépens.

La société Technisol soutient en substance que :

- il n'existe aucune contestation sérieuse de nature à faire échec à sa demande de provision sur le fondement de l'article 873 du code de procédure civile ;

- les demandes de la société Technisol ne nécessitent en aucun cas un examen au fond dès lors qu'un examen des termes de la convention de sous-traitance, ou des conditions d'exécution des travaux, ou encore de la résiliation du marché ne sont pas nécessaires pour faire droit à sa demande et qu'elle se fonde sur les dires et écrits de la société l'Atelier des Compagnons ;

- la compensation suppose une créance liquide et exigible alors qu'en l'espèce, la créance de la société Technisol n'est ni certaine, ni vraisemblable ;

- enfin, le quantum de la créance de la société Technisol sur la société l'Atelier des Compagnons s'élève à la somme de 47.673,84 euros.

Pour un plus ample exposé des moyens des parties, il est renvoyé à leurs conclusions susvisées conformément à l'article 455 du code de procédure civile.

SUR CE,

L'article 873 alinéa 2 du code de procédure civile dispose que, dans les cas où l'existence de l'obligation n'est pas sérieusement contestable, le président du tribunal de commerce peut accorder en référé une provision au créancier ou ordonner l'exécution de l'obligation même s'il s'agit d'une obligation de faire.

Le montant de la provision en référé n'a d'autre limite que le montant non sérieusement contestable de la dette alléguée.

Une contestation sérieuse est caractérisée lorsque l'un des moyens de défense opposés aux prétentions du demandeur n'apparaît pas immédiatement vain et laisse subsister un doute sur le sens de la décision au fond qui pourrait éventuellement intervenir par la suite sur ce point si les parties entendaient saisir les juges du fond.

En l'espèce, il doit être observé que :

- il est constant qu'en exécution du contrat cadre de sous-traitance signé par les parties en 2019, cinq avenants ont été régularisés concernant l'opération de réhabilitation de l'immeuble situé [Adresse 4],

- il est tout aussi constant que, sur ce chantier, la réception des travaux pour les bâtiments B et C est intervenue avec réserves le 8 avril 2021, celle des travaux du bâtiment A, avec réserves également, le 20 mai 2021. Par courrier du 26 août 2021, la société l'Atelier des Compagnons a entendu résilier le contrat qui la liait à la société Technisol, une réunion sur site étant organisée le 31 août 2021,

- le montant du marché de la société Technisol, concernant l'opération de réhabilitation de l'immeuble situé [Adresse 4] s'élève à la somme de 532.771, 26 euros, outre celle de 5.260 euros pour travaux supplémentaires, la société Atelier des Compagnons indiquant elle-même avoir payé la somme de 389.041, 76 euros ainsi qu'une somme complémentaire de 59.783, 31 euros réglée le 28 juin 2021,

- la société Technisol s'est vue confier un autre marché ("Skema"), pour lequel le maître de l'ouvrage a été conduit à opérer une retenue de garantie de 85.000 euros, ce qui n'est pas contesté,

- le contrat cadre de sous-traitance prévoit notamment que :

' le décompte définitif est établi dans les conditions de l'article 9-2, suite à l'établissement du constat d'état des lieux et d'avancement des travaux, (article 15.2) ;

' le donneur d'ordre examine le projet, établit le décompte définitif des sommes dues en exécution du sous-traité et le notifie par lettre recommandée avec avis de réception à l'entreprise sous-traitante qui dispose de 15 jours à compter de la notification pour accepter le décompte ou présenter par écrit, et dans les mêmes formes ses observations ; passé ce délai, l'entreprise sous-traitante est réputée faute d'observations avoir accepté le décompte définitif ; si l'entreprise sous-traitante a formulé des observations, le donneur d'ordre dispose à son tour de 15 jours pour faire connaître par écrit, et sous les mêmes conditions de forme, si elle accepte les observations ; passé ce délai, elle est réputée avoir accepté les observations du sous-traitant ; si à l'issue de ce processus, aucun décompte définitif n'a pu être accepté de manière expresse ou tacite, chaque partie est libre de soumettre à son initiative les termes du différend afférent à l'établissement du décompte à la juridiction compétente (article 9-2).

- le 18 novembre 2021, la société Technisol a adressé à la société Atelier des Compagnons une lettre recommandée avec accusé de réception aux termes de laquelle elle contestait le décompte général définitif (Dgd) et réitérait une position qu'elle avait exprimée le 23 mars 2021 dans sa situation n° 7,

- par lettre recommandée avec AR, du 3 décembre 2021, la société Atelier des Compagnons a contesté cette position et exprimé son désaccord,

- par ailleurs, un litige a opposé les parties, avant même la résiliation survenue et leur désaccord sur le décompte général définitif, au sujet des réserves à lever dans les suites des opérations de réception du chantier,

- c'est ainsi que la société Atelier des Compagnons a mis en demeure la société Technisol de procéder à la levée des réserves par courrier du 18 mai 2021 puis par lettre du 22 juin 2021, du 22 juillet 2021, et du 12 août 2021, elle a indiqué à la société Technisol qu'à défaut de procéder à la levée desdites réserves, elle s'exposait à ce que les travaux soient réalisés en ses lieu et place à ses frais pour un montant de 53.280, 24 euros,

- la société Technisol a en première instance ramené sa demande de provision à hauteur de 41.673, 84 euros, compte étant tenu de la moins-value liée aux réserves, provision que le premier juge lui a accordé,

- toutefois, alors que le décompte général définitif a été établi postérieurement à la résiliation du contrat, et contesté par la société Technisol, celle-ci évalue le montant de la provision qu'elle sollicite à la somme de 41.673, 84 euros, sans pour autant en justifier précisément, alors que le montant des travaux supplémentaires, sur lesquels les parties s'opposent, s'élève à la somme de 4.332, 50 euros et qu'elle a retiré de sa demande de provision des sommes retenues au titre des travaux pour lesquels elle a été substituée pour un montant de 51.815, 85 euros, montant auquel elle renonce dans le cadre de la présente procédure,

- il s'ensuit que le litige porte bien, non sur le seul décompte général définitif, mais sur l'exigibilité du solde du prix du marché, compte étant tenu de la question de la levée des réserves, du coût des travaux supplémentaires et d'une éventuelle compensation avec le chantier Skema confié également à la société Technisol,

- de la sorte, la demande de la société Technisol se heurte à plusieurs contestations sérieuses

tenant à la question de la levée des réserves, au coût des travaux supplémentaires, à l'éventuelle compensation avec les sommes dues au titre du chantier Skema et à l'absence de justification du quantum de la provision demandée et ne peut prospérer devant le juge des référés, seul le juge du fond pouvant déterminer le solde exigible qui lui serait dû.

Dès lors, la décision entreprise sera infirmée, la cour d'appel considérant qu'il n'y a pas lieu à référé sur la demande de provision formulée par la société Technisol.

La société Atelier des Compagnons demande la restitution de la somme de 41.990, 56 euros correspondant au montant de la provision allouée en première instance, assortie des intérêts. Il n'y a toutefois pas lieu de statuer sur ce point, la question de cette restitution relevant de l'exécution du présent arrêt. Cette demande sera ainsi rejetée.

La société Technisol qui succombe sera condamnée aux dépens de première instance et d'appel.

Elle sera en outre condamnée à payer à la société Atelier des Compagnons la somme de 2.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, en première instance et en appel.

PAR CES MOTIFS

Infirme l'ordonnance entreprise en toutes ses dispositions ;

Statuant à nouveau,

Dit n'y avoir lieu à référé ;

Rejette toute autre demande ;

Condamne la société Technisol à payer à la société Atelier des Compagnons la somme de 2.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile en première instance et en appel,

Condamne la société Technisol aux dépens de première instance et d'appel.

LA GREFFIÈRE POUR LA PRESIDENTE

DE CHAMBRE EMPÊCHÉE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 1 - chambre 2
Numéro d'arrêt : 22/11374
Date de la décision : 12/01/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-01-12;22.11374 ?
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