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12/01/2023 | FRANCE | N°21/17875

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 4 - chambre 7, 12 janvier 2023, 21/17875


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

Au nom du Peuple français



COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 4 - Chambre 7



ARRÊT DU 12 Janvier 2023

(n° , 18 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 21/17875 - N° Portalis 35L7-V-B7F-CEPDG



Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 07 Décembre 2020 par le tribunal judiciaire de CRETEIL - RG n° 19/00097





APPELANTE

S.C.I. AGFIMMO

[Adresse 7]

[Localité 19]



Représentée par Me Nathalie LESENECHAL, avocat a

u barreau de PARIS, toque : D2090

Ayant pour avocat plaidant : Me Thierry PARIENTE substitué par Me Alexandra THOMAS - ARMAND AVOCATS, avocat au barreau de PARIS, toque : K0153





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RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

Au nom du Peuple français

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 4 - Chambre 7

ARRÊT DU 12 Janvier 2023

(n° , 18 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 21/17875 - N° Portalis 35L7-V-B7F-CEPDG

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 07 Décembre 2020 par le tribunal judiciaire de CRETEIL - RG n° 19/00097

APPELANTE

S.C.I. AGFIMMO

[Adresse 7]

[Localité 19]

Représentée par Me Nathalie LESENECHAL, avocat au barreau de PARIS, toque : D2090

Ayant pour avocat plaidant : Me Thierry PARIENTE substitué par Me Alexandra THOMAS - ARMAND AVOCATS, avocat au barreau de PARIS, toque : K0153

INTIMÉES

Société SADEV 94

[Adresse 8]

[Localité 15]

Représentée par Me Michaël MOUSSAULT, SELAS DS AVOCAT, avocat au barreau de PARIS, toque : T0007 substitué par Me Xavier GOSSELIN, même cabinet

DIRECTION DÉPARTEMENTALE DES FINANCES PUBLIQUES DU VAL DE MARNE - COMMISSAIRE DU GOUVERNEMENT

[Adresse 1]

[Localité 14]

Représentée par Madame [B] [L], en vertu d'un pouvoir général

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l'article 805 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 10 Novembre 2022, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Monsieur Hervé LOCU, Président chargé du rapport :

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Monsieur Hervé LOCU, Président,

Madame Valérie GEORGET, Conseillère

Madame Catherine LEFORT, Conseillère

Greffier : Mme Dominique CARMENT, lors des débats

ARRÊT :

- Contradictoire

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Hervé LOCU, Président, et par Dorothée RABITA, greffière présente lors de la mise à disposition.

* * *

EXPOSÉ DES FAITS ET DE LA PROCÉDURE :

Par arrêté n° 2010/7224 du 28 octobre 2010, le Préfet du Val de Marne a décidé la création de la ZAC [Localité 19] Confluences, dont l'aménagement a été concédé à la SADEV 94, au terme d'une délibération du conseil municipal de la commune du 16 décembre 2010.

Le 18 juillet 2019, la société AGFIMMO a adressé à la mairie une déclaration d'intention d'aliéner le bien immobilier sis [Adresse 7] à [Localité 19], édi'é sur la parcelle cadastrée section [Cadastre 16], au prix de 2.800.000 euros.

La parcelle cadastrée [Cadastre 16] a une superficie de 2.804 m². Elle est d'une forme rectangulaire irrégulière avec une profondeur assez limitée par rapport à la longueur du terrain qui développe une grande façade. Elle est occupée par un bâtiment en R+1.

La SADEV 94 a exercé le droit de préemption dont elle est délégataire par une offre du 10 avril 2019 au prix de 1.150.000 euros.

Cette proposition d'acquisition a été refusée par la société propriétaire par courrier reçu le 18 novembre 2019.

Par requête et mémoire reçus au greffe du service des expropriations le 2 décembre 2019, la SADEV 94 a saisi le juge de l'expropriation du tribunal judiciaire de Créteil en vue de la fixation judiciaire du prix de l'ensemble immobilier préempté.

Par jugement du 7 décembre 2020, après transport sur les lieux le 21 janvier 2020, le juge de l'expropriation de Créteil a :

Annexé à la décision le procès-verbal de transport du 21 janvier 2020 ;

Fixé la date de référence au 26 mars 2019 ;

Retenu un prix unitaire de 1.286,25 euros/m² ;

Appliqué un abattement de 30% pour occupation ;

Fixé l'indemnité due par la SADEV 94 à la société AGFIMMO au titre de la préemption du bien immobilier sis [Adresse 7] à [Localité 19], édi'é sur la parcelle cadastrée section [Cadastre 16] à la somme totale de 1.122.387,40 euros ;

Précisé que cette indemnité de dépossession foncière se décompose de la façon suivante :

Indemnité principale : 1.002.387,40 euros,

Indemnité de perte de loyer commercial : 120.000 euros ;

Dit que les dépens de la présente instance seront supportés par la SADEV 94 en application de l'article L.312-1 du code de l'expropriation, y compris la somme de 1.080 euros au titre de la rémunération du géomètre-expert avancée par la société AGFIMMO ;

Condamné la SADEV 94 à payer à la société AGFIMMO la somme de 3.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile .

La société AGFIMMO a interjeté appel du jugement le 12 octobre 2021, pour une infirmation totale en listant le dispositif du jugement et contestant le débouté de ses demandes de première instance.

Pour l'exposé complet des faits, de la procédure, des prétentions et moyens des parties, conformément à l'article 455 du code de procédure civile, il est expressément renvoyé à la décision déférée et aux écritures :

1/ adressées au greffe par la société AGFIMMO, le 11 janvier 2022, notifiées le 12 janvier 2022 (AR intimé le 13 janvier 2022 et AR CG le 13 janvier 2022), aux termes desquelles il est demandé à la cour de :

Réformer le jugement du 7 décembre 2020 en ce qu'il a fixé l'indemnité due par la SADEV 94 à la société AGFIMMO au titre de la préemption du bien immobilier sis [Adresse 7] à [Localité 19], édifié sur la parcelle cadastrée section [Cadastre 16] à la somme totale de 1.122.387,40 euros ;

Statuant à nouveau,

Fixer la valeur vénale de l'immeuble sis [Adresse 7] et édifié sur la parcelle [Cadastre 16] à la somme de 2.930.180 euros ;

Condamner la SADEV 94 à payer à la société AGFIMMO la somme totale de 3.076.689 euros au titre de l'indemnisation du préjudice subi du fait de la préemption du bien immobilier sis [Adresse 7] à [Localité 19], édi'é sur la parcelle cadastrée section [Cadastre 16] ;

A titre subsidiaire, et si la Cour devait retenir la méthode dite du terrain intégré,

Fixer la valeur vénale de l'immeuble sis [Adresse 7] et édi'é sur la parcelle [Cadastre 16] à la somme 1.947.750 euros ;

Condamner la SADEV 94 à payer à la société AGFIMMO la somme de 1.947.750 euros au titre de l'indemnisation du préjudice subi du fait de la préemption du bien immobilier sis [Adresse 7] à [Localité 19], édi'é sur la parcelle cadastrée section [Cadastre 16] ;

En tout état de cause,

Confirmer le jugement en ce qu'il a condamné la SADEV 94 au paiement de la somme de 10.080 euros correspondant à la facture du Cabinet Mètre ;

Débouter la SADEV 94 de ses demandes ;

Y ajoutant,

Condamner la SADEV 94 à la somme de 5.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

Condamner la SADEV 94 aux entiers dépens.

2/ adressées au greffe par la société AGFIMMO, le 7 juillet 2022, notifiées le 7 juillet 2022 (AR intimé le 11 juillet 2022 et AR CG le 11 juillet 2022), aux termes desquelles il est demandé à la cour de :

Réformer le jugement du 7 décembre 2020 en ce qu'il a fixé l'indemnité due par la SADEV 94 à la société AGFIMMO au titre de la préemption du bien immobilier sis [Adresse 7] à [Localité 19], édifié sur la parcelle cadastrée section [Cadastre 16] à la somme totale de 1.122.387,40 euros ;

Statuant à nouveau,

Fixer la valeur vénale de l'immeuble sis [Adresse 7] et édifié sur la parcelle [Cadastre 16] à la somme de 2.930.180 euros ;

Condamner la SADEV 94 à payer à la société AGFIMMO la somme totale de 3.076.689 euros au titre de l'indemnisation du préjudice subi du fait de la préemption du bien immobilier sis [Adresse 7] à [Localité 19], édi'é sur la parcelle cadastrée section [Cadastre 16] ;

A titre subsidiaire, et si la Cour devait retenir la méthode dite du terrain intégré,

Fixer la valeur vénale de l'immeuble sis [Adresse 7] et édi'é sur la parcelle [Cadastre 16] à la somme 1.947.750 euros ;

Condamner la SADEV 94 à payer à la société AGFIMMO la somme de 1.947.750 euros au titre de l'indemnisation du préjudice subi du fait de la préemption du bien immobilier sis [Adresse 7] à [Localité 19], édi'é sur la parcelle cadastrée section [Cadastre 16] ;

En tout état de cause,

Confirmer le jugement en ce qu'il a condamné la SADEV 94 au paiement de la somme de 10.080 euros correspondant à la facture du Cabinet Mètre ;

Débouter la SADEV 94 de ses demandes ;

Y ajoutant,

Condamner la SADEV 94 à la somme de 5.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

Condamner la SADEV 94 aux entiers dépens.

3/ déposées au greffe par la SADEV 94, intimée, le 7 avril 2022, notifiées le 8 avril 2022 (AR appelant le 13 avril 2022 et AR CG le 11 avril 2022), aux termes desquelles il est demandé à la cour de :

Dire et juger la société AGFIMMO mal fondée en son appel ;

En conséquence,

La débouter de l'ensemble de ses demandes, fins et prétentions ;

Incidemment,

Infirmer partiellement le jugement du 7 décembre 2020 en ce qu'il a alloué à la société AGFIMMO une indemnité accessoire pour perte de revenus locatifs ;

Par suite,

Fixer comme suit le prix d'aliénation de l'ensemble immobilier situé [Adresse 7] et édifié sur la parcelle [Cadastre 16] à usage d'activités :

Surface retenue : 1.113,3 m²

Valeur unitaire retenue : 1.286,25 euros/m2

Taux de l'abattement pour occupation : 30 %

Soit : 1.113,3 m² × 1.286,25 euros/m² × 0,7 = 1.002.387,4 euros.

4/ adressées au greffe par le commissaire du gouvernement, intimé, le 1er mars 2022, notifiées le 2 mars 2022 (AR appelant le 7 mars 2022 et AR intimé le 4 mars 2022), aux termes desquelles il forme appel incident et demande à la cour de :

Confirmer le jugement RG n°19/00097 en date du 7 décembre 2020 sur les points suivants :

La surface utile des locaux d'activité,

La méthode d'évaluation à retenir,

Les frais du géomètre : 1 080 euros ;

Infirmer les indemnités de perte de revenus locatifs pour le bien préempté libre d'occupation ;

Fixer le prix de la préemption à la somme de 1.447.290 euros libre d'occupation (1.113,30 m² × 1.300 euros/m² =1.447.290 euros).

EXPOSÉ DES PRÉTENTIONS ET DES MOYENS DES PARTIES :

La SCI AGFIMMO fait valoir que :

Concernant la description du bien, il s'agit d'un ensemble immobilier situé [Adresse 7] à [Localité 19], édifié dans les années 2000 et conçu pour accueillir un laboratoire alimentaire. Un cabinet de géomètres-experts a calculé une surface utile de 1.113,3 m² (Pièce 7A). Si le bâtiment faisait l'objet d'un bail commercial à la date du jugement, ce n'est désormais plus le cas (Pièce 11A). Il conviendra donc d'écarter l'abattement pour occupation de 30% appliqué par le premier juge sur le montant de l'indemnité principale.

Concernant la méthode d'évaluation, la méthode dite « terrain intégré » est inadaptée en ce qu'elle ne permet pas de couvrir l'intégralité du préjudice direct, matériel et certain causé par l'expropriation comme le prescrit pourtant l'article L.321-1 du code de l'expropriation. En effet, le préjudice subi à savoir la différence entre l'indemnité proposée par l'autorité préemptrice et le prix du marché tel qu'il ressort de la promesse unilatérale de vente conclue le 17 juillet 2019 au prix de 2.800.000 euros, doit nécessairement conduire à augmenter l'évaluation du bien préempté. Cela doit passer par le recours à une autre méthode d'évaluation, étant précisé que le choix de la méthode d'évaluation relève du pouvoir souverain d'appréciation des juges du fond, comme l'indique la cour d'appel de Paris (RG 17/08396, RG 18/03541, RG 18/01431). La méthode retenue par le premier juge ne permet pas de valoriser l'intégralité du terrain non bâti, à savoir plus de 1.604 m², lequel était justement au c'ur de la promesse de vente, l'acquéreur souhaitant édifier des logements sociaux sur la totalité de l'emprise du terrain (Pièce 2A). De plus, ce terrain nu est situé de manière privilégiée dans la ZAC [Localité 19] Confluences et son potentiel de construction important est particulièrement adapté aux projets d'aménagement d'ampleur qui concernent cette zone. Donc, la méthode de valorisation du terrain doit être revue pour prendre en considération la totalité du terrain, soit 2.804 m². La promesse de vente conclue le 17 juillet 2019 indique que le bâtiment situé sur la parcelle avait vocation à être démoli, et que les coûts de démolition seraient à la charge de l'acquéreur.

Dans un rapport du 10 décembre 2019, M. [P], expert judiciaire près la cour d'appel de Paris, a évalué la valeur du bien préempté à 2.804.000 euros (Pièce 5A). Ainsi, eu égard à ce rapport et au prix de vente négocié aux termes de la promesse, il convient de retenir le prix unitaire proposé par l'autorité préemptrice, à savoir 1.045 euros/m², mais de l'appliquer non pas au bâti mais à l'ensemble du terrain, soit 2.804 m².

Concernant la perte de l'exonération fiscale liée à la vente, la promesse de vente rappelle que l'exonération de la plus-value immobilière « est une condition essentielle et déterminante de son engagement ». Afin d'assurer l'indemnisation de l'intégralité du préjudice subi, il convient de majorer l'indemnité principale de 5% pour tenir compte du régime fiscal moins favorable en raison de la préemption, soit un montant total de 3.076.689 euros.

A titre subsidiaire, les termes de comparaison retenus par le premier juge doivent être écartés. De plus, le bien préempté présente des caractéristiques particulières qui doivent nécessairement être valorisées, et notamment le caractère faiblement bâti de la parcelle. La cour d'appel de Paris a déjà jugé en ce sens dans une espèce similaire (RG 20/16466). La moyenne des deux termes de comparaison proposés s'établit à 1.841,50 euros/m². Il est proposé de retenir un prix unitaire de 1.750 euros/m². L'indemnité principale doit donc s'établir à 1.947.750 euros sans qu'il y ait lieu d'appliquer un abattement pour occupation, les locaux étant libres (1.113 m² × 1.750 euros/m²).

Concernant l'indemnité pour perte de revenus locatifs, la société preneuse à bail a quitté les lieux. Dans ces conditions, il n'y a pas lieu de pratiquer un abattement pour occupation sur l'indemnité principale, comme exposé plus haut et il n'y a pas non plus lieu à indemnité pour perte de revenus locatifs.

Concernant les frais irrépétibles, il serait inéquitable de laisser à la charge de la SCI AGFIMMO les frais exposés dans le cadre de la procédure d'appel et la SADEV 94 sera condamnée aux dépens ainsi qu'à lui payer la somme de 5.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

La SCI AGFIMMO fait valoir dans un second jeu de conclusions que :

Contrairement à ce que soutient l'intimé, les dispositions du code de l'expropriation n'excluent aucune méthode d'évaluation ;

Contrairement à ce que soutient l'intimé, il ne faut pas pratiquer d'abattement pour frais de destruction et de dépollution , car le prix du bien tel que convenu par les parties à la promesse de vente tient déjà compte des éventuels coûts tels que les frais de démolition.

Contrairement à ce que soutient l'intimé, la pièce 8 produite aux débats par l'appelante vise l'ensemble des références et informations nécessaires pour retenir ces termes de comparaison (Pièce 8A).

L'exonération de la plus-value immobilière est soumise au remploi des fonds perçus dans un délai de douze mois, contrairement à l'exonération telle qu'elle aurait découlé de la promesse de vente, qui, elle, est de droit.

Les termes de comparaison proposés par l'intimé doivent tous être écartés car non pertinents en l'espèce, l'essentiel des références concernant des biens à usage d'habitation.

Contrairement à ce que soutient l'intimé, le bien doit être considéré comme libre d'occupation. En effet, d'une part, l'article L.213-4 b) du code de l'urbanisme précise que les changements intervenus sur le bien ne sont pas présumés spéculatifs. Ce caractère spéculatif étant inexistant dans la mesure où la promesse de vente impliquait nécessairement de libérer les lieux et de mettre un terme au bail. D'autre part, le commissaire du gouvernement confirme que la situation d'occupation a changé et que le bien doit être évalué libre de toute occupation.

La SADEV 94 rétorque que :

Concernant la consistance matérielle, le bien est un ensemble immobilier constitué d'une cour close, d'un bâtiment en R+1 avec à l'étage une mezzanine à usage de bureaux et en rez-de-chaussée un entrepôt servant à la préparation de plats cuisinés, et dont l'état d'entretien est, selon les salles, de correct à passable.

Concernant la superficie, la parcelle cadastrée [Cadastre 16] mesure 2.804 m². La surface du bâtiment est de 1.113,3 m² d'après le mesurage du bien par un géomètre-expert.

Concernant la situation d'occupation, à la date du transport sur les lieux, et du jugement, l'ensemble immobilier en cause était occupé commercialement en vertu d'un bail commercial datant du 1er janvier 2014. Le prix d'aliénation a donc été fixé en valeur occupée.

Concernant la date de référence, il résulte des articles L.322-2 du code de l'expropriation et L.213-4 du code de l'urbanisme que celle-ci doit en l'espèce être fixée au 26 mars 2019, date à laquelle est devenue opposable aux tiers la dernière modification du plan local d'urbanisme de la commune d'[Localité 19].

Concernant la situation d'urbanisme, le bien préempté est situé en zone UIC du plan local d'urbanisme.

Concernant le mode d'évaluation, un bien préempté doit être évalué en fonction de sa consistance matérielle et juridique à la date de l'ordonnance d'expropriation et de son usage à la date de référence. En retenant la seule valeur du terrain nu, l'appelant méconnaît les dispositions du code de l'expropriation en faisant reposer son évaluation sur un usage futur incertain.

Concernant l'exonération d'imposition comme facteur de valorisation du bien, le préjudice résultant de l'absence d'exonération est incertain dans la mesure où l'exonération était soumise à la réalisation de conditions suspensives non remplies. De plus, la plus-value immobilière reste exonérable en cas de remploi de l'intégralité du prix de cession d'après l'article 150 U II-4° du code général des impôts.

Concernant la méthode dite du « bilan-promoteur », celle-ci est juridiquement inapplicable dans la mesure où des références permettent de cerner le marché sectoriel dans le cadre d'une évaluation par comparaison et ladite méthode conduit à valoriser le bien préempté par référence à un usage futur incertain ; et ce, conformément à un arrêt de la Cour de cassation du 10 mai 1984, systématiquement repris depuis par les juges du fond. En tout état de cause, si cette méthode aléatoire devait être retenue, il aurait fallu que l'appelant produise des termes de comparaison et des devis de démolition pour pouvoir correctement l'appliquer. Il convient donc de recourir à la méthode « terrain intégré » d'autant plus que de nombreux termes de références utilisant cette méthode sont versés aux débats.

Concernant le montant du prix d'aliénation, les termes de comparaison proposés par l'appelant doivent pour la plupart être écartés en ce qu'ils ne sont pas accompagnés d'un acte de vente, d'une date précise ou d'une référence de publication. Ils ne devront pas être retenus en application de la jurisprudence de la Cour de cassation (10-13.890). Les juges de l'expropriation de Pontoise (15/80) et de Créteil (RG 19/00033) ont d'ailleurs déjà écarté les termes de comparaison cités mais non produits. Par ailleurs, certains termes de comparaison, en raison de la trop grande disparité de leur prix unitaire, concernent nécessairement une cession de droits à construire, et non pas des cessions de terrains, comme tendent également à le démontrer les impressions Google Maps. Ces derniers doivent être écartés, conformément à la jurisprudence de la cour d'appel de Paris (RG 17/10860, RG 18/02112). Enfin, il est de jurisprudence constante que dans le cadre d'une estimation par comparaison, seules peuvent être prises en considération les décisions judiciaires et les mutations définitives, à l'exclusion donc des promesses de vente. (Cour de cassation : 89-70345, TGI de Créteil : RG 11/00044, Cour d'appel d'Orléans : RG 08/02936). Enfin contrairement à ce que propose le commissaire du gouvernement, la majoration de 5% de la valeur du bien préempté est suffisante et ne doit pas être révisée. Il convient donc de confirmer le jugement en ce qu'il a fixé l'indemnité à 1.002.387,40 euros.

Concernant l'application d'un abattement pour occupation commerciale, en application de l'article L.322-1 du code de l'expropriation et de la jurisprudence en résultant, lorsque la fixation indemnitaire s'inscrit dans le cadre d'une préemption, c'est à la date du jugement de première instance qu'il convient de prendre en compte pour apprécier la consistance matérielle et juridique du bien évalué. Donc, en l'espèce, l`existence d'un bail commercial, toujours en cours à la date du jugement de première instance, justifie l'application d'un abattement de 30% pour occupation commerciale, la jurisprudence retenant habituellement un abattement de 40% (Cour d'appel de Paris RG 16/21779).

Concernant l'indemnité de remploi, l'alinéa premier de l'article L.213-4 du code de l'urbanisme dispose que le prix d'acquisition fixé judiciairement est exclusif de toute indemnité accessoire, et notamment de l'indemnité de réemploi. Il ne peut donc être octroyé aucune indemnité de remploi.

Concernant l'indemnité pour perte de revenus locatifs, le raisonnement est identique, comme l'a confirmé la Cour de cassation (94-70.249). Il ne peut donc être octroyé aucune indemnité pour perte de revenus locatifs.

Le commissaire du gouvernement conclut que :

Concernant la description du bien, il s'agit d'un ensemble immobilier comprenant une cour close et un bâtiment en R+1 avec une cour donnant accès à un garage en sous-sol avec à l'étage une mezzanine à usage de bureaux et en rez-de-chaussée un entrepôt servant à la préparation de plats cuisinés. Le bien est dans un bon état général et fonctionnel. Les quais de déchargement sont dans un état assez médiocre.

Concernant la surface, la surface utile du bâtiment est de 1.113,3 m².

Concernant la situation locative, l'appelante précise dans son mémoire d'appel que depuis le 1er janvier 2021, la société preneuse à bail commercial a libéré les lieux loués.

Concernant la date de référence, il résulte des articles L.322-2 du code de l'expropriation et L.213-4 du code de l'urbanisme que celle-ci doit en l'espèce être fixée au 26 mars 2019, date à laquelle est devenue opposable aux tiers la dernière modification du plan local d'urbanisme de la commune d'[Localité 19].

Concernant la situation d'urbanisme, la parcelle cadastrée section [Cadastre 16] est située en zone UIC. La zone correspond presque en totalité au périmètre de la ZAC [Localité 19] Confluences.

La moyenne des quatre termes de comparaison proposés s'établit à 1.223,75 euros/m². Il est proposé de retenir une valeur de 1.300 euros/m².

Concernant l'indemnité principale, la méthode d'évaluation globale par comparaison aboutit à un montant en valeur libre d'occupation de 1.447.290 euros (1.113,3 m² x 1.300 euros/m²).

Concernant l'indemnité pour perte de revenus locatifs, il convient d'infirmer le jugement de première instance en l'absence de locataire à compter du 1er janvier 2021.

Concernant les frais de géomètre, il convient de confirmer le jugement de première instance.

L'indemnité totale due sera fixée à 1.447.290 euros.

SUR CE LA COUR

- Sur la recevabilité des conclusions

Aux termes de l'article R 311-26 du code de l'expropriation modifié par décret N°2017-891 du 6 mai 2017-article 41 en vigueur au 1er septembre 2017, l'appel étant du 12 octobre 2021, à peine de caducité de la déclaration d'appel, relevée d'office, l'appelant dépose ou adresse au greffe de la cour ses conclusions et les documents qu'il entend produire dans un délai de trois mois à compter de la déclaration d'appel.

À peine d'irrecevabilité, relevée d'office, l'intimé dépose ou adresse au greffe de la cour ses conclusions et les documents qu'il entend produire dans un délai de trois mois à compter de la notification des conclusions de l'appelant. Le cas échéant, il forme appel incident dans le même délai et sous la même sanction.

L'intimé à un appel incident ou un appel provoqué dispose, à peine d'irrecevabilité relevée d'office, d'un délai de trois mois à compter de la notification qui en est faite pour conclure.

Le commissaire du gouvernement dépose ou adresse au greffe de la cour ses conclusions et l'ensemble des pièces sur lesquelles il fonde son évaluation dans le même délai et sous la même sanction que celle prévue au deuxième alinéa.

Les conclusions et documents sont produits en autant d'exemplaires qu'il y a de parties, plus un.

Le greffe notifie à chaque intéressé et au commissaire du gouvernement, dès leur réception, une copie des pièces qui lui sont transmises.

En l'espèce, les conclusions de la société AGFIMMO du 11 janvier 2022, de la SADEV 94 du 7 avril 2022 et du commissaire du gouvernement du 1er mars 2022 adressées ou déposées dans les délais légaux sont recevables.

Les conclusions hors délai de la société AGFIMMO du 7 juillet 2022 sont de pures répliques à celles de la SADEV 94 appelante incidente et du commissaire du gouvernement appelant incident ne formulent pas de demandes nouvelles ou de moyens nouveaux, sont donc recevables au delà des délais initiaux.

- Sur le fond

Aux termes de l'article 1er du premier protocole additionnel à la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ratifiée qui s'impose au juge français, toute personne physique ou morale a droit au respect de ses biens. Nul ne peut être privé de sa propriété que pour cause d'utilité publique et dans les conditions prévues par la loi et les principes généraux du droit international ; ces dispositions ne portent pas atteinte au droit que possèdent les Etats de mettre en vigueur les lois qu'il juge nécessaires pour réglementer l'usage des biens conformément à l'intérêt général ou pour assurer le paiement des impôts ou d'autres contributions ou des amendes.

Aux termes de l'article 17 de la déclaration des droits de l'homme et du citoyen, la propriété est un droit inviolable et sacré, dont nul ne peut être privé si ce n'est lorsque la nécessité publique, légalement constatée, l'exige évidemment, et sous la réserve d'une juste et préalable indemnité.

L'article 545 du code civil dispose que nul ne peut être contraint de céder sa propriété, si ce n'est pour cause d'utilité publique, et moyennant une juste et préalable indemnité.

Aux termes de l'article L 211-5 du code de l'urbanisme, tout propriétaire d'un bien soumis au droit de préemption peut proposer au titulaire de ce droit l'acquisition de ce bien, en indiquant le prix qu'il en demande. Le titulaire doit se prononcer dans un délai de 2 mois à compter de ladite proposition dont copie doit être transmise par le maire au directeur départemental des finances publiques.

À défaut d'accord amiable, le prix est fixé par la juridiction compétente en matière d'expropriation selon les règles mentionnées à l'article L 213'4.

En cas d'acquisition, l'article L313-14 est applicable.

Aux termes de l'article L 213-4 du code de l'urbanisme, à défaut d'accord amiable le prix d'acquisition est fixé par la juridiction compétente en matière d'expropriation ; ce prix est exclusif de toute indemnité accessoire, et notamment l'indemnité de remploi.

Conformément aux dispositions de l'article L 322-2, du code de l'expropriation, les biens sont estimés à la date de la décision de première instance, seul étant pris en considération - sous réserve de l'application des articles L 322-3 à L 322-6 dudit code - leur usage effectif à la date définie par ce texte.

L'appel de la société AGFIMMO porte sur toutes les dispositions du jugement et le débouté de ses demandes de première instance.

L'appel incident de la SADEV 94 est limité à l'indemnité accessoire allouée pour perte de revenus locatifs.

L'appel incident du commissaire du gouvernement concerne également ce dernier point, mais également le prix fixé.

S'agissant de la date de référence qui n'est pas contestée par les parties, le premier juge l'a fixé au 26 mars 2019 en application de l'article L313-4 du code de l'urbanisme correspondant à la dernière modification du PLU de la ville d'[Localité 19].

S'agissant des données d'urbanisme, à cette date de référence, la parcelle cadastrée section [Cadastre 16] est située en zone UIC ( comme U' [Localité 19] - Confluance ) correspond presque en totalité au périmètre de la ZAC du même nom et prend appui sur une orientation d'aménagement dénommée ' [Localité 19]- Confluences'.

Pour ce qui est de la nature du bien, de son usage effectif et de sa consistance, il s'agit d'un ensemble immobilier situé [Adresse 7] à [Localité 19] édifié sur la parcelle [Cadastre 16], à usage d'activités comprenant un laboratoire de cuisine pour la préparation de plats asiatiques avec des salles dédiées à la cuisson, au conditionnement et des chambres froides, avec:

- une cour close utilisée pour la circulation, le chargement des opérations et le stationnement des véhicules de société.

- un bâtiment en R+1 avec à l'étage une mezzanine à usage de bureaux et en rez de chaussée un entrepôt servant à la préparation de plats cuisinés.

Pour une plus ample description, il convient de se référer au procès verbal de transport.

La société AGFIMMO souligne la présence d' équipements de qualité qui ont nécessité un investissement initial de plus de 2 millions d'euros (pièce N°10), un bon état d'entretien, une localisation favorable porte de [Localité 20] dans une zone d'activité , une proximité des transports en communs et voies rapides et la présence d'un double accès véhicules et la possibilité de stationnement.

LA SADEV 94 indique en produisant des photographies que l'état d'entretien est, selon les salles, de correct à passable.

Le commissaire du gouvernement considère que le bien est dans un bon état général et fonctionnel avec des surfaces complètement dédiées pour la préparation de plats cuisinés, que les quais de déchargement sont dans un état assez médiocre et que quelques places de stationnement se trouvent à l'intérieur du site.

Il ajoute que les locaux constitués d'un seul immeuble occupent le terrain en son centre et que la parcelle présente une forme rectangulaire irrégulière avec une profondeur assez limitée par rapport à la longueur du terrain qui forme une grande façade.

S'agissant de la date de fixation du prix du bien , il s'agit de celle de la première instance, soit le 7 décembre 2020.

-Sur la surface

Les parties s'accordent sur la surface utile totale du cabinet METRE, géomètre expert, retenue par le premier juge pour un total de l'immeuble de 1113,3 m² et la condamnation aux dépens par la SADEV 94 comprenant ces frais de géomètre pour la somme de 1080 euros n'est pas contestée par celle-ci .

La superficie totale de 2804 m² pour la parcelle déclarée par l'expropriée n'est pas contestée par les parties.

- Sur la méthode

Le premier juge a écarté la méthode proposée par la société AGFIMMO dite de récupération foncière, également dite : « méthode du promoteur » et retenu la méthode proposée tant par la SADEV 94 que par le commissaire du gouvernement par comparaison intégré.

La société AGFIMMO demande l'infirmation et sollicite à titre principal la détermination de l'indemnité principale correspondant à la valeur du bien préempté; elle fait tout d'abord état du caractère inadapté de la méthode dite « terrain intégré » , le juge de l'expropriation étant libre d'adopter la méthode d'évaluation du bien qui lui paraît la plus appropriée et les dispositions du code de l'expropriation n'excluent aucune méthode d'évaluation et il convient donc pour une indemnisation du préjudice de retenir la promesse de vente pour un prix de 2'800'000 euros (de toute occupation), la méthode du « terrain intégré » ne valorisant pas l'intégralité du terrain, en écartant une surface à bâtir de plus de 1604 m² ; elle ajoute qu'il convient d'appliquer la méthode dite « du promoteur » en se basant sur la promesse de vente, cette valeur étant confirmée par un rapport d'expertise amiable qu'elle produit du 10 décembre 2019 qui vise un certain nombre de références :

'vente d'un terrain novembre 2018, situé [Adresse 4], de 2354 m² pour un prix de 1788 euros/m² ;

'vente d'un terrain en décembre 2018 d'un terrain dans 4 du même projet Zac [Localité 19] confluences au [Adresse 3], [Adresse 10] , [Adresse 11] à [Localité 19], d'une surface de 1750 m², avec un local industriel de 1782 m² pour un prix de 1895 euros/m².

La SADEV 94 et le commissaire du gouvernement demandent la confirmation.

Aux termes de l'article L 213-4 du code de l'urbanisme le prix est fixé, payé ou, le cas échéant, consigné selon les règles applicables en matière d'expropriation.

Au regard des règles du code de l'expropriation, le bien doit donc être évalué en fonction de sa consistance matérielle et juridique à la date du jugement et de son usage à la date de référence.

La méthode habituellement utilisée en matière d'expropriation et de préemption est celle de la comparaison, et plus précisément celle de la méthode par comparaison globale avec des mutations similaires, également appelée la méthode par terrain intégré celle-ci se basant sur la surface utile des bâtiments pour évaluer le bien, terrain d'assiette compris.

La méthode du bilan promoteur, sollicitée par la société AGFIMMO, revient à calculer le prix maximal d'un terrain au-delà duquel l'opération ne sera pas rentable compte tenu du prix de vente prévisionnel des locaux construits ; cette méthode d'évaluation aboutit à évaluer un bien en fonction d'un projet futur qui est incertain et non en fonction de l'usage effectif de l'immeuble ; cette méthode d'évaluation ne peut donc être retenue et il convient donc de confirmer le jugement qui a fixé le prix du bien en fonction de la méthode d'évaluation par comparaison intégrée, la SADEV 94 et le commissaire du gouvernement proposant des termes de comparaison correspondant à des mutations similaires, et la société AGFIMMO proposant elle-même à titre subsidiaire dans le cadre de cette méthode deux termes de comparaison.

- Sur la demande de la société AGFIMMO de prise en compte de l'exonération fiscale

Le premier juge a débouté la société AGFIMMO de la prise en compte pour la valorisation du bien de l'exonération fiscale à laquelle elle aurait pu prétendre sur la plus-value si la vente initialement prévue avait abouti.

La société AGFIMMO demande également dans le cadre de l'application de la méthode dite « du promoteur » l'infirmation en sollicitant pour une indemnisation intégrale du préjudice, une indemnisation au titre de la perte de l'exonération fiscale liée à la vente ; elle indique que le projet initial de vente lui appartenant l'exonérait de toute plus-value immobilière en raison de la destination du bien, ce que rappelle la promesse aux termes de son article « plus-value », cette exonération étant une condition essentielle et déterminante de son engagement comme l'indique la promesse : «le promettant déclare que cette  condition est une condition essentielle et déterminante de son engagement au présent acte» ( pièce N°2) ; le prix de cession de 2'800'000 euros compris entre les parties était net d'impôts pour la SCI AGFIMMO et, par voie de conséquence, pour ses associés, ce qui était un élément essentiel de leur consentement à l'opération ; la décision de la préemption de la SADEV 94 entraîne pour la SCI AGFIMMO la perte de l'éxonération fiscale, préjudice certain et conséquent ; elle demande donc de fixer la valeur du bien à la somme de 2 930'180 euros, majorée de 5 % pour tenir compte du régime fiscal moins favorable en raison de la préemption, soit une indemnité totale de 3'076'689 euros.

Aux termes de l'article L321-1 du code de l'expropriation les indemnités allouées couvrent l'intégralité du président direct, matériel et certain causé par l'expropriation.

Or, l'exonération fiscale avancée par la SCI AGFFIMMO n'est fondée qu'au vu de l'usage futur du site envisagé par le bénéficiaire de la promesse de vente du 17 juillet 2019, cette exonération restant purement hypothétique, la promesse de vente ayant été soumise à diverses conditions suspensives telles que la purge de tout droit à préemption et de préférence, l'obtention de plusieurs permis de construire pour l'édification de logements intégralement à caractère social.

Le premier juge a donc exactement dit que l'exonération sur la plus-value est un événement incertain conditionné par la réalisation des conditions suspensives et ne saurait être retenu dans l'évaluation du bien comme facteur de valorisation, et que cette exonération est étrangère à la qualité du bien en lui-même.

Il convient donc en conséquence de confirmer le jugement de débouté.

- Sur la situation locative

Le premier juge indique que la société AGFIMMO a fait état lors du transport d'une location des lieux à la SARL ASIA GENERAL FOOD, qu'elle a produit le bail commercial consenti à cette société le 1er janvier 2014 pour 12 ans, concernant l'ensemble de l'immeuble pour un loyer annuel en principal de 66'000 euros, outre la taxe foncière et elle a produit les factures pour les loyers des 3 premiers trimestres 2020, la taxe foncière 2019 et des relevés de compte faisant apparaître des virements libellés « loyer » et il a donc évalué l'immeuble en valeur occupée.

La société AGFIMMO dans son argumentation concernant l'indemnisation pour perte de revenus locatifs indique que depuis le 1er janvier 2021, la société ASIA GENERAL FOOD, preneur à bail des locaux, a libéré les lieux loués , une résiliation amiable étant intervenue le 3 décembre 2020 ( pièce N°11) ; en conséquence le bien doit être évalué libre de toute occupation.

Le commissaire du gouvernement propose une évaluation en valeur libre, la société AGFIMMO ayant précisé dans son mémoire d'appel que depuis le 1er janvier 2021, la société SAS ASIA GENERAL FOOD avait libéré les lieux loués.

Il est à noter que lors du jugement, l'occupation des lieux selon un bail commercial ne faisait pas débat et que la SADEV 94 et la SCI AGFIMMO faisaient état de leur accord pour affecter la valeur du bien de l'abattement de 30 % pour occupation.

Aux termes de l'article L 213-4 alinéa 3 du code de l'urbanisme, le prix d'acquisition est fixé, payé ou, les cas échéant, consigné selon les règles applicables en matière d'expropriation.

En conséquence, en application de l'article L 322-1 du code de l'expropriation , le montant du prix doit être fixé, en l'absence d'ordonnance d'expropriation s'agissant de préemption, à la date du jugement soit le 7 décembre 2020, et il est donc établi que la libération des lieux est intervenue postérieurement à cette date soit le 1er janvier 2021.

Il convient donc de confirmer le jugement qui a exactement évalué l'immeuble en valeur occupée avec un taux habituel de 30 %.

- Sur la fixation du prix

A- Sur l'indemnité principale

Le premier juge après examen des références des parties a retenu deux références correspondant à deux arrêts de la cour d'appel de Paris des 28 juin 2018 et 31 janvier 2019 pour une moyenne de 1225 euros/m², majorée de 5 %, soit 1286,25 euros/m², soit une indemnité principale arrondie à 1'431'982 euros, soit après abattement pour occupation d' 1 002 387,40 euros.

Il convient d'examiner les références des parties :

1° Les références de la société AGFIMMO

Elle verse à l'appui de sa demande subsidiaire sur l'évaluation du bien selon la méthode dite du 'terrain intégré' un rapport amiable du cabinet [P] - Berthelot du 10 décembre 2019 (pièce numéro 5), recevable car ayant été soumis au débat contradictoire, en indiquant qu'il vise un certain nombre de références ; il s'agit de la vente de quatre terrains, pour des valeurs de 458 euros/m² , 543 euros/m², 1788 euros/m² et 1895 euros/m², mais elle retient uniquement les 2 dernières :

'vente de terrains en novembre 2018, situés [Adresse 4] à [Localité 19], d'une surface de 3354 m² pour un prix de 1788 euros/m², numéro DVF 2018-1317198 ;

'vente de terrains en décembre 2018, situés [Adresse 3], [Adresse 10] , [Adresse 11] à [Localité 19], d'une surface de 1750 m² avec un local industriel de 1782 m², pour un prix de 1895 euros/m², numéro DVF: 2018/13 18 757.

Elle indique qu'elle produit aux débats en pièce numéro 8 les références de publication foncière et l'acte de vente.

Cependant, la SADEV 94 démontre par les photographies produites que pour la première référence il s'agit d'un terrain, en chantier, inclus dans une opération d'aménagement et dont les opérations de construction sont en cours et que pour la seconde référence il s'agit d'un immeuble qui a été démoli et que les parcelles en cause sont en cours d'aménagement.

Ces références ne concernent donc pas uniquement des terrains nus à bâtir mais correspondent également à des cessions de droits à construire attachés à ces terrains ; le prix figurant dans l'acte ne correspond donc pas uniquement à la valeur du terrain car elle intègre la valeur des droits construire attacher au terrain.

Ces références non comparables seront donc écartées.

2° Les références de la SADEV 94

Elle propose sept références:

N° du terme

Date de vente

Adresse

surface activité

Prix en euros/

Observations

Tet CG1

arrêt de la cour d'appel de Paris du 28 juin 2018 entre la SADEV 94 et la SCI CLAUDES RG 16/00 107

[Adresse 6] à [Localité 19]

859,81

1250 euros/valeur libre

Un ensemble immobilier à usage de bureaux et d'activité :

bureau (427,35 m²) : 1800 euros/m²

locaux d'activité (859,81 m²) : 1250 euros/m²

valeur libre d'occupation

T2

le jugement du TJ de Créteil du 9 janvier 2017 entre SADEV 94 et Madame [Z]

RG

14/00030

[Adresse 5]

à

[Localité 19]

836,80

900 euros/m² en valeur libre pour les locaux à usage d'entrepôts

T3

21 décembre 2016 : SADEV 94 / badinait

1082 euros/m² en valeur libre

Pièce numéro 4

T4

12 octobre 2019 entre la société COFIMAG et la SCI IMMAAN

[Adresse 12] à [Localité 19]

3324,20 m²

1113,05 euro

pièce numéro 5

T5 et CG3

arrêt de la cour d'appel de Paris du 31 janvier 2019 est actée le 25 mars 2019

[Adresse 2]

582 au 110 et 368 m²

1200 euros/m² en valeur libre

pièce numéro 6

T6

arrêt la cour d'appel de Paris du 8 mars 2018 actée le 6 mai 2019 entre SADEV 94 et la SCI Garibaldi

RG

14/000 83

[Adresse 2]

116 m²

1200 euros/m² en valeur libre

pièce numéro 7

T7

quittance amiable notariée du 21 décembre 2017 entre SADEV 94 et la SCI IMH2

[Adresse 13]

720 4,5 m²

1190/m² pour des locaux mixtes (bureaux compris

Pièce numéro 8

Le terme T1 et CG1 correspond à un bien situé à 1km de l'immeuble objet de la procédure, dans le quartier de bord de Seine concernée par l'aménagement de la Zac [Localité 19] confluences.

Ce bien est composé de plusieurs bâtiments, avec un immeuble de deux étages donnant sur rue et à l'arrière du bâtiment un grand entrepôt avec une importante hauteur sous plafond et mezzanine à usage de bureaux. Le juge de l'expropriation s'agissant de la partie hangar a indiqué : « s'agissant de la partie hangar, il a indiqué que l'ensemble est en bon état, que le hangar bénéficie d'une importante hauteur sous plafond que l'ensemble de la structure apparaît en très bon état et bien entretenu. L'état de l'ensemble avec le premier étage est correct ». Et la cour rappelle s'agissant de la valorisation que : « le premier juge a indiqué qu'il prenait en compte le bon entretien des locaux d'activités, leurs qualités structurelles, mais également la circonstance qu'ils ne sont pas situés en façade sur rue, qu'il convient également de prendre en compte le fait que le prix du m² pour un bien évoluant en proportion inverse de sa superficie et qu'en l'espèce, il s'agit d'une superficie importante, a fixé la valeur unitaire au regard des termes de comparaison retenue à la somme de 1250 euros/m² ».

Il ressort de l'arrêt une surface totale des locaux supérieure à celle du bien de la SCI AGFIMMO et de hangar inférieur d'environ 250 m² mais restant toujours comparable, les locaux d'activité étant décrits comme en bon état d'entretien et de qualité et l'immeuble étant dans un périmètre suffisamment proche et similaire.

Ce terme comparable sera donc retenu.

Le terme T2 correspond à un bien situé à 450 m de celui de SCI AGFIMMO, composé d'un pavillon, une partie bureaux d'une partie hangar. Il est décrit par le jugement comme : « la parcelle cadastrée [Cadastre 17] est occupé en totalité par la hangar servant de stockage de nettoyage des sanitaires mobiles dans le cadre de l'activité de la société SILLAGE occupant les locaux ».

S'agissant d'un hangar servant essentiellement de stockage, ce bâtiment offre des prestations inférieures à celle du bien à évaluer.

Cette référence non comparable en consistance sera donc écartée.

Le terme T3 se situe à 800 m de l'immeuble à évaluer et résulte d'un accord amiable entre la SADEV 94 dans le cadre de l'aménagement de la Zac [Localité 19] Confluences.

L'acte de vente mentionne : « une propriété constituée de 2 bâtiments et d'un appentis :

1) bâtiment donnant sur le boulevard du colonel Fabien formant un immeuble de bureaux élevés sur rez-de-chaussée 2 étages avec entresol et une loge de gardien

2) bâtiment formant un immeuble mixte activité élevé sur sous-sol, rez-de-chaussée et premier étage, comprenant vingt deux quais de livraison, de monte-charge de 3 tonnes et bureaux

3) un appentis sur cour formant des places de stationnement

4) 90 places de stationnement

Le tout d'une superficie utile d' environ 5401,40 m² et 490 m² de surface annexe.

Étant précisé qu'il existe deux haches rentrantes qui donnent sur la place Gambetta (hôtel restaurant) et le numéro 9 de l'avenue Jean Jaurès (atelier) mur mitoyen en partie entre ces haches et la société métallurgique d'[Localité 18] ».

L'acte de vente indique également que l'immeuble est squatté et qu'une procédure d'expulsion est pendante, facteur de dépréciation du bien.

En conséquence, il est établi que la plupart du bâtiment est à usage de bureaux, et qu'en outre la superficie du bien est largement supérieure à celle du bien à évaluer, ce qui est un facteur de dépréciation du mètre carré.

Cette référence non comparable sera donc écartée.

Pour le terme T4, comme en première instance, l'acte de vente n'est pas produit, mais uniquement une attestation notariée et les attestations de superficie du bien qui ne mentionnent pas le prix de vente (pièce numéro 5) ; en conséquence, la consistance du bien et son prix de vente ne peuvent être vérifiés.

Cette référence sera donc écartée.

Le terme T5 et CG 3 est ainsi décrit dans l'arrêt : « numéro 110 lot numéro 29 constitué de locaux d'activité, d'un hangar, show-room pour une surface de 582 m² et aussi numéro 111, lots numéro 17,18, 19,20 24, 48,49 et 85 constituées de locaux d'activité, des hangars, une maison d'habitation et de cave ».

Pour les locaux du 110, le juge a retenu « les éléments de moins-value correspondant à un état moyen, tandis que les éléments de plus-value résident dans la présence d'une large vitrine sur rue, un aménagement pour accueillir des activités exigeant plus que ce que requiert un simple hangar ou garage en voiture, sont constitués de plusieurs espaces distincts, à la différence d'un entrepôt ou d'un hangar.

Pour ceux du 111, il est indiqué « les éléments de moins-value important correspondent au fait qu'ils sont beaucoup plus sommaires et moins bien entretenus que ceux du 110. »

Si les locaux du 110, ont une superficie presque deux fois moindre au bien à évaluer, ils présentent cependant des similarités en ce qu'il ne s'agit pas uniquement d'un hangar mais qu'ils sont aménagés en plusieurs espaces et peuvent recevoir plusieurs types d'activité et l'addition des superficies permet d'approcher celle du bien à évaluer.

Ce terme comparable sera donc retenu.

Le terme T6 correspond à une décision du 31 août 2015 correspondant à la date de valorisation de l'immeuble en appel ; étant trop ancien, ce terme sera donc écarté.

Le terme T7 correspond à un acte d'adhésion qui correspond selon l'attestation notariée :

'au rez-de-chaussée, un atelier, réserve une pièce sans fenêtre,

'au premier étage, 4 bureaux, un couloir d'escalier,

'au 2e étage, 4 bureaux, un couloir et un escalier

'à 454/millième des parties communes.

Il n'est pas indiqué dans l'attestation notariale de réception de l'acte d'adhésion, la ventilation du prix à la partie bureau et la partie entrepôts et les surfaces sont sensiblement inférieures à celle du bien à évaluer.

Ce terme non comparable sera donc écarté.

3° Les références du commissaire du gouvernement

Outre les deux termes déjà retenus, le commissaire du gouvernement propose deux autres termes correspondant à de la jurisprudence de locaux d'activités dans la même zone sur la commune d'[Localité 19] :

'tribunal judiciaire de Créteil du 18 janvier 2021, RG 19/00100 : 66,70 rue Maurice Gunsbourg, SCI AZUR, AT 50,1 ensemble immobilier est réparti sur plusieurs bâtiments disposés en U, constitué d'un grand pavillon à entrée division bureaux et plusieurs appartements, le tout en bon état.

Surface retenue :

-367,03 m² d'appartements/3500 euros/m² en valeur libre

-311,11 m² de bureaux/1725 euros/m² valeur libre

-3565,61 m² d'activité/1200 euros/m², valeur libre

abattement de 30 % pour les locaux d'activité occupée et un abattement de 10% pour les habitations occupées.

Ce terme est comparable en consistance et en localisation et sera retenu en conséquence pour la partie activité pour une valeur de 1200 euros/m² en valeur libre.

'Mutation du 25 juin 2019 référencé 2019P 06803, locaux d'activité situés [Adresse 9], d'une surface utile totale de 1244 m², vendus au prix de 2'794'000 euros, prix unitaire de 1245 euros/m² en valeur libre d'occupation.

Ce terme comparable en consistance localisation sera retenu.

Les termes retenus par la cour correspond donc à :

'1250+ 1200+ 1200+ 1245= 4895/4= 1223,75 euros.

En tenant compte de la consistance du bien et de facteurs de plus-value tenant à la localisation et à l'existance d'une cour utilisée pour la circulation, le chargement des opérations et le stationnement des véhicules de société, il convient de retenir une valeur de 1300 euros/m² en valeur libre soit une indemnité de : 1113,3 X1300 = 1'447'290 euros, soit après un abattement de 30 % pour occupation : 1'447'290X 0,70 = 1'013'103 euros.

Le jugement sera infirmé en ce sens.

B- sur l'indemnité accessoire de perte de revenus locatifs

Le premier juge a indiqué que l'expropriée bénéficiait non seulement du patrimoine foncier, mais également des revenus locatifs de son exploitation ; il a indiqué que les locaux étaient donnés à bail ainsi qu'en atteste le bail commercial conclu avec la SARL ASIA GENERAL FOOD et quittance des 3 premiers trimestres 2020 versés aux débats et il a donc accordé à la société AGFIMMO une indemnité de perte de revenus locatifs fixés à 15 mois de loyer hors-taxes soit la somme de : 8000 euros X15 = 120'000 euros.

La société AGFIMMO en appel indique que depuis le 1er janvier 2021, que la société ASIA GENERAL FOOD , preneuse à bail a libéré les lieux loués et qu' outre le fait qu'il n'y a pas lieu à abattement pour occupation pour l'indemnité principale, il ny a pas non plus lieu à indemnité pour perte de revenus locatifs.

Aux termes de l'article L213- 4 du code urbanisme à défaut d'accord amiable, le prix d'acquisition est fixé par la juridiction compétente en matière d'expropriation, ce prix est exclusif de toute indemnité accessoire, et notamment de l'indemnité de remploi.

En conséquence, il convient d'infirmer le jugement déféré qui a accordé à tort une indemnité accessoire à la société AGFIMMO pour perte de revenus locatifs, s'agissant d'une préemption avec cette précision qu'en appel la société AGFIMMO ne demande plus d'indemnité accessoire pour perte de revenus locatifs.

La cour fixe en conséquence l'indemnité due par la SADEV 94 à la société AGFIMMO au titre de la préemption de son bien immobilier à la somme totale de 1'013'103 euros en valeur occupée.

Le jugement sera infirmé en ce sens.

- Sur l'article 700 du code de procédure civile

Il convient de confirmer le jugement qui a condamné la SADEV 94 à payer à la société AGFIMMO la somme de 3000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

L'équité commande de débouter la société AGFIMMO de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel.

- Sur les dépens

Il convient de confirmer le jugement pour les dépens de première instance qui seront supportés par la SADEV 94 en application de l'article L 312-1 du code de l'expropriation, y compris la somme de 1000 euros au titre de la rémunération du géomètre expert avancée par la société AGFIMMO.

La société AGFIMMO perdant le procès sera condamnée aux dépens d'appel.

PAR CES MOTIFS,

La cour statuant publiquement par mise à disposition au greffe, contradictoirement et en dernier ressort,

Déclare recevables les conclusions des parties ;

Infirme partiellement le jugement entrepris ;

Statuant à nouveau dans les limites de l'appel ;

Fixe l'indemnité due par la société d'aménagement et de développement des villes du département du Val-de-Marne (SADEV 94) à la société AGFIMMO au titre de la préemption du bien immobilier sis [Adresse 7] à [Localité 19], édifié sur la parcelle cadastrée section [Cadastre 16] à la somme totale de 1'013'103 euros en valeur occupée;

Confirme le jugement entrepris en ses autres dispositions ;

Déboute les parties de leurs demandes plus amples ou contraires ;

Déboute la société AGFIMMO de sa demande au titre de l' article 700 du code de procédure civile ;

Condamne la société AGFIMMO aux dépens.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 4 - chambre 7
Numéro d'arrêt : 21/17875
Date de la décision : 12/01/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-01-12;21.17875 ?
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