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12/01/2023 | FRANCE | N°20/07172

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 6 - chambre 5, 12 janvier 2023, 20/07172


Copies exécutoires REPUBLIQUE FRANCAISE

délivrées le : AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS





COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 5



ARRET DU 12 JANVIER 2023



(n° 2023/ , 2 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 20/07172 - N° Portalis 35L7-V-B7E-CCRY6



Décision déférée à la Cour : Jugement du 16 Septembre 2020 -Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de LONGJUMEAU - RG n° 18/00014



APPELANTE



Madame [E] [R]

[Adresse 1]

[Adresse

1]



Représentée par Me Maria-claudia VARELA, avocat au barreau d'ESSONNE



(bénéficie d'une aide juridictionnelle Partielle numéro 2020/035785 du 29/10/2020 accordée par le bu...

Copies exécutoires REPUBLIQUE FRANCAISE

délivrées le : AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 5

ARRET DU 12 JANVIER 2023

(n° 2023/ , 2 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 20/07172 - N° Portalis 35L7-V-B7E-CCRY6

Décision déférée à la Cour : Jugement du 16 Septembre 2020 -Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de LONGJUMEAU - RG n° 18/00014

APPELANTE

Madame [E] [R]

[Adresse 1]

[Adresse 1]

Représentée par Me Maria-claudia VARELA, avocat au barreau d'ESSONNE

(bénéficie d'une aide juridictionnelle Partielle numéro 2020/035785 du 29/10/2020 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de PARIS)

INTIMEE

S.A.S. SODEXO HYGIENE ET PROPRETE société prise en la personne de son représentant légal.

[Adresse 2]

[Adresse 2]

Représentée par Me Nicolas SERRE, avocat au barreau de PARIS, toque : A0966

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 20 octobre 2022, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Marie-Christine HERVIER, Présidente de chambre chargée du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Madame Marie-Christine HERVIER, Présidente de chambre, Présidente de formation,

Madame Marie-José BOU, Présidente de chambre

Madame Séverine MOUSSY, Conseillère

Greffier : Madame Cécile IMBAR, lors des débats

ARRÊT :

- contradictoire,

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile,

- signé par Madame Marie-Christine HERVIER, présidente et par Madame Cécile IMBAR, greffier à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

EXPOSE DU LITIGE

Mme [E] [R] a été engagée en qualité d'agent de service niveau AS2A par la société Sodexo hygiène et propreté par contrat de travail à durée indéterminée du 19 avril 2016 avec reprise d'ancienneté au 1er septembre 2003 pour une durée de travail de 130 heures mensuelles moyennant une rémunération qui s'élevait dans le dernier état de la relation contractuelle à la somme de 1 370,43 euros brut. Elle était affectée sur le site Safran campus à [Localité 3] et travaillait du lundi au vendredi de 9 heures à 15 heures.

Le 12 août 2016, l'employeur lui a notifié une mise à pied à titre disciplinaire de trois jours.

Par courrier recommandé du 30 novembre 2017, Mme [R] a été convoquée à un entretien préalable à un éventuel licenciement fixé au 1er décembre 2017 puis s'est vu notifier son licenciement pour faute grave par courrier adressé sous la même forme le 22 décembre 2017.

La société Sodexo hygiène et propreté emploie au moins onze salariés et applique la convention collective nationale des entreprises de propreté.

Contestant son licenciement et estimant ne pas être remplie de ses droits, Mme [R] a saisi le conseil de prud'hommes de Longjumeau le 9 janvier 2018 afin d'obtenir la condamnation de l'employeur à lui verser diverses sommes au titre de l'exécution et la rupture du contrat de travail. Par jugement du 16 septembre 2020 auquel la cour renvoie pour plus ample exposé des demandes initiales et de la procédure antérieure, le conseil de prud'hommes de Longjumeau, section commerce, a':

- fixé la moyenne de salaire de Mme [R] à 1 370 euros,

- annulé la sanction disciplinaire du 12 août 2016,

- requalifié le licenciement pour faute grave en licenciement pour cause réelle et sérieuse,

- débouté Mme [R] de sa demande d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

- condamné la société Sodexo hygiène et propreté à lui payer les sommes de :

* 1 000 euros de dommages-intérêts pour sanction injustifiée,

* 2 741 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis outre 274 euros au titre des congés payés sur préavis,

* 5 253,34 euros au titre de l'indemnité légale de licenciement,

* 1 200 euros sur le fondement de l'article 700 alinéa 2 du code de procédure civile,

- dit que les intérêts au taux légal courront à côté du 10 janvier 2018 pour les créances salariales et à compter du prononcé pour les autres créances,

- ordonné à la société Sodexo hygiène et propreté de remettre à Mme [R] l'attestation Pôle emploi rectifiée et un bulletin de paie rectificatif conforme à sa décision,

- ordonné l'exécution provisoire,

- condamné la société Sodexo hygiène et propreté aux dépens.

Mme [R] a régulièrement relevé appel du jugement le 21 octobre 2020.

Aux termes de ses dernières conclusions transmises par voie électronique le 20 janvier 2021 auxquelles la cour renvoie conformément à l'article 455 du code de procédure civile pour plus ample exposé des prétentions et moyens, Mme [R] prie la cour d'infirmer le jugement en ce qu'il l'a déboutée de sa demande d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, de le confirmer pour le surplus et de :

- requalifier le licenciement en licenciement sans cause réelle et sérieuse,

- condamner la société Sodexo hygiène et propreté à lui verser la somme de 13'700 euros à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

- condamner la société Sodexo hygiène et propreté aux dépens,

- débouter la société Sodexo hygiène et propreté de toute demande reconventionnelle.

Aux termes de ses dernières conclusions d'intimée n°1, portant appel incident, transmises par voie électronique le 20 avril 2021 auxquelles la cour renvoie pour plus ample exposé des prétentions et moyens conformément à l'article 455 du code de procédure civile, la société Sodexo hygiène et propreté prie la cour de':

- infirmer le jugement et débouter Mme [R] de l'ensemble de ses demandes,

- subsidiairement, confirmer le jugement en ce qu'il a débouté Mme [R] de sa demande d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et sur les quantum de l'indemnité compensatrice de préavis, les congés payés afférents et l'indemnité légale de licenciement,

- infirmer le jugement en ce qu'il a annulé la sanction disciplinaire du 12 août 2016 et l'a condamnée à payer à Mme [R] une somme de 1 000 euros de dommages-intérêts pour sanction disciplinaire injustifiée outre 1 200 euros en application de l'article 700 alinéa deux du code de procédure civile,

- débouter Mme [R] de sa demande de dommages-intérêts au titre de la sanction disciplinaire du 12 août 2016 et de sa demande présentée sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- à titre plus subsidiaire, fixer l'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse à la somme de 4 110 euros,

- en tout état de cause, condamner Mme [R] aux dépens de première instance et d'appel et à lui payer la somme de 2 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

L'ordonnance de clôture est intervenue le 21 septembre 2022.

MOTIVATION':

Sur l'exécution du contrat de travail':

Aux termes de l'article L. 1333-1 du code du travail, en cas de litige sur une sanction disciplinaire, le conseil de prud'hommes apprécie la régularité de la procédure suivie et si les faits reprochés au salarié sont de nature à justifier une sanction. L'employeur fournit au conseil de prud'hommes les éléments retenus pour prendre la sanction. Au vu de ces éléments et de ceux qui sont fournis par le salarié à l'appui de ses allégations, le conseil de prud'hommes forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles. Si un doute subsiste, il profite au salarié.

L'article L. 1333-2 du code du travail précise que le conseil de prud'hommes peut annuler une sanction irrégulière en la forme, ou injustifiée ou disproportionnée à la faute commise.

La société Sodexo hygiène et propreté sollicite l'infirmation du jugement en ce qu'il a prononcé l'annulation de la sanction disciplinaire notifiée le 12 août 2016 en faisant valoir que celle-ci est justifiée puisqu'elle repose sur :

- un refus de réaliser ou une mauvaise exécution des tâches qui incombent à la salariée,

- un refus de remonter les anomalies constatées dans les chambres qu'elle nettoie,

- la communication d'informations mensongères,

- la perturbation du bon fonctionnement de l'équipe et la remise en cause de l'autorité de sa responsable hiérarchique.

De son côté, Mme [R] sollicite la confirmation du jugement et conteste la matérialité des faits ou que ceux-ci lui sont imputables.

Sur le refus d'excuter les tâches :

L'employeur soutient que Mme [R] a refusé d'exécuter le nettoyage des rainures des vitres qu'il lui demandait de faire et qu'elle effectuait mal son travail, s'appuyant sur des fiches de tâches faisant apparaître les manquements signalés.

Mme [R] fait valoir qu'il lui a été demandé de nettoyer les vitres alors que cette tâche ne fait pas partie de sa fiche de poste puisqu'un autre salarié en est chargé et qu'elle ne disposait pas du matériel nécessaire et s'agissant de la mauvaise réalisation des tâches, soutient qu'elle ne travaille pas seule puisque le nettoyage des chambres est effectué par un binôme.

Il ressort des fiches de tâches produites par l'employeur pour les journées des 3, 13, 20 et 27 juin 2016 que Mme [R] n'était pas la seule à qui les tâches litigieuses ont été confiées puisque que les fiches mentionnent deux ou trois prénoms. L'employeur n'établit donc pas l'imputabilité des faits à la salariée. En revanche, s'agissant du nettoyage des vitres, il ressort du courrier de notification de la mise à pied que le travail demandé à Mme [R] n'était pas le nettoyage la vitre mais des rainures des portes vitrées de sorte que le refus allégué et non contesté d'accomplir cette tâche est fautif.

Sur le refus de remonter les anomalies constatées :

L'employeur soutient que chaque salarié doit remonter à son supérieur hiérarchique les anomalies constatées lors de son intervention, communiquant les fiches de contrôle qui décrivent précisément l'état dans lequel doit se trouver chaque chambre.

Mme [R] fait valoir qu'elle ne travaillait pas seule alors qu'elle a été la seule à être sanctionnée.

L'employeur verse aux débats les fiches de contrôle des 14, 15 et 16 juin 2016 signalant les anomalies dans les chambres qui ne suffisent pas à établir toutefois que l'information n'avait pas été remontée ni que cette situation était imputable à Mme [R] puisqu'il ressort de ces fiches que le travail dans les chambres était effectué par plusieurs salariées et que le fait que Mme [R] soit le dénominateur commun des équipes constituées comme le souligne l'employeur ne suffit pas à établir que les faits lui sont imputables personnellement.

Sur la communication d'informations erronées :

L'employeur reproche à la salariée de lui avoir communiqué de fausses informations sur la situation antérieure au transfert du contrat de travail et les pratiques de son ancien employeur en ayant prétendu que celui-ci employait des équipiers intérimaires afin de se répartir la charge de travail et s'appuie sur l'attestation de M. [O], directeur du site dans laquelle il fait état de cette déclaration et de ce que, renseignements pris auprès du précédent prestataire, cette information s'était avérée inexacte, ainsi que sur un courrier du 1er juillet 2016 signé par Mme [Z] [P] et Mme [K] [U] dont les qualités ne sont pas connues dans lequel elles indiquent qu'avec le précédent prestataire elles ne travaillaient pas avec des intérimaires. La cour considère toutefois que ces éléments sont insuffisants pour établir le caractère délibérément inexact des propos prêtés à Mme [R] dont la teneur n'est pas connue ni justifiée.

Sur la perturbation volontaire du bon fonctionnement de l'entreprise :

L'employeur reproche à Mme [R] de remettre constamment en cause l'autorité de sa responsable hiérarchique, en incitant les autres salariées à travailler moins vite pour avoir des heures supplémentaires, en donnant des instruction contradictoires aux personnels employés en contrat de travail à durée déterminée, en incitant les autres femmes de chambre à ne pas obtempérer aux demandes de la gouvernante et en prétendant que sa supérieure hiérarchique lui parle mal, lui crie dessus, ne la regarde pas et ne lui dit pas bonjour. L'employeur s'appuie sur une note qu'il présente comme émanant de Mme [I] mais dont la valeur probante est insuffisante pour établir la matérialité des faits dès lors qu'aucun élément objectif ne vient la confirmer alors qu'elle n'est pas signée et que son auteur n'est pas formellement identifié.

En définitive, en dehors du refus de nettoyer les rainures des portes vitrées, la cour considère que les faits ne sont pas établis de sorte que la mise à pied de trois jours est une sanction disproportionnée par rapport à la faute commise. La sanction est donc annulée et le jugement confirmé sur ce point et en ce qu'il a condamné la société Sodexo hygiène et propreté à verser à Mme [R] une somme de 1 000 euros de dommages-intérêts en réparation du préjudice subi.

Sur la rupture du contrat travail :

Sur le bien-fondé du licenciement :

Aux termes de la lettre de licenciement fixant les limites du litige, Mme [R] a été licenciée pour les motifs suivants :

« ['] nous devons déplorer votre comportement sur le site à l'égard de votre hiérarchie. En effet, vous mettez régulièrement en cause votre responsable en ne prenant pas en compte ce qui vous est dit, notamment sur le respect des règles sur le temps de travail. La manière dont vous répondez à votre responsable traduit une insolence certaine de votre part vis-à-vis d'elle. Par ailleurs vous ne respectez pas le temps de pause qui vous est imparti et prévu à votre planning et n'en faites qu'à votre tête quant à vos horaires de travail.

Ainsi, le 20 novembre 2017 vous êtes arrivée à 9 heures et deviez donc finir à 15h20 pause incluse. Pourtant vous avez répondu à votre responsable, lorsque celle-ci vous en a parlé, que vous n'aviez pas pris votre pause, et que vous partiez à 14h45 car vous aviez un rendez-vous et que c'était ainsi !

Le 27 novembre 2017, vous êtes arrivée à 9 heures mais vous avez décidé de partir à 15 heures sans faire votre pause, car vous aviez des choses à faire. Votre responsable vous l'a signalé mais vous lui avez répondu que « si vous aviez des choses à faire, vous ne preniez pas votre pause ». De plus, sur le cahier d'enregistrement des arrivées/départs, vous avez indiqué un départ à 15h20 ce qui a été rectifié par votre responsable.

Le 1er décembre 2017, les transports fonctionnaient mal. Ce jour-là à 9h15 votre responsable ne vous voyant pas arriver (pour une prise de poste à 8h30), elle vous a appelée pour savoir ce qui se passait. Vous l'avez informée des problèmes de transport. Votre responsable vous a alors fait remarquer que vous auriez pu la prévenir mais vous aviez déjà raccroché ! Vous êtes finalement arrivée à 9h30. Vous deviez donc finir à 15h50. Votre responsable vous croisant à 14h45, elle vous demande si vous avez pris votre pause : vous lui répondez que vous partiez à 15h30. Lorsque votre responsable vous fait remarquer que vous devez prendre votre pause, vous lui répondez que c'est vous qui décidez de prendre ou non votre pause.

Enfin, vous n'admettez aucune remarque et lorsqu'il vous est fait des observations sur votre travail, vous ne reconnaissez pas les faits et vous vous emportez. Le 4 décembre 2017, vous avez eu une altercation vers 11 heures avec votre chef d'équipe au sujet de la propreté de la salle fitness. Vous responsable avait été appelé par une personne qui, voulant utiliser la salle, avait constaté que la salle n'était pas propre. Votre chef d'équipe nous a montré que le sol du fitness n'était pas aspiré et mal lavé (présence de miettes, terres et cheveux sur le sol). Vous n'avez pas accepté la remarque, disant que ce n'était pas vrai. Le ton est monté très haut et l'altercation a été violente. Vous avez également prévenu que vous aviez enregistré la conversation. Ce même jour à 13 heures, vous êtes allée voir votre chef d'équipe pour lui demander de vous montrer comment passer la mop alors qu'elle avait terminé sa journée et allait partir.

Votre comportement est inadmissible : votre mise en cause permanente de l'autorité de votre responsable hiérarchique crée une ambiance délétère sur le site, au point que votre responsable n'ose plus vous faire de remarques.

Vous avez déjà fait l'objet en septembre 2016 d'une mise à pied disciplinaire de trois jours pour des faits similaires. Par ailleurs, votre responsable avait alerté à plusieurs reprises sur les difficultés relationnelles qu'elle rencontrait avec vous. Bien que ces faits n'aient pas fait l'objet de sanctions disciplinaires, ils n'en attestent pas moins de la réalité de la situation et des conséquences néfastes de votre comportement.

Lors de l'entretien vous avez réfuté la plupart des griefs. Compte tenu de la gravité des faits et de votre absence totale de remise en cause, nous sommes amenés à vous notifier par la présente votre licenciement pour faute grave, sans indemnité ni préavis, pour ces différents motifs. En effet, ces faits en raison de leur nature et de leurs répercussions, créent une situation rendant impossible la poursuite de votre contrat travail pendant la période correspondant au préavis. [']. ».

La faute grave est celle qui rend impossible le maintien du salarié dans l'entreprise. La charge de la preuve repose sur l'employeur qui l'invoque.

La société Sodexo hygiène et propreté soutient que le licenciement de Mme [R] est justifié par :

- son insubordination notamment par le non-respect du temps de travail,

- son comportement agressif et insolent.

S'agissant de l'insubordination par le non-respect du temps de travail :

L'employeur communique trois mails de Mme [V], la gouvernante, supérieure hiérarchique de Mme [R], en date des 20 novembre, 27 novembre et 1er décembre 2017, adressés à la directrice des ressources humaines par lesquels elle signale les faits tels qu'ils sont repris dans la lettre de licenciement.

De son côté, Mme [R] soutient que Mme [V] avait un comportement humiliant à son égard et indique qu'elle avait déposé une main courante à son encontre dès le mois de mai 2017.

La cour relève toutefois que les allégations portées dans la main courante ne sont pas corroborées par des éléments objectifs.

Mme [R] conteste les faits qui lui sont reprochés en faisant valoir avec raison que ses horaires de travail sont fixés contractuellement de 9 heures à 15 heures du lundi au vendredi, que le mail de Mme [V] du 20 novembre à 14h38 dans lequel elle affirme que la salariée partira à 14h45 ne suffit pas à établir la réalité de cet horaire puisqu'il a été rédigé avant l'heure de départ qui lui est reprochée. S'agissant de la journée du 27 novembre 2017, Mme [R] soutient avoir effectué les horaires prévus par son contrat de travail de 9 heures à 15 heures, ce qui est corroboré par le mail de Mme [V] versé aux débats, de sorte qu'aucune faute ne peut lui être reprochée valablement. Enfin, s'agissant de la journée du 1er décembre, Mme [R] fait valoir que si elle est arrivée à 9h30 il est naturel qu'elle parte à 15h30, mais la cour relève que les horaires de travail n'ont donc pas été respectés.

Sur le comportement de Mme [R]':

L'employeur s'appuie sur des comptes-rendus d'entretiens qui d'après lui, ont été menés le 12 janvier 2018 par la responsable des ressources humaines de la société, qu'il communique dont il ressort que Mme [R] est « méchante », qu'elle traite ses collègues de «'sorcières » qu'elle contestait l'autorité de la gouvernante et qu'elle « faisait peur » à une de ses collègues. Cependant, la cour relève que comme le soulève justement la salariée les conditions dans lesquelles ces entretiens ont été menés ne sont pas établies pas plus que n'est justifiée ou même mentionnée l'identité et la qualité de la personne ayant rédigé les entretiens. La valeur probante de ces comptes-rendus n'est donc pas certaine et insuffisante pour établir la matérialité des faits. Par ailleurs, la cour relève que la lettre de licenciement ne reproche pas à Mme [R] un comportement agressif vis-à-vis de ses collègues. Il est en revanche fait état d'une altercation avec le chef d'équipe le 4 décembre 2017 à 11 heures au sujet de la propreté de la salle fitness. L'employeur s'appuie sur ce qu'il présente comme le compte rendu d'entretien de Mme [H] [J] selon lequel il aurait été dit par cette salariée que Mme [R] ne fait pas bien la propreté et que le jour de l'incident elle ne reconnaissait pas que ce n'était pas propre. Mais la cour n'a pas retenu la valeur probante des comptes-rendus d'entretien comme il a été dit plus haut et d'autre part, contrairement à ce que prétend l'employeur, il n'est pas justifié que le compte rendu d'entretien a été signé par Mme [J], la copie communiquée en pièce 12 du bordereau ne comportant aucune signature. L'employeur verse également aux débats le mail de Mme [V] du 4 décembre 2017, adressé à Mme [W], et relatant cet incident. Mais la cour relève que Mme [V] se contente de rapporter les faits qui lui ont été présentés par Mme [N] sans faire état de ses propres constatations puisqu'elle n'a pas assisté à l'incident. La cour considère en conséquence de ce qui précède que les faits ne sont pas suffisamment établis.

En définitive, seul le non-respect des horaires pour la journée du 1er décembre 2017 est établi mais la cour considère qu'il ne suffit pas à rendre impossible le maintien de la salariée dans l'entreprise ni même à caractériser une cause sérieuse de licenciement. Le licenciement est donc sans cause réelle et sérieuse.

Sur les conséquences du licenciement sans cause réelle et sérieuse :

Le jugement est confirmé en ce qu'il a condamné la société Sodexo hygiène et propreté à payer à Mme [R] la somme de 2 741 euros au titre de l'indemnité compensatrice de préavis outre 274 euros au titre de l'indemnité compensatrice de congés payés sur préavis et de 5 253,34 euros au titre de l'indemnité légale de licenciement dont les montants ont été calculés conformément aux dispositions contractuelles, conventionnelles et légales et ne sont pas critiquées par l'employeur.

Sur l'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse :

Mme [R] bénéficiant d'une ancienneté de 13 années complètes dans une entreprise comprenant au moins 11 salariés est fondée à percevoir une indemnité comprise entre 3 et 11 mois et demi de salaire en application de l'article L. 1235'3 du code du travail dans sa version en vigueur au moment du licenciement. Eu égard au montant de sa rémunération, à son âge au moment du licenciement (née en 1973), à son ancienneté dans l'entreprise, aux circonstances du licenciement, à ce qu'elle justifie de sa situation postérieure à la rupture, la cour condamne la société Sodexo hygiène et propreté à verser à Mme [R] une somme de 10'000 euros suffisant à réparer son entier préjudice et le jugement est infirmé en ce qu'il l'a déboutée de ce chef de demande.

Sur les autres demandes :

Le jugement est confirmé en ce qu'il a statué sur le point de départ des intérêts au taux légal portant sur les condamnations de nature salariale et, s'agissant des intérêts au taux légal portant sur les condamnations de nature indemnitaire, la cour rappelle que les intérêts courent à compter de la décision qui les prononce.

Le jugement est également confirmé en ce qu'il a ordonné la remise des documents sociaux conformes à la décision.

Eu égard à la solution du litige, la cour fait d'office application de l'article L. 1235'4 du code du travail et la société Sodexo hygiène et propreté doit rembourser à Pôle emploi les indemnités de chômage éventuellement versées à Mme [R] depuis son licenciement jusqu'à ce jour dans la limite de trois mois.

La société Sodexo hygiène et propreté, partie perdante, est condamnée aux dépens de première instance et d'appel et à verser à Mme [R] une somme de 1 500 euros en application de l'article 700 al. 2 du code de procédure civile, en sus de la somme allouée sur ce fondement en première instance, le jugement étant confirmé de ce chef et la propre demande présentée par la société Sodexo hygiène et propreté étant rejetée.

PAR CES MOTIFS :

La cour, statuant contradictoirement et par mise à disposition au greffe,

CONFIRME le jugement sauf en ce qu'il a requalifié le licenciement pour faute grave en licenciement pour cause réelle et sérieuse et débouté Mme [E] [R] de sa demande d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

Statuant à nouveau des chefs infirmés et y ajoutant :

DIT le licenciement sans cause réelle et sérieuse,

CONDAMNE la société Sodexo hygiène et propreté à verser à Mme [E] [R] la somme de 10'000 euros à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

RAPPELLE que les intérêts au taux légal portant sur les condamnations de nature indemnitaire sont dus à compter de la décision qui les prononce,

ORDONNE à la société Sodexo hygiène et propreté de rembourser à Pôle emploi les indemnités de chômage éventuellement versées à Mme [E] [R] depuis son licenciement dans la limite de trois mois,

DIT n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile en faveur de la société Sodexo hygiène et propreté,

CONDAMNE la société Sodexo hygiène et propreté aux dépens et à payer à Mme [E] [R] la somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article 700 al. 2 du code de procédure civile.

LA GREFFIÈRE LA PRÉSIDENTE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 6 - chambre 5
Numéro d'arrêt : 20/07172
Date de la décision : 12/01/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-01-12;20.07172 ?
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