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11/01/2023 | FRANCE | N°21/03988

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 5 - chambre 1, 11 janvier 2023, 21/03988


REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS







COUR D'APPEL DE PARIS



Pôle 5 - Chambre 1



ARRET DU 11 JANVIER 2023



(n° 002/2023, 12 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : 21/03988 - N° Portalis 35L7-V-B7F-CDGMD



Décision déférée à la Cour : Jugement du 26 Février 2021 - Tribunal Judiciaire de PARIS 3ème chambre - 2ème section - RG n° 19/09491





APPELANTS



Monsieur [K] [J]

Né le 20 Décembre 1951 à [Localité 6] (

75)

De nationalité française

Auditeur, conseiller scientifique et écrivain

Demeurant [Adresse 3]

[Localité 1]

SUISSE



Représenté et assisté de Me Antoine GITTON de la SELAS Antoine GITT...

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 5 - Chambre 1

ARRET DU 11 JANVIER 2023

(n° 002/2023, 12 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : 21/03988 - N° Portalis 35L7-V-B7F-CDGMD

Décision déférée à la Cour : Jugement du 26 Février 2021 - Tribunal Judiciaire de PARIS 3ème chambre - 2ème section - RG n° 19/09491

APPELANTS

Monsieur [K] [J]

Né le 20 Décembre 1951 à [Localité 6] (75)

De nationalité française

Auditeur, conseiller scientifique et écrivain

Demeurant [Adresse 3]

[Localité 1]

SUISSE

Représenté et assisté de Me Antoine GITTON de la SELAS Antoine GITTON Avocats, avocat au barreau de PARIS, toque : L0096

Madame [H] [G] [J]

Née le 18 Mai 1949 à [Localité 5] (21)

De nationalité française

Auditrice, conseillère scientifique et écrivaine

Demeurant [Adresse 3]

[Localité 1]

SUISSE

Représentée et assistée de Me Antoine GITTON de la SELAS Antoine GITTON Avocats, avocat au barreau de PARIS, toque : L0096

INTIMEE

S.A.S.U. ELLEBORE

Société au capital social de 1 000 euros

Immatriculée au Registre du Commerce et des Sociétés de PARIS sous le numéro 811 973 023

Prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés ès qualités audit siège

[Adresse 2]

[Localité 4]

Représentée par Me Pierre-Louis ROUYER, avocat au barreau de PARIS, toque : E1508

Assistée de Me Hélène MARINOPOULOS substituant Me Pierre Louis ROUYER, avocats au barreau de PARIS, toque E1508

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l'article 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 09 novembre 2022, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Mme Déborah BOHÉE, conseillère et Mme Isabelle DOUILLET, présidente, chargée d'instruire l'affaire, laquelle a préalablement été entendue en son rapport.

Ces magistrates ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Mme Isabelle DOUILLET, présidente de chambre

Mme Françoise BARUTEL, conseillère

Mme Déborah BOHÉE, conseillère.

Greffier, lors des débats : Mme Karine ABELKALON

ARRÊT :

Contradictoire

par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

signé par Isabelle DOUILLET, Présidente de chambre et par Karine ABELKALON, Greffière, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

EXPOSÉ DU LITIGE

La société ELLEBORE (SARL), créée en 1980, était une société d'édition ayant fusionné en 2006 avec la société SANG DE LA TERRE, nom sous lequel elle a publié des ouvrages, notamment dans le domaine de l'écologie et de l'environnement.

Par un jugement du tribunal de commerce de Paris du 7 mai 2015, son fonds de commerce a fait l'objet d'une cession partielle - comprenant la reprise de l'intégralité des contrats entre la société ELLEBORE et les auteurs - au profit de la société DG DIFFUSION.

La liquidation judiciaire de la société ELLEBORE a été prononcée par jugement du 11 juin 2015.

La SASU ELLEBORE, filiale détenue à 100 % par la société DG DIFFUSION et immatriculée le 12 juin 2015, s'est alors substituée à celle-ci pour l'exploitation des oeuvres ayant fait l'objet d'un contrat d'édition signé initialement par la société ELLEBORE (SARL).

M. [K] [J] se présente comme un ingénieur agronome réputé dans le domaine de la restauration des sols agricoles. Son épouse, Mme [H] [J], et lui-même ont publié l'ouvrage « Le Sol, la terre et les champs : pour retrouver une agriculture saine » selon un contrat d'édition conclu avec la SARL ELLEBORE le 15 février 2008.

Les époux [J] exposent rencontrer, depuis la reprise des contrats par la société DG DIFFUSION, des difficultés récurrentes pour obtenir des redditions de comptes conformes aux stipulations contractuelles, ainsi que le paiement de leurs droits d'auteur. Après un premier courrier en date du 4 octobre 2018 resté sans réponse, M. et Mme [J] ont, par lettre recommandée du 9 avril 2019, mis en demeure l'éditeur d'exécuter ses obligations et se sont prévalus de l'article L.132-17-3 du code de la propriété intellectuelle et de la résiliation de plein droit du contrat d'édition.

Par courrier RAR du 22 mai 2019, la société ELLEBORE a répondu par l'intermédiaire de son avocat que la date du 1er avril (prévue au contrat pour le paiement du solde des droits d'auteur) ne constituait pas une date d'échéance mais une date ouvrant un délai pour la mise en paiement et que le retard dans le versement des redevances était dû à un changement de domiciliation fiscale des auteurs, ceux-ci ayant sollicité le versement de leurs droits sur un compte en Suisse, ce qui nécessitait la vérification des règles d'assujettissement à la TVA française et l'établissement d'un nouveau relevé de droits.

Considérant qu'aucune réponse satisfaisante ne leur avait été apportée sur l'absence de reddition des comptes pour l'année 2018, ni sur la conformité des comptes pour les exercices antérieurs, et que les paiements se rapportant aux exercices 2017 et 2018 n'étaient toujours pas intervenus, M. et Mme [J] ont, par acte d'huissier délivré le 8 août 2019, fait assigner la société ELLEBORE (SASU) devant le tribunal judiciaire de Paris.

Par lettre recommandée avec accusé de réception en date du 15 juillet 2019 reçue le 16 juillet 2019, les deux coauteurs se sont prévalus des dispositions de l'article L.132-17-3-II du code de la propriété intellectuelle relatif à la résiliation de plein droit du contrat d'édition en cas de non respect par l'éditeur de son obligation de reddition des comptes.

Par ordonnance le 24 janvier 2020, ils ont obtenu du juge de la mise en état une somme provisionnelle de 7 387,22 euros à valoir sur leurs droits d'auteurs au titre de l'année 2017, le juge enjoignant par ailleurs aux époux [J] de produire le justificatif de leur domiciliation fiscale pour les années 2017 et 2018.

La société ELLEBORE (SASU) a ensuite procédé au règlement de 14 478 euros au titre des droits se rapportant à l'exercice 2017 et 2018, une somme de 5 278,85 euros restant due pour l'année 2019.

Dans un jugement rendu le 26 février 2021, le tribunal judiciaire de Paris a :

- rejeté les demandes tendant à voir constater la résiliation de plein droit du contrat d'édition du 15 février 2008 de l'ouvrage « Le Sol, la terre et les champs : pour retrouver une agriculture saine » ;

- condamné en tant que de besoin la société ELLEBORE à communiquer des comptes d'exploitation conformes aux dispositions de l'article L.132-17-3 du code de la propriété intellectuelle ;

- dit que la demande tendant au paiement de la somme de 5.278,85 euros avec intérêts au taux légal à compter du 1er juillet 2020 est devenue sans objet ;

- rejeté la demande de dommages et intérêts ;

- rejeté la demande tendant à voir prononcer la résiliation du contrat d'édition du 15 février 2008 en raison d'une faute de l'éditeur ;

- condamné [K] et [H] [J] aux dépens et au versement à la société ELLEBORE de la somme de 3 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ;

- dit n'y avoir lieu d'ordonner l'exécution provisoire.

Les époux [J] ont interjeté appel de ce jugement le 1er mars 2021.

Le 18 mai 2021, les époux [J] ont adressé une nouvelle mise en demeure à l'éditeur, reçue par ce dernier le 28 mai 2021, se prévalant de l'article L. 132-17-3-II du code de la propriété intellectuelle, demandant la communication de comptes d'exploitation pour l'année 2020 avec des mentions précises, ainsi que le paiement de leurs droits au plus tard pour le 30 juin.

Dans leurs dernières conclusions numérotées 4 transmises le 14 juin 2022, les époux [J] demandent à la cour de :

- de les déclarer recevables et bien fondés en leur appel,

- de débouter la société ELLEBORE de ses demandes,

- d'infirmer le jugement en toutes ses dispositions,

- de dire que le contrat d'édition du 15 février 2008 de l'ouvrage 'Le sol la terre et les champs' est résilié de plein droit depuis le 16 octobre 2019, subsidiairement depuis le 19 août 2021,

- de dire que les comptes-rendus d'édition des exercices 2015, 2016, 2017, 2018, 2019, 2020 et 2021 sont irréguliers,

- de condamner la société ELLEBORE, sous astreinte de 1.000 euros par jour de retard, sur une durée de six mois passé un délai de huit jours à compter de la signification du jugement à intervenir, à communiquer les comptes d'exploitation de l'ouvrage « Le Sol, la terre et les champs : pour retrouver une agriculture saine » ISBN 978-2-86985-326-3 pour chacun des exercices annuels compris entre 2015 et jusqu'au jour de l'arrêt à intervenir avec la mention précise :

- du nombre d'exemplaires en stock en début d'exercice ;

- du nombre d'exemplaires fabriqués en cours d'exercice ;

- du nombre d'exemplaires expédiés et facturés en cours d'exercice aux points de vente ;

- du nombre d'exemplaires retournés et crédités en cours d'exercice aux points de vente

- du nombre d'exemplaires net vendus par l'éditeur au cours de l'exercice ;

- du nombre total d'exemplaires hors droits de l'exercice, en indiquant notamment le nombre d'exemplaires promotionnels non destinés a la vente et en isolant le nombre d'exemplaires destinés aux médias (« services de presse ») ;

- du nombre d'exemplaires détruits au cours de l'exercice ; le nombre d'exemplaires en stock en fin d'exercice.

- des modalités de calcul des provisions pour retours (quantité, taux...) ;

- du montant de la réintégration de la provision pour retours de la période précédente a compter du 2e exercice ;

- du montant de la provision pour retours constituée pour l'exercice. Pour chacun des circuits de diffusion :

- du prix public hors taxes ;

- du taux de droits d'auteur prévu au contrat ;

- du nombre d'exemplaires net vendus par l'éditeur au cours de l'exercice ;

- de la provision pour retours constituée, le cas échéant, pour l'exercice ;

- du montant total des droits calculés sur l'exercice ;

- de dire le défaut récurrent de paiement de redevances par l'éditeur et l'absence de reddition decomptes constituent des fautes d'une particulière gravité au préjudice des deux auteurs,

- de condamner la SASU ELLEBORE au paiement de la somme de 15.000 euros de dommages et intérêts,

- subsidiairement, d'ordonner la résiliation du contrat d'édition du 15 février 2008 à compter de la date de l'arrêt à intervenir,

- de condamner la SASU ELLEBORE au paiement de la somme de 15 000 euros en remboursement des frais irrépétibles exposés en première instance et en appel,

- de condamner la SASU ELLEBORE aux entiers dépens d'instance avec bénéfice du droit de recouvrement direct à la SELAS AGA, conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

Dans ses dernières conclusions récapitulatives numérotées 3 transmises le 16 mai 2022, la société ELLEBORE demande à la cour :

- à titre principal,

- de confirmer le jugement dans toutes ses dispositions ;

- de rejeter le surplus des demandes formulées par M. et Mme [J];

- à titre subsidiaire

- de constater que la société ELLEBORE n'a commis aucune faute de nature à justifier la résiliation du contrat d'édition du 15 février 2008 ;

- en conséquence,

- de débouter M. et Mme [J] de l'ensemble de leurs demandes ;

- en tout état de cause,

- de condamner M. et Mme [J] à verser la somme de 3 000 euros chacun à la société ELLEBORE au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

- de condamner M. et Mme [J] aux entiers dépens.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 20 septembre 2022.

MOTIFS DE L'ARRET

En application des dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, il est expressément

renvoyé, pour un exposé exhaustif des prétentions et moyens des parties, aux conclusions écrites qu'elles ont transmises, telles que susvisées.

Sur la résiliation de plein droit du contrat d'édition

Les appelants sollicitent la résiliation de plein droit du contrat d'édition en date du 15 février 2008 soutenant que la société ELLEBORE a failli à ses obligations de reddition des comptes et de paiement des droits d'auteur. Ils font valoir, en ce qui concerne la reddition des comptes, que leur lettre RAR du 15 juillet 2019 concernant les comptes de l'exercice 2018 n'a pas été suivie d'effet, que la prétendue lettre du 28 août 2019 de l'éditeur prétextant leur défaut de réponse sur leur résidence fiscale en Suisse a été produite dans le cadre de l'incident de première instance ayant donné lieu à l'ordonnance du 24 janvier 2020 et ne peut avoir interrompu le délai de résiliation de plein droit de l'article L. 131-17-3-I alors que l'éditeur avait été informé de leur résidence fiscale en Suisse par un courrier du 4 mai 2017, et qu'un tel défaut d'information ne justifie en rien l'absence de communication des comptes ; que la société ELLEBORE a communiqué des bordereaux de versement de droits d'auteur au titre des années 2015, 2016, 2017, 2018 et 2019 seulement le 16 octobre 2020, dans le cadre de la procédure, soit avec un retard de 6 à 54 mois ; que malgré une nouvelle LRAR du 18 mai 2021, les comptes pour l'année 2020 (avec ceux de l'année 2021) n'ont été transmis, dans le cadre de la procédure, qu'avec des conclusions du 20 janvier 2022 et 16 mai 2022, soit avec un retard respectivement de 10 mois et un an en demi ; que la prétendue lettre simple du 16 août 2021 invoquée par l'éditeur est un faux ; que contrairement à l'appréciation des premiers juges, les redditions de compte de la société ELLEBORE, communiquées uniquement dans le cadre de la procédure, sans mise à disposition des comptes par l'éditeur, par un procédé de communication électronique, ne répondent pas à l'obligation générale de rendre compte à l'auteur du calcul de sa rémunération de façon explicite et transparente au regard des textes légaux, réglementaires, contractuels ou professionnels applicables. En ce qui concerne le paiement de leurs droits, ils arguent que le contrat prévoit que les redevance d'auteur afférentes à un chiffre d'affaires réalisé par l'éditeur au cours d'un exercice 'n' sont exigibles dès le 1er avril de l'année 'n°+1" ; que l'accord entre le Conseil Permanent des Écrivains et le Syndicat National de l'Édition et l'accord entre la Société des Gens de Lettre et le Syndicat National de l'Édition prévoient un paiement au plus tard dans les six mois de la date d'arrêté des comptes (31 décembre), soit au plus tard le 30 juin de l'année suivante ; que c'est de façon spécieuse que la société ELLEBORE a invoqué quant au paiement des droits une difficulté liée à la TVA et à leur résidence en Suisse alors qu'elle avait réglé des sommes dues sur l'exercice 2015 ; que les redevances dues sur l'année 2020 n'ont pas été réglées avant le mois de mai 2022.

La société ELLEBORE oppose qu'elle a répondu à la LRAR des époux [J] dès le 28 août 2019 en leur indiquant qu'elle serait en mesure de procéder au règlement de leurs droits ainsi qu'à la reddition des comptes dès qu'elle serait en possession des informations nécessaires relatives à leur régime d'imposition ; que les informations relatives à la résidence fiscale des auteurs s'avèrent en effet indispensables afin de déterminer si elle devait ou non en sa qualité d'éditeur s'acquitter du règlement des cotisations sociales ; que les consorts [J] ont répondu par une nouvelle mise en demeure du 15 juillet 2019 au lieu de fournir les informations sollicitées qui n'ont été transmises qu'à compter du 28 janvier 2020 à la suite de l'ordonnance rendue par le juge de la mise en état ; que les bordereaux transmis sont conformes aux exigences de l'article L.132-17-3 du code de la propriété intellectuelle ; qu'à la mise en demeure des époux [J] du 18 mai 2021, adressée en cours de procédure, demandant la communication des comptes selon certaines modalités, elle a répondu par courrier du 16 août 2021 en justifiant les raisons de son refus, les demandes des auteurs portant précisément sur les demandes soumises à la cour ; que ce courrier est un courrier simple car elle n'a pas les moyens de répondre à tous ses auteurs par courrier RAR ; que l'article 18 du contrat fixe le 1er avril comme le point de départ de la période d'exigibilité du paiement ; qu'elle s'est acquittée de la totalité de sa dette au titre des exercices antérieurs à l'année 2020 et que si elle s'est acquittée tardivement, le 16 mai 2022, des droits au titre de l'exercice 2020, c'est en raison de la crise sanitaire de 2020 qui a impacté lourdement le marché de l'édition (report ou cessation de publications, annulation de nombreux événements littéraires...), elle-même, petite société d'édition, ayant connu des difficultés en raison de la concomitance de l'échéance de son bail commercial, du paiement des charges sociales de ses salariés et du versement des droits de ses auteurs.

Sur l'obligation de reddition des comptes

Selon l'article L. 132-13 du code de la propriété intellectuelle, 'L'éditeur est tenu de rendre compte. L'auteur pourra, à défaut de modalités spéciales prévues au contrat, exiger au moins une fois l'an la production par l'éditeur d'un état mentionnant le nombre d'exemplaires fabriqués en cours d'exercice et précisant la date et l'importance des tirages et le nombre des exemplaires en stock. Sauf usage ou conventions contraires, cet état mentionnera également le nombre des exemplaires vendus par l'éditeur, celui des exemplaires inutilisables ou détruits par cas fortuit ou force majeure, ainsi que le montant des redevances dues ou versées à l'auteur'. L'article L.132-14 du même code précise que 'L'éditeur est tenu de fournir à l'auteur toutes justifications propres à établir l'exactitude de ses comptes. Faute par l'éditeur de fournir les justifications nécessaires, il y sera contraint par le juge'.

L'article L.132-17-3 du code de la propriété intellectuelle dispose que :

'I.- L'éditeur est tenu pour chaque livre de rendre compte à l'auteur du calcul de sa rémunération de façon explicite et transparente. A cette fin, l'éditeur adresse à l'auteur, ou met à sa disposition par un procédé de communication électronique, un état des comptes mentionnant :

1° Lorsque le livre est édité sous une forme imprimée, le nombre d'exemplaires fabriqués en cours d'exercice, le nombre des exemplaires en stock en début et en fin d'exercice, le nombre des exemplaires vendus par l'éditeur, le nombre des exemplaires hors droits et détruits

au cours de l'exercice ;

2° Lorsque le livre est édité sous une forme numérique, les revenus issus de la vente à l'unité et de chacun des autres modes d'exploitation du livre ;

3° Dans tous les cas, la liste des cessions de droits réalisées au cours de l'exercice, le montant des redevances correspondantes dues ou versées à l'auteur ainsi que les assiettes et les taux des différentes rémunérations prévues au contrat d'édition.

Une partie spécifique de cet état des comptes est consacrée à l'exploitation du livre sous une forme numérique.

La reddition des comptes est effectuée au moins une fois par an, à la date prévue au contrat ou, en l'absence de date, au plus tard six mois après l'arrêté des comptes.

II.- Si l'éditeur n'a pas satisfait à son obligation de reddition des comptes selon les modalités et dans les délais prévus au I, l'auteur dispose d'un délai de six mois pour mettre en demeure l'éditeur d'y procéder.

Lorsque cette mise en demeure n'est pas suivie d'effet dans un délai de trois mois, le contrat est résilié de plein droit.

III.- Lorsque l'éditeur n'a satisfait, durant deux exercices successifs, à son obligation de reddition des comptes que sur mise en demeure de l'auteur, le contrat est résilié de plein droit trois mois après la seconde mise en demeure.

IV.- L'éditeur reste tenu, même en l'absence de mise en demeure par l'auteur, de respecter ses obligations légales et contractuelles de reddition des comptes'.

Le contrat d'édition signé le 5 février 2008 entre M. et Mme [J] et la société ELLEBORE prévoit en son article 18 ('Comptes') : 'L'ensemble de la rémunération due à l'auteur en vertu de l'article 14 du présent contrat ainsi que les sommes dues au titre de l'article 4 du présent contrat feront l'objet d'un arrêté de comptes annuels au 31 décembre de chaque année. Au cours des trois mois qui suivent la date de l'arrêté des comptes, l'éditeur remettra à l'auteur, en même temps que les relevés de compte, un état mentionnant le nombre d'exemplaires en stock. Cet état mentionnera également le nombre d'exemplaires vendus par l'éditeur, celui des exemplaires inutilisables et retirés du circuit commercial et des exemplaires détruits, détériorés ou disparus tel qu'il est envisagé à l'article 11 du présent contrat (...)'.

En l'espèce, la première lettre de mise en demeure des époux [J] visant le défaut de transmission des comptes d'exploitation (pour l'année 2018) est la lettre RAR en date du 15 juillet 2019 par laquelle ils demandent la communication des comptes au titre de l'année 2018 devant comporter une certaine nombre de mentions qu'ils précisent. La société ELLEBORE a répondu par lettre simple en date du 28 août 2019, qu'elle restait dans l'attente de la communication par les auteurs d'informations relatives à leur situation fiscale en Suisse, communication précédemment demandée par un courrier d'avocat RAR en date du 22 mai 2019.

La société ELLEBORE justifie qu'elle est assujettie, lorsqu'elle rémunère un auteur, au versement auprès de l'AGESSA (sécurité sociale des artistes auteurs) de contributions sociales qui sont ainsi déduites du montant brut hors taxes des droits versés aux auteurs, les rémunérations versées aux auteurs résidant fiscalement hors de France étant cependant exonérées de ce prélèvement à la source. Il en résulte que les interrogations de l'éditeur étaient légitimes, l'indication par M. [J], par courriel du 4 mai 2017, de la nouvelle adresse du couple en Suisse étant insuffisante au regard des obligations de l'éditeur, peu important que l'éditeur ait cru pouvoir procéder précédemment, le 16 mai 2017, sur la seule base de la nouvelle adresse en Suisse, à un virement des droits au titre des années 2015 et 2016. Dans son ordonnance du 24 janvier 2020, le juge de la mise en état du tribunal, tout en octroyant une provision aux époux [J], leur a d'ailleurs enjoint de produire le justificatif de leur domiciliation 'fiscale' pour les années 2017 et 2018.

Les époux [J] ont produit ce justificatif le 28 janvier 2020.

Par ailleurs, les bordereaux de versement de droits d'auteur produits aux débats, qui font apparaître pour chaque exercice, le stock en début de période, le tirage sur la période, le nombre des ventes, les retours, les ventes totales, les exemplaires détruits, le stock en fin de période, le prix public de vente, le nombre de ventes, les taux de rémunération appliqués et le montant des droits sont conformes aux prescriptions à la fois des 1° et 3° de l'article L. 132-17-3 du code de la propriété intellectuelle précité, de l'article 18 du contrat et de l'accord du 1er décembre 2014 entre le Conseil permanent des écrivains et le Syndicat national de l'édition rendu obligatoire par arrêté du ministre de la culture du 10 décembre 2014, sans que les appelants puissent utilement invoquer les dispositions plus exigeantes du vade-mecum de la Société des gens de lettres dont il n'est pas démontré qu'elles s'imposeraient à la société ELLEBORE.

Comme le souligne la société ELLEBORE, la seconde lettre de mise en demeure des époux [J] en date du 18 mai 2021, visant le défaut de transmission des comptes d'exploitation pour l'année 2020, a été envoyée en cours de procédure d'appel et concerne la prétendue non conformité des mentions portées sur les bordereaux émis par l'éditeur, lequel a répondu à juste titre par courrier simple du 16 août 2021, dont le caractère faux n'est pas démontré, que cette question était soumise à la cour.

Enfin, la cour observe qu'en appel, les époux [J] ne se prévalent plus de la résiliation de plein droit du contrat en application de la clause résolutoire qu'il contient (article 13) dont les premiers juges ont retenu, à juste raison, qu'elle visait des circonstances (non publication ou non réimpression par l'éditeur) étrangères au litige.

Dans ces conditions, le défaut de reddition des comptes ne peut être invoqué à l'appui de la demande de résiliation de plein droit du contrat d'édition.

Sur l'obligation de paiement des droits dus aux auteurs

L'article L.132-17-3-1 dispose :

'L'éditeur procède au paiement des droits au plus tard six mois après l'arrêté des comptes, sauf convention contraire précisée par l'accord rendu obligatoire mentionné à l'article L. 132-17-8.

Si l'éditeur n'a pas satisfait à son obligation de paiement des droits dans les délais prévus au premier alinéa du présent article, l'auteur dispose d'un délai de douze mois pour mettre en demeure l'éditeur d'y procéder.

Lorsque cette mise en demeure n'est pas suivie d'effet dans un délai de trois mois, le contrat est résilié de plein droit'.

L'article 18 du contrat d'édition stipule que « (...) Le solde sera payable à l'auteur à partir du 1er avril suivant. Cependant, l'éditeur ne sera tenu d'adresser ni de relevé de comptes, ni d'état des exemplaires à l'auteur si l'ouvrage a été publié depuis moins de six mois. Toutefois, un ouvrage paru entre le 1er juillet et le 31 décembre fera l'objet d'un premier arrêté de comptes exceptionnel au 30 juin de l'année suivante ».

Par LRAR en date du 9 avril 2019, les époux [J] ont mis en demeure l'éditeur de leur verser les droits d'auteur au titre des exercices 2017 (7 387,77 €) et 2018.

Une nouvelle LRAR en date du 15 juillet 2019 été adressée concernant le paiement 'de nos droits'. Dans les deux cas, l'éditeur a répondu, par les courriers des 22 mai et 28 août 2019 précités, en opposant notamment - légitimement comme il a été dit - le défaut de réponse à sa demande d'informations concernant la situation fiscale des auteurs, informations qui n'ont été transmises que le 28 janvier 2020 à la suite de l'injonction prononcée par le juge de la mise en état dans l'ordonnance du 24 janvier 2020. Les droits au titre des années 2017 et 2018 ont été réglés fin janvier 2020 après l'ordonnance rendue par le juge de la mise en état et la communication par les époux [J] des informations fiscales demandées.

Dans ces conditions, le défaut de paiement des droits visé dans les mises en demeure ne peut être invoqué à l'appui de la demande de résiliation de plein droit du contrat d'édition.

Le jugement sera donc confirmé en ce qu'il a rejeté les demandes tendant à voir constater la résiliation de plein droit du contrat d'édition du 15 février 2008.

Sur la demande subsidiaire de résiliation du contrat d'édition pour faute de l'éditeur

Les appelants demandent à titre subsidiaire la résiliation du contrat d'édition pour faute de l'éditeur, arguant que depuis 2015 ce dernier a systématiquement remis la reddition des comptes et versé les droits d'auteur avec des retards très importants.

La société ELLEBORE répond que si, par extraordinaire, la cour considérait qu'elle a adopté un comportement fautif dans le cadre de l'exécution de ses obligations, elle devrait apprécier s'il y a lieu ou non de prononcer la résiliation du contrat au regard de la gravité des manquements invoqués, toute faute n'étant pas de nature à justifier la résiliation.

Il résulte de l'article 18 du contrat d'édition que l'éditeur doit procéder à l'arrêté des comptes de l'année 'n' le 31 décembre de cette même année et à la reddition des comptes aux auteurs au plus tard le 31 mars de l'année 'n+1". Si ce même article indique qu'il doit verser les droits 'à partir du 1er avril suivant', l'éditeur ne peut en déduire que le 1er avril étant le point de départ de la période d'exigibilité du paiement, il n'y avait pas de date limite pour le paiement. Il faut à cet égard se référer à l'Accord entre le Conseil permanent des écrivains et le Syndicat national de l'édition sur le contrat d'édition dans le secteur du livre du 1er décembre 2014, rendu obligatoire par arrêté du ministre de la culture du 10 décembre 2014 et auquel renvoie l'article L. 132-17-3-1 précité, qui indique que l'éditeur est tenu de procéder au paiement des droits au plus tard six mois après l'arrêté des comptes. Il sera par conséquent retenu que la société ELLEBORE était tenue de procéder au paiement des droits dus aux auteurs au titre de l'année 'n' entre le 1er avril et le 30 juin au plus tard de l'année 'n+1'.

Les appelants fournissent un tableau (pages 10 et 11 de leurs écritures), dont le contenu n'est pas contesté par l'intimée, duquel il ressort qu'indépendamment des retards dans la reddition des comptes d'exploitation pour les années 2017, 2018 et 2019 et dans le paiement des droits pour les années 2017 et 2018, dus à la transmission tardive (le 28 janvier 2020) par les auteurs des informations relatives à leur nouvelle situation fiscale en Suisse :

- l'éditeur a transmis les comptes :

- pour l'année 2015 (exigibles au plus tard le 31 mars 2016), le 16 octobre 2020, soit avec 54 mois de retard,

- pour l'année 2016 (exigibles au plus tard le 31 mars 2017), le 16 octobre 2020, soit avec 42 mois de retard,

- pour l'année 2017, le 16 octobre 2020 (alors que les époux [J] avaient communiqué les informations demandées le 28 janvier 2020), soit avec près de huit mois de retard (en laissant à l'éditeur un délai d'un mois pour intégrer les informations transmises),

- pour l'année 2018, le 17 juin 2020 (alors que les époux [J] avaient communiqué les informations demandées le 28 janvier 2020), soit avec près de quatre mois de retard (en laissant à l'éditeur un délai d'un mois pour intégrer les informations transmises),

- pour l'année 2019, le 16 octobre 2020 (alors que les époux [J] avaient communiqué les informations demandées le 28 janvier 2020), soit avec près de huit mois de retard (en laissant à l'éditeur un délai d'un mois pour intégrer les informations transmises),

- pour l'année 2020 (exigibles au plus tard le 31 mars 2021), le 20 janvier 2022, soit avec dix mois de retard,

- pour l'année 2021 (exigibles au plus tard le 31 mars 2022), le 16 mai 2022, soit avec un mois et demi de retard.

- les droits ont été payés :

- pour l'année 2015 (droits payables au plus tard le 30 juin 2016), le 16 mai 2017, soit avec plus de 10 mois de retard,

- pour l'année 2019 (droits payables au plus tard le 30 juin 2020), le 17 novembre 2020, soit avec plus de quatre mois de retard,

- pour l'année 2020 (droits payables au plus tard le 30 juin 2021), le 16 mai 2022, soit avec plus de 10 mois de retard.

Les appelants soulignent à juste raison que les dispositions de l'ordonnance n° 2020-306 du 25 mars 2020 modifiée relative à la prorogation des délais échus pendant la période d'urgence sanitaire et à l'adaptation de procédures pendant cette même période, dont le bénéfice n'a au demeurant pas été invoqué par l'éditeur lors de ses échanges avec les auteurs, ne sauraient justifier de retards qu'au cours de la période visée par lesdites dispositions, concernant tout au plus les obligations venant à échéance entre mars et août de l'année 2020. Quant aux difficultés financières dont argue la société ELLEBORE, dont elle n'a nullement fait état dans ses échanges avec les auteurs, elles ne peuvent en aucun cas justifier les retards répétés et importants dans les redditions de comptes.

La répétition des retards dans la reddition des comptes et le règlement des droits dus aux auteurs, en violation des obligations légales et contractuelles incombant à l'éditeur, constitue une faute suffisamment grave pour justifier la résiliation à ses torts du contrat d'édition à compter du présent arrêt.

Le jugement sera infirmé en ce sens.

Sur la demande indemnitaire des époux [J]

A l'appui de leur demande en paiement de la somme de 15 000 € à titre de dommages et intérêts, les appelants font valoir que le défaut de paiement de redevances systématiquement retenues par l'éditeur et le défaut de reddition de comptes constituent des fautes d'une particulière gravité à l'origine d'un préjudice à la fois patrimonial, puisqu'ils n'ont pu bénéficier du revenu qui leur est dû et sur lequel ils comptaient, et moral, le défaut de rémunération d'un auteur par un éditeur étant une source à la fois d'inquiétude et d'avilissement.

Les retards qui viennent d'être constatés ont incontestablement causé un préjudice aux auteurs, ne serait-ce que parce qu'ils les ont privés durablement de revenus qui leur étaient dus.

Une indemnité d'un montant de 1 000 € réparera ce préjudice.

Sur la demande des époux [J] de communication des comptes d'exploitation de l'ouvrage depuis 2015

Il y a lieu, sous astreinte comme il sera précisé au dispositif, d'enjoindre à la société ELLEBORE de communiquer aux époux [J] les comptes d'exploitation pour l'année 2022 (pour la période courant jusqu'au présent arrêt prononçant la résiliation) au plus tard le 31 mars 2023 et de procéder au versement des droits dus pour cette même année (pour la période courant jusqu'au présent arrêt prononçant la résiliation) au plus tard le 30 juin 2023.

Le jugement sera réformé en ce sens.

Sur les dépens et les frais irrépétibles

La société ELLEBORE, partie perdante, sera condamnée aux dépens de première instance et d'appel, dont distraction au profit de la SELAS AGA dans les conditions prévues à l'article 699 du code de procédure civile, et gardera à sa charge les frais non compris dans les dépens qu'elle a exposés à l'occasion de la présente instance, les dispositions prises sur les dépens et frais irrépétibles de première instance étant infirmées.

La somme qui doit être mise à la charge de la société ELLEBORE au titre des frais non compris dans les dépens exposés par M.et Mme [J] peut être équitablement fixée à 8 000 € pour la première instance et l'appel.

PAR CES MOTIFS,

LA COUR,

Infirme le jugement sauf en ce qu'il a :

- rejeté les demandes tendant à voir constater la résiliation de plein droit du contrat d'édition du 15 février 2008 de l'ouvrage « Le Sol, la terre et les champs : pour retrouver une agriculture saine »,

- dit que la demande tendant au paiement de la somme de 5.278,85 euros avec intérêts au taux légal à compter du 1er juillet 2020 est devenue sans objet,

Statuant de nouveau,

Prononce, à compter du présent arrêt, la résiliation du contrat d'édition du 15 septembre 2008 portant sur l'ouvrage « Le Sol, la terre et les champs : pour retrouver une agriculture saine » aux torts exclusifs de la société éditrice ELLEBORE,

Condamne la société ELLEBORE à payer à M. et Mme [J] la somme de 1 000 € en réparation de leur préjudice résultant des retards dans la reddition des comptes et le paiement de leurs droits,

Fait injonction à la société ELLEBORE de communiquer aux époux [J] les comptes d'exploitation pour l'année 2022 (pour la période courant jusqu'au présent arrêt prononçant la résiliation) au plus tard le 31 mars 2023 et de procéder au versement des droits dus pour cette même année (pour la période courant jusqu'au présent arrêt prononçant la résiliation) au plus tard le 30 juin 2023, et ce, sous astreinte, ces dates passées, de 100 € par jour de retard, pendant une période de 4 mois,

Condamne la société ELLEBORE aux dépens de première instance et d'appel, dont distraction au profit de la SELAS AGA dans les conditions prévues à l'article 699 du code de procédure civile, et au paiement à M. et Mme [J] de la somme de 8 000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile.

LA GREFFIÈRE LA PRÉSIDENTE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 5 - chambre 1
Numéro d'arrêt : 21/03988
Date de la décision : 11/01/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-01-11;21.03988 ?
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