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11/01/2023 | FRANCE | N°20/05479

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 6 - chambre 4, 11 janvier 2023, 20/05479


Copies exécutoires REPUBLIQUE FRANCAISE

délivrées le : AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS



COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 4



ARRET DU 11 JANVIER 2023



(n° , 10 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 20/05479 - N° Portalis 35L7-V-B7E-CCILE



Décision déférée à la Cour : Jugement du 28 Août 2019 -Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de BOBIGNY - RG n° 16/014446





APPELANT



Monsieur [G] [R]

[Adresse 2]

[Localité 4]
r>Représenté par Me Oleg KOVALSKY, avocat au barreau de PARIS, toque : C0679

(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 751010022022010463 du 05/05/2022 accordée par le bureau...

Copies exécutoires REPUBLIQUE FRANCAISE

délivrées le : AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 4

ARRET DU 11 JANVIER 2023

(n° , 10 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 20/05479 - N° Portalis 35L7-V-B7E-CCILE

Décision déférée à la Cour : Jugement du 28 Août 2019 -Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de BOBIGNY - RG n° 16/014446

APPELANT

Monsieur [G] [R]

[Adresse 2]

[Localité 4]

Représenté par Me Oleg KOVALSKY, avocat au barreau de PARIS, toque : C0679

(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 751010022022010463 du 05/05/2022 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de PARIS)

INTIMEE

S.A.R.L. BOUCHERIE MONDIALE

[Adresse 1]

[Localité 3]

Déclaration d'appel signifiée le 26 octobre 2020 à étude

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 17 Octobre 2022, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Madame Florence MARQUES, conseillère, chargée du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, entendu en son rapport, composée de :

Monsieur Jean-François DE CHANVILLE, président

Madame Anne-Ga'l BLANC, conseillère

Madame Florence MARQUES, conseillère

Greffier, lors des débats : Mme Victoria RENARD

ARRET :

- par défaut

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Jean-François DE CHANVILLE, Président de chambre et par Victoria RENARD, Greffière, présente lors de la mise à disposition.

RAPPEL DES FAITS, PROCÉDURE ET MOYEN DES PARTIES :

Suivant contrat de travail à durée indéterminée en date du 21 décembre 2012, M. [G] [R] a été engagé par la société Boucherie Mondiale, en qualité de Boucher, moyennant une rémunération mensuelle de 1425,70 euros pour une durée de travail de 151,67 heures.

Les relations contractuelles entre les parties étaient soumises à la convention collective nationale de la boucherie (IDCC 992).

La société Boucherie Mondiale occupait à titre habituel plus de dix salariés.

Le 29 mars 2016, M. [G] [R] a reçu un avertissement pour être arrivé en retard le 26 mars 2016 et avoir refusé , le 29 mars 2016, de désosser des carcasses de veau.

Le salarié a contesté le 25 avril 2016 les motifs de cet avertissement.

M. [G] [R] a sollicité, notamment, le paiement d'heures supplémentaires le 13 septembre 2016.

M. [R] a fait l'objet d'un licenciement pour faute grave le 22 septembre 2016.

Le salarié a saisi le conseil de prud'hommes de Bobigny, le 15 décembre 2016, aux fins notamment de voir juger qu'il a été victime d'un harcèlement moral, dire son licenciement nul et subsidiairement sans cause réelle et sérieuse, et voir condamner la société Boucherie Mondiale à lui verser diverses sommes.

Par jugement en date du 28 octobre 2019 le conseil de prud'hommes de Bobigny a :

- requalifié le licenciement pour faute grave de M. [G] [R] en licenciement pour cause réelle et sérieuse,

- condamné la SARL BOUCHERIE MONDIALE à verser au demandeur les sommes suivantes':

* 1.499 € au titre de l'indemnité de licenciement,

* 4.003,98 € au titre de l'indemnité de préavis,

* 400,39 € au titre des congés payés afférents,

* 1.149,82 € au titre du rappel d'heure supplémentaires,

* 114,98 € au titre des congés payés afférents,

* 1.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- ordonné la remise des documents de fin de contrat conformes,

- débouté M. [R] du surplus de ses demandes,

- débouté la société BOUCHERIE MONDIALE de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné la partie défenderesse aux entiers dépens.

Par déclaration au greffe en date du 10 août 2020, M. [G] [R] a régulièrement interjeté appel de cette décision.

Par ses uniques conclusions remises via le réseau virtuel des avocats le 21 octobre 2020, M. [G] [R] demande à la cour de':

- infirmer le jugement entrepris,

Statuant à nouveau :

- condamner la SARL BOUCHERIE MONDIALE à lui payer les sommes de :

* 10.300,40 € à titre d'indemnité de préavis et 1030,04 € en incidences de congés payés,

* 2.914,44 € à titre d'indemnité de licenciement,

* 1.000 € à titre de dommages et intérêts pour avertissement injustifié,

*10.000 € à titre de dommages et intérêts du faits du harcèlement,

* 5.000 € à titre de dommages et intérêts du fait de la violation de l'obligation de sécurité,

* 41.201 € à titre d'indemnité pour licenciement nul ou subsidiairement sans cause réelle et sérieuse,

* 2.000 € pour irrégularité de la procédure de licenciement,

* 2.000 € à titre de dommages et intérêts pour circonstances abusives de la rupture,

* 30.901 € à titre d'indemnité pour travail dissimulé,

* 727,65 € à titre de rappel d'indemnité de congés payés,

* 52.545,43 € à titre de rappel d'heures supplémentaires, et 5.254,54 € en incidence de congés payés,

* 887,82 € à titre de rappel de majoration d'heures supplémentaires, et 88,78 € en incidence de congés payés,

* 2.000 € à titre de dommages et intérêts pour non-respect du temps de pause conventionnel,

* 1.000 € à titre de dommages et intérêts pour violation de la durée hebdomadaire du travail,

* 1.000 € les dommages et intérêts pour violation de la durée quotidienne du travail,

* 2.000 € à titre de dommages et intérêts pour non-respect du temps de repos hebdomadaire,

* 2.000 € à titre de dommages et intérêts pour violation des dispositions légales sur le travail dominical,

* 1.000 € à titre de dommages et intérêts pour absence de visites médicales,

* 5.000 € à titre de dommages et intérêts pour violation de l'obligation de formation,

* 2.000 € à lui payer à titre de dommages et intérêts pour absence d'entretien professionnel,

* remise d'un certificat de travail, d'une attestation pôle emploi et d'un bulletin de paie conformes sous astreinte de 75 € par jour et par document,

* 3.000 € au titre de l'article 700,

- Ordonner l'application de l'article 1343-2 du Code Civil.

La société Boucherie Mondiale n'a pas conclut.

L'ordonnance de clôture est intervenue le 20 septembre 2022.

En application de l'article 455 du code de procédure civile, il est expressément renvoyé aux conclusions des parties pour un exposé complet du litige.

MOTIFS DE LA DECISION :

La cour rappelle que l'intimé qui ne conclut pas, ou dont les conclusions sont irrecevables, est réputé adopter les motifs de la décision de première instance, sans pouvoir se référer à ses conclusions ou pièces déposées devant la juridiction de première instance. Ainsi, la cour d'appel qui n'est pas saisie de conclusions de l'intimé doit uniquement examiner les motifs du jugement ayant accueilli les prétentions de cette partie en première instance.

1- Sur l''annulation de l'avertissement du 29 mars 2016 et la demande de dommage et intérêts

Aux termes de l'article L. 1331-1 du code du travail, constitue une sanction toute mesure, autre que les observations verbales, prise par l'employeur à la suite d'un agissement du salarié considéré par l'employeur comme fautif, que cette mesure soit de nature à affecter immédiatement ou non la présence du salarié dans l'entreprise, sa fonction, sa carrière ou sa rémunération, l'article L. 1332-4 du code du travail limitant à deux mois la prescription des faits fautifs.

En outre, l'article L. 1333-1 du code du travail édicte qu'en cas de litige, le conseil de prud'hommes apprécie la régularité de la procédure suivie et si les faits reprochés au salarié sont de nature à justifier une sanction. L'employeur fournit au conseil de prud'hommes les éléments retenus pour prendre la sanction. Au vu de ces éléments et de ceux qui sont fournis par le salarié à l'appui de ses allégations, le conseil de prud'hommes forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles. Si un doute subsiste, il profite au salarié, l'article L. 1333-2 du même code prévoyant qu'il peut annuler une sanction irrégulière en la forme ou injustifiée ou disproportionnée à la faute commise.

Par lettre recommandée avec accusé de réception en date du 29 mars 2016, a adressé un avertissement au salarié, lui reprochant':

-d'être arrivé avec deux heures de retard, le 26 mars 2016,

-d'avoir refusé de désosser les carcasses de veau , le 29 mars 2016

Le CPH ne statue pas de ce chef. Le salarié justifie avoir été en retard en raison d'un arrêt de la circulation du RER et en avoir immédiatement averti son supérieur hiérarchique. En ce qui concerne le refus de désossage, le salarié indique qu'il s'était blessé au pouce et qu'il n'avait pas de gants de protection, si bien qu'il a refusé de procéder à cette opération. L'employeur, absent, ne justifie pas qu'il a équipé son salarié de gants adaptés. Ce dernier grief n'est pas fondé.

L'avertissement pour le retard, eu égard aux circonstances, est disproportionné et annulé. Il est alloué une somme de 200 euros au salarié à titre de dommages et intérêts.

Le jugement sera complété en ce sens.

2- Sur les heures supplémentaires

Aux termes de l'article L. 3171-2 alinéa 1er du code du travail, lorsque tous les salariés occupés dans un service ou un atelier ne travaillent pas selon le même horaire collectif, l'employeur établit les documents nécessaires au décompte de la durée de travail, des repos compensateurs acquis et de leur prise effective, pour chacun des salariés concernés.

Selon l'article L. 3171-4 du code du travail, en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail accomplies, l'employeur fournit au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié. Au vu de ces éléments et de ceux fournis par le salarié à l'appui de sa demande, le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles. Si le décompte des heures de travail accomplies par chaque salarié est assuré par un système d'enregistrement automatique, celui-ci doit être fiable et infalsifiable.

Il résulte de ces dispositions, qu'en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail accomplies, il appartient au salarié de présenter, à l'appui de sa demande, des éléments suffisamment précis quant aux heures non rémunérées qu'il prétend avoir accomplies afin de permettre à l'employeur, qui assure le contrôle des heures de travail effectuées, d'y répondre utilement en produisant ses propres éléments. Le juge forme sa conviction en tenant compte de l'ensemble de ces éléments au regard des exigences rappelées aux dispositions légales et réglementaires précitées. Après analyse des pièces produites par l'une et l'autre des parties, dans l'hypothèse où il retient l'existence d'heures supplémentaires, il évalue souverainement, sans être tenu de préciser le détail de son calcul, l'importance de celles-ci et fixe les créances salariales s'y rapportant.

Il a été jugé que constituent des éléments suffisamment précis des tableaux mentionnant le décompte journalier des heures travaillées, peu important qu'ils aient été établis par le salarié lui-même pour les besoins de la procédure.

Par ailleurs, même en l'absence d'accord exprès, les heures supplémentaires justifiées par l'importance des tâches à accomplir ou réalisées avec l'accord tacite de l'employeur, qui ne pouvait en ignorer l'existence et qui ne s'y est pas opposé, doivent être payées.

En l'espèce, au soutien de ses prétentions, le salarié produit un tableau établi par ses soins récapitulant ses horaires de travail sur la période concernée, et des attestations de collègues faisant état d'une amplitude horaire de 7h30 à 19h45.

Ce faisant, il produit des éléments suffisamment précis quant aux heures non rémunérées qu'il prétend avoir accomplies au-delà de' l'horaire légal ce qui permet à l'employeur, qui assure le contrôle des heures de travail effectuées, d'y répondre utilement en produisant ses propres éléments.

L'employeur n'ayant pas conclu, ne répond pas.

Cependant, il résulte de la lecture du jugement déféré que la boucherie était fermée les dimanches après-midi et les lundis. Or le décompte produit mentionne des heures effectuées sur un certain nombre de dimanche toute la journée et des lundis.

Par ailleurs, les bulletins de salaires montrent le paiement de 17,33 heures supplémentaires par mois.

Au regard des éléments produits, il apparaît que le salarié a bien effectué des heures supplémentaires mais pas dans la proportion revendiquée.

Il est retenue une somme de 8.000,50 euros de ce chef ( y compris le'«' rappel de majoration d'heures supplémentaires'»), outre celle de 800 euros au titre de congés payés afférents.

Le jugement est infirmé sur ce point.

3- Sur la demande de dommages-intérêts pour travail dissimulé

L'article L.8221-5 du code du travail dispose qu'est réputé travail dissimulé par dissimulation d'emploi salarié le fait pour tout employeur :

1° Soit de se soustraire intentionnellement à l'accomplissement de la formalité prévue à l'article L. 1221-10, relatif à la déclaration préalable à l'embauche ;

2° Soit de se soustraire intentionnellement à la délivrance d'un bulletin de paie ou d'un document équivalent défini par voie réglementaire, ou de mentionner sur le bulletin de paie ou le document équivalent un nombre d'heures de travail inférieur à celui réellement accompli, si cette mention ne résulte pas d'une convention ou d'un accord collectif d'aménagement du temps de travail conclu en application du titre II du livre Ier de la troisième partie ;

3° Soit de se soustraire intentionnellement aux déclarations relatives aux salaires ou aux cotisations sociales assises sur ceux-ci auprès des organismes de recouvrement des contributions et cotisations sociales ou de l'administration fiscale en vertu des dispositions légales.

L'article L.8223-1 du même code dispose quant à lui que, en cas de rupture de la relation de travail, le salarié auquel un employeur a eu recours dans les conditions de l'article L. 8221-3 ou en commettant les faits prévus à l'article L. 8221-5 a droit à une indemnité forfaitaire égale à six mois de salaire.

Au cas d'espèce, il n'est pas rapporté la preuve d'un élément intentionnel.

Le salarié est débouté de ce chef et le jugement confirmé ( il a été statué de ce chef au titre du «' travail illicite'»).

4- Sur les demandes de dommages-intérêts pour non respect du temps de pause conventionnel, violation de la durée quotidienne du travail, non respect du temps de repos hebdomadaire

La cour remarque que le salarié admet, dans ses conclusions avoir bénéficié de pauses. Pour autant, l'employeur ne rapporte pas la preuve du respect de toutes les pauses conventionnelles, de la durée quotidienne de travail et du respect de temps de repos hebdomadaires.

Il est alloué au salarié une somme de 500 euros de ces chefs

Le jugement est infirmé.

5- Sur les demandes de dommages-intérêts pour violation de la durée hebdomadaire de travail, et violation des dispositions légales sur le travail dominical

Le CPH n'a pas statué de ces chefs.

L'employeur échoue à rapporter la preuve du respect de ces dispositions.

Il est alloué au salarié une somme de 500 euros de ce chef

Le jugement sera complété en ce sens.

6- Sur le rappel de congés payés

Le conseil de prud'hommes n'a pas statué de ce chef.

Le salarié affirme qu'il n'a pas été payé de l'intégralité de son salaire en avril 2015 alors qu'il était en congés payés. Il réclame la somme de 727,65 euros.

Le bulletin d'avril 2015 mentionne une retenue de salaire de ce montant au titre d''«'une absence non rémunérée'». Il est noté que les bulletins de paie ne mentionnent rien au titre des congés payés. Il appartient à l'employeur de justifier d'une retenue de salaire contestée par le salarié. Tel n'est pas le cas en l'espèce.

La SARL Boucherie Mondiale sera condamnée à payer à M'. [G] [R] la somme de 727,65 euros à titre de rappel de congés payés.

Le jugement est complété en ce sens.

7- Sur la demande de dommages-intérêts pour harcèlement moral

Aux termes de l'article L.1152-1 du code du travail, aucun salarié ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel.

L'article L.1154-1 du même code prévoit, dans sa version applicable à la cause, qu'en cas de litige, le salarié concerné établit des faits qui permettent de présumer l'existence d'un harcèlement et il incombe alors à l'employeur, au vu de ces éléments, de prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs d'un tel harcèlement et que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement.

En l'espèce, le salarié soutient avoir été victime de harcèlement moral de son employeur caractérisé par ses conditions de travail, les dépassements de la durée du travail, le non paiement des heures supplémentaires, la volonté de procéder à un licenciement et à des sanctions disciplinaires injustifiées.

Les (mauvaises) «'conditions de travail'» ne sont pas caractérisées.

Les dépassements de la durée de travail sont avérés dans de faibles proportions.

Il a été procédé à une seule sanction disciplinaire ( hors le licenciement), annulée pour disproportion. Le salarié reconnaît néanmoins un retard.

Le salarié justifie du non paiement d'heures supplémentaires.

Les dépassements de la durée de travail , l'avertissement et le non paiement des heures supplémentaires ne permettent pas de supposer une dégradation des conditions de travail susceptible de porter atteinte aux droits et à la dignité, d'altérer la santé physique ou mentale ou de compromettre l' avenir professionnel du salarié. Même pris ensemble, ils ne caractérisent pas un harcèlement moral.

Le salarié est débouté de sa demande de dommages-intérêts de ce chef.

Le jugement est confirmé.

8-Sur la demande de dommages et intérêts pour manquement par la société à son obligation de sécurité de résultat

En application de l'article L 4121-1 du code du travail, l'employeur prend les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs, ces mesures comprenant notamment des actions de prévention des risques professionnels, des actions d'information et de formation, la mise en place d'une organisation et de moyens adaptés.

Le salarié invoque de ce chef les mêmes arguments que pour le harcèlement moral.

La société établit qu'elle a respecté son obligation de sécurité.

Le salarié est débouté de sa demande de dommages-intérêts de ce chef.

Le jugement est confirmé.

9- Sur les demandes de dommages-intérêts pour absence de visites médicales, non respect de l'obligation de formation et pour absence d'entretien professionnel

Le salarié ne justifie d'aucun préjudice de ces chefs.

Le salarié est débouté de ces chefs.

Le jugement est confirmé.

10- Sur le licenciement pour faute grave

L'article L.1231-1 du code du travail dispose que le contrat à durée indéterminée peut être rompu à l'initiative de l'employeur ou du salarié. Aux termes de l'article L.1232-1 du même code, le licenciement par l'employeur pour motif personnel est justifié par une cause réelle et sérieuse.

Il résulte par ailleurs des dispositions combinées des articles L 1232-1, L 1232-6, L 1234-1 et L 1235-1 du code du travail que devant le juge, saisi d'un litige dont la lettre de licenciement fixe les limites, il incombe à l'employeur qui a licencié un salarié pour faute grave, d'une part d'établir l'exactitude des faits imputés à celui-ci dans la lettre, d'autre part de démontrer que ces faits constituent une violation des obligations découlant du contrat de travail ou des relations de travail d'une importance telle qu'elle rend impossible le maintien de ce salarié dans l'entreprise.

En l'espèce, aux termes de la lettre de rupture du 22 septembre 2016, il est reproché au salarié':

-Des retards répétitifs, insubordination, service de la clientèle avec un téléphone portable accroché à l'oreille, manque de respect et harcèlement à l'encontre de la clientèle féminine,

-D'avoir refusé à deux reprises de désosser des carcasses de veau,

-une absence injustifiée du 6 au 18 septembre 2016

L'employeur ne justifie d'aucun des griefs reprochés.

Le licenciement de M. [G] [R] est sans cause réelle et sérieuse.

Le jugement est infirmé de ce chef.

11- Sur les conséquences financières du licenciement sans cause réelle et sérieuse

Le salaire mensuel de référence à retenir est de 2.000,99 euros.

11-1-Sur l'indemnité compensatrice de préavis et les congés payés afférents

La salariée peut prétendre à 2 mois de préavis. Il lui est dû de ce chef la somme de 4.003,98 euros, outre la somme de 400,39 euros pour les congés payés afférents.

Le jugement est confirmé de ce chef.

11-2-Sur l'indemnité légale de licenciement

Compte tenu de l'ancienneté du salarié (3 ans et 11 mois), il lui est dû la somme de 1.960,28 euros de ce chef.

Le jugement est infirmé de ce chef.

11-3-Sur l'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse

Aux termes de l'article L 1235-3 du code du travail dans sa version applicable au litige «'Si le licenciement d'un salarié survient pour une cause qui n'est pas réelle et sérieuse, le juge peut proposer la réintégration du salarié dans l'entreprise, avec maintien de ses avantages acquis.

Si l'une ou l'autre des parties refuse, le juge octroie une indemnité au salarié. Cette indemnité, à la charge de l'employeur, ne peut être inférieure aux salaires des six derniers mois. Elle est due sans préjudice, le cas échéant, de l'indemnité de licenciement prévue à l'article L. 1234-9.'»

En considération notamment de l'effectif de l'entreprise, des circonstances de la rupture, du montant de la rémunération versée à M. [G] [R] de son âge au jour de son licenciement ( 32 ans), de son ancienneté à cette même date ( 3 ans et 11 mois), de sa capacité à trouver un nouvel emploi eu égard à sa formation et à son expérience professionnelle et des conséquences du licenciement à son égard, tels que ces éléments résultent des pièces et des explications fournies à la cour, il y a lieu de lui allouer la somme de 12.011,94 euros ( 6 mois de salaires) à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.

12- Sur la demande de dommages-intérêts pour irrégularité de la procédure de licenciement

Le salarié affirme qu'aucune procédure de licenciement n'a été respectée. Il produit la lettre de licenciement . Il n'est pas justifié de la convocation à un entretien préalable.

En tout état de cause, l'irrégularité d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse d'un salarié de plus de deux ans d'ancienneté dans une entreprise de plus de 10 salariés n'ouvre pas droit à des dommages-intérêts pour licenciement irrégulier en l'état des textes applicables à l'espèce.

Le salarié est débouté de sa demande de ce chef.

Il sera ajouté au jugement de ce chef.

13- Sur les dommages-intérêts pour circonstances abusives de la rupture

Il est de principe que l'octroi de dommages-intérêts en réparation du préjudice résultant des circonstances brutales et vexatoires du licenciement nécessite, d'une part, la caractérisation d'une faute de l'employeur dans les circonstances de la rupture du contrat de travail qui doit être différente de celle tenant au seul caractère abusif du licenciement, ainsi que, d'autre part, la démonstration d'un préjudice distinct de celui d'ores et déjà réparé par l'indemnité allouée au titre du licenciement sans cause réelle et sérieuse.

Au cas d'espèce, le salarié affirme avoir été expulsé de son poste de travail alors qu'il n'avait pas reçu de lettre de licenciement, devant l'ensemble du personnel et des clients, sans l'établir de quel que manière que ce soit.

Il est débouté de ce chef.

Le jugement est complété en ce sens.

14- Sur la remise des documents de fin de contrat

Il convient d'ordonner la remise d'un certificat de travail, des bulletins de paie et attestation pôle emploi conformes à la présente décision, celle-ci étant de droit, sans qu'une astreinte ne soit prononcée. .

15- Sur la capitalisation des intérêts

Les intérêts seront capitalisés dans les conditions de l'article 1343-2 du code civil.

16- Sur le remboursement des indemnités de chômage

En application de l'article 1235-4 du code du travail, il convient d'ordonner d'office le remboursement par l'employeur à Pôle emploi des indemnités de chômage versées au salarié licencié, du jour de son licenciement au jour du jugement prononcé, dans la limite de deux mois d'indemnisation; le jugement déféré sera complété de ce chef.

17- Sur les demandes accessoires

Le jugement est confirmé sur les dépens et l'article 700 du code de procédure civile.

Partie perdante, la SARL Boucherie Mondiale est condamnée aux dépens d'appel.

L'équité commande de faire application de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel au profit du salarié, ainsi qu'il sera dit au dispositif.

PAR CES MOTIFS :

La cour,

Infirme le jugement déféré sauf en ce qu'il a condamné la Sarl Boucherie Mondiale à payer à M. [G] [R] la somme de 4.003,98 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis , outre celle de 400,39 euros pour les congés payés afférents, a débouté M. [G] [R] de ses demandes de dommages-intérêts pour travail dissimulé, pour harcèlement moral, pour manquement l'obligation de sécurité de résultat, pour absence de visites médicales, non respect de l'obligation de formation et pour absence d'entretien professionnel, sur les dépens et l'article 700 du code de procédure civile,

Complète comme suit le jugement':

Annule l'avertissement du 29 mars 2016,

Condamne la Sarl Boucherie Mondiale à payer à M. [G] [R] les sommes suivantes':

- 200 euros à titre de dommages-intérêts en raison de l'annulation de l'avertissement en date du 29 mars 2016,

- 727,65 euros à titre de rappel de congés payés,

- 1.000 euros à titre de dommages-intérêts pour violation de la durée hebdomadaire de travail et violation des dispositions légales sur le travail dominical,

Déboute M. [G] [R] de sa demande de dommages-intérêts pour circonstances abusives de la rupture,

Statuant à nouveau et y ajoutant,

Dit sans cause réelle et sérieuse le licenciement de M. [G] [R],

Condamne la SARL Boucherie Mondiale à payer à M. [G] [R] les sommes suivantes':

- 12.011,94 euros pour licenciement sans cause réelle et sérieuse

- 1.960,28 euros à titre d'indemnité de licenciement,

- 8.000,50 euros au titre des heures supplémentaires ( y compris le'«' rappel de majoration d'heures supplémentaires'»), outre celle de 800 euros au titre de congés payés afférents,

-1.000 euros à titre de dommages-intérêts pour non respect du temps de pause conventionnel, de la durée quotidienne du travail et du temps de repos hebdomadaire,

Dit que les intérêts seront capitalisés dans les conditions de l'article 1343-2 du code civil,

Déboute M. [G] [R] de sa demande de dommages-intérêts pour irrégularité de la procédure de licenciement,

Ordonne à la SARL Boucherie Mondiale de remettre à M. [G] [R] un certificat de travail, une attestation destinée au Pôle Emploi et un bulletin de salaire conformes au présent arrêt dans un délai de un mois à compter de sa signification,

Ordonne d'office à la SARL Boucherie Mondiale le remboursement à Pôle Emploi des indemnités de chômage versées à M. [G] [R] dans la limite de deux mois d'indemnisation,

Condamne SARL Boucherie Mondiale à payer à M. [G] [R] la somme de 1.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, en cause d'appel,

Déboute SARL Boucherie Mondiale de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

Condamne SARL Boucherie Mondiale aux dépens d'appel.

LA GREFFIÈRE LE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 6 - chambre 4
Numéro d'arrêt : 20/05479
Date de la décision : 11/01/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-01-11;20.05479 ?
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