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11/01/2023 | FRANCE | N°20/05430

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 6 - chambre 4, 11 janvier 2023, 20/05430


Copies exécutoires REPUBLIQUE FRANCAISE

délivrées le : AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS



COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 4



ARRET DU 11 JANVIER 2023



(n° , 6 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 20/05430 - N° Portalis 35L7-V-B7E-CCIEV



Décision déférée à la Cour : Jugement du 17 Décembre 2019 -Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de PARIS - RG n° F 19/02035



APPELANT



Monsieur [T] [E]

[Adresse 3]

[Adresse 3]

Repré

senté par Me Simon OVADIA, avocat au barreau de PARIS, toque : C1007



INTIMEE



SAS COMPASS GROUP FRANCE Agissant poursuites & diligences de son Président et/ou tous représenta...

Copies exécutoires REPUBLIQUE FRANCAISE

délivrées le : AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 4

ARRET DU 11 JANVIER 2023

(n° , 6 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 20/05430 - N° Portalis 35L7-V-B7E-CCIEV

Décision déférée à la Cour : Jugement du 17 Décembre 2019 -Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de PARIS - RG n° F 19/02035

APPELANT

Monsieur [T] [E]

[Adresse 3]

[Adresse 3]

Représenté par Me Simon OVADIA, avocat au barreau de PARIS, toque : C1007

INTIMEE

SAS COMPASS GROUP FRANCE Agissant poursuites & diligences de son Président et/ou tous représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

[Adresse 1]

[Adresse 1]

Représentée par Me François TEYTAUD, avocat au barreau de PARIS, toque : J125

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 10 Octobre 2022, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Madame Florence MARQUES, conseillère, chargée du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, entendu en son rapport, composée de :

Monsieur Jean-François DE CHANVILLE, président

Madame Anne-Ga'l BLANC, conseillère

Madame Florence MARQUES, conseillère

Greffier, lors des débats : Mme Victoria RENARD

ARRET :

- contradictoire

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Jean-François DE CHANVILLE, Président de chambre et par Victoria RENARD, Greffière, présente lors de la mise à disposition.

RAPPEL DES FAITS, PROCÉDURE ET MOYEN DES PARTIES :

La société COMPASS GROUP FRANCE a une activité de restauration collective.

Suivant contrat à durée indéterminée du 18 décembre 2002, M. [T] [E] a été engagé par la société Compass Group France, en qualité de magasinier plongeur.

La Convention Collective applicable est celle de la restauration collective.

En dernier lieu, M. [T] [E] était affecté au sein du restaurant du Collège Stanislas situé [Adresse 2].

M. [E] a été victime d'un accident du travail le 13 août 2012 et a été, à la suite de cet accident régulièrement en arrêt de travail.

La société COMPASS GROUP FRANCE a perdu le marché de la restauration du Groupe scolaire Stanislas, au profit de la société Elres.

Le 6 juillet 2017, la Société COMPASS a alors informé M. [T] [E] du transfert automatique de son contrat de travail auprès du nouveau prestataire la société Elres restauration à compter du 20 août 2017.

Le 13 juillet 2017, la société Elres a également informé M. [T] [E], de ce qu'elle devenait son employeur à compter du 21 août 2017, avec poursuites des conditions d'emploi antérieures, en application de l'avenant n° 3 du 26 février 1986 de la convention collective de la restauration de collectivités.

Le 21 août 2017, la société Elres a adressé un avenant à Monsieur [E] qu'il n'a jamais signé.

Une visite de reprise a été organisée le 13 octobre 2017 par la Société Elres.

Après étude du poste et des conditions de travail de M. [T] [E], le médecin du travail l'a déclaré inapte à son poste de plongeur magasinier à l'issue d'un seul examen en vertu de l'article R 4624-42 du Code du Travail.

Le médecin du travail a précisé que l'état de santé du salarié faisait obstacle à tout reclassement à un emploi dans l'entreprise et que, de ce fait, il ne pouvait pas suivre de formation dans l'entreprise.

M. [T] [E] été licencié le 26 décembre 2017 par la société Elres pour inaptitude d'origine professionnelle et impossibilité de reclassement .

Par requête en date du 28 mars 2018, M. [T] [E] a saisi le Conseil de Prud'hommes de Paris et sollicité la convocation de la société Elres afin de voir juger son licenciement pour inaptitude d'origine professionnelle sans cause réelle et sérieuse et la société condamnée à lui verser diverses sommes dont 30.000 euros pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et 10.000 euros au titre de la violation de l'obligation de formation par la société Elres.

La procédure a été enregistrée sous le n° F18/02621.

Par requête en date du 11 mars 2019 M. [T] [E] a saisi le conseil de prud'hommes de Paris et sollicité la convocation de la société Compass Group France aux fins de contester l'effectivité du transfert de son contrat de travail à la société Elres et de voir juger en conséquence nulle la rupture de ses relations contractuelles avec la société Compass group France et la société Compass Group France condamnée à lui payer la somme de 25.000 euros à titre d'indemnité pour licenciement nul, avec intérêts au taux légal, outre celle de 4.500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile. Le salarié a également demandé la jonction des deux instances.

La procédure a été enregistrée sous le n° F19/02035.

Le conseil de prud'hommes de Paris n'a pas fait droit à la demande de jonction et a rendu deux jugement en date du 17 décembre 2019.

Le jugement du 17 décembre 2019, RG n°18/02621 relatif à la procédure initiée par M. [T] [E] à l'encontre de la Société Elres a débouté M. [T] [E] de l'ensemble de ses demandes. Le salarié n'a pas interjeté appel à l'encontre de cette décision.

Concernant la second procédure, le conseil de prud'hommes de Paris,a':

- débouté M. [E] de l'ensemble de ses demandes,

- débouté la SAS Compass Group France de l'ensemble de ses demandes,

- condamné M. [E] aux entiers dépens.

Par déclaration du 04 août 2020, M. [E] a régulièrement interjeté appel de cette décision, notifiée par lettre du greffe reçue par ce dernier le 07 juillet 2020.

Par ses uniques conclusions adressées au greffe par le réseau privé virtuel des avocats le 10 février 2021, M. [T] [E], demande à la Cour de':

- infirmer le jugement déféré,

Statuant à nouveau,

- constater que Monsieur [E] n'a pas donné son accord exprès au transfert conventionnel de son contrat de travail à la société Elres,

- constater que Monsieur [E] était en arrêt de travail à la date du 20 août 2017,

En conséquence,

- dire que la rupture des relations contractuelles entre Monsieur [E] et la société Compass Groupe France, intervenue le 20 août 2017, est irrégulière compte tenu de ce que cette dernière n'a pas respecté les dispositions du code du travail relatives à la procédure de licenciement,

- déclarer la rupture du contrat de travail de Monsieur [E] nulle,

En conséquence,

- condamner la société Compass Group France à payer à Monsieur [E] la somme de 25.000 € à titre d'indemnité pour licenciement nul découlant directement de la rupture du contrat de travail avec intérêts au taux légal à compter du jugement,

- condamner la société Compass Group France à payer à Monsieur [E] la somme de 4.500 € au titre des frais irrépétibles de première instance et à la somme de 2.500 € au titre des frais irrépétibles d'appel,

- rejeter l'ensemble des demandes de la société Compass Group France,

- condamner la société Compass Group France aux entiers dépens.

Par ses uniques conclusions adressées au greffe par le réseau privé virtuel des avocats le 13 janvier 2021, la société Compass Group France, demande à la Cour de':

- confirmer le jugement rendu par le conseil de prud'hommes de Paris du 17 décembre 2019 en ce qu'il a':

* débouté M. [E] de l'ensemble de ses demandes,

* débouté la SAS Compass Group France de l'ensemble de ses demandes,

* condamné M. [E] au paiement des entiers dépens,

En conséquence':

- constater que le contrat de travail de Monsieur [T] [E] a été transféré au sein de la société Elres à compter du 21 août 2017,

- par conséquent, débouter Monsieur [T] [E] de sa demande au titre de la nullité de la rupture de son contrat de travail,

En tout état de cause,

- débouter Monsieur [T] [E] de l'ensemble de ses demandes,

- condamner Monsieur [T] [E] au versement de la somme de 4 500 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner Monsieur [T] [E] aux entiers dépens dont distraction au profit de Maître François Teytaud dans les conditions de l'article 699 du CPC.

L'ordonnance de clôture est intervenue le 05 juillet 2022.

Par un plus ample exposé des faits, des prétentions et des moyens des parties, la Cour se réfère à leurs conclusions écrites conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile.

MOTIFS DE LA DECISION :

1- Sur le transfert du contrat de travail

Le salarié soutient que le transfert conventionnel de son contrat de travail à la société Elres, suite à la perte par la société Compass Group France de son marché au collège Stanislas, supposait son accord express, lequel ne peut résulter de la seule poursuite du contrat de travail sous une autre direction. Il souligne que n'ayant pas expressément consenti au transfert de son contrat de travail, ce transfert n'a pas eu lieu.

La société Compass Group France indique que l'article 3 de l'avenant n° 3 du 26 février 1986 de la Convention collective du

personnel des entreprises de restauration de collectivités dispose':

« a) Une entreprise entrant dans le champ d'application du présent avenant qui se voit attribuer un marché précédemment confié à une autre entreprise entrant également dans le champ d'application du présent avenant est tenue de poursuivre les contrats de travail des salariés de niveau I ' II ' III ' IV et V, employés par le prédécesseur pour l'exécution exclusive du marché concerné, dans les mêmes conditions fondamentales d'exploitation».

La société indique que le salarié a manifesté des actes positifs de son acceptation du transfert de son contrat de travail, en ne lui adressant plus ses justificatifs d'absence, en se rendant à la convocation que lui a adressé la société Elres dans le cadre de la procédure de licenciement, la dite société ayant initiée la procédure pour inaptitude et en faisant convoquer la dite société devant le conseil de prud'hommes. La société Compass Group France souligne également que la société Elres a adressé son solde de tout compte au salarié et lui a versé les sommes dues de ce chef.

La cour ne peut que constater que sauf application éventuelle de l'article L. 1224-1 du code du travail, ce qui n'est pas le cas en l'espèce, le changement d'employeur prévu et organisé par voie conventionnelle suppose l'accord exprès du salarié, qui ne peut résulter de la seule poursuite de son contrat de travail sous une autre direction.

Au cas d'espèce, M. [T] [E] n'a pas expressément accepté le transfert de son contrat si bien que ce transfert n'a pas eu lieu et que M. [T] [E] est resté le salarié de la société Compass Group France.

Le jugement est infirmé de ce chef.

2- Sur les conséquences de l'absence de transfert du contrat de travail

1- Sur la relation de travail

Aux termes de l'article L 1226-9 du code du travail «'Au cours des périodes de suspension du contrat de travail, l'employeur ne peut rompre ce dernier que s'il justifie soit d'une faute grave de l'intéressé, soit de son impossibilité de maintenir ce contrat pour un motif étranger à l'accident ou à la maladie'»

Aux termes de l'article L 1226-13 du code du travail «'Toute rupture du contrat de travail prononcée en méconnaissance des dispositions des articles L. 1226-9 et L. 1226-18 est nulle'»

Au 20 août 2017, le salarié était en arrêt de travail à le suite d'une rechute en lien avec son accident du travail.

Il n'est pas rapporté la preuve par la société Compass Group France d'une faute grave ou de l'impossibilité de maintenir ce contrat pour un motif étranger à l'accident.

La rupture des relations contractuelles entre la société Compass Group France et M. [T] [E] s'analyse en licenciement nul.

2- Sur l'indemnité pour licenciement nul

En application de l'article L1235-3-1 du Code du Travail, Monsieur [E] peut prétendre à une indemnité qui ne peut être inférieure aux salaires des six derniers mois.

En considération notamment de l'effectif de l'entreprise, des circonstances de la rupture, du montant de la rémunération versée à M. [T] [E] de son âge au jour de son licenciement (49 ans), de son ancienneté à cette même date (14 ans et 8 mois), de sa capacité à trouver un nouvel emploi eu égard à sa formation et à son expérience professionnelle et des conséquences du licenciement à son égard, tels que ces éléments résultent des pièces et des explications fournies à la cour, il y a lieu de lui allouer la somme de 9.543,66 euros (6 mois de salaires) à titre de dommages-intérêts pour licenciement nul.

Le jugement est infirmé de ce chef.

3- Sur les demandes accessoires

Le jugement est infirmé sur les dépens et l'article 700 du code de procédure civile sauf en ce qu'il a débouté la société Compass Group France de sa demande au titre des frais irrépétibles. Il est alloué la somme de 1.000 euros au salarié sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Partie perdante, la société Compass Group France est condamnée aux dépens d'appel.

Il est alloué à M . [T] [E] la somme de 1.500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel'.

La société Compass Group France est déboutée de sa demande au titre des frais irrépétibles en cause d'appel.

PAR CES MOTIFS :

La cour,

Infirme le jugement déféré sauf en ce qu'il a débouté la société Compass Group France de sa demande au titre des frais irrépétibles,

Statuant à nouveau et y ajoutant,

Dit que le contrat de travail de M. [T] [E] n'a pas été transféré à la société Elres,

Dit que la rupture des relations contractuelles entre la société Compass Group France et M. [T] [E] s'analyse en un licenciement nul,

En conséquence,

Condamne la société Compass Group France à payer à M. [T] [E] les sommes suivantes':

- 9.543,66 euros à titre d'indemnité pour licenciement licenciement nul,

- 1.000 euros sur le fondement de l'article,

Condamne la société Compass Group France à payer à M. [T] [E] la somme de 1.500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, en cause d'appel,

Déboute la société Compass Group France de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile, en cause d'appel,

Condamne la société Compass Group France aux dépens de première instance et d'appel.

LA GREFFIÈRE LE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 6 - chambre 4
Numéro d'arrêt : 20/05430
Date de la décision : 11/01/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-01-11;20.05430 ?
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