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11/01/2023 | FRANCE | N°20/03771

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 6 - chambre 4, 11 janvier 2023, 20/03771


Copies exécutoires REPUBLIQUE FRANCAISE

délivrées le : AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS



COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 4



ARRET DU 11 JANVIER 2023



(n° , 10 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 20/03771 - N° Portalis 35L7-V-B7E-CB55S



Décision déférée à la Cour : Jugement du 20 Janvier 2020 -Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de BOBIGNY - RG n° F 17/01284



APPELANTE



S.A.R.L. DIASPO ENVIRONNEMENT, prise en la personne de son représ

entant légal domicilié en cette qualité audit siège

[Adresse 2]

[Localité 3]

Représentée par Me Clémence HILLEL-MANOACH, avocat au barreau de PARIS, toque : C...

Copies exécutoires REPUBLIQUE FRANCAISE

délivrées le : AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 4

ARRET DU 11 JANVIER 2023

(n° , 10 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 20/03771 - N° Portalis 35L7-V-B7E-CB55S

Décision déférée à la Cour : Jugement du 20 Janvier 2020 -Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de BOBIGNY - RG n° F 17/01284

APPELANTE

S.A.R.L. DIASPO ENVIRONNEMENT, prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège

[Adresse 2]

[Localité 3]

Représentée par Me Clémence HILLEL-MANOACH, avocat au barreau de PARIS, toque : C1444

Représentée par Mme [H] [Z] (Juriste) en vertu d'un pouvoir général

INTIME

Monsieur [J] [E]

[Adresse 7]

[Adresse 7]

[Localité 1]

Représenté par Me Manuella METOUDI, avocat au barreau de PARIS, toque : D1137

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 31 Octobre 2022, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Madame Florence MARQUES, conseillère, chargée du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, entendu en son rapport, composée de :

Monsieur Jean-François DECHANVILLE, président

Madame Anne-Gael BLANC, conseillère

Madame Florence MARQUES, conseillère

Greffier, lors des débats : Mme Victoria RENARD

ARRET :

- contradictoire

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Jean-François DE CHANVILLE, Président de chambre et par Victoria RENARD, Greffière, présente lors de la mise à disposition.

RAPPEL DES FAITS, PROCEDURE ET MOYEN DES PARTIES :

La société DIASPO ENVIRONNEMENT est spécialisée dans le secteur d'activité des transports routiers de fret de proximité.

Suivant contrat de travail à durée indéterminée à effet du 04 janvier 2016, M. [J] [E] a été engagé par la SARL Diaspo Environnement, en qualité de « chauffeur super poids lourds », statut ouvrier, moyennant un salaire de base de 2.199,22 euros brut par mois.

Les relations contractuelles entre les parties étaient soumises à la convention collective nationale des transports routiers et activités auxiliaires du transport (IDCC 16).

La société Diaspo Environnement occupait à titre habituel moins de onze salariés. 

Les trois derniers mois de salaire de M. [E] s'établissaient en moyenne à la somme de 3.762,29 euros.

M. [J] [E] a fait l'objet, après convocation et mise à pied conservatoire du 08 novembre 2016 et entretien préalable du 18 novembre 2016, d'un licenciement pour faute grave le 24 novembre 2016.

M. [J] [E] a saisi le conseil de prud'hommes de Bobigny, le 03 mai 2017, aux fins notamment de voir juger son licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse et condamner la société Diaspo Environnement à lui verser diverses sommes.

Par jugement en date du 20 janvier 2020 le conseil de prud'hommes de Bobigny a :

- condamné la société Diaspo Environnement à verser à M. [E] les sommes suivantes :

* 7.524,58 euros au titre de dommages et intérêts pour rupture abusive du contrat de travail,

* 3.762,29 euros au titre de l'indemnité compensatrice de préavis,

* 376,22 euros au titre de congés payés y afférents,

* 689,75 euros au titre de l'indemnité légale de licenciement,

* 100 euros au titre de dommages et intérêts pour absence de visite médicale,

* 1.200 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- rappelé que les créances salariales porteront intérêts de droit à compter de la date de réception par la partie défenderesse de la convocation devant le bureau de conciliation, soit le 09 mai 2017, et les créances à caractère indemnitaire porteront intérêts au taux légal à compter du jour du prononcé du présent jugement,

- ordonné à la société Diaspo Environnement de remettre à M. [E] les documents de fin de contrat de travail conformes au présent jugement,

- débouté les parties du surplus de leurs demandes,

- condamné la société aux dépens.

Par déclaration au greffe en date du 26 juin 2020, la société Diaspo Environnement a régulièrement interjeté appel de cette décision.

Par ses dernières conclusions adressées au greffe par le réseau privé virtuel des avocats le 17 mars 2021, la société Diaspo Environnement demande à la Cour de :

- infirmer le jugement déféré en ce qu'il a :

* condamné, en retenant implicitement que le licenciement ne reposait ni sur une faute grave, ni sur une cause réelle et sérieuse, la société SARL DIASPO ENVIRONNEMENT à verser à Monsieur [J] [E] :

$gt; 7 524,58 € à titre de dommages-intérêts pour rupture abusive du contrat de travail,

$gt; 3 762,29 € au titre de l'indemnité compensatrice de préavis,

$gt; 376,22 € au titre des congés payés y afférents,

$gt; 689,75 € au titre de l'indemnité légale de licenciement,

$gt; 100 € au titre de dommages et intérêts pour absence de visite médicale,

$gt; 1.200 € au titre de l'article 700 du Code de procédure civile* ordonné à la société DIASPO ENVIRONNEMENT de remettre à Monsieur [J] [E] les documents de fin de contrat conformes au présent jugement,* condamné la société DIASPO ENVIRONNEMENT aux dépens,

* débouté la société DIASPO ENVIRONNEMENT de sa demande au titre de l'article 700 du Code de procédure civile,

- confirmer le jugement de première instance en ce qu'il a :

* débouté Monsieur [E] du surplus de ses demandes et notamment :

$gt; de sa demande de dommages et intérêts pour préjudice moral d'un montant de 5.000 €,

$gt; de sa demande de condamnation sous astreinte pour la remise des documents,

$gt; de sa demande d'exécution provisoire au titre de l'article 515 du code de procédure civile,

ET, STATUANT A NOUVEAU, il est demandé à la Cour d'appel de :

A titre principal,

- dire et juger que le licenciement repose sur une faute grave,

En conséquence,

- débouter Monsieur [E] de sa demande de dommages et intérêts pour licenciement abusif (22.573,74 €),

- débouter Monsieur [E] de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions et notamment des demandes suivantes :

* 3 762,29 € au titre de l'indemnité compensatrice de préavis,

* 376,22 € au titre des congés payés y afférents,

* 689,75€ au titre de l'indemnité de licenciement,

* 1.522,50 € au titre du rappel de salaire pour la période de mise à pied,

* 1.500 € de dommages et intérêt pour absence de visite médicale d'embauche,

* 5.000 € à titre de dommages et intérêts pour préjudice moral,

* 10.128,25 € au titre de l'indemnité pour défaut de contrepartie obligatoire en repos,

* ordonner la remise des documents de fin de contrat conforme à la décision à intervenir, sous astreinte de 100 € par jour,

* 4.000 € au titre de l'article 700 du CODE DE PROCÉDURE CIVILE,

A titre subsidiaire,

- dire et juger que le licenciement repose sur une cause réelle et sérieuse,

En conséquence,

- débouter Monsieur [E] de sa demande de dommages et intérêts pour licenciement abusif (22.573,74 €),

- débouter Monsieur [E] de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions et notamment des demandes suivantes :

* 3 762,29 € au titre de l'indemnité compensatrice de préavis,

* 376,22 € au titre des congés payés y afférents,

* 689,75€ au titre de l'indemnité de licenciement,

* 1.522,50 € au titre du rappel de salaire pour la période de mise à pied,

* 1.500 € de dommages et intérêt pour absence de visite médicale d'embauche,

* 5.000 € à titre de dommages et intérêts pour préjudice moral,

* 10.128,25 € au titre de l'indemnité pour défaut de contrepartie obligatoire en repos,

* ordonner la remise des documents de fin de contrat conforme à la décision à intervenir, sous astreinte de 100 € par jour,

* 4.000 € au titre de l'article 700 du CODE DE PROCÉDURE CIVILE,

En tout état de cause,

- débouter Monsieur [E] de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions et notamment des demandes suivantes :

* 1.522,50 € au titre du rappel de salaire pour la période de mise à pied,

* 1.500 € de dommages et intérêt pour absence de visite médicale d'embauche,

* 5.000 € à titre de dommages et intérêts pour préjudice moral,

* 10.128,25 € au titre de l'indemnité pour défaut de contrepartie obligatoire en repos,

* ordonner la remise des documents de fin de contrat conforme à la décision à intervenir, sous astreinte de 100 € par jour,

* 4.000 € au titre de l'article 700 du CODE DE PROCÉDURE CIVILE,

- ordonner à Monsieur [E] le remboursement des sommes perçues au titre de l'exécution provisoire,

- condamner Monsieur [E] à verser à la société DIASPO ENVIRONNEMENT la somme de 3.000 € euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile,

- dire que ces sommes porteront intérêts au taux légal à compter du jugement,

- condamner Monsieur [E] aux entiers dépens.

Par ses uniques conclusions adressées au greffe par le réseau privé virtuel des avocats le 18 décembre 2020, M. [J] [E] demande à la Cour de :

- confirmer le jugement déféré en ce qu'il a dit et jugé son licenciement sans cause sérieuse et en a tiré les conséquences légales au titre de la requalification du licenciement pour faute grave en licenciement sans cause réelle et sérieuse,

- le confirmer en ce qu'il a condamné la SARL DIASPO ENVIRONNEMENT à des dommages et intérêts pour absence de visite médicale,

- infirmer le jugement rendu par le Conseil de prud'hommes de Bobigny en date du 20 janvier 2020 en ce qu'il a débouté Monsieur [J] [E] de sa demande de dommages et intérêts pour préjudice moral,

- l'infirmer en ce qu'il a limité les dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse alloués à Monsieur [J] [E] à la somme de 7.524,58 euros, et en ce qu'il a limité les dommages et intérêts pour absence de visite médicale à la somme de 100€,

Et Statuant à nouveau,

- dire et juger le licenciement de Monsieur [J] [E] sans cause réelle et sérieuse,

En conséquence,

- condamner la SARL DIASPO ENVIRONNEMENT à régler à Monsieur [J] [E] la somme de 22.573,74€ au titre des dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

- condamner la SARL DIASPO ENVIRONNEMENT à régler à Monsieur [J] [E] la somme de 3.762,29 € au titre de l'indemnité compensatrice de préavis (1 mois), et 376,22 € au titre des congés payés y afférents,

- condamner la SARL DIASPO ENVIRONNEMENT à régler à Monsieur [J] [E] la somme de 689,75 € au titre de l'indemnité de licenciement,

- condamner la SARL DIASPO ENVIRONNEMENT à régler à Monsieur [J] [E] la somme de 1.522,50€ bruts au titre du rappel de salaire au titre de la mise à pied à titre conservatoire injustifiée sur la période du 9 au 29 novembre 2016, et 152,25€ bruts au titre des congés payés afférents,

- condamner la SARL DIASPO ENVIRONNEMENT au paiement de la somme de 1.500€ au titre de l'absence de visite médicale d'embauche,

- condamner la société SARL DIASPO ENVIRONNEMENT au paiement de la somme de 5.000€ au titre du préjudice moral,

- condamner la société SARL DIASPO ENVIRONNEMENT au paiement de la somme de 10.128,25€ au titre de l'indemnité pour défaut de contrepartie obligatoire en repos,

- assortir l'arrêt des intérêts au taux légal à compter de la saisine,

- ordonner la remise de l'attestation Pôle emploi, solde de tout compte et certificat de travail conformes à la décision à intervenir sous astreinte de 100 euros par jour de retard et par document,

- condamner la SARL DIASPO ENVIRONNEMENT au paiement de la somme de 4.000 € au titre de l'article 700 du Code de Procédure Civile,

- condamner la SARL DIASPO ENVIRONNEMENT aux entiers dépens.

L'ordonnance de clôture est intervenue le 05 juillet 2022.

En application de l'article 455 du code de procédure civile, il est expressément renvoyé aux conclusions des parties pour un exposé complet du litige.

MOTIFS DE LA DÉCISION :

1-Sur la recevabilité des demandes des chefs du rappel de salaire au titre de la période de mise à pied et d'une indemnité pour défaut de contrepartie obligatoire en repos présentées pour la première fois en cause d'appel

L'employeur soutient que les demandes de ces chefs sont nouvelles en cause d'appel et en conséquence, irrecevables sur le fondement de l'article 564 du code de procédure civile.

Le salarié ne répond pas.

Aux termes des articles 564 et suivants du code procédure civile, à peine d'irrecevabilité relevée d'office, les parties ne peuvent soumettre à la cour de nouvelles prétentions si ce n'est pour opposer compensation, faire écarter les prétentions adverses ou faire juger les questions nées de l'intervention d'un tiers, ou de la survenance ou de la révélation d'un fait. Cependant, les prétentions ne sont pas nouvelles dès lors qu'elles tendent aux mêmes fins que celles soumises au premier juge même si leur fondement juridique est différent. Les parties ne peuvent ajouter aux prétentions soumises au premier juge que les demandes qui en sont l'accessoire, la conséquence ou le complément nécessaire.

Les demandes sus-visées sont complémentaires au sens de l'article 566 du code de procédure civile des demandes principales de M. [J] [E] et dés lors recevables.

2-Sur la prescription des demandes nouvelles

La société soutient que ces demandes sont prescrites en application de l'article L 3245-1 du code du travail qui dispose que « L'action en paiement ou en répétition du salaire se prescrit par trois ans à compter du jour où celui qui l'exerce a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l'exercer » . Elle indique que le salarié est assisté par un avocat depuis le début de la procédure prud'homale et ne pouvait en conséquence ignorer ses droits.

La société indique que le salarié a formulé pour la première fois ses demandes dans ses conclusions du 18 décembre 2020 alors qu'il a eu connaissance de ses droits plus de 3 ans auparavant.

Le salarié ne répond pas.

Aux termes de l'article L. 3245-1 du Code du travail, l'action en paiement ou en répétition de salaire se prescrit à l'expiration d'un délai de trois ans à compter du jour où celui qui l'exerce a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l'exercer. La demande peut porter sur les sommes dues au titre des trois dernières années à compter de ce jour ou lorsque le contrat de travail est rompu, sur les sommes dues au titre des trois années précédant la rupture.

Il s'ensuit qu'en cas de rupture du contrat, le salarié peut agir dans les trois ans de cette rupture, en paiement des sommes dues au titre des trois années précédant la rupture.

Au cas d'espèce, le salarié a été licencié le 24 novembre 2016, il a saisi le CPH, le 3 mai 2017 et disposait donc jusqu'au 3 mai 2020 pour formuler le paiement de rappel de salaires.

Les demandes sont prescrites pour avoir été formulées pour la première fois le 18 décembre 2020. .

3- Sur le licenciement pour faute grave

L'article L.1231-1 du code du travail dispose que le contrat à durée indéterminée peut être rompu à l'initiative de l'employeur ou du salarié. Aux termes de l'article L.1232-1 du même code, le licenciement par l'employeur pour motif personnel est justifié par une cause réelle et sérieuse.

Il résulte par ailleurs des dispositions combinées des articles L 1232-1, L 1232-6, L 1234-1 et L 1235-1 du code du travail que devant le juge, saisi d'un litige dont la lettre de licenciement fixe les limites, il incombe à l'employeur qui a licencié un salarié pour faute grave, d'une part d'établir l'exactitude des faits imputés à celui-ci dans la lettre, d'autre part de démontrer que ces faits constituent une violation des obligations découlant du contrat de travail ou des relations de travail d'une importance telle qu'elle rend impossible le maintien de ce salarié dans l'entreprise.

En l'espèce, la lettre de rupture du 24 novembre 2016 est aisni rédigée:

« ['] Les faits qui vous sont reprochés sont les suivants :

De nombreux retards à votre prise de poste engendrant un réel mécontentement de certains clients importants de la société.

A titre d'exemples, vous trouverez ci-dessous la liste de certains de vos retards qui ont été extrêmement pénalisant pour l'entreprise :

-Le 1er septembre 2016, votre présence chez le client MAZET messagerie à [Localité 5] devait être effective à 6 heures, alors que vous avez pris vos fonctions à [Localité 3] à 7h42,

Le 12 septembre 2016, votre présence chez le client CARTONDUL à [Localité 6] devait être effective à 6 heures, alors que vous avez pris vos fonctions à [Localité 3] à 6h,

Le 26 septembre 2016, votre présence chez le client MEDIA Gare Pleyel devait être effective à 6 heures, alors que vous avez pris vos alors fonctions à [Localité 3] à 6h24,

Le 20 octobre 2016, votre présence chez le client RESEAU NATIONAL DE PROMONTI à [Localité 8] devait être effective à 6 heures, alors que vous avez pris vos fonctions à [Localité 3] à 7h45,

Le 27 octobre 2016, votre présence chez le client FLP Services devait être effective à 7 heures, alors que vous avez pris vos fonctions à [Localité 3] à 9h24,

Le 7 novembre 2016, votre présence chez le client PROTOSTYLEBUC à [Localité 4] devait être effective à 8 heures, alors que vous avez pris vos fonctions à [Localité 3] à 8h28.

Enfin, nous comptabilisions des absences inopinées le 3 octobre et le 9 novembre 2016, absences qui sont injustifiées à ce jour. Nous avons accepté que la journée du 3 octobre soit déduite de votre compteur de congés payés; cependant cette situation n'est pas unique, elle s'est produite à plusieurs reprises.

Ces retards et ces absences, dont la liste ci-dessus n'est pas exhaustive, sont fortement dommageables pour l'entreprise [']

Enfin, nous constatons de régulières remises en cause des décisions de votre hiérarchie (plannings, organisation, paie, ').

Lors de ces remises en cause des décisions de la Direction, vous entraînez vos collègues dans des débats et des critiques sévères vis-à-vis de la Direction allant parfois jusqu'à évoquer des menaces d'actions collectives.

Ces faits sont extrêmement pénalisants pour le climat social d'une petite structure comme la notre ['].

Lors de l'entretien, vous nous avez dit que vous ne vous étiez pas rendu compte de l'impact de ces retards pour la Société, puisque toutes les collectes étaient effectuées dans la journée. Cependant, vous n'êtes pas sans savoir que certains clients ont des exigences en termes d'heures de collecte ['].

Ainsi, dans l'intérêt de l'entreprise, ['] nous ne pouvons que constater que vos retards et/ou absences ponctuelles sont extrêmement préjudiciables pour l'entreprise, en termes d'image vis-à-vis de son client.

De même, votre comportement nous amène à une petite totale de confiance à votre égard car tous ces faits s'avèrent fortement dommageables à l'entreprise.

C'est pourquoi, et compte tenu de la récidive de tous ces manquements, nous vous informons que votre maintien à votre poste dans l'entreprise s'avère impossible et vous notifions votre licenciement pour faute grave ['] »

Il est ainsi reproché au salariées retards, des absences et une remise en cause des décisions de la direction (insubordination).

M. [J] [E] conteste l'ensemble de ces griefs. Il soutient qu'aucun retard ne peut lui être reproché dans la mesure ou il n'avait pas d'horaire fixe, les horaires indiqués sur les feuilles de route étant indicatifs.

Les SMS échangés entre le salarié et son responsable démontrent les retards reprochés les 1er septembre , 20 octobre et 7 novembre 2016. Les feuilles de tournées versées aux débats ne concernent pas les dates visées à la lettre de licenciement, si bien que le relevé du chronotatchygraphe n'est d'aucune utilité.

Les autres retards invoqués dans les écritures de la société mais non visés dans la lettre de licenciement ne peuvent être retenus. Il est d'ailleurs remarqué que la plainte du client Butin Sedic, adressée à une société tierce, peu important que celle-ci ait le même gérant que la société Diapo Environnement, n'est nullement visée dans la lettre de licenciement, si bien que l'employeur ne peut s'en prévaloir à l'occasion de la procédure prud'homale. Ainsi trois retards sont retenus.

En ce qui concerne les absences reprochées, l'employeur admet que le salarié ayant été mis à pied le 9 novembre 2016, le retard de ce jour là ne peut lui être reproché.

Pour la journée du 3 octobre 2016, l'employeur, en proposant à son salarié de retenir un jour de congé, a admis une forme de régularisation qu'il ne peut dénoncer à l'occasion de la procédure de licenciement. L'employeur ne peut invoquer d'autres absences que celles visées dans la lettre de licenciement, comme il le fait dans ses écritures. Ce grief n'est pas retenu.

Enfin, l'employeur n'établit d'aucune manière que le salarié aurait contesté ses directives et aurait amené ses collégues à faire de même. Ce grief n'est pas établi.

Les trois retards retenus ont pu désorganiser le travail mais ne rendaient pas impossible le maintien du salarié dans l'entreprise, ils ne sont ainsi pas constitutifs d'une faute grave mais constituent une cause réelle et sérieuse de licenciement.

Le licenciement de M. [J] [E] est pour faute grave est requalifié en licenciement pour cause réelle et sérieuse.

Le jugement entrepris est infirmé de ce chef et en ce qu'il a alloué au salarié une indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.

4- Sur les conséquences financières du licenciement sans cause réelle et sérieuse

Le salaire mensuel de référence à retenir est de 3.762,29 euros.

4-1-Sur l'indemnité compensatrice de préavis et les congés payés afférents

Le salarié peut prétendre à 1 mois de préavis.. Il lui est dû de ce chef la somme de 3.762,29 euros, outre la somme de 376,22 euros pour les congés payés afférents.

Le jugement est confirmé de ce chef.

4-2-Sur l'indemnité légale de licenciement

Le salarié a droit à la somme de 689,75 euros de ce chef.

Le jugement est confirmé de ce chef.

5- Sur les dommages-intérêts pour préjudice moral

Le salarié ne justifie d'aucun préjudice moral.

Il est débouté de ce chef. Le jugement est confirmé.

6- Sur la demande de dommages-intérêts pour défaut de visite médicale d'embauche

Le salarié ne démontre aucun préjudice . Dès lors, il ne peut qu'être débouté de sa demande de ce chef.

Le jugement est infirmé de ce chef.

7- Sur la remise des documents de fin de contrat.

Il convient d'ordonner la remise d'une attestation Pôle Emploi, du solde de tout compte et d'un certificat de travail conformes à la présente décision, celle-ci étant de droit, sans qu'il ne soit nécessaire de prononcer une astreinte.

8- Sur les intérêts

Conformément aux dispositions de l'article 1231-6 et 7 du code civil, les intérêts au taux légal courent sur les créances salariales à compter de la réception par l'employeur de sa convocation devant le bureau de conciliation du conseil de prud'hommes, soit le 9 mai 2017 et à compter du jugement pour les créances indemnitaires.

9- Sur les demandes accessoires

Le jugement est confirmé sur les dépens et l'article 700 du code de procédure civile.

Partie perdante, la SARL Diaspo Environnement est condamnée aux dépens d'appel.

L'équité commande de faire application de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel au profit de M. [J] [E], aisni qu'il sera dit au dispositif.

La SARL Diaspo Environnement est déboutée de sa demande au titre des frais irrépétibles en cause d'appel.

PAR CES MOTIFS :

La cour,

Constate que les demandes nouvelles des chefs du rappel de salaire au titre de la période de mise à pied et d'une indemnité pour défaut de contrepartie obligatoire en repos sont prescrites,

Confirme le jugement déféré, sauf en ce qu'il a dit sans cause réelle et sérieuse le licenciement de M. [J] [E], a condamné la SARL Diaspo Environnement à payer à M. [J] [E] la somme de 7.524,58 euros à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et la somme de 100 euros à titre de dommages et intérêts pour absence de visite médicale,

Statuant à nouveau des chefs infirmés et y ajoutant,

Requalifie le licenciement pour faute de M. [J] [E] en licenciement pour cause réelle et sérieuse,

Déboute M. [J] [E] de sa demande d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

Déboute M. [J] [E] de sa demande de dommages et intérêts pour absence de visite médicale,

Ordonne à la SARL Diaspo Environnement de remettre à M. [J] [E] un certificat de travail, une attestation destinée au Pôle Emploi et un solde de tout compte conformes au présent arrêt dans un délai de quinze à compter de sa signification,

Rappelle que les sommes de nature salariale porteront intérêts au taux légal à compter du 9 mai 2017, les créances indemnitaires portant intérêts au taux légal à compter du jugement,

Condamne la SARL Diaspo Environnement à payer à M. [J] [E] la somme de 1.500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, en cause d'appel,

Déboute la SARL Diaspo Environnement de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

Condamne la SARL Diaspo Environnement aux dépens d'appel.

LA GREFFIÈRE LE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 6 - chambre 4
Numéro d'arrêt : 20/03771
Date de la décision : 11/01/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-01-11;20.03771 ?
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