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11/01/2023 | FRANCE | N°19/05316

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 6 - chambre 4, 11 janvier 2023, 19/05316


Copies exécutoires REPUBLIQUE FRANCAISE

délivrées le : AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS



COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 4



ARRET DU 11 JANVIER 2023



(n° , 10 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 19/05316 - N° Portalis 35L7-V-B7D-B73AB



Décision déférée à la Cour : Jugement du 15 Mars 2019 -Conseil de Prud'hommes - Formation de départage de MEAUX - RG n° 17/00105





APPELANT



Monsieur [E] [O]

[Adresse 1]

[Adresse 1]

Représenté par Me Séverine HOUARD-BREDON, avocat au barreau de PARIS, toque : E0327



INTIMEE



SAS VERISURE anciennement dénommée SECURITAS DIRECT

[Adresse 2]

[Adresse 2]

Représ...

Copies exécutoires REPUBLIQUE FRANCAISE

délivrées le : AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 4

ARRET DU 11 JANVIER 2023

(n° , 10 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 19/05316 - N° Portalis 35L7-V-B7D-B73AB

Décision déférée à la Cour : Jugement du 15 Mars 2019 -Conseil de Prud'hommes - Formation de départage de MEAUX - RG n° 17/00105

APPELANT

Monsieur [E] [O]

[Adresse 1]

[Adresse 1]

Représenté par Me Séverine HOUARD-BREDON, avocat au barreau de PARIS, toque : E0327

INTIMEE

SAS VERISURE anciennement dénommée SECURITAS DIRECT

[Adresse 2]

[Adresse 2]

Représentée par Me Marion HOCHART, avocat au barreau de PARIS

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 12 octobre 2022, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Monsieur Jean-François DE CHANVILLE, président, chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, entendu en son rapport, composée de :

Monsieur Jean-François DE CHANVILLE, président

Madame Anne-Ga'l BLANC, conseillère

Madame Florence MARQUES, conseillère

Greffier, lors des débats : Mme Victoria RENARD

ARRET :

- contradictoire

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Jean-François DE CHANVILLE, Président de chambre et par Victoria RENARD, Greffière, présente lors de la mise à disposition.

EXPOSÉ DU LITIGE :

M. [E] [O], né le 25 novembre 1981, a été engagé par la société Securitas Direct, aujourd'hui dénommée Verisure, par contrat de travail à durée indéterminée à compter du 1er février 2011 en qualité d'expert sécurité.

Il était stipulé que le salarié travaillerait du lundi au samedi pour un total de 151,67 heures moyennant une rémunération mensuelle fixe de 1 405,41 euros brut.

Les relations contractuelles entre les parties étaient soumises à la convention collective nationale des entreprises de prévention et de sécurité (IDCC 1351).

Par lettre datée du 24 octobre 2014, M. [O] a présenté à son employeur sa démission.

A la date du licenciement, la société Securitas Direct occupait habituellement au moins onze salariés.

M. [O] a saisi le 24 mars 2016 le conseil de prud'hommes de Meaux aux fins de voir condamner la société Securitas Direct au versement des sommes suivantes :

- 1.364,05 euros à titre de rappels de salaires pour tenir compte des fonctions réellement exercées par le salarié, celles de chef d'équipe,

- 136,40 euros au titre des congés payés y afférents,

- 75 euros à titre de rappels de salaires relatifs à des retenues pour redevance automobile,

- 7,50 euros au titre des congés payés y afférents,

- 1.960 euros de rappels de salaires sur les primes et commissions restant dues au titre de l'année 2011,

- 196 euros au titre des congés payés y afférents,

- 2.385 euros de rappels de salaires sur les primes et commissions restant dues au titre de l'année 2012,

- 238,50 euros d'indemnité de congés payés y afférents,

- 776,20 euros de rappels de salaires sur les primes et commissions restant dues au titre de l'année 2013,

- 77,62 euros au titre des congés payés y afférents,

- 565,70 euros de rappel de salaires sur les primes et commissions restant dues au titre de l'année 2014,

- 56,57 euros au titre des congés payés y afférents,

- 44.548,35 euros de rappels de salaires pour heures supplémentaires,

- 4.454,83 euros d'indemnité de congés payés y afférents,

- subsidiairement sur les demandes en paiement des heures supplémentaires, 10.000 euros de dommages et intérêts pour violation des dispositions relatives aux durées maximales de travail et temps de repos ;

- 16.384,44 euros d'indemnité pour travail dissimulé,

- 2.500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Il était en outre demandé la remise d'un bulletin de paie récapitulatif et d'une attestation Pôle emploi conformes au jugement à intervenir.

Par jugement du 15 mars 2019, auquel la cour se réfère pour l'exposé de la procédure antérieure et des prétentions initiales des parties, le conseil a :

- condamné la SAS Securitas Direct à payer à M. [O] la somme brute de 1.801 euros au titre des commissions et primes non versées outre la somme de 108,10 euros au titre des congés payés y afférents, avec intérêt au taux légal à compter du 30 mars 2016 ;

- condamné la SAS Securitas Direct à payer à M. [O] la somme brute de 75 euros à titre de rappels de salaires relatifs à des retenues pour redevance automobile, et 7,50 euros au titre des congés payés y afférents, avec intérêt au taux légal à compter du 30 mars 2016 ;

- rejeté la demande de rappels de salaires et des congés payés y afférents au titre des fonctions de chef d'équipe ;

- rejeté la demande de rappels de salaires pour heures supplémentaires et des congés payés y afférents ;

- rejeté la demande d'indemnité de travail dissimulé ;

- rejeté la demande de dommages et intérêts en réparation de la violation des dispositions relatives aux durées maximales de travail et de temps de repos ;

- ordonné à la SAS Securitas Direct de remettre à M. [O] une attestation Pôle emploi et un bulletin de salaire conformes au présent jugement ;

- dit n'y avoir lieu à assortir d'une astreinte l'obligation de remise de documents sociaux et des bulletins de paie ;

- condamné la SAS Securitas Direct à payer à M. [O] la somme de 1.200 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamné la SAS Securitas Direct aux entiers dépens ;

- débouté la SAS Securitas Direct de l'ensemble de ces demandes ;

- dit n'y avoir lieu à exécution provisoire du présent jugement.

Par déclaration du 17 avril 2019, M. [O] a interjeté appel de cette décision, notifiée par lettre du greffe réceptionnée le 19 mars 2019 par l'appelant.

Dans ses dernières conclusions adressées au greffe par le réseau privé virtuel des avocats le 11 avril 2022, l'appelant demande à la cour d'infirmer le jugement et réitère l'intégralité de ses demandes formulées en première instance, excepté en ce qu'il élève sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile à la somme de 3.000 euros et ajoute une demande en paiement de la somme de 5.000 euros de dommages et intérêts en réparation du manquement de l'employeur à son obligation d'exécuter le contrat de travail de bonne foi. Il sollicite les intérêts au taux légal à compter de la saisine et la condamnation de l'intimée aux dépens et éventuels frais d'exécution forcée du jugement.

Dans ses dernières conclusions adressées au greffe par le réseau privé virtuel des avocats le 29 juillet 2020, l'intimée demande à la cour d'infirmer partiellement le jugement rendu par le jugement déféré en ce qu'il a condamné la société Securitas Direct à verser les sommes suivantes :

- 1.081 euros brut au titre des commissions et primes non versées, ainsi que la somme de 108,10 euros au titre des congés payés y afférents, avec intérêts au taux légal à compter du 30 mars 2016,

- 75 euros brut au titre de la redevance automobile, et 7,50 euros au titre des congés payés y afférents, avec intérêt au taux légal à compter du 30 mars 2016,

- 1.200 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.

Elle prie la cour de rejeter l'ensemble des prétentions adverses.

Subsidiairement, elle entend voir limiter les rappels de commissions à la somme de 850 euros outre 85 euros d'indemnité de congés payés y afférents.

En tout état de cause, elle demande l'allocation de la somme de somme de 3.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile et la condamnation de l'appelant aux entiers dépens.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 10 mai 2022 et l'affaire a été fixée à l'audience du 12 octobre 2022.

Pour un plus ample exposé des faits, des prétentions et des moyens des parties, la cour se réfère à leurs conclusions écrites conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile.

MOTIFS :

1 : Sur la qualification de chef d'équipe

M. [E] [O] soutient qu'il a été promu chef d'équipe avec deux salariés sous sa responsabilité d'août 2012 à décembre 2012 sans signature d'avenant, ni mention de cette qualification sur les bulletins de paie. Il sollicite en conséquence un rappel de salaire pour tenir compte du salaire minimum conventionnel applicable à l'agent de maîtrise, niveau 1, échelon 1.

La société GIE GLD Services conteste cette qualification.

Sur ce

Il est de principe que, sous réserve d'une attribution volontaire par l'employeur, la qualification, mais également la catégorie à laquelle appartient un salarié, se détermine en fonction des fonctions réellement exercées par celui-ci, sans que l'absence de contestation en amont puisse lui être opposée, les juges n'étant pas liés par la qualification figurant dans le contrat de travail. La charge de la preuve de la qualification revendiquée pèse sur le salarié.

Pour tout élément de nature à appuyer sa position, le salarié produit une carte de visite portant la qualité de chef d'équipe à l'en-tête de Vérisure. Ce document produit pour la première fois en cause d'appel ne présente aucune garantie d'authenticité.

Par suite la demande de requalification sera rejetée, de même que les demande de rappel de salaire et d'indemnité de congés payés y afférents.

2 : Sur les commissions et primes

M. [E] [O] demande des rappels de salaire au titre des années 2011 à 2014, en alléguant qu'un certain nombre de primes dues ont fait l'objet de déductions injustifiées par l'employeur.

Celui-ci oppose que la contrat excluait le versement de prime sur des ventes payées en dessous d'un tarif déterminé et que le salarié ne justifie pas avoir obtenu le prix voulu pour pouvoir percevoir les primes litigieuses. Dans l'hypothèse où le salarié justifierait avoir procédé à des ventes au prix ouvrant droit à commission, la société GIE GLD Services reconnaît devoir la somme de 850 euros outre 85 euros d'indemnité de congés payés y afférents.

Sur ce

Lorsque le calcul de la rémunération dépend d'éléments détenus par l'employeur, il résulte du principe énoncé à l'article 1353 nouveau du Code civil que celui-ci est tenu de les produire en vue d'une discussion contradictoire.

Aux termes de l'article 5 du contrat de travail liant les parties le salarié a droit à une rémunération variable qui se déclenche au-delà d'un certain seuil et est versée le mois suivant,

L'annexe 1 au contrat précise que les options vendues et installées au-delà du kit de base sont rémunérées en fonction du prix de vente et du taux de remise appliqué, un taux de remise de 50 % entraînant une déduction sur la commission.

Le salarié fournit un tableau précis à partir des détails de son activité commerciale, couvrant les années litigieuses avec une colonne figurant les parts de primes non payées.

Contrairement à ce que soutient la société Vérisure, il n'appartient pas au salarié de justifier de ce que les ventes n'ouvraient pas droit à commission, lorsqu'il estime que celles-ci sont dues.

Dés lors qu'il sera fait droit intégralement à la demande de rappel de prime du salarié.

3 : Sur le rappel de salaire au titre de la redevance automobile

M. [E] [O] sollicite le paiement de la somme de 75 euros outre 7,50 euros d'indemnité de congés payés y afférents au titre de la redevance perçue par l'employeur en contrepartie de l'usage personnel qu'il faisait du véhicule de fonction. Il estime que le montant mensuel de 115 euros prélevé d'août 2012 à décembre 2012 par l'employeur était excessif. En effet, il reproche à celui-ci d'avoir prélevé la somme de 115 euros par mois, ce qui correspond à un véhicule de quatre places, au lieu de 100 euros correspondant à son véhicule qui n'était que de deux places.

La société Vérisure s'y oppose en soulignant que le salarié ne justifie pas du montant de redevance qu'il revendique. Elle soutient que si la redevance a baissé à 100 en 2013, cela est dû aux offres commerciales des prestataires.

Il appartient à l'employeur de justifier de son droit à la redevance revendiquée, ce qu'il ne fait pas.

Dés lors la demande du salarié doit être accueillie favorablement.

4 : Sur les heures supplémentaires

Il convient de statuer sur les heures supplémentaires et sur l'indemnité de travail dissimulé à raison des heures supplémentaires.

4.1 : Sur le rappel de salaire

M. [E] [O] sollicite la condamnation de son adversaire à lui payer la somme de 44 548,35 euros de rappel de salaire sur heures supplémentaires. Il explique qu'il travaillait du lundi au samedi, voire le dimanche, de 9 heures du matin jusqu'à 20 heures ou 21 heures ce qui le conduisait à réaliser 17 heures par semaine. Il prétend qu'il commençait sa journée un rendez-vous à l'agence, à quoi succédaient des rendez-vous clientèle, la formation de ses collaborateurs, la prospection commerciale, les rendez-vous d'installation et de maintenance avec pour finir le compte rendu de son activité à son chef territorial.

La société Vérisure conteste que le salarié ait effectué plus de 35 heures par semaine et qu'il ait à accomplir l'ensemble des tâches qui lui incombe en une seule journée, de manière hebdomadaire, régulière et intangible. Ainsi il n'y avait pas une réunion chaque matin et les missions étaient effectuées selon certaines heures en fonction de leur spécificité, moyennant des décalages dans l'horaire de travail qui ne supposaient pas d'heures supplémentaires, lesquelles n'étaient pas autorisées. Il dénonce des incohérences dans le tableau présenté par le salarié.

Sur ce

Aux termes de l'article L. 3171-2, alinéa 1er, du code du travail, lorsque tous les salariés occupés dans un service ou un atelier ne travaillent pas selon le même horaire collectif, l'employeur établit les documents nécessaires au décompte de la durée de travail, des repos compensateurs acquis et de leur prise effective, pour chacun des salariés concernés.

Selon l'article L. 3171-4 du code du travail, en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail accomplies, l'employeur fournit au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié. Au vu de ces éléments et de ceux fournis par le salarié à l'appui de sa demande, le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles. Si le décompte des heures de travail accomplies par chaque salarié est assuré par un système d'enregistrement automatique, celui-ci doit être fiable et infalsifiable.

Les heures supplémentaires doivent être rémunérées, dès lors qu'elles ont été effectuées avec l'accord exprès ou tacite de l'employeur ou que le travail confié impose l'accomplissement d'heures supplémentaires.

Il résulte de ces dispositions, qu'en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail accomplies, il appartient au salarié de présenter, à l'appui de sa demande, des éléments suffisamment précis quant aux heures non rémunérées qu'il prétend avoir accomplies afin de permettre à l'employeur, qui assure le contrôle des heures de travail effectuées, d'y répondre utilement en produisant ses propres éléments. Le juge forme sa conviction en tenant compte de l'ensemble de ces éléments au regard des exigences rappelées aux dispositions légales et réglementaires précitées. Après analyse des pièces produites par l'une et l'autre des parties, dans l'hypothèse où il retient l'existence d'heures supplémentaires, il évalue souverainement, sans être tenu de préciser le détail de son calcul, l'importance de celles-ci et fixe les créances salariales s'y rapportant.

Il est en outre constant qu'un tableau établi par le salarié durant la procédure prud'homale ou après celle-ci peut constituer un élément suffisamment précis de nature à permettre à l'employeur, qui assure le contrôle des heures de travail effectuées, d'y répondre utilement en produisant ses propres éléments.

Il doit être relevé de manière liminaire que chaque partie soutenant que le cahier de secteur, qui devait retracer l'activité quotidienne de M. [E] [O], a été conservé par la partie adverse, il ne peut être tiré argument de l'absence de production de ce document.

A l'appui de sa demande, le salarié fournit un tableau mentionnant le nombre d'heures effectuées sur chaque semaine de la période considérée, ainsi que pour illustrer ce document et sans prétendre pouvoir refléter la totalité de son activité, des contrats d'installation, des contrats de télésurveillance, des bons de commande, des fiches de visite technique, des procés-verbaux d'installation, des bons de travaux et de maintenance ou extensions, des données d'installation.

L'ensemble de ces données constitue des éléments suffisamment précis quant aux heures non rémunérées qu'il prétend avoir accomplies afin de permettre à l'employeur, qui assure le contrôle des heures de travail effectuées, d'y répondre utilement en produisant ses propres éléments.

En revanche les attestations de collègues qui rapportent avoir travaillé du lundi au vendredi de 9 heures à 20 heures ou 20 heures 30 et le samedi de 9 heures à 17 heures, 18 heures voire 20 heures 30 ne sont pas exploitables dans la mesure où il n'apparaît pas que ces témoins exerçaient les mêmes fonctions que M. [E] [O].

N'est pas plus opérant le jugement du conseil des prud'hommes de Cergy Pontoise rendu le 28 juillet 2017 allouant un expert sécurité de la société Vérisure un rappel de salaire pour heures supplémentaires, son cas ne pouvant être étendu à tous ses collègues.

S'il ressort de la lettre de mission du salarié que celui-ci n'était astreint le matin qu'à une seule réunion par semaine à 9 heures 30 les lundis, le salarié ne dit rien en sens contraire, se bornant à indiquer qu'il avait un rendez-vous de début de journée à 9 heures.

Pour le reste, l'employeur en dehors de critiques du tableau consistant à reprocher au salarié de ne pas rapporter une preuve rigoureuse de ce qu'il contient, relève à juste titre que la régularité extrême du nombre d'heures effectuées par jour est invraisemblable au regard de la diversité des tâches accomplies et de leur durée très variable.

Le salaire devant servir au calcul du rappel de salaire pour heures supplémentaires comprend le salaire de base et les primes et indemnités qui sont la contrepartie directe du travail fourni par le salarié ou qui sont inhérentes à la nature de ce travail.

En conséquence, le salaire variable reconnu plus haut à M. [E] [O] doit être inclus dans le salaire servant de base au calcul du rappel de salaire pour heures supplémentaires.

L'importance des tâches à accomplir telles qu'évoquées plus haut imposait l'accomplissement des heures supplémentaires.

Au vu des pièces du dossier, la cour retient un rappel de salaire de 20.000 euros pour l'accomplissement de tâches qui les rendaient nécessaires. Ce montant sera donc alloué outre 2.000 euros d'indemnité de congés payés y afférents.

4.2 : Sur l'indemnité de travail dissimulé

M. [E] [O] sollicite l'allocation de la somme de 16.384,44 euros d'indemnité de travail dissimulé en observant que l'employeur a persisté à ne payer son salarié que sur la base de travail de 35 heures, alors que la surcharge anormale de travail de celui-ci ne pouvait lui échapper.

La société Vérisure répond que le caractère intentionnel du travail dissimulé prétendu n'est pas établi et qu'en tout état de cause, il n'y a pas d'heures supplémentaires.

Sur ce

L'article L8221-5 du code du travail dispose qu'est réputé travail dissimulé par dissimulation d'emploi salarié le fait pour tout employeur :

1° Soit de se soustraire intentionnellement à l'accomplissement de la formalité prévue à l'article L. 1221-10, relatif à la déclaration préalable à l'embauche ;

2° Soit de se soustraire intentionnellement à la délivrance d'un bulletin de paie ou d'un document équivalent défini par voie réglementaire, ou de mentionner sur le bulletin de paie ou le document équivalent un nombre d'heures de travail inférieur à celui réellement accompli, si cette mention ne résulte pas d'une convention ou d'un accord collectif d'aménagement du temps de travail conclu en application du titre II du livre Ier de la troisième partie ;

3° Soit de se soustraire intentionnellement aux déclarations relatives aux salaires ou aux cotisations sociales assises sur ceux-ci auprès des organismes de recouvrement des contributions et cotisations sociales ou de l'administration fiscale en vertu des dispositions légales.

L'article 8223-1 du code du travail dispose quant à lui que, en cas de rupture de la relation de travail, le salarié auquel un employeur a eu recours dans les conditions de l'article L. 8221-3 ou en commettant les faits prévus à l'article L. 8221-5 a droit à une indemnité forfaitaire égale à six mois de salaire.

L'élément matériel du travail dissimulé est caractérisé par l'absence de mention des heures supplémentaires sur les feuilles de paie.

L'élément intentionnel ne peut être déduit du nombre plus limité que celui que revendiquait le salarié, ni d'aucun autre élément du dossier, de sorte que l'indemnité de travail dissimulé est écartée.

5 : Sur la non-exécution de bonne foi du contrat de travail

M. [E] [O] sollicite l'allocation de la somme de 5 000 euros en réparation du manquement de la société Vérisure à l'obligation d'exécuter de bonne foi le contrat de travail. Il fait valoir que :

- il a été privé de salaires qui présentent un caractère alimentaire ;

- son avenant de chef d'équipe n'a pas été régularisé ;

- ses heures supplémentaires ne lui ont pas été payées ;

- il n'y a pas eu de contrôle effectif de son temps de travail, ni des durées maximales du temps de travail ;

- les critères de la rémunération variable ont été modifiés de sorte qu'il ne les a pas perçues intégralement.

Le présent arrêt, dans les motifs qui précèdent, a écarté la faute tirée de l'absence de reconnaissance de la qualité de chef d'équipe.

Il demeure que l'employeur n'a pas payé les primes, ni les heures supplémentaires.

La totalité des primes, Sous couvert de la demande de réparation du manquement à l'obligation de loyauté, le salarié sollicite la réparation du préjudice né du retard dans le paiement des heures supplémentaires.

Aux termes de l'article 1231-6 du code du travail, les dommages-intérêts dus à raison du retard dans le paiement d'une obligation de sommes d'argent consistent dans l'intérêt au taux légal, à compter de la mise en demeure. Le créancier auquel son débiteur en retard a causé par sa mauvaise foi, un préjudice indépendant de ce retard, peut obtenir des dommages-intérêts distincts de l'intérêt dilatoire.

Le salarié ne justifie pas d'un préjudice indépendant du retard et sera dés lors débouté de ce chef.

L'employeur ne prouve pas avoir respecté ses obligations en matière de durée maximale de temps de travail et de temps de repos, tels que prévus par les articles L. 3121-33, L. 3121-34, L. 3121-35 et L. 3121-36 du Code du travail, le seul fait que le salarié mentionne un temps de repos pour des journées de travail écoulées parfois entre 9 heures du matin et 22 heures le soir étant insuffisant pour assurer le respect de ces règles.

Toutefois, en l'absence d'explication sur le préjudice revendiqué, celui-ci ne saurait être admis et la demande de réparation en cause sera rejetée.

6 : Sur les documents de fin de contrat, les intérêts, l'application de l'article 700 du code de procédure civile et les dépens

Les sommes allouées, qui sont toutes de nature contractuelle, porteront intérêts au taux légal à compter de la réception de la convocation de l'employeur devant le bureau de conciliation du conseil des prud'hommes.

Eu égard aux rappels de salaires accordés, il y a lieu d'ordonner la délivrance d'un bulletin de paie récapitulatif et d'une attestation Pôle Emploi dans le mois de la signification du jugement, sans qu'il soit besoin de fixer une astreinte.

Il est équitable au regard de l'article 700 du code de procédure civile de rejeter les demandes de la société Vérisure qui succombe, au titre des frais irrépétibles et de la condamner à payer au salarié de ces chefs la somme de 1.200 euros au titre des frais irrépétibles de première instance et celle de 1.000 euros au titre des frais irrépétibles d'appel.

L'employeur supportera la charge des dépens.

Il convient de rejeter les demandes au titre des frais d'exécution et du droit de recouvrement de l'huissier qui ne relèvent pas des dépens.

PAR CES MOTIFS :

La Cour statuant contradictoirement, par mise à disposition au greffe et en dernier ressort ;

Infirme le jugement déféré, sauf sur les demandes de M. [E] [O] en paiement de rappel de salaire au titre de son reclassement comme chef d'équipe, de l'indemnité de congés payés y afférents, de la redevance automobile, de l'indemnité de congés payés y afférents et de l'indemnité de travail dissimulé, ainsi que sur les dépens ;

Statuant à nouveau ;

Condamne la société Vérisure à payer à M. [E] [O] les sommes suivantes :

- 1.960 euros de rappel de salaire sur les primes et commission de 2011 ;

- 196 euros d'indemnité de congés payés y afférents ;

- 2.385 euros de rappel de salaire sur les primes et commission de 2012 ;

- 238,50 euros d'indemnité de congés payés y afférents ;

- 776,20 euros de rappel de salaire sur les primes et commission de 2013 ;

- 77,62 euros d'indemnité de congés payés y afférents ;

- 565,70 euros de rappel de salaire sur les primes et commission de 2014 ;

- 56,57 euros d'indemnité de congés payés y afférents ;

- 20.000 euros de rappel de salaire sur les heures supplémentaires ;

- et 2.000 euros d'indemnité de congés payés y afférents ;

Ordonne la délivrance d'une attestation Pôle Emploi et d'un bulletin de paie récapitulatif conformes à la présente décision dans le mois de la signification de celle-ci ;

Y ajoutant ;

Dit que les sommes allouées porteront intérêts au taux légal à compter du 24 mars 2016 ;

Déclare recevable la demande en paiement de dommages-intérêts pour manquement à l'obligation d'exécution de bonne foi du contrat de travail ;

Condamne la société Vérisure à verser à M. [E] [O] la somme de 1.000 euros au titre des frais irrépétibles d'appel ;

Rejette la demande de la société Vérisure au titre des frais irrépétibles d'appel ;

Condamne la société Vérisure aux dépens d'appel.

LA GREFFIÈRE LE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 6 - chambre 4
Numéro d'arrêt : 19/05316
Date de la décision : 11/01/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-01-11;19.05316 ?
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