Copies exécutoires RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 5 - Chambre 10
ARRÊT DU 09 JANVIER 2023
(n° , 11 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 21/04524 - N° Portalis 35L7-V-B7F-CDH7R
Décision déférée à la Cour : Jugement du 18 Janvier 2021 -TJ de PARIS - RG n° 18/09583
APPELANT
MONSIEUR LE DIRECTEUR RÉGIONAL DES FINANCES PUBLIQUES D'ILE DE FRANCE ET DU DÉPARTEMENT DE PARIS
Pôle Fiscal Parisien 1, Pôle Juridictionnel Judiciaire
Ayant ses bureaux [Adresse 1]
[Localité 2]
Prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège
Représenté par Me Guillaume MIGAUD de la SELARL ABM DROIT ET CONSEIL AVOCATS E.BOCCALINI & MIGAUD, avocat au barreau de VAL-DE-MARNE, toque : PC430
INTIMES
Monsieur [V] [Y]
Madame [L] [Y]
Domicilié ensemble [Adresse 4]
[Localité 3]
Prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège
Représentée par Me Arnaud GUYONNET de la SCP AFG, avocat au barreau de PARIS, toque : L0044
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 24 Octobre 2022, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposé, devant Monsieur Edouard LOOS, Président, chargé du rapport et Madame Christine SIMON-ROSSENTHAL, Présidente.
Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
Monsieur Edouard LOOS, Président
Madame Christine SIMON-ROSSENTHAL, Présidente
Madame Sylvie CASTERMANS, Magistrate honoraire exerçant des fonctions juridictionnelles
Greffier, lors des débats : Madame Sylvie MOLLÉ
ARRÊT :
- contradictoire
- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
- signé par Edouard LOOS, Président et par Sylvie MOLLÉ, Greffier présent lors du prononcé.
FAITS ET PROCEDURE
La loi n° 2007-1223 du 21 août 2007 dite loi 'TEPA' a introduit dans le code général des impots, précisément dans sa partie relative au calcul de l'impôt de solidarité sur la fortune, un article 885-O-V-bis, dit aussi 'réduction ISF-PME', prévoyant la possibilité pour les contribuables assujettis de souscrire, directement ou par l'intermédiaire d'une holding, au capital de petites et moyennes entreprises au sens du droit communautaire, non cotées sur un marché réglementé francais ou étranger, afin de bénéficier à ce titre, et dans certaines conditions, d'une réduction de leur impôt de solidarité sur la fortune égale à 75% du montant des versements opérés, dans la limite annuelle de 50 000 euros.
M. [V] [Y] et Mme [L] [Y] ont ainsi choisi de devenir investisseurs dits 'providentiels' en souscrivant au capital de la SAS Finaréa Taurus.
M. et Mme [Y] ont ainsi investi la somme de 19 200 euros le 15 juin 2009.
La société Finaréa Taurus leur a communiqué une attestation indiquant sa qualité au regard des catégories du code général des impôts et précisant que l'investissement de M. et Mme [Y] devait étre considéré comme une souscription directe a une société opérationnelle éligible en cela à une réduction d'impôt de solidarité sur la fortune (ISF) au titre de l'article 885-O-V-bis du code général des impots.
Précisémcnt, l'investissement de la société Finaréa Taurus, invoquant la qualité de holding animatrice, a été réalisé le 16 septembre 2009 avec la souscription de 40 % des actions (3 676) dans la société par actions simplifiées RSCU EUROPE au nom commercial PABOCO.
M. et Mme [Y] ont bénéficié de la réduction d'impôt prévue en application de l'article 885-O-V-bis-du code général des impôts en 2009 et 2010. La souscription directe opérée d'un montant de 19 200 euros leur a ainsi ouvert droit à une réduction d'ISF de 14 400 euros de l'année 2009 et de 16 500 euros au titre de l'année 2010.
Le 6 décembre 2012, M. et Mme [Y] ont été destinataires d'une proposition de rectification de l'imposition de solidarité sur la fortune au titre de l'année 2009 et 2010.
Le 25 janvier 2013, M. [H] [F], président de la société Finaréa et agissant en qualité de mandataire de M. et Mme [Y], a contesté la proposition de rectification du 6 décembre 2012.
Le 11 juin 2013, l'administration a répondu aux observations des contribuables et maintenu la rectification d'imposition.
Le 16 octobre 2013, l'administration fiscale a procédé à la mise en recouvrement de l'imposition pour les montants de 14 253 euros en principal, 2 395 euros au titre des intérêts de retard.
M. et Mme [Y] ont formé des réclamations contentieuses le 24 décembre 2015 qui a été rejetée implicitement par l'administration fiscale, aucune réponse n'ayant été apportée dans le délai de six mois suivant la réclamation.
Par acte d'huissier en date du 24 avril 2016, M. et Mme [Y] ont fait assigner la direction régionale des finances publiques d'Île-de-France et du département de Paris pour contester la rectification de l'imposition.
* * *
Vu le jugement prononcé le 18 janvier 2021 par le tribunal judiciaire de Paris qui a statué comme suit :
- Déboute M. [V] [Y] et Mme [L] [Y] de leur demande de communication sous astreinte des deux rescrits délivrés aux sociétés Trufile et Partech,
- Rejette la demande d'annulation pour cause d'irrégularités de la procédure de rectification fiscale initiée par proposition de rectification n°2120 en date du 6 décembre 2012,
- Infirme la décision de rejet implicite du 24 décembre 2015 du directeur général des finances publiques, agissant en la personne du directeur régional des finances publiques d'Ile de France et du département de Paris, de la réclamation contentieuse de M. [V] [Y] et de Mme [L] [Y] portant sur la proposition de rectification de leur impôt de solidarité sur la fortune des années 2009 et 2010 en date du 6 décembre 2012,
- Dit qu'il appartiendra au directeur général des finances publiques, agissant en la personne du directeur régional des finances publiques d'Ile de France et du département de Paris, de notifier la décharge du rehaussement de droits au titre de l'impôt de solidarité sur la fortune dû par M. [V] [Y] et Mme [L] [Y] pour les années 2009 et 2010 ainsi que des intérêts de retard appliques,
- Condamne le directeur général des finances publiques, agissant en la personne du directeur régional des finances publiques d'Ile de France et du département de Paris, aux dépens mentionnés à l'article R. 207-1 du livre des procédures fiscales,
- Condamne le directeur général des finances publiques, agissant en la personne du directeur régional des finances publiques d'Ile de France et du département de Paris, a payer la somme totale de 3 000 euros a M. [V] [Y] et Mme [L] [Y] au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
Vu l'appel déclaré le 9 mars 2021 par le Directeur régional des finances publiques d'Ile de France et du département de Paris,
Vu les dernières conclusions signifiées le 23 septembre 2022 par le Directeur régional des finances publiques d'Ile de France et du département de Paris,
Vu les dernières conclusions signifiées le 27 janvier 2022 par Madame [L] [Y] et Monsieur [V] [Y] ,
Le Directeur régional des finances publiques d'Ile de France et du département de Paris demande à la cour de statuer comme suit :
Vu l'article 885-0 V bis du code général des impôts et l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales ;
- Confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a débouté le contribuable de sa demande de communication des rescrits et rejeté la demande d'annulation pour cause d'irrégularité de la procédure de rectification ;
- Infirmer le jugement pour le surplus ;
Statuant à nouveau :
- Confirmer la décision de rejet prise à l'encontre du contribuable
- Reconnaître le rappel fondé en droit et en fait pour ce qui concerne l'année 2009 ;
En conséquence,
- Rejeter toutes les demandes du contribuable ;
- Condamner le contribuable aux entiers dépens d'appel, dont distraction pour ces derniers au profit de l'avocat soussigné aux offres de droit ;
- Condamner le contribuable à verser à l'Etat la somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Madame [L] [Y] et Monsieur [V] [Y] demandent à la cour de statuer comme suit :
Vu les articles 107 et 108-3, 267 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne, la décision n° 596/A/2007 de la Commission européenne ayant validé le dispositif issu de la loi n°2007-1223 du 21 août 2007 au regard du droit des aides d'État, les articles 6-1 de la CEDH et 1er-1 du Premier protocole additionnel à la CEDH, les articles L. 55, L 57, L. 76 B, L. 80 A, L. 80 B, L. 143 du livre des procédures fiscales, 3, 8, 10, 11, 132, 133, 134, 138, 142, 143, 144, 699, 700, 775 et 916 du code de procédure civile, L. 131-1 et suivants du code des procédures civiles d'exécution, 1134, 1165, 1842 du code civil, 885-0-V-bis, 885 I ter, 1740 A, 299 septies et 350 terdecies annexe III du code général des impôts,
Liminairement, déclarer l'appel dépourvu d'effet dévolutif sur le fondement de l'article 562 du code de procédure civile.
- Confirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions ;
En tout état de cause :
- Déclarer irrégulière la procédure fiscale préalable à la présente procédure contentieuse ;
- En conséquence, annuler ladite procédure fiscale et prononcer la décharge des rehaussements ;
- Rejeter comme étant infondée la décision de rehaussement puis de mise en recouvrement prise à l'encontre des concluants ;
- En conséquence, prononcer la décharge des rehaussements ;
Le cas échéant :
- Ordonner la communication par la Direction générale des finances publiques, sous astreinte provisoire, pendant deux mois, de 1 000 euros par jour de retard à compter du huitième jour suivant la signification de la décision à intervenir, des rescrits Truffle et Partech dans leur version originale ou expurgée des éléments prétendument confidentiels ;
- Ordonner que, passé ce délai de deux mois, la partie qui y a intérêt pourra saisir le juge de céans d'une demande de liquidation de l'astreinte provisoire et fixation de l'astreinte définitive ;
En cas de difficulté d'interprétation du droit de l'Union européenne, poser à la cour de justice de l'Union européenne des questions préjudicielles, dans les termes suivants ;
« La décision de la Commission européenne réservant la réduction ISF-PME aux PME en phases liminaires de développement doit-elle être interprétée comme interdisant la réduction aux investissements dans des holdings animatrices ne détenant pas encore de participation à la date de la souscription voire dont l'actif n'est pas encore principalement composé de titres de participations ' »
« Le droit des aides d'Etat (articles 107 et 108 du TFUE, règlement n° 659/1999 du Conseil du 22 mars 1999 portant modalités d'application de l'article 93 du Traité CE, règlement n° 994/98 du Conseil du 7 mai 1998 sur l'application des articles 92 et 93 du Traité instituant la Communauté européenne à certaines catégories d'aides d'Etat horizontales) doit-il être interprété comme interdisant l'édiction de rescrits accordant un avantage fiscal aux seuls souscripteurs à certains véhicules d'investissement dans les PME ' Pareil rescrit ne doit-il pas donner lieu à notification préalable ' » ;
« En présence d'un contribuable revendiquant l'application à son bénéfice de la norme fiscale énoncée dans un rescrit délivré à un autre contribuable, le principe d'effectivité du droit de l'Union européenne, ensemble la réglementation des aides d'État (articles 107 et 108 du TFUE, règlement n° 994/98 du Conseil du 7 mai 1998 sur l'application des articles 92 et 93 du Traité instituant la Communauté européenne à certaines catégories d'aides d'État horizontales) et les principes de libertés de circulation des capitaux, d'établissement et de prestations de services, ne commandent-ils pas au juge national d'ordonner la production du rescrit litigieux ' ».
- Condamner la Direction générale des finances publiques au paiement de 10 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
SUR CE, LA COUR
a) Sur l'effet dévolutif de la déclaration d'appel,
M. et Mme [Y] font valoir, au visa des articles 562 et 901 du code deprocédure civile, que la déclaration d'appel n'a pas opéré d'effet dévolutif au motif qu'elle ne contient pas les chefs du jugement critiqué. L'appelant ne peut se prévaloir d'une pièce complétant sa déclaration d'appel qu'à titre exceptionnel et dans la seule hypothèse oùcelle-ci dépasserait les 4080 caractères permis par le RPVA. L' intimée affirme qu' elle
n'a pas reçu l'annexe de la déclaration d'appel et estime que les demandes de l'appelant
doivent être déclarées irrecevables.
La direction régionale des finances publiques fait valoir qu'il ne résulte pas des textes précités que les chefs de jugement critiqués doivent être visés dans le formulairedématérialisé du RPVA. Elle affirme que sa déclaration d'appel qui comprend une annexe dont il est expressément indiqué qu'elle fait corps avec elle, est conforme à l'article 901 du code de procédure civile.
Ceci étant exposé l'article 901 est désormais ainsi rédigé :
'La déclaration d'appel est faite par acte, comportant le cas échéant une annexe, contenant,
outre les mentions prescrites par les 2° et 3° de l'article 54 et par le cinquième alinéa de
l'article 57 et à peine de nullité :
1° La constitution de l'avocat de l'appelant ;
2° L'indication de la décision attaquée ;
3° L'indication de la cour devant laquelle l'appel est porté ;
4° Les chefs du jugement expressément critiqués auxquels l'appel est limité, sauf si l'appel
tend à l'annulation du jugement ou si l'objet du litige est indivisible.
Elle est signée par l'avocat constitué. Elle est accompagnée d'une copie de la décision. Elle
est remise au greffe et vaut demande d'inscription au rôle'.
Cette version résulte du décret du 25 février 2022 n° 2022-245 qui précise que cesnouvelles dispositions sont applicables aux instances en cours.
Il s'en déduit que la déclaration d'appel du directeur général des finances publiques d'Ile de France le 9 mars 2021 comportant la mention 'Appel limité aux chefs du jugement expressément critiqués selon note jointe aux présentes et faisant corps avec la déclaration d'appel ' est parfaitement régulier et, contrairement à ce que soutiennent les intimés, emporte effet dévolutif concernant 'les chefs du jugement expressément critiqués aux quels l'appel est limité' conformémet aux termes de l'article 901 précité .
Le moyen ainsi soulevé doit être écarté.
b) Sur la régularité de la procédure de rehaussement,
La direction régionale des finances publiques fait valoir, au visa de l'article L.57 du livre des procédures fiscales (LPF), que la proposition de rectification a permis aux contribuables d'exercer leurs droits de contestation et de défense. Elle ajoute que les informations, sur lesquelles se base la proposition de rectification, ressortent de la vérification de comptabilité de la société Finaréa Taurus au regard des dispositions de l'article 885-0 V bis du CGI. Les contribuables en sont actionnaires et disposaient d'informations privilégiées sur son fonctionnement. Aucune disposition législative ou réglementaire ne l'oblige à lister les documents qu'elle cite dans la proposition de rectification. La réponse aux observations des contribuables démontre que l'obligation de motivation prévue parl'article L. 57 du LPF a parfaitement été respectée ; l'administration a répondu aux critiques des contribuables sur le prétendu manque de cohérence de l'action de l'administration.
M. et Mme [Y] soutiennent sur le fondement des articles L. 57 et L. 76 B du LPF et de l'article 47 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne, que
l'administration fonde ses redressements sur des éléments qu'elle a recueillis en dehors du
dossier des contribuables alors qu'elle aurait dû conformément au principe du respect du
contradictoire, d'égalité des armes, et de loyauté, communiquer à l'appui du redressement.
La proposition de rectification ne dresse pas la liste des documents cités et l'origine des
pièces est inexacte. L'administration fiscale n'a pas respecté l'obligation renforcée de motivation, qui pesait sur elle, dans sa réponse aux contribuables.
Ceci étant exposé l'article L57 du livre des procédures fiscales est ainsi rédigé :
'L'administration adresse au contribuable une proposition de rectification qui doit être
motivée de manière à lui permettre de formuler ses observations ou de faire connaître son
acceptation. (...)
Lorsque l'administration rejette les observations du contribuable sa réponse doit également
être motivée.'
L'article L76 B est lui même ainsi rédigé :
'L'administration est tenue d'informer le contribuable de la teneur et de l'origine des renseignements et documents obtenus de tiers sur lesquels elle s'est fondée pour établir l'imposition faisant l'objet de la proposition prévue au premier alinéa de l'articleL.57 ou de la notification prévue à l'article L.76. Elle communique, avant la mise en recouvrement, une copie des documents susmentionnés au contribuable qui en fait la demande'.
La proposition de rectification adressée à M. et Mme [Y] le 6 décembre 2012 mentionne les faits constatés lors de la vérification de la comptabilité de la société Finaréa Taurus , constituée le 7 avril 2009 et sa souscription au capital de la société RSCU Europe à hauteur de 999 872 euros représentant 40% de son capital , le reste étant détenu par les associés historiques
(M. [E] et M. [R] ).
Sont exposées les relations de la société Finaréa Taurus avec sa filiale RSCU Europe au vu des rapports de gestion de la société Finaréa Taurus au titre des execcices clos le 30 juin 2010 et l'analyse qui en a été faite.
M. et Mme [Y] ne précisent pas les pièces recueillies auprès de tiers autres que celles émanant de la société Finaréa Taurus dont ils sont associés qui auraient dû être communiquées .L'administration n'est d'autre part pas tenue d'adresser une liste spécifique des documents qu'elle invoque dés lors qu'ils sont identifiés dans le contenu de la proposition de rectification.
Dans sa réponse du 11 juin 2013 l'administration fiscale qui maintient sa position réplique point par point et de manière motivée aux contestations des contribuables .
Il se déduit de ce qui précède que le jugement déféré doit être confirmé en ce qu'il
a dit la procédure régulière.
c) Sur l'éligibilité des souscriptions à la réduction.
La direction régionale des finances publiques fait valoir, au visa de l'article b du1 du I de l'article 885-0 V bis du CGI, que la société Finarea Taurus n'exerçait pasd'activité industrielle, commerciale, artisanale, agricole ou libérale durant l'annéelitigieuse. Le bilan de la société clos le 30 juin 2010 montre que son actif brut était composé de participations, de valeurs mobilières, de disponibilités et d'autres actifs. La société Finarea ne détient pas au moins 90% de son actif brut comptable en titres des sociétés opérationnelles. Les contribuables ne produisent aucun document probant de nature à démontrer que la société Finarea impulse la stratégie des sociétés opérationnelles et encore moins qu'elle en contrôle la mise en 'uvre.
Les époux [Y] soutiennent que la société Finaréa Taurus a eu pour objet social, dès sa création, la prise de participation dans de jeunes PME, l'animation de ces participations, c'est-à-dire l'implication dans la gestion desdites PME. La société Finaréa Taurus a imposé aux fondateurs de PME : un modèle de statuts-types en contrepartie de ses prises de participation ; une transformation en Sas desdites PME ; un contrat d'animation détaillant les prestations fournies moyennant rémunération aux PME cibles ; un pacte d'actionnaires type. Il n'est pas possible pour le président, quelle que soit sa quote-part du capital social de la PME, de décider d'une dépense sans l'aval de Finaréa.
Ceci étant exposé l'article 885-O V bis du code général des impôts, dans sa rédaction applicable au litige, dispose que :
'Le redevable peut imputer sur l'impôt de solidarité sur la fortune 75 % des
versementseffectués au titre de souscriptions au capital initial ou aux augmentations de
capital desociétés, en numéraire ou en nature par apport de biens nécessaires à l'exercice
de l'activité, à l'exception des actifs immobiliers et des valeurs mobilières, ainsi qu'au titre
de souscriptions dans les mêmes conditions de titres participatifs dans des sociétés
coopératives ouvrières de production définies par la loi n° 78-763 du 19 juillet 1978 dans
d'autres sociétés coopératives régies par la loi n° 47-1775 du 10 septembre 1947portant statut de la coopération. Cet avantage fiscal ne peut être supérieur à 50 000euros. La société bénéficiaire des versements mentionnée au premier alinéa doitsatisfaire aux conditions suivantes :
a) Etre une petite et moyenne entreprise au sens de l'annexe I au règlement (CE) n° 800/2008 de la Commission du 6 août 2008 déclarant certaines catégories d'aides compatibles avec le marché commun en application des articles 87 et 88 du traité
(Règlement général d'exemption par catégorie) ;
b) Exercer exclusivement une activité industrielle, commerciale, artisanale, agricole ou libérale, à l'exclusion des activités de gestion de patrimoine mobilier définie à l'article 885 O quater , notamment celles des organismes de placement en valeurs mobilières, et des activités de gestion ou de location d'immeubles. Cette condition n'est pas exigée pour les
entreprises solidaires au sens de l'article L.443-3-2 du code du travail qui exercent une activité de gestion immobilière à vocation sociale ; (...)
f) Etre en phase d'amorçage, de démarrage ou d'expansion au sens des lignes directrices
concernant les aides d'Etat visant à promouvoir les investissements en capital-
investissement dans les petites et moyennes entreprises (2006 / C 194 / 02) ;
g) Ne pas être qualifiable d'entreprise en difficulté au sens des lignes directrices communautaires concernant les aides d'Etat au sauvetage et à la restructuration d'entreprises en difficulté ou relever des secteurs de la construction navale, de l'industrie houillère ou de la sidérurgie ;
h) Le montant des versements mentionnés au premier alinéa ne doit pas excéder le plafond
fixé par décret. Ce plafond ne peut excéder 1, 5 million d'euros par période de douze mois.
2.L'avantage fiscal prévu au 1 s'applique également aux souscriptions effectuées par des
personnes physiques en indivision. Chaque membre de l'indivision peut bénéficier de l'avantage fiscal à concurrence de la fraction de la part de sa souscription représentativede
titres reçus en contrepartie de souscriptions au capital de sociétés vérifiant les conditions
prévues au 1.
3.L'avantage fiscal prévu au 1 s'applique également aux souscriptions en numéraire au capital d'une société satisfaisant aux conditions suivantes :
a) La société vérifie l'ensemble des conditions prévues au 1, à l'exception de celles prévues
aux b, f et h ;
b) La société a pour objet exclusif de détenir des participations dans des sociétés
exerçant une des activités mentionnées au b du 1 ;
c) La société ne compte pas plus de cinquante associés ou actionnaires ;
d) La société a exclusivement pour mandataires sociaux des personnes physiques ;
e) La société n'accorde aucune garantie en capital à ses associés ou actionnaires en
contrepartie de leurs souscriptions ni aucun mécanisme automatique de sortie au terme de
cinq ans.
(...)
II.-1. Le bénéfice de l'avantage fiscal prévu au I est subordonné à la conservation par le redevable des titres reçus en contrepartie de sa souscription au capital de la société jusqu'au
31 décembre de la cinquième année suivant celle de la souscription.
La condition relative à la conservation des titres reçus en contrepartie de la souscription
au capital s'applique également à la société mentionnée au premier alinéa du 3 du I et à l'indivision mentionnée au 2 du I. (...)'
Il doit être relevé que l'article précité ne désigne pas les holdings comme étant les
bénéficiaires de l'avantage fiscal. Cette possibilité est prévue par la doctrine administrative
et l'instruction 7 -S- 3-08 selon laquelle la holding animatrice éligible à l'avantage fiscal
est celle qui participe activement à la politique de son groupe et au contrôle de ses filiales.
Dans la présente espèce, la société la société Finaréa Taurus a pris part à l'augmentation en capital de la société RSCU Europe le 16 septembre 2009 pour 40% de ses parts.
Pour la période antérieure au 16 septembre 2009 la société Finaréa Taurus ne peut pas revendiquer le statut d'holding animatrice puisque, ne détenant aucune participation dans le capital de la société RSCU Europe, le rapport holding/filiale était dépourvu d'existence.
Pour la période postérieure comprise entre le 17 septembre 2009 et le 31 décembre 2010, la société Finaréus Taurus doit justifier d'actions concrètes sans s'arrêter aux mentions littérales contenues dans son objet social , dans le pacte d'associés qu'elle a conclu avec trois personnes physiques dénommées 'entrepreneurs' ou dans le contrat d'animation conclu avec la société RSCU Europe .
Le rapport de gestion de la société Finaréa Taurus concernant l'exercice clos le 30 juin 2010 rappelle les activités développées par la société RSCU Europe (pabobo) mai ne comporte aucune information sur les interventions de la holding dans la stratégie et l'animation de sa filiale. Les conseil de direction de la société RSCU Europe des 4 mai 2010, 30 juin 2010 et 6 janvier 2011 comprennent un membre de la société Finaréa Taurus en qualité d'associé dont les observations et interventions portent sur des éventuelles améliorations ponctuelles à apporter sans véritable proposition ni incidence sur la stratégie de la sociéré ou sur une politique de groupe. Les quelques courriers électronique versés aux débats sont totalement insusceptibles de caractériser un travail d'animation.
Il se déduit de ce qui précède que la société Finaréa Taurus ne remplit pas les conditions de la holding animatrice éligible à l'avantage fiscal sollicité.
Aucune décision contraire de l'administration n'est susceptible de lui être opposée.
Le jugement déféré doit être infirmé de ce chef.
d) Sur la contrariété au droit de l'Union européenne
La direction régionale des finances publiques fait valoir que le dispositif de l'article 885-0 V bis du code général des impôts n'est pas contraire au droit de l'Union européenne. Elle ajoute que le dispositif ne fausse pas la concurrence au niveau de la fourniture du marché de capital-investissement, au sens des articles 107 et 108 du TFUE,
au motif que, selon la Commission, les risques de distorsion ou d'éviction de la concurrence pouvant découler du dispositif étaient limités. Au surplus, elle soutient que l'issue du litige ne dépend pas de la réponse aux questions préjudicielles posées par les contribuables. S'agissant des rescrits, dont la communication est sollicitée par les contribuables, elle soutient qu'ils ne constituent ni des prises de position de portée générale
ni des aides d'État, que leur communication serait sans intérêt pour la résolution du litige,
lequel repose sur l'appréciation de circonstances de faits et que le secret professionnel s'oppose à leur communication.
M. et Mme [Y] estiment que les rehaussements dont ils ont fait l'objet seraient contraires au droit de l'Union européenne ce qui pourrait justifier trois questions préjudicielles :
- La décision de la Commission européenne réservant la réduction ISF-PME aux PME en phases liminaires de développement doit-elle être interprétée comme interdisant la réduction aux investissements dans des holdings animatrices ne détenant pas encore de participation à la date de la souscription voire dont l'actif n'est pas encore principalement
composé de titres de participations '
-Le droit des aides d'État doit-il être interprété comme interdisant l'édiction de rescritsaccordant un avantage fiscal aux seuls souscripteurs à certains véhicules d'investissement dans les PME ' Pareil rescrit ne doit-il pas donner lieu à notification préalable '
- En présence d'un contribuable revendiquant l'application à son bénéfice de la norme fiscale énoncée dans un rescrit délivré à un autre contribuable, le principe d'effectivité du droit de l'Union européenne, ensemble la réglementation des aides d'État et les principes de libertés de circulation des capitaux, d'établissement et de prestations de services, ne commandent-ils pas au juge national d'ordonner la production du rescrit litigieux '
Ceci étant exposé, la demande de communication des rescrits Truffle et Partech doit être écartée puisque l'animation de la holding s'apprécie concrètement en tenant compte des pièces versées aux débats et la position fiscale prise à l'occasion de ces procédures distinctes ne sera pas nécéssairement transposable à la situation spécifique de la société Finéréa Taurus.
Il n'y a dès lors pas lieu d'ordonner la communication desdits rescrits ni de poser de questions préjudicielles relatives à leur notification préalable ou à leur production.
Par décision du 11 mars 2008 la commission européenne a répondu que la loi française TEPA d'août 2007 dans sa partie relative à la réduction d'ISF pour les contribuables investissant dans une PME afin de leur permettre d'obtenir des financements nécessaires au démarrage de leur activité ou à leur développement étaitconstitutive d'une aide compatible avec le traité CE, en application de son article 87 (3).D'autre part laquestion relative à l'éligibilité de la réduction fiscale aux holdingsanimatrices ne détenant pas encore de participation relève de l'application par le jugenational de l'article 885-O V
bis du code général des impôts sans nécessité de saisir la CJUE d'une demande d'interprétation de la décision de la commision européenne précitée .
Les demandes relatives aux questions préjudicielles doivent ainsi être écartées.
e ) Sur l'article 700 du code de procédure civile.
Une indemnité doit être l'appelant sur ce fondement.
PAR CES MOTIFS
La cour,
DIT régulière la déclaration d'appel ;
CONFIRME le jugement déféré en ce qu'il a dit la procédure régulière et rejeté la demande
de communication des rescrits ;
INFIRME le jugement déféré pour le surplus ;
Statuant de nouveau :
DÉBOUTE M. [V] [Y] et Mme [L] [Y] de leur contestation ;
CONDAMNE solidairement M. [V] [Y] et Mme [L] [Y] aux dépens
et accorde à la Selarl Boccalini-Migaud, avocat, le bénéfice des dispositions de l'article
699 du code de procédure civile ;
CONDAMNE solidairement M. [V] [Y] et Mme [L] [Y] à verser au directeur régional des finances publiques d'Ile-de-France et du département de Paris la somme de 2 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;
REJETTE toutes autres demandes.
LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,
S.MOLLÉ E.LOOS