Copies exécutoires RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 1 - Chambre 9
ARRET DU 09 JANVIER 2023
(N° /2023, 4 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 19/00662 - N° Portalis 35L7-V-B7D-CBEHV
Décision déférée à la Cour : Décision du 13 Novembre 2019 -Bâtonnier de l'ordre des avocats de PARIS - RG n° 211/318067
APPELANT
Maître [C] [W]
[Adresse 3]
[Adresse 3]
Comparant en personne
INTIMEES
Madame [Z] [U]
[Adresse 2]
[Adresse 2]
Madame [T] [R]
[Adresse 1]
[Adresse 1]
Madame [N] [E]
[Adresse 4]
[Adresse 4]
[Adresse 4]
Représentés par Me Rémi ANTOMARCHI, avocat au barreau de PARIS, toque : C1289
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions des articles 786 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 14 Novembre 2022, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposé, devant Mme Claire DAVID, magistrat honoraire désignée par décret du 17 août 2020 du Président de la République aux fins d'exercer des fonctions juridictionnelles, entendue en son rapport.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
M Michel RISPE, Président de chambre
Mme Laurence CHAINTRON, Conseillère
Mme Claire DAVID, Magistrat honoraire
Greffier, lors des débats : Mme Marylène BOGAERS
ARRÊT :
- contradictoire
- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
- signé par M Michel RISPE, Président de chambre et par Mme Eléa DESPRETZ, Greffière présente lors du prononcé.
****
Vu les articles 174 et suivants du décret n°91-1197 du 27 novembre 1991, l'article 10 de la loi du 31 décembre 1971 modifiée par la loi du 28 mars 2011 et les articles 10 et suivants du décret n°2005-790 du 12 juillet 2005 ;
Vu le recours formé par Maître [W] auprès du Premier président de la cour d'appel de Paris, par lettre recommandée avec accusé de réception en date du 16 décembre 2019, à l'encontre de la décision rendue le 13 novembre 2019 par le bâtonnier de l'Ordre des avocats du barreau de Paris, qui a :
- fixé à la somme de 15 150 euros HT le montant total des honoraires dûs par les consorts [U] [R],
- constaté qu'un paiement de 18 750 euros HT a été effectué,
- dit en conséquence que Maître [W] devra restituer aux consorts [U] [R] la somme de 3 600 euros HT outre la TVA au taux de 20 % ;
Vu les conclusions régulièrement notifiées et soutenues à l'audience, aux termes desquelles Maître [W] sollicite l'infirmation de la décision déférée, la mise hors de cause de Madame [R], la fixation de ses honoraires à zéro euro qu'il [U] à l'audience à 22 488 euros TTC et la condamnation des trois défenderesses à 4 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
Vu les conclusions régulièrement notifiées et soutenues à l'audience par Madame [R], Madame [U] et Madame [E] qui demandent à la cour de voir infirmer la décision du bâtonnier, de fixer les honoraires de Maître [W] à 2 400 euros TTC, de constater qu'elles ont réglé 22 488 euros TTC et de condamner Maître [W] à leur rembourser la différence ;
SUR CE,
La décision du bâtonnier a été notifiée à par lettre recommandée avec accusé de réception reçue le 15 novembre 2019 ; en conséquence, le recours introduit le 16 décembre 2019 est recevable, dès lors que le 15 décembre 2019 tombait un dimanche.
Maître [W] sollicite de la cour qu'elle dise que Madame [T] [R] doit être 'privée d'un quelconque bénéfice de la présente instance pour défaut de cause'.
Cette demande ne semble pas poser de difficulté, dès lors que Madame [R] elle-même, dans ses écritures, reconnaît avoir mis fin à la mission de Maître [W] au motif qu'elle n'était pas en mesure de régler ses honoraires.
En conséquence, les parties s'accordent pour reconnaître que les clientes de Maître [W] sont Madame [U] et Madame [E] et il convient de mettre Madame [R] hors de cause.
Maître [W] a été saisi dans le cadre d'un litige successoral en date du 4 novembre 2013 et les clientes ont dessaisi leur avocat le 30 janvier 2019.
Les parties n'ayant pas signé de convention, les honoraires revenant à l'avocat doivent être fixés en application des critères de l'article 10 de la loi du 31 décembre 1971 modifiée par la loi du 10 juillet 1991, et de l'article 10 du décret du 12 juillet 2005, aux termes desquels les honoraires sont fixés à défaut de convention entre l'avocat et son client, "selon les usages, en fonction de la situation de fortune du client, de la difficulté de l'affaire, des frais exposés par l'avocat, de la notoriété et des diligences de celui-ci".
La fiche de diligences produite par Maître [W] dressée le 21 juin 2019 fait état de 300 entretiens téléphoniques, de plusieurs centaines de courriers électroniques, d'un nombre d'heures consacrées au dossier 'très très au-delà de 15 heures par an sur six années consécutives sur la base d'un taux horaire de 200 euros HT'.
Certaines notes d'honoraires produites aux débats sont les suivantes :
- la note du 8 septembre 2016 est émise pour la somme de 2 500 euros HT,
- la note du 6 mars 2017 est émise pour la somme de 2 500 euros HT,
- la note du 28 avril 2017 est émise pour 1 250 euros HT,
- la note du 10 novembre 2017 est émise pour 3 000 euros HT,
- la note du 7 juin 2018 est émise pour 1 500 euros HT, ce qui fait un total de 10 750 euros HT, soit 12 900 euros TTC.
Les autres factures ne sont pas produites aux débats mais ont été réglées par les clientes.
Par contre, les factures n'indiquent ni le temps consacré au dossier, ni le détail des diligences effectuées, ni le taux horaire pratiqué.
Cependant si la facture doit respecter les dispositions de l'article L.441-3 du code de commerce et contenir les diligences effectuées par l'avocat et le temps passé à chaque diligence, une facture mal libellée ne dispense pas le client de régler des honoraires à son avocat que le juge de l'honoraire appréciera alors en fonction des diligences justifiées et en fonction d'un taux horaire qu'il déterminera lui-même si celui-ci n'est pas précisé.
Maître [W] produit un constat d'huissier dressé le 3 novembre 2022 qui a relevé sur six années de travail 261 documents portant le nom de [R], 380 mails et 288 fichiers portant le nom du dossier.
Maître [W] justifie en outre 26 heures de médiation, qui sont confirmées par la médiatrice, qu'il facture à hauteur de 5 200 euros HT, soit 6 240 euros TTC.
Il résulte de ce qui précède que les diligences effectuées et justifiées par Maître [W] ont pu raisonnablement prendre les 94 heures de travail qu'il a facturées au total.
Le juge de l'honoraire ne peut pas connaître, même à titre incident, de la question de la responsabilité de l'avocat en raison d'un manquement à son devoir de conseil sur les conditions de sa rémunération et réduire de ce fait le montant des honoraires.
Il est certain que Maître [W] n'a jamais précisé le taux horaire qu'il a facturé à ses clientes, mais le taux horaire fixé à 200 euros HT est parfaitement raisonnable, en application des critères de l'article 10 de la loi du 31 décembre 1971.
Il doit être précisé à ce stade qu'il n'entre pas dans les pouvoirs du juge de l'honoraire de se prononcer sur une demande tendant à la réparation, par la voie de la diminution des honoraires ou de l'allocation de dommages et intérêts, de fautes professionnelles ou déontologiques éventuelles de l'avocat, telles qu'elles sont évoquées par Madame [U] et Madame [E] qui ne peuvent engager la responsabilité de l'avocat que devant le tribunal judiciaire.
Au vu de tout ce qui précède, la décision déférée doit être infirmée et il doit être considéré que la somme de 22 488 euros TTC réglée par Madame [U] et Madame [E] correspond aux honoraires dûs à Maître [W].
L'équité commande de rejeter la demande de Maître [W] sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
Compte-tenu du règlement des honoraires de Maître [W], chaque partie conservera la charge de ses dépens.
PAR CES MOTIFS
Statuant en dernier ressort, publiquement par mise à disposition au Greffe et par décisison contradictoire
Met Madame [R] hors de cause,
Infirme la décision déférée,
Statuant à nouveau,
Fixe les honoraires revenant à Maître [W] à la somme de 22 488 euros TTC,
Constate que Madame [U] et Madame [E] ont réglé cette somme,
Déboute Maître [W] de sa demande fondée sur l'article 700 du code de procédure civile,
Laisse à chaque partie la charge de ses dépens,
Dit qu'en application de l'article 177 du décret n° 91-1197 du 27 novembre 1991, l'arrêt sera notifié aux parties par le greffe de la cour par lettre recommandée avec accusé de réception.
LA GREFFIERE LE PRESIDENT DE CHAMBRE