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04/01/2023 | FRANCE | N°19/07407

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 6 - chambre 3, 04 janvier 2023, 19/07407


Copies exécutoires REPUBLIQUE FRANCAISE

délivrées le : AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS



COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 3



ARRET DU 04 JANVIER 2023



(n° , 14 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 19/07407 - N° Portalis 35L7-V-B7D-CAH3A



Décision déférée à la Cour : Jugement du 14 Mai 2019 -Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de MELUN - RG n° 14/00422



APPELANTE



Madame [A] [W]

[Adresse 1]

[Localité 5]

Représenté

e par Me Anne LEVEILLARD, avocat au barreau de MEAUX



INTIMEES



Me [P] [J] (SCP [J] [P]) - Commissaire à l'éxécution du plan de la SAS CLINIQUE SAINT JEAN-L'ERMITAGE

[Adresse ...

Copies exécutoires REPUBLIQUE FRANCAISE

délivrées le : AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 3

ARRET DU 04 JANVIER 2023

(n° , 14 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 19/07407 - N° Portalis 35L7-V-B7D-CAH3A

Décision déférée à la Cour : Jugement du 14 Mai 2019 -Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de MELUN - RG n° 14/00422

APPELANTE

Madame [A] [W]

[Adresse 1]

[Localité 5]

Représentée par Me Anne LEVEILLARD, avocat au barreau de MEAUX

INTIMEES

Me [P] [J] (SCP [J] [P]) - Commissaire à l'éxécution du plan de la SAS CLINIQUE SAINT JEAN-L'ERMITAGE

[Adresse 6]

[Localité 7]

Représenté par Me Valérie PLANEIX, avocat au barreau de PARIS, toque : J083

SAS CLINIQUE SAINT JEAN-L'ERMITAGE représentée par son Président en exercice, domicilié en cette qualité au siège social

[Adresse 3]

[Localité 4]

Représentée par Me Valérie PLANEIX, avocat au barreau de PARIS, toque : J083

ASSOCIATION UNÉDIC DÉLÉGATION AGS CGEA ÎLE-DE-FRANCE EST

Association déclarée, représentée par sa Directrice, dûment habilitée [E] [G],

[Adresse 2]

[Localité 8]

Représentée par Me Claude-marc BENOIT, avocat au barreau de PARIS, toque : C1953

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 09 Novembre 2022, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Mme Véronique MARMORAT, Présidente de chambre, chargée du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, entendu en son rapport, composée de :

Madame Véronique MARMORAT, Présidente de chambre

Madame Fabienne ROUGE, Présidente de chambre Madame Anne MENARD, Présidente de chambre

Greffier, lors des débats : Mme Frantz RONOT

ARRÊT :

- contradictoire

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Véronique MARMORAT, Présidente de chambre et par SEBBAK Sarah greffière stagiaire en préaffectation à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Exposé du litige

Embauchée par la société Clinique Saint Jean-l'Ermitage le 1er janvier 2003 en qualité de directrice, madame [A] [O] épouse [W], née le 28 juin 1957, a été licenciée le 2 avril 2014 pour faute grave qui serait constituée par la découverte fortuite d'un appartement à [Adresse 15] loué au frais de la société Clinique Saint Jean-L'Ermitage (loyer de 820 euros ) et de l'achat d'une tablette Ipad, puis des frais d'installation, d'aménagement de ce logement pour un montant de 6 300 euros, d'un avantage en nature de 600 euros par mois à compter du 1er novembre 2013, des règlements de dépenses personnelles avec la carte bancaire de la société Clinique Saint Jean-L'Ermitage (Occitane pour 1 641,50 euros, déplacements et hôtelleries ), l'octroi de jours RTT pour un montant total de 7 595 euros, l'octroi d'un contrat à durée déterminée pour sa fille [R] [W] au poste d'économe avec un salaire de 2 570 euros soit d'un montant 40 % supérieur à la grille conventionnelle, l'octroi de deux prêts à madame [K] et de 256 heures supplémentaires pour un coût de 26 272 euros ainsi qu'un complément de salaire à monsieur [S].

Le 14 mai 2014, la salariée a saisi en contestation le Conseil des prud'hommes de Melun lequel par jugement du 14 mai 2019, a constaté le bien-fondé du licenciement pour faute grave, débouté madame [W] de l'ensemble de ses demandes, mis hors de cause l'AGS et condamné la salariée aux dépens et à verser à la société Clinique Saint Jean-L'Ermitage la somme de 3000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Parallèlement à cette procédure prud'homale, une procédure d'instruction ouverte pour abus de biens sociaux, abus de confiance, recel le 28 novembre 2014 a été close le 29 septembre 2017 par une ordonnance de non-lieu, confirmée par arrêt rendu par la Cour d'appel de Paris le 28 juin 2018. De même, le 8 janvier 2018, une procédure de redressement judiciaire a été ouverte à l'égard de la société Clinique Saint Jean-l'Ermitage par le Tribunal de commerce d'Evry lequel par jugement du 18 juin 2018 a arrêté un plan de redressement judiciaire.

Madame [W] a interjeté appel du jugement du Conseil des prud'hommes le 24 juin 2019.

Par conclusions signifiées par voie électronique le 28 février 2020, auxquelles il convient de se reporter en ce qui concerne ses moyens, madame [W] demande à la cour qu'elle infirme la décision du Conseil des prud'hommes dans toutes ses dispositions, statuant de nouveau, de juger que le licenciement est dépourvu de cause réelle et sérieuse et qu'il est vexatoire et de

Condamner l'employeur aux dépens en première instance et en cause d'appel ainsi que les frais éventuels d'exécution et à lui verser les sommes suivantes :

titre

montant en euros

indemnité compensatrice de préavis

congés payés

90 544,74

9 054,47

indemnité conventionnelle de licenciement

132 044,40

dommages et intérêts pour rupture vexatoire

50 000,00

dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse

362 000,00

article 700 du code de procédure civile

6 000,00

Ordonner à la société Clinique Saint Jean-L'Ermitage de lui remettre les documents de fin de contrat conformes (certificat de travail, attestation Pôle Emploi, bulletin de paie récapitulatif).

Par conclusions signifiées par voie électronique le 19 mai 2020, auxquelles il convient de se reporter en ce qui concerne ses moyens, la société Clinique Saint Jean-l'Ermitage et la scp [J] [P], mandataire judiciaire pris en sa qualité de commissaire à l'exécution du plan de cette société demandent à la cour de confirmer le jugement, de débouter madame [W] de toutes ses demandes, de la condamner aux dépens et à lui verser la somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Par conclusions signifiées par voie électronique le 13 septembre 2019, auxquelles il convient de se reporter en ce qui concerne ses moyens, l'association Unédic délégation Ags Cgea Île-de-France Est demande à la cour d'être mise hors de cause et, à titre subsidiaire, de confirmer le jugement entrepris, de débouter madame [W] de ses demandes et à titre très subsidiaire de fixer au passif de la liquidation les créances retenues, de dire l'arrêt opposable dans les termes et conditions de l'article L 3253-19 du code du travail et dans la limite du plafond 6 toutes créances brutes confondues, exclure de cette opposabilité la créance éventuellement fixée au titre de l'article 700 du code de procédure civile et dire ce que de droit quant aux dépens sans qu'ils puissent être mis à sa charge.

La cour se réfère, pour un plus ample exposé des faits, de la procédure, des moyens et des prétentions des parties, à la décision déférée et aux dernières conclusions échangées en appel.

Motifs

Sur le licenciement

Principe de droit applicable :

Aux termes des dispositions de l'article L 1232-1 du Code du travail, tout licenciement motivé dans les conditions prévues par ce code doit être justifié par une cause réelle et sérieuse ; en vertu des dispositions de l'article L 1235-1 du même code, en cas de litige, le juge, à qui il appartient d'apprécier la régularité de la procédure suivie et le caractère réel et sérieux des motifs invoqués par l'employeur, forme sa conviction au vu des éléments fournis par les parties, après avoir ordonné, au besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles ; si un doute subsiste, il profite au salarié.

La faute grave est celle qui résulte d'un fait ou d'un ensemble de faits imputables au salarié, qui constituent une violation des obligations résultant du contrat de travail ou des relations de travail d'une importance telle qu'elle rend impossible le maintien du salarié dans l'entreprise, même pendant la durée du préavis ; l'employeur qui invoque la faute grave pour licencier doit en rapporter la preuve.

Par application des dispositions de l'article L 1232-6 du Code du travail, la lettre de licenciement, notifiée par lettre recommandée avec avis de réception, comporte l'énoncé du ou des motifs invoqués par l'employeur ; la motivation de cette lettre, précisée le cas échéant dans les conditions prévues par l'article L 1235-2 du même code, fixe les limites du litige.

Application en l'espèce

En l'espèce, la lettre de licenciement est motivée de la manière suivante

"Mon attention a été attirée fortuitement, le 4 février 2014, à l'occasion d'une interpellation d'un membre du comité d'entreprise au sujet d'une attestation d'assurance "Habitation" reçue par erreur de la compagnie Axa, portant sur un appartement à [Localité 16], loué au nom de la clinique et sur l'achat par la clinique d'une tablette Ipad à votre usage.

C'est dans ces conditions qu'après recherches, j'ai découvert l'existence d'un bail d'habitation manifestement souscrit par la Csje, lequel ne m'a jamais été soumis pour signature bien que je sois le contractant en tant que pdg.

Ce bail souscrit en octobre 2013 à votre usage exclusif, n'a pas été signé ni validé par le président directeur général ou le conseil d'administration. L'entreprise ne dispose pas d'ailleurs d'un exemplaire signé.

Le fait que vous ayez ainsi contracté ce bail sans m'en informer précisément, ni concerté sur les modalités de financement du dit appartement m'a interpellé et m'a conduit à entreprendre des investigations complémentaires.

Je vous ai donc directement sollicitée, le 5 février 2014, sur les 4 sujets suivants :

le loyer de l'appartement de [Adresse 15]

un achat d'un Ipad fait au nom de la clinique

l'embauche récente de Mlle [R] [W], votre fille

et l'embauche récente de monsieur [M] [X], recrutement dont je n'avais pas été préalablement informé.

En retour, vous avez aussitôt reconnu la nécessité de régulariser la question de l'appartement de [Localité 16] (1 900 € ) et de l'Ipad (507,10 €) et vous avez procédé à des" remboursements" le 6 février 2014.

Vous m'avez par ailleurs confirmé l'embauche de votre fille [R] en cdd au poste d'économe le 27 janvier 2014 et celle de M. [M] [X], au poste de cadre dpc au 3 février 2014.

A ma demande, alors que je vous interrogeais spécifiquement sur l'opportunité de ces recrutements, vous m'avez confirmé la possibilité réglementaire d'interrompre le contrat d'[M] [X].

Dès le lendemain de notre entretien, le 6 février 2014, vous avez adressé un arrêt de travail, renouvelé depuis.

Au regard de ces découvertes fortuites, et de la réaction qui a été la vôtre, un contrôle interne approfondi a été mené, avec l'appui de l'expert comptable de la clinique, la société In Extenso.

Différentes irrégularités très préjudiciables à l'entreprise ont été relevées concernant :

Des avantages que vous vous êtes octroyés

Des avantages que vous avez indûment octroyés ou validés à certains collaborateurs

Ces éléments matériellement établis constituent autant de manquements fautifs à l'exécution des fonctions de Directrice générale qui vous ont été confiées, avec des conséquences financières non négligeables pour l'entreprise. Ils interpellent en outre votre probité à l'égard de l'entreprise.

Concernant les avantages que vous vous êtes octroyés

Un bail a été souscrit à votre usage exclusif sans validation du pdg ni du conseil d'administration. Interrogée sur ce sujet, vous avez aussitôt procédé au "remboursement " de 3 mois de loyer (1 900 € ), contre toute logique comptable eu égard à l'avantage en nature par ailleurs inscrit, à votre demande, sur votre fiche de paye, mais traduisant par là même votre reconnaissance officielle d'une grave irrégularité.

Dans le cadre de l'aménagement de cet appartement, vous avez fait supporter à la Clinique des dépenses pour lesquelles vous n'avez pas non plus sollicité une autorisation ni même envisagé d'en faire valider le principe.

Ces dépenses d'un montant de 3 768 € (mobilier et électroménager ) ont été intégralement supportées et réglées par la Clinique, y compris la décoration (rideaux : 514,60 €). Ceci sans compter les frais inhérents à la prise de ce bail (honoraires d'agence, assurance, edf ...).

Vous avez réglé avec la carte bleue à usage strictement professionnel mise à votre disposition des dépenses n'entrant pas dans les standards de la profession et constituent même des irrégularités.

Ainsi, nous avons relevé 3 commandes passées chez l'Occitane les :

- 20 novembre 2013 (n°12716054) pour 570 € ttc

- 20 novembre 2013 encore (n°12716032) pour 581,50 € ttc

- et le 27 novembre 2013 (n°12738923) pour 354 € ttc

Sur les deux dernières commandes, la justification de ces achats serait " cadeaux fin d'année" pour " cram-cpam-ars-dt77". La 3ème commande ne porte pas de mention. Outre que nous estimons déplacé d'offrir des" cadeaux" à ces interlocuteurs, ces gestes "commerciaux" ne nous paraissent pas en conformité avec notre éthique, nous ne pouvant accepter la forme et le contenu de ces achats : 3 commandes quasiment à la même date, dont deux pour le même objet, achat notamment de shampoing, gel nettoyant, gel douche, mousse mains, tels qu'apparaissant sur le détail des factures, en contradiction totale avec leur destination prétendue.

Egalement nous avons constaté que vous aviez fait prendre en charge par la Clinique certains de vos déplacements personnels et frais d'hôtellerie en particulier à l'occasion de plusieurs Congrès de la fhp notamment les 2, 3 et 4 décembre 2013 à [Localité 13] (Sofitel [Localité 13] Chambre luxury à 253 € la nuit hors frais de restauration le 18 septembre 2013 à [Localité 17], les 11 et 12 septembre 2013 à [Localité 9], les 28,29 et 30 mai 2013 à la [Localité 12]...Vous n'étiez pas, à ma connaissance, spécifiquement mandatée par la Clinique pour ces réunions et n'avez pas cru bon en tout cas de nous soumettre, pour validation, les frais inhérents.

Par ailleurs, malgré la liberté dont vous disposez dans le cadre de la gestion de vos horaires de travail, consécutive à votre statut de cadre dirigeant, vous vous êtes octroyée une contrepartie financière de jours de rtt qui vous a été réglée au mois de décembre 2013 pour un montant de 7 595 €. Ce règlement est en contradiction avec votre statut. Madame [K], Directrice adjointe notamment en charge de la paye, nous a indiqué avoir agi sur vos instructions et précisant que vous aviez également été attributaire des mêmes avantages en décembre 2012 et décembre 2011. Ces émoluments sont parfaitement injustifiés.

Vous vous êtes octroyée en août 2013 une prime dite de "déménagement " de 2 600 € pour avoir participé au débarras d'archives avec une cadre gratifiée de la même somme qui nous semble totalement injustifiée. Nos personnels d'entretien sollicités pour la même tâche n'ont eu droit qu'à quelques centaines d'euros de prime pour certains ou se sont vus refuser toute gratification pour d'autres.

Concernant les avantages que vous avez accordés à certains collaborateurs :

Il a été procédé au contrôle de la situation contractuelle et salariale de certains de vos proches collaborateurs.

Il ressort que :

Vous avez signé, le 27.01. 2014, le contrat à durée déterminée de votre fille [R] [W] au poste de "économe" avec un salaire de 2570 € bruts/ mois soit un montant 40 % supérieur à la grille conventionnelle, alors que la moyenne des salaires de la clinique se situe à seulement 20 % au-dessus.

Vous n'avez pas sollicité notre autorisation ni même envisagé de nous soumettre votre projet au regard des liens vous unissant à cette nouvelle recrue.

En outre, son bulletin de salaire mentionne "assistante rh" en contradiction avec son contrat et la licéité du motif de recours à ce cdd est discutable " dans l'attente du recrutement d'une économe", celle-ci n'étant pas désignée.

Vous avez octroyé 2 prêts successifs à madame [K], directrice adjointe soit

4 600 € le 27/09/2013 à raison de 600 € remboursés par mois depuis janvier 2014

20 000 € le 30/01/2014 à rembourser sur 36 mois à compter de septembre 2014.

Si en soi le prêt n'est pas interdit, le montant de ces prêts et les conditions de remboursement exposent l'entreprise à un risque majeur de redressement de l'urssaf. Ils constituent en outre des avantages excessifs, dont la justification est plus que douteuse au regard de la rémunération de madame [K]. Là encore, malgré l'important montant concédé, et les modalités offertes (report des échéances du second prêt), ces prêts ont été octroyés sans en référer au pdg ni au conseil d'administration.

Vous avez également validé chaque mois en 2013 des acomptes substantiels à madame [K], représentant 10 390 € en espèces et 10 038 € en virements. L'ampleur et les modalités de ces acomptes, associées au montant des prêts précédemment cités, posent gravement question.

Vous avez également validé 256 heures supplémentaires qui ont été réglées à madame [K] en 2013 pour un coût de 26 272 € pour la clinique. Il n'a été retrouvé aucun élément de nature à justifier l'accomplissement de ces heures, leur objet ni a fortiori leur autorisation, contrairement aux pratiques dans les autres services. La partie "complément clinique" du salaire de madame [K] a par ailleurs été augmenté de 300 % entre 2011 et 2012 sans qu'aucun élément ne le justifie.

Vous avez validé de la même façon les primes injustifiées pour monsieur [S] et un complément de salaire dit " complément clinique" totalement démesuré au regard de sa fonction et de ses attributions (54k€ de primes en 2011, 44 k€ de complément clinique en 2012). Force est de constater que vous avez laissé le soin à madame [K] de gérer la rupture conventionnelle de monsieur [S], proche de cette dernière, au nom de csje, en novembre 2013 ; au titre de cet accord, ce dernier a perçu la somme de 50 864 € imputée uniquement sur le site de [Localité 10]. Cette délégation de signature n'est pas régulière, cette convention n'entrant pas dans les actes courants.

En agissant comme ci-dessus exposé, vous avez gravement abusé de votre fonction, outrepassé des prérogatives et fait fi de la confiance qu'avaient placée en vous le Président Directeur Général et le Conseil d'administration pour servir vos intérêts et ceux de vos proches collaborateurs. Votre façon d'agir sans autorisation ni concertation préalables constitue en outre un manquement grave à vos obligations professionnelles et à votre loyauté.

Dans ce contexte, votre communication faite le 4 mars 2014 par message électronique, à l'ensemble des collaborateurs des deux sites, faisant état de votre état de santé et de votre surcharge de travail qui en serait à l'origine, apparaît non seulement douteuse mais plus que déplacée. De surcroît, une telle communication, prenant à témoins l'ensemble du personnel, n'est pas acceptable de la part d'une Directrice Générale et ce d'autant plus qu'elle contenait de fausses allégations.

Vous n'avez donné aucune explication à l'ensemble des éléments précis qui vous ont été soumis, confirmant l'absence de justification des actes qui vous sont reprochés."

Madame [W] explique que globalement elle était surchargée de travail en particulier à compter de 2010 et que pour alléger ses contraintes, elle aurait été autorisée à louer un appartement à [Localité 16], qu'elle était épuisée fin 2013, qu'elle aurait fait un malaise un burn out et/ou une dépression et qu'elle a dû être hospitalisée le 11 mars 2014 au Centre hospitalier de [Localité 14]. Elle souligne le fait qu'aucune poursuite pénale n'a été engagée contre elle.

Elle explique que son licenciement a été annoncé verbalement au cours d'une réunion du personnel avant la tenue de l'entretien préalable, ce qui prive le licenciement de cause réelle et sérieuse et que l'employeur le lui a annoncé dès l'entretien préalable le 19 mars 2014.

La salarié subsidiairement soutient que les faits invoqués par l'employeur sont prescrits et qu'il ne saurait prétendre que leur révélation est contemporaine à l'audit du mois de mars 2014 et que les griefs formulés par l'employeur sont inconsistants comme le démontre l'absence d'anomalie détectée lors des contrôles fiscaux et de l'Urssaf.

La société Clinique Saint Jean-l'Ermitage fait valoir que le licenciement de madame [W] n'a aucun caractère verbal et fait remarquer que le compte-rendu d'entretien préalable rédigé par madame [F] n'est pas signé par son auteur et n'a aucune force probante. L'employeur avance l'hypothèse que la rédactrice aurait confondu son refus d'une rupture conventionnelle avec l'annonce du licenciement. Il s'étonne que madame [F] ait porté la mention" lu et approuvé "ce qui laisse supposer que madame [W] ait été la véritable rédactrice de ce document. L'employeur explique l'annonce par voie de communiqué du départ de madame [W] le 27 mars 2014 n'a pas été adressé à la salariée elle-même et que ce document ne peut être considéré comme un licenciement. L'employeur soutient que sa connaissance des faits remonte au moment du dépôt du rapport d'audit transmis en mars 2014, de sorte que les faits ne sont pas prescrits.

Sur la régularité de la procédure de licenciement et l'exception tirée de la prescription

Il résulte des pièces de la procédure les éléments suivants :

Madame [W] en tant que directrice générale a reçu le 30 janvier 2009 de la part du président directeur général son pouvoir pour signer tous documents en son nom. Cette délégation de pouvoir a été renouvelée le 23 mai 2012 par le nouveau président directeur général, le docteur [I] [B] lequel a poursuivi son activité de chirurgien à plein temps. A compter de 2010, le regroupement des établissements situés à [Localité 16] et à [Localité 11] a été mené par la salariée en lien avec le conseil d'administration et le président directeur général. En raison de graves difficultés financières, le service de maternité de [Localité 11] a été fermé le 26 janvier 2014 engendrant la perte de 28 emplois. Un plan de sauvegarde a été mis en place le 27 janvier 2014.

C'est dans ce contexte qu'il a été remis au docteur [I] [B] le 4 février 2014 un courrier de la Compagnie Axa portant sur un logement situé à [Adresse 15] loué par la société Clinique Saint Jean-l'Ermitage, ce courrier ayant été adressé par erreur au comité d'entreprise au lieu du secrétariat de direction.

Après avoir demandé des explications à madame [W] le lendemain et sollicité les documents utiles à sa compréhension, le président directeur général confiera le 24 février 2014 au cabinet In Extenso une mission d'audit. A compter du 8 février 2014, la salariée est placée en arrêt maladie. Le 10 mars 2014, madame [W] est mise à pied et convoquée pour l'entretien préalable fixée au 19 mars 2014, son licenciement lui sera donné le 2 avril 2014.

Il ressort de ces éléments que madame [W] jouissait d'une confiance pleine et entière des présidents directeurs généraux successifs qui l'ont décrite comme une personne brillante, intègre et totalement investie. Cette confiance leur permettait de ne pas vérifier eux-mêmes ni lors des conseils d'administration le détail des actes de gestion et en conséquence, la découverte fortuite d'un acte de gestion atypique n'a pu que susciter une réaction inversement proportionnelle à cette confiance.

En conséquence, l'exception de prescription est rejetée, la révélation des faits datant du 4 février 2014.

Concernant la régularité de la procédure du licenciement, il est établi par ces mêmes pièces que le docteur [I] [B] lors du comité de direction du 3 mars 2014 et lors d'une réunion du personnel du 12 mars 2014 a annoncé qu'une procédure de licenciement était engagée à l'encontre de madame [W]. Cette annonce avait notamment pour objet de demander au personnel de répondre de manière exhaustive à toutes les sollicitations du cabinet d'audit et a été formulée alors que, depuis son arrêt maladie, madame [W] n'avait pas repris contact avec ses services ni avec son employeur si ce n'est par un courriel adressé le 14 février 2014 à ses plus proches collaborateurs évoquant notamment un déséquilibre de son diabète puis un courriel général du 4 mars 2014 mentionnant un burn out et alors qu'elle avait été mise à pied. Cette situation ne pouvait générer que de l'inquiétude, étant rappelé que la Clinique faisait au même moment l'objet d'un plan de sauvegarde et qu'il appartenait au président directeur général de donner des éléments de compréhension aux salariés de la clinique. Enfin, il n'est aucunement établi que le docteur [I] [B] a verbalement informé madame [W] de son licenciement, la procédure de licenciement ayant été respectée bien que la cour émette les mêmes réserves que l'employeur sur la véritable rédactrice du compte-rendu de l'entretien préalable produit par madame [W] en raison des termes "lu et approuvé "apposés en son pied de page.

Enfin, aucune décision pénale n'est intervenue au fond, une ordonnance de non-lieu n'étant pas susceptible de lier la juridiction prud'homale.

Il résulte de ce qui précède que toutes les exceptions soulevées par la salariée sont rejetées.

Sur la faute grave

Sur l'attribution d'un logement de fonction et son aménagement : la société Clinique Saint Jean-L'Ermitage expose que le 4 février 2014, monsieur [B], président de la clinique, a reçu un rappel de prime d'assurance habitation d'un appartement, apparemment loué par la Clinique et situé à [Adresse 15]. Après investigation, il s'agissait du bien immobilier loué par madame [W] pour la somme mensuelle de 820 euros sans que le président ni le conseil d'administration n'en aient été informés. L'examen du contrat de bail relève que madame [W] a signé tout en indiquant que la Clinique était représentée par monsieur [B]. La somme totale engagée pour les frais d'installation, d'aménagement et d'ameublement est égale à 6 300 euros dont 514 euros pour l'achat de rideaux. Madame [W] a fait comptabiliser un avantage en nature de 600 euros c'est à dire une augmentation de salaire. Le 5 février 2014, monsieur [B] interrogeait madame [W] qui dès le lendemain remettait à la Clinique un chèque de 1 900 euros.

Madame [W] soutient que le logement a été pris à bail au mois d'octobre 2013 pour être davantage disponible pour la Clinique et qu'elle en a fait part au président directeur général qui a donné son accord verbal, cet avantage en nature valorisée à la somme de 950 euros sous l'intitulé avantage nature voiture/ logement (la part voiture étant égale à 350 euros /mois) étant apparu sur ses fiches de paie dès le mois de novembre 2013. Elle précise avoir adressé un chèque de 1 900 euros de régularisation. Concernant l'aménagement de celui-ci, la salariée expose que ses achats mobiliers se réduisaient au strict minimum et ont été achetés chez Alinéa ou Auchan et non dans des enseignes de luxe. Enfin, madame [W] précise que l'intégralité des éléments achetés pour meubler cet appartement a été restitué lors de son licenciement.

Le contrat de bail produit par l'employeur signé le 29 octobre 2013 indique comme parties aux contrat monsieur et madame [H] représentés par la société Van Den Immobilier, d'une part, et la Sas Clinique Saint Jean-l'Ermitage représentée par son président directeur général, monsieur [I] [B], d'autre part. Il porte sur un logement, qualifié par madame [W] de pied à terre, de 70 m2 comportant deux chambres, un séjour avec balcon, une place de parking sous terrain et une cave. Le coût de l'opération, des frais aménagements réglées par chèques ne sont pas contestés. En revanche, aucune pièce ne vient étayer la thèse de la salariée selon laquelle elle aurait obtenu l'accord verbal de l'employeur, étant observé que si cet acte lui avait semblé si régulier le chèque qu'elle a adressé à la société Clinique Saint Jean-l'Ermitage se trouverait sans cause.

En conséquence, cette faute est établie.

Sur la prise en charge de ses dépenses personnelles : la société Clinique Saint Jean-l'Ermitage expose que l'audit a révélé 3 commandes passées auprès de la société l'Occitane passées les 20, 27 novembre 2013 et 4 décembre 2013 pour les montants respectifs de 581,50 euros, 354 euros et 706 euros. Madame [W] n'apporte aucune preuve de ses allégations selon lesquelles il s'agirait de cadeaux de fin d'année à l'exception de deux cadres de la Clinique qui attestent en avoir bénéficié, au mépris de toute notion d'égalité. Il en est de même de l'achat d'un Ipad, la salariée ne démontrant pas qu'il était nécessaire à l'exercice ses fonctions puisqu'elle possédait déjà un ordinateur portable mis à sa disposition par la Clinique. Le fait que madame [W] ait procédé au remboursement de son prix confirme le caractère personnel de cette dépense.

La salariée précise qu'il s'agit de cadeaux de Noël offerts comme chaque année aux cadres des deux établissements ainsi qu'aux autorités de tutelle et que pour ce qui concerne l'achat d'un Ipad, madame [W] prétend qu'il s'agit d'un outil de travail et qu'il est plus simple de consulter un Ipad qu'un ordinateur portable et souligne le fait qu'elle a accepté de rembourser cet achat à hauteur de la somme de 507,10 euros.

Concernant les cadeaux de fin d'année, les factures produites, les attestations fournies par madame [W] permettent de considérer que ces achats ne sont pas des dépenses personnelles mais ont été réglées au moyen de la carte bancaire de la salarié pour les besoins de la Clinique et pour satisfaire à un usage répété et établi.

Toutefois, le principe et les bénéficiaires de ces cadeaux auraient du être discutés soit avec le président directeur général soit avec le conseil d'administration à la fois pour une attribution en interne soit égalitaire soit au mérite et en externe au regard des règles de déontologie et en terme d'images, s'agissant en particulier de produit d'hygiène corporel.

Pour ce qui concerne l'achat de l'Ipad, cette dépense de confort est difficilement compréhensible compte tenu des moyens informatiques dont était déjà dotée la salariée et compte tenu de la situation économique de la société Clinique Saint Jean-l'Ermitage au moment de cet achat. Ici encore, il convient d'observer si cet acte lui avait semblé si régulier le chèque que madame [W] a adressé à son employeur se trouverait sans cause.

Les griefs sont en conséquence établis.

Sur les déplacements professionnels non autorisés et pour des prix déraisonnables : l'employeur prétend que madame [W] s'est rendu à des congrès sans y avoir été mandaté pour des prix excessifs engageant des repas allant jusqu'à 100 euros et des chambres d'hôtel doubles à plus de 250 euros la nuit alors que la Clinique était en difficultés financières alors que la salariée fait part de son étonnement face à ce grief et verse aux débats la procuration établie par monsieur [B], président directeur général afin qu'elle puisse voter lors de ces congrès.

Il résulte des pièces de la procédure que la participation de madame [W] à ses congrès faisait partie de ces attributions et que la cour ne peut estimer que les coûts pratiqués ne soient excessifs et constitutifs de faits fautifs.

En conséquence, ce grief est écarté.

Sur l'octroi illégal de rémunération de journée de RTT L'employeur rappelle que madame [W] avait un statut de cadre dirigeant qui exclue l'application de l'article L 3 111-2 du code du travail et que l'audit établi qu'elle a perçu à ce titre la somme de 21 004,47 euros en 3 ans pour un coût total de plus de 30 000 euros pour la Clinique. Cet avantage ne figure pas dans son contrat de travail et l'attestation produite de monsieur [N], ancien président jusqu'en 2005, a été rédigé par madame [W] elle-même, celui-ci s'étant contenté de signer et de le retourner avec la mention manuscrite suivante " Monsieur et Madame [N] vous transmettent toutes leurs amitiés et vous assurent de leur affection".

La salariée soutient que son contrat de travail prévoit 11 jours de RTT par an et qu'il n'a jamais été modifié sur ce point par un avenant et que compte tenu de la surcharge de travail à compter de 2011, elle n'a pas été en mesure de les poser et que le service des ressources humaines calculait automatiquement une contrepartie financière.

Les documents contractuels, seuls susceptibles d'établir un avantage dérogatoire au statut de cadre dirigeant, sont :

Une lettre d'engagement datée du 24 septembre 2002 portant sur un contrat à durée indéterminée à effet du 1er janvier 2003 en qualité de directrice de la Clinique de l'Ermitage et de la Maison de retraite de l'Ermitage situées à [Localité 11] en qualité de Directrice avec

- une période d'essai de 3 mois

- un statut de cadre salarié

- un salaire mensuel net de 5 793,06 euros

- un treizième mois en décembre

- une prime d'intéressement initialement prévue à 1,5 % et fixée à 3 % du résultat net comptable, versée en avril

Un avenant portant sur l'acquisition d'un véhicule type Audi ITT en crédit bail pour un in montant de location mensuelle de 1 600 euros au titre de véhicule de fonction. Un véhicule type Audi ITT Coupé sera acquit en exécution de ce contrat.

Aucun de ces documents n'allouant à madame [W] des jours de RTT, l'avantage qu'elle s'est attribuée à elle-même permet de considérer comme fondé ce grief.

Sur la prime de déménagement : La clinique conteste avoir autorisé le versement d'une prime déménagement d'un montant de 2 600 euros et observe que la salariée ne rapporte ni la preuve de cet accord ni de sa participation effective à celui-ci. Elle fait observer que le personnel d'entretien qui a procédé à ce déménagement s'est vu attribuer pour certains quelques centaines d'euros et pour d'autres opposer un refus à toute gratification.

Madame [W] explique qu'il lui a été attribué une prime de 2 600 euros en compensation de son action pour déménager un grand nombre d'archives dont le volume représentait trois containers de 15 m3.

Cette prime constitue également un avantage que la salariée s'est attribuée à elle-même, étant observé que cette prime lui a été versée en 2013 alors que l'équilibre budgétaire de la clinique était fragile.

Sur l'embauche de [R] [W] : La Clinique rappelle que l'embauche d'un proche nécessite l'accord du président et du Conseil d'administration et observe que cette embauche comportait de nombreuses irrégularités et contrevenait gravement au principe d'égalité de traitement entre les salariés. Ainsi, la fille de madame [W] avait un salarié mensuel brut de 2 570 euros comprenant un complément clinique de 1 036 euros (soit 40 % de la rémunération pour une moyenne de 20 % pour les autres salariés ) soit un salaire supérieur à la personne remplacée plus âgée et plus expérimentée et alors que dans la même période la clinique venait de procéder au licenciement pour motifs économique d'une vingtaine de salariés.

La salariée soutient qu'elle a toujours bénéficié d'une autonomie complète sur les recrutements du personnel de la clinique et qu'elle avait le pouvoir de signer les contrats de travail. Elle précise que sa fille, titulaire d'un master de gestion, a été embauchée le 27 janvier 2014 pour un contrat à durée déterminée de 5 mois alors que madame [F], économe était placée en arrêt maladie puis a sollicité une rupture conventionnelle et que madame [D], responsable d'exploitation a été victime d'un accident du travail. Sa rémunération soit un salaire brut de base de 2 570 euros correspondrait à ses tâches multiples et à son niveau de formation soit un diplôme de troisième cycle.

Il résulte des attestations produites par madame [W] que l'embauche de sa fille [R] n'a pas été dissimulée au président directeur général qui l'a salué lors de réunions et s'est réjoui de son arrivée afin de pallier les absences de salariée. Toutefois, il n'est pas contesté que le montant de la rémunération octroyé ne lui a pas été présenté alors que celui-ci présentait un complément clinique équivalent au double de la moyenne des autres salariés. Par ailleurs, l'urssaff, par courrier du 26 janvier 2015, a révélé que le contrat de [R] [W] avait été enregistré en contrat à durée indéterminée, la cour observant que la déclaration d'embauche n'a pas été versée aux débats.

Il résulte de ce qui précède que ce contrat de travail conclu le 27 juin 2014, soit au lendemain de la fermeture de la maternité de [Localité 11] pour la période du 27 janvier 2014 au 30 juin 2014, présente des irrégularités et que compte tenu du lien de parenté avec madame [W] et des conditions très avantageuses conclues, un accord sur les modalités de ce contrat aurait dû être sollicité auprès du président directeur général ou du conseil d'administration.

Sur les avantages indus consentis à madame [K] : la société Clinique Saint Jean-l'Ermitage expose que la rémunération des salariés de la clinique est composée d'un salaire de base complété par un complément clinique correspondant à la différence entre les minima conventionnels et le salaire généralement constaté sur le marché. L'employeur fait observer que l'évolution de ce complément pour madame [K] a été le suivant 2010 : 13 849 euros, 2011 : 13 849 euros, 2012 : 40 626 euros, 2013 : 40 627 euros ce qui représente 32 % de sa rémunération pour une moyenne de 20 % pour les autres cadres. Les arguments de la salariée sur le surcroît de responsabilité ne sauraient, selon l'employeur, convaincre la cour, la Clinique rappelant que la fusion date de 2005 et qu'aucune modification marquante n'est intervenue en 2011 et 2012. Il en va de même pour les primes qui lui ont été attribuées telles que deux primes d'un montant de 1317 en attribué en juillet et août 2013 intitulés " Primes absence personnelle" ainsi que l'octroi pour l'année 2013 de 256 heures supplémentaires pour la somme de 26 272 euros, heures supplémentaires qui ne se retrouvent dans aucun planning ou de la prime déménagement. Enfin, l'audit a constaté égalent la pratique illégale de payer les congés payés non pris.

La société Clinique Saint Jean-l'Ermitage relève également l'octroi de prêts et la pratique d'acomptes au profit de madame [K], ses acomptes systématiques représentant la somme de 20 428 euros dont 10 390 euros versés en espèces ce qui représente 18 % de la totalité des acomptes versés au salarié. Madame [K] a bénéficié deux prêts l'un de 4 600 euros et l'autre de 20 000 payable en 36 mensualités à compter de septembre 2014 sans intérêt, licenciée le 7 avril 2014, elle n'a procédé à aucun remboursement.

Madame [W] explique que concernant l'octroi des prêts, cette pratique était usuelle et ces prêts étaient garantis par une reconnaissance de dette. Concernant les acomptes réglés à madame [K], la salariée déclare ne pas se souvenir d'avoir validé chaque mois des acomptes substantiels. Cette pratique aurait été par ailleurs été couramment admise et ne créerait pas de préjudice pour la société Clinique Saint Jean-l'Ermitage. S'agissant des heures supplémentaires réglées à madame [K], la salariée expose que ces heures supplémentaires ayant été effectuées (soit 256 heures pour l'année 2013) elles devaient être réglées. Elle explique également que si la partie "complément clinique" du salaire de madame [K] a été augmenté de 300 % entre 2011 et 2012, c'est en raison de l'accroissement significatif des responsabilités confiée à cette dernière.

La cour relève en premier lieu que certains de ces griefs ne figurent pas dans la lettre de licenciement tels que l'octroi de primes injustifiées et en second lieu que l'octroi de prêt ou d'avance n'est pas en eux même irrégulier et peut relever d'actes de gestion courante. En revanche, les pièces de la procédure établissent que madame [K] faisait fréquemment part à madame [W] de ses difficultés financières engendrées par ses charges fiscales, des frais de réparations sur son véhicule ou la situation financière décrite comme " dans le noir" de sa soeur. La connaissance de ces difficultés, la proximité dans leur travail quotidien ont conduit madame [W] à favoriser madame [K] tant pour le montant de la part Clinique que par l'octroi d'heures supplémentaires qu'aucune pièce ne justifie. Enfin aucun avenant ou compte-rendu de réunion de Codir ne vient établir une surcharge de travail pour madame [K] alors que, dans le même temps, la situation financière de la Clinique était obérée et les salariées d'autres services en particulier ceux de la partie médicale quittaient la société Clinique Saint Jean-l'Ermitage en raison de la faiblesse de leurs rémunérations.

En conséquence, ce grief est constitué.

Sur les avantages consentis à monsieur [S] : l'employeur affirme que ce dernier a perçu de nombreuses primes injustifiées soit en 2011 la somme de 54 600 euros, prime qui ont été remplacé en 2012 par un complément clinique passé annuellement de 20 554,80 euros à 44 135 euros sans aucune justification ni avenant au contrat de travail, pour une somme totale de 2011 à 2013 de 109 793 euros bruts ) soit 165 000 euros pour la Clinique. La société Clinique Saint Jean-l'Ermitage expose qu'au milieu de l'année 2013, monsieur [B] avait évoqué avec madame [W] un licenciement pour motif disciplinaire à l'égard de ce salarié eu vu des plaintes pour harcèlement. Madame [W] a prétendu demandé un avis juridique non retrouvé pour décliner ce type de rupture et a conclu sans que le président ne soit informé une rupture conventionnelle d'un montant de 50 864 euros alors même que l'indemnité conventionnelle aurait du être comprise entre 40 000 euros et 41 000 euros. L'employeur relève que cette indemnité a été supportée par le site de [Localité 10] alors qu'elle aurait dû l'être par celui de [Localité 16].

Madame [W] expose que monsieur [S], responsable technique des deux établissements effectuait de nombreuses heures supplémentaires et l'engagement du salarié justifiaient les sommes versées et que le principe et les modalités de la rupture conventionnelle n'ont jamais été remis en cause.

Il résulte des pièces versées à la procédure que les primes et l'augmentation du complément clinique litigieuses sont établies mais rien ne permet de considérer leur caractère excessif compte tenu de la charge de travail que requiert ce poste. De même, la société Clinique Saint Jean-l'Ermitage affirme sans l'établir qu'un licenciement disciplinaire avait été envisagé à l'égard de ce salarié. Ainsi, seul le montant de l'indemnité de rupture conventionnelle pourrait paraître excessif sans qu'il ne puisse être considéré qu'une faute soit consituée à l'égard de madame [W].

Ce grief n'est pas établi.

Ces éléments pris dans leur ensemble et en tout premier lieu la conclusion du contrat de bail constituent une faute grave dans la mesure où la position somitale de madame [W] lui permettait d'avoir une parfaite connaissance de la situation des établissements de la société Clinique Saint Jean-l'Ermitage, de la fragilité économique de la société, ce qui ne l'a pas empêchée de privilégier ses intérêts et ceux de ses proches avant ceux de l'employeur en utilisant des moyens permettant une certaine opacité comme le règlement par chèques ou en imputant une opération comptable sur un site différent de celui qui aurait dû supporter la dépense.

Il s'ensuit que la faute grave est caractérisée et que les reproches justifiaient le licenciement et rendaient immédiatement impossible la poursuite des relations contractuelles.

Sur le préjudice moral spécifique

Il résulte de ce qui précède que la demande d'indemnisation d'un préjudice distinct est rejetée.

Le jugement du Conseil de prud'hommes sera, en conséquence, confirmé.

Sur la mise hors de cause de l'association Unédic délégation Ags Cgea Île-de-France Est

La société Clinique Saint Jean-l'Ermitage étant en plan de continuation, l'association Unédic délégation Ags Cgea Île-de-France Est n'intervenant qu'à titre subsidiaire en cas d'insuffisance des fonds disponibles, et aucun créance n'étant mis à la charge de l'employeur, il convient de faire droit à la demande de l'association Unédic délégation Ags Cgea Île-de-France Est d'être mise hors de cause.

Par ces motifs

La cour, statuant par arrêt contradictoire prononcé publiquement par mise à disposition au greffe de la cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues par l'article 450 du code de procédure civile,

MET hors de cause l'association Unédic délégation Ags Cgea Île-de-France Est

CONFIRME le jugement en toutes ses dispositions

VU l'article 700 du code de procédure civile,

CONDAMNE madame [W] à verser à la société Clinique Saint Jean-l'Ermitage la somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

DÉBOUTE les parties du surplus de leurs demandes.

CONDAMNE madame [W] aux dépens.

LA GREFFIÈRE LA PRÉSIDENTE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 6 - chambre 3
Numéro d'arrêt : 19/07407
Date de la décision : 04/01/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-01-04;19.07407 ?
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