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15/12/2022 | FRANCE | N°21/18759

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 4 - chambre 7, 15 décembre 2022, 21/18759


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

Au nom du Peuple Français



COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 4 - Chambre 7



ARRÊT DU 15 DÉCEMBRE 2022

(n° , 13 pages)





Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 21/18759 - N° Portalis 35L7-V-B7F-CESBR



Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 07 Septembre 2021 par le tribunal judiciaire de BOBIGNY - RG n° 21/00005





APPELANTE

ETABLISSEMENT PUBLIC FONCIER D'ILE DE FRANCE

[Adresse 5]

[Localité 13]



Représent

é par Me Frédéric LEVY, avocat au barreau de PARIS, toque : T0700 assistée de par Me François DAUCHY, avocat au barreau de PARIS, toque : T07





INTIMÉES

S.A. AVENTIS PHARMA

[Adresse 4...

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

Au nom du Peuple Français

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 4 - Chambre 7

ARRÊT DU 15 DÉCEMBRE 2022

(n° , 13 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 21/18759 - N° Portalis 35L7-V-B7F-CESBR

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 07 Septembre 2021 par le tribunal judiciaire de BOBIGNY - RG n° 21/00005

APPELANTE

ETABLISSEMENT PUBLIC FONCIER D'ILE DE FRANCE

[Adresse 5]

[Localité 13]

Représenté par Me Frédéric LEVY, avocat au barreau de PARIS, toque : T0700 assistée de par Me François DAUCHY, avocat au barreau de PARIS, toque : T07

INTIMÉES

S.A. AVENTIS PHARMA

[Adresse 4]

[Localité 16]

Défaillante

DIRECTION DÉPARTEMENTALE DES FINANCES PUBLIQUES DE LA SEINE SAINT DENIS - COMMISSAIRE DU GOUVERNEMENT

[Adresse 1]

[Adresse 1]

[Adresse 1]

93009 BOBIGNY CEDEX

Comparant en la personne de Madame [Z] [D]

de la DDFIP de Seine Saint-Denis

[Adresse 18]

[Adresse 18]

[Localité 17]

PARTIE INTERVENANTE :

Société ABIDING

[Adresse 15]

[Localité 12]

Représentée par Me Cédric JOBELOT, avocat au barreau de PARIS, toque : P0154 assistée de Me Stanislas HUERRE, avocat au barreau de PARIS

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l'article 805 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 27 octobre 2022 , en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Monsieur Hervé LOCU, Président chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Monsieur Hervé LOCU, Président

Madame Monique CHAULET, Conseillère

Monsieur Raphaël TRARIEUX, Conseiller

Greffier : Marylène BOGAERS, lors des débats

ARRÊT :

- réputé contradictoire

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Hervé LOCU, Président, et par Dorothée RABITA, greffière présente lors de la mise à disposition.

***

La SA Aventis Pharma a adressé une déclaration d'intention d'aliéner le bien immobilier sis [Adresse 14] sur les parcelles cadastrées P n°[Cadastre 6], P n°[Cadastre 7], P n°[Cadastre 8], P n°[Cadastre 9], P n°[Cadastre 10], P n°[Cadastre 11], P n°[Cadastre 2] et P n°[Cadastre 3], au prix de 10.050.000 euros HT, 12.060.000 euros TTC, ainsi qu`une commission d'agence à la charge de l'acquéreur s'élevant à 5 % du prix d'acquisition, à la mairie, qui l'a réceptionnée le 4 août 2020.

Les parcelles cadastrées P n°[Cadastre 6], P n°[Cadastre 7], P n°[Cadastre 8], P n°[Cadastre 9], P n°[Cadastre 10], P n°[Cadastre 11], P n°[Cadastre 2] et P n°[Cadastre 3] sont d'une superficie totale de 7.014 m². Elles sont situées en zone UP du plan local d'urbanisme. Il s'agit d'un terrain en friche. Le sol est en terre et en pierre, et est partiellement bétonné. Les parcelles sont situées à quinze minutes à pied de la station de métro Bobigny Pantin Raymond Queneau de la ligne 5.

L'EPFIF a, par acte extra-judiciaire reçu le 5 novembre 2020 par la SA Aventis Pharma, informé cette dernière de l'exercice de son droit de préemption, qui lui a été délégué par décision du 21 septembre 2020, au prix de 3.800.000 euros.

Par courrier daté du 18 décembre 2020 et réceptionné le 8 janvier 2021, la SA Aventis Pharma a refusé cette proposition.

Par une requête et un mémoire introductif d'instance reçus le 20 janvier 2021, l'EPFIF a saisi le juge de l'expropriation du tribunal judiciaire de Bobigny en vue de la fixation du prix du bien préempté.

L'EPFIF justifie avoir consigné une somme de 610.500 euros, correspondant à 15% du montant de l'évaluation du prix par le directeur des services 'scaux et avoir notifié copie du récépissé de la consignation à la SA Aventis Pharma et à la juridiction de l'expropriation reçu le 5 février 2021.

Par jugement du 7 septembre 2021, après transport sur les lieux le 6 avril 2021, le juge de l'expropriation de Bobigny a :

Annexé à la décision le procès-verbal de transport du 6 avril 2021 ;

Fixé la date de référence au 27 mars 2020 en application des articles L.213-4 et L.213-6 du code de l'urbanisme ;

Fixé à 4.909.800 euros le prix d'acquisition du bien appartenant à la SA Aventis Pharma, en valeur libre, situé [Adresse 14] (93) sur les parcelles cadastrées P n°[Cadastre 6], P n°[Cadastre 7], P n°[Cadastre 8], P n°[Cadastre 9], P n°[Cadastre 10], P n°[Cadastre 11], P n°[Cadastre 2] et P n°[Cadastre 3] ;

(La somme de 4.909.800 euros est décomposée comme suit : 7.014 m² x 700 euros/m²)

Dit que les frais de commission d'agence dus par l'EPFIF sont d'un montant de 502.500 euros, dans 1'hypothèse d'une réalisation de l'opération de préemption et en cas de besoin, la condamne au paiement ;

Précisé que le prix d`acquisition et les frais de commission sont fixés hors taxe ;

Condamné l'EPFIF au paiement des dépens de la présente procédure.

L'EPFIF a interjeté appel du jugement le 28 octobre 2021 sur le montant de la commission d'agence mentionnée dans la déclaration d'intention d'aliéner.

Pour l'exposé complet des faits, de la procédure, des prétentions et moyens des parties, conformément à l'article 455 du code de procédure civile, il est expressément renvoyé à la décision déférée et aux écritures :

1/ adressées au greffe par l'EPFIF, le 18 janvier 2022, notifiées le 21 janvier 2022 (AR intimé le 24 janvier 2022 et AR CG le 24 janvier 2022), aux termes desquelles il est demandé à la cour de :

Dire et juger l'EPFIF bien fondé en son appel partiel du jugement du 7 septembre 2021 (RG n° 21/00005) ;

En conséquence,

Infirmer le jugement du 7 septembre 2021 en ce qu'il a condamné l'EPFIF au paiement de la somme de 502.500 euros HT au titre de la commission d'agence due à la société Abiding ;

Fixer le montant de la commission due à la société Abiding à la somme de 245.490 euros HT, correspondant à 5% du prix fixé judiciairement si le processus de transfert de propriété des parcelles cadastrées à [Localité 20] section P n°[Cadastre 6], P n°[Cadastre 7], P n°[Cadastre 8], P n°[Cadastre 9], P n°[Cadastre 10], P n°[Cadastre 11], P n°[Cadastre 2] et P n°[Cadastre 3] pour une contenance totale de 7.014 m² prévu par l'article L.213-14 du Code de l'urbanisme est mené à son terme.

2/ adressées au greffe par l'EPFIF, le 26 septembre 2022, notifiées le 28 septembre 2022 (AR partie intervenante le 30 septembre 2022 et AR CG le 30 septembre 2022), aux termes desquelles il est demandé à la cour de :

Dire et juger l'EPFIF bien fondé en son appel partiel du jugement du 7 septembre 2021 (RG n° 21/00005) ;

En conséquence,

Infirmer le jugement du 7 septembre 2021 en ce qu'il a condamné l'EPFlF au paiement de la somme de 502.500 euros HT au titre de la commission d'agence due à la société Abiding ;

Fixer le montant de la commission due à la société Abiding à la somme de 245.490 euros HT, correspondant à 5% du prix fixé judiciairement si le processus de transfert de propriété des parcelles cadastrées à [Localité 20] section P n°[Cadastre 6], P n°[Cadastre 7], P n°[Cadastre 8], P n°[Cadastre 9], P n°[Cadastre 10], P n°[Cadastre 11], P n°[Cadastre 2] et P n°[Cadastre 3] pour une contenance totale de 7.014 m² prévu par l'article L.213-14 du Code de l'urbanisme est mené à son terme.

Se déclarer incompétent pour statuer sur les demandes de condamnation formées par la société Abiding.

En tout état de cause, la dire mal fondée en ses demandes.

Subsidiairement, sur le fondement de l'article L.311-8 du code de l'expropriation, si la Cour estime qu'il existe une contestation sérieuse sur le fond du droit, fixer le montant de la commission sous forme d'une alternative et renvoyer la partie la plus diligente à saisir la juridiction de droit commun.

Condamner la société Abiding à verser à l'EPFIF une somme de 3.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

3/ déposées au greffe par la société Abiding, intervenante volontaire, le 13 avril 2022, notifiées le 14 avril 2022 (AR appelant le 25 avril 2022 et AR CG le 19 avril 2022), aux termes desquelles elle demande à la cour de :

Déclarer recevable et bien fondée la société Abiding en son intervention volontaire ;

Déclarer mal fondé l'appel interjeté par l'EPFIF ;

Débouter l'EPFIF de l'ensemble de ses demandes, 'ns et conclusions ;

En conséquence,

Confirmer la décision entreprise en toutes ses dispositions ;

Y ajoutant et à titre reconventionnel,

Condamner l'EPFIF à verser à la société Abiding la somme de 2.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Condamner l'EPFIF aux entiers d'appel, y compris les frais d'expertise dont le recouvrement sera poursuivi par Maître Cédric Jobelot conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

4/déposées au greffe par la société Abiding , intervenante volontaire le 30 juin 2022 notifiées le 30 juin 2022( AR du 4 juillet 2022) aux termes desquelles elle demande à la cour de :

Déclarer recevable et bien fondée la société Abiding en son intervention volontaire ;

Déclarer mal fondé l'appel interjeté par l'EPFIF ;

Débouter l'EPFIF de l'ensemble de ses demandes, 'ns et conclusions ;

En conséquence,

Confirmer la décision entreprise en toutes ses dispositions ;

Y ajoutant et à titre reconventionnel,

Condamner l'EPFIF à verser à la société Abiding la somme de 2.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Condamner l'EPFIF aux entiers d'appel, y compris les frais d'expertise dont le recouvrement sera poursuivi par Maître Cédric Jobelot conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

5/ déposées au greffe par la société Abiding, intervenante volontaire, le 24 octobre 2022, notifiées le 24 octobre 2022 (AR Appelant et CG le 04 juillet 2022), aux termes desquelles elle demande à la cour de :

Déclarer recevable et bien fondée la société Abiding en son intervention volontaire ;

Déclarer mal fondé l'appel interjeté par l'EPFIF ;

Débouter l'EPFIF de l'ensemble de ses demandes, 'ns et conclusions ;

En conséquence,

Confirmer la décision entreprise en toutes ses dispositions ;

Y ajoutant et à titre reconventionnel,

Condamner l'EPFIF à verser à la société Abiding la somme de 2.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Condamner l'EPFIF aux entiers d'appel, y compris les frais d'expertise dont le recouvrement sera poursuivi par Maître Cédric Jobelot conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

6/ adressées au greffe par le commissaire du gouvernement, intimé, formant appel incident,

le 21 avril 2022, notifiées le 25 avril 2022 (AR appelant le 26 avril 2022 et AR intervenant

le 26 avril 2022), aux termes desquelles il est demandé à la cour de :

Fixer le montant de la commission due à la somme de 245.490 euros HT (5% x 4.909.800 euros).

EXPOSE DES PRETENTIONS ET DES MOYENS DES PARTIES :

L'EPFIF fait valoir que :

Concernant la commission d'agence, celle-ci doit être limitée à 5% de la valeur vénale fixée par le premier juge, à savoir 4.909.800 euros, et non à 5% du prix de cession mentionné dans la déclaration d'intention d'aliéner, à savoir 502.500 euros HT, conformément au paragraphe « Négociation » de la note annexée à la déclaration d'intention d'aliéner (Pièce 1A) et à l'article 3.2 du mandat exclusif de vente (Pièce 7A). Le montant de la commission doit donc s'élever à 245.490 euros (5% x 4.909.800 euros).

L'EPFIF fait valoir dans son mémoire récapitulatif et en réplique que :

Le juge de l'expropriation est incompétent pour statuer sur une demande formée par un intermédiaire immobilier de condamnation d'un expropriant, laquelle relève des juridictions de droit commun. Cette position est celle d'auteurs de la doctrine, en l'occurrence MM. [P] et [U], et celle de la Cour d'appel de Dijon dans un arrêt du 27 avril 2015 (15/03).

A défaut, la demande de l'intervenant volontaire est mal fondée car la rémunération de l'intermédiaire immobilier, si elle incombe à l'acquéreur, ne peut pas être supérieure à celle stipulée dans le mandat, dans la promesse de vente ou résultant de l'article 73 du décret du 20 juillet 1972. Dans une affaire similaire où le prix fixé judiciairement s'était révélé inférieur à celui résultant de la promesse de vente, la cour d'appel d'Amiens a jugé dans un arrêt du 2 février 2017 (RG 13/07314), qu'un agent immobilier ne pouvait pas réclamer une somme supérieure à celle prévue contractuellement. La Cour de cassation a validé cette analyse dans un arrêt portant sur la même affaire du 16 mars 2022 (20-17.028). A défaut de suivre cette analyse, il en résulterait une violation de l'article 73 du décret du 20 juillet 1972 et un enrichissement sans cause de l'intermédiaire immobilier.

La SA Aventis Pharma n'a pas constitué avocat et n'a pas fait parvenir de conclusions.

La SAS Abiding conclut que :

Son intervention volontaire à la procédure afin de solliciter la confirmation du jugement est bien fondée en ce qu'elle a intérêt à voir l'EPFIF débouté de sa demande de diminution de la commission d'agence qui lui est due.

Concernant la fixation du montant de la commission d'agence, il ressort de la jurisprudence de la Cour de cassation que la substitution du préempteur à l'acquéreur ne doit pas porter atteinte au droit à commission de l'agent immobilier tel qu'il est conventionnellement prévu, peu important à cet égard que le prix d'acquisition du bien préempté soit inférieur à celui qui avait été initialement convenu entre le vendeur et acquéreur, ce droit étant conditionné par l'indication du montant et de la partie qui en a la charge dans l'engagement des parties et dans la déclaration d'intention d'aliéner. (02-18.746, 06-17.337, 19-25.226) (Pièces 2IV, 3IV, 4IV) En l'espèce, il est établi que tant la promesse unilatérale de vente que la déclaration d'intention d'aliéner mentionnent une commission d'agence à hauteur de 502.500 euros HT soit 603.000 euros TTC à la charge de l'acquéreur. Contrairement à ce que prétend l'EPFIF, il n'y a pas lieu de tenir compte du mandat, la préemption ayant été effectuée sur la base de la déclaration d'intention d'aliéner.

Concernant les frais irrépétibles, il serait inéquitable de laisser à la charge de la société Abiding les frais irrépétibles qu'elle a été contrainte d'exposer pour la défense de ses intérêts. L'EPFIF sera en conséquence condamné au paiement de la somme de 2.000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

La SAS Abiding ajoute dans un second jeu de conclusions que :

Même si le commissaire du gouvernement observe qu'au regard du mandat exclusif de vente et de la note annexe à la déclaration d'aliéner, la rémunération du mandataire semble être indexée sur le prix de vente, il n'y a pas lieu de tenir compte du mandat mais de la déclaration d'intention d'aliéner, laquelle indique expressément que le montant de la commission d'agence s'élève à 603.000 euros TTC. La promesse unilatérale de vente mentionne également expressément ce montant.

Elle ajoute dans un troisième jeu de conclusions que :

- la demande relative à la compétence du juge de l'expropriation pour statuer sur une demande de condamnation au titre de la commission d'agence est une demande nouvelle qui n'avait pas été soumise par l'appelant dans ses premières conclusions, de sorte qu'elle doit être déclarée irrecevable. Il en est de même de la demande subsidiaire de l'EPFIF tendant à obtenir de la cour statue sous forme alternative et renvoie les parties à saisir la juridiction de droit commun. En tout état de cause, le juge de l'expropriation est compétent.

L'arrêt de la cour d'appel de Rennes invoqué au soutien des prétentions de l'appelant mentionne que la déclaration d'intention d'aliéner faisait référence à un taux appliqué sur le prix de vente ; or en l'espèce, la déclaration d'intention d'aliéner vise expressément la somme de 603'000 euros TTC au titre de la commission d'agence ;

- la demande de condamnation de la partie intervenante au paiement des frais visés par l'article 700 du code de procédure civile n'est pas juste dès lors que les frais d'avocat exposés par l'appelante ne résultent pas de la partie intervenante mais simplement de sa propre décision d'interjeter appel.

Le commissaire du gouvernement conclut que :

Concernant la demande de l'appelant relative à l'infirmation du jugement de première instance portant sur le montant de la commission d'agence due, la déclaration d'intention d'aliéner mentionne certes dans son cadre F « Modalités de la cession » une commission d'agence d'un montant de 603.000 euros TTC à la charge de l'acquéreur, mais la rubrique Négociation (page 4) de la note annexe à la déclaration d'intention d'aliéner précise que la commission de l'intermédiaire immobilier s'élève à 5% du prix du bien hors taxe, soit 502.500 euros HT. (Pièce 1A) De même, l'article 3.2 Rémunération du Mandataire (page 3) du mandat exclusif de vente corrobore cette information relative à la rémunération du mandataire, qui semble être indexée sur le prix de la vente. (Pièce 7A). Il convient donc de fixer le montant de la commission due à 5 % du prix du bien hors taxe, soit 245.490 euros HT.

SUR CE, LA COUR

- sur l'intervention volontaire

Selon les dispositions de l'article 544 du code de procédure civile peuvent intervenir en cause d'appel dès lors qu'elles y ont intérêt les personnes qui n'ont été ni parties ni représentées en première instance ou qui y ont figuré en une autre qualité.

La société Abiding indique que l'EPFIF sollicitant la réformation du jugement et plus précisément la diminution de la commission d'agence qui lui est due, elle a manifestement un intérêt à intervenir volontairement à la procédure pour solliciter la confirmation du jugement rendu le 7 septembre 2021.

L'EPFIF et le commissaire du gouvernement ne contestent pas l'intervention volontaire de la société Abiding ; l'appel de l'EPFIF portant sur la commission d'agence de la société Abiding, celle-ci a intérêt pour intervenir volontairement à la procédure d'appel sur le fondement de l'article 544 du code de procédure civile.

En conséquence, la société Abiding sera déclarée recevable et bien fondée en son intervention volontaire.

Sur la recevabilité des conclusions

Aux termes de l'article R 311-26 du code de l'expropriation modifié par décret N°2017-891 du 6 mai 2017 - article 41 en vigueur au 1 septembre 2017, l'appel étant du 28 octobre 2021, à peine de caducité de la déclaration d'appel, relevée d'office, l'appelant dépose ou adresse au greffe de la cour ses conclusions et les documents qu'il entend produire dans un délai de trois mois à compter de la déclaration d'appel.

À peine d'irrecevabilité, relevée d'office, l'intimé dépose ou adresse au greffe de la cour ses conclusions et les documents qu'il entend produire dans un délai de trois mois à compter de la notification des conclusions de l'appelant. Le cas échéant, il forme appel incident dans le même délai et sous la même sanction.

L'intimé à un appel incident ou un appel provoqué dispose, à peine d'irrecevabilité relevée d'office, d'un délai de trois mois à compter de la notification qui en est faite pour conclure.

Le commissaire du gouvernement dépose ou adresse au greffe de la cour ses conclusions et l'ensemble des pièces sur lesquelles il fonde son évaluation dans le même délai et sous la même sanction que celle prévue au deuxième alinéa.

Les conclusions et documents sont produits en autant d'exemplaires qu'il y a de parties, plus un.

Le greffe notifie à chaque intéressé et au commissaire du gouvernement, dès leur réception, une copie des pièces qui lui sont transmises.

En l'espèce, les conclusions de l'EPFIF du 18 janvier 2022, de la société Abiding du 13 avril 2022 et du commissaire du gouvernement du 21 avril 2022 adressées ou déposées dans les délais légaux sont recevables.

Les conclusions hors délai de la société Abiding N°2 du 30 juin 2022 sont de pure réplique à celles de l'appelant et du commissaire du gouvernement, ne formulent pas de demandes nouvelles et sont donc recevables.

Dans son mémoire récapitulatif et en réplique hors délai de l'EPFIF du 26 septembre 2022, celui-ci soulève l'incompétence du juge de l'expropriation pour statuer sur une demande de condamnation formée par un agent immobilier, tiers au contentieux de fixation du prix d'un bien préempté et en tout état de cause elle conclut que la demande de la société Abiding est mal fondée. À titre subsidiaire, elle demande sur le fondement l'article L 311-8 du code de l'expropriation, si la cour estime qu'il existe une contestation sérieuse sur le fond du droit, de fixer le montant de la commission sous forme alternative et de renvoyer la partie la plus diligente à saisir la juridiction de droit commun.

Dans ses conclusions d'intervention volontaire numéro 3 hors délai du 24 octobre 2022, la société Abiding rétorque que dans ses écritures déposées le 27 septembre 2022, l'EPFIF invoque pour la première fois l'incompétence du juge de l'expropriation pour statuer sur une demande de condamnation au titre de la commission d'agence, qu'il s'agit d'une demande nouvelle formulée hors délai qui est irrecevable ; il en est de même de sa demande subsidiaire tendant à obtenir de la cour qu'elle statue sous forme alternative et renvoie les parties à saisir la juridiction de droit commun.

Dans son mémoire d'appel du 19 janvier 2022, l'EPFIF demande à la cour de :

« vu le jugement du 7 septembre 2021,

vu la déclaration d'intention d'aliéner et ses annexes,

vu la décision de préemption de l'EPFIF,

vu le présent mémoire,

vu les pièces versées aux débats,

Il est demandé à la cour d'appel de Paris :

'de dire et juger l'EPFIF bien fondé en son appel partiel du jugement du 7 septembre 2021 (RG 21/00005) ;

en conséquence :

d'infirmer le jugement du 7 septembre 2021 en ce qu'il a condamné l'EPFIF au paiement de la somme de 502'500 euros hors-taxes au titre de la commission d'agence due à la société Abiding ;

'de fixer le montant de la commission due à la société Abiding à la somme de 245'490 euros hors-taxes, correspondant à 5 % du prix fixé judiciairement si le processus de transfert de propriété des parcelles cadastrées à [Localité 20] section P numéro [Cadastre 6]/[Cadastre 7]/[Cadastre 8]/[Cadastre 9]/[Cadastre 10]/[Cadastre 11]/[Cadastre 2]/[Cadastre 3] pour une contenance totale de 7014 m² prévu par l'article L 213-14 du code urbanisme est mené à son terme. »

Dans son mémoire récapitulatif et en réplique du 27 septembre 2002 hors délai, l'EPFIF demande à la cour de :

'vu le jugement du 7 septembre 2021,

vu l'article 73 du décret du 20 juillet 1972,

vu l'article L 311-8 du code de l'expropriation,

vu la déclaration d'intention d'aliéner et ses annexes,

vu la décision de préemption de l'EPFIF,

vu le présent mémoire,

vu les pièces versées aux débats,

il est demandé à la cour d'appel de Paris :

de dire et juger l'EPFIF bien fondé en son appel partiel du jugement du 7 septembre 2021 (RG numéro 21/00005) ;

en conséquence :

infirmer le jugement du 7 septembre 2021 en ce qu'il a condamné l'EPFIF au paiement de la somme de 502'500 euros hors-taxes au titre de la commission d'agence due à la société Abiding ;

de fixer le montant la commission due à la société Abiding à la somme de 245'490 euros hors-taxes, correspondant à 5 % du prix fixé judiciairement si le processus de transfert de propriété des parcelles cadastrées à [Localité 20] section P numéro [Cadastre 6]/[Cadastre 7]/[Cadastre 8]/[Cadastre 9]/[Cadastre 10]/[Cadastre 11]/[Cadastre 2]/[Cadastre 3] pour une contenance totale de 7014 m² prévu par l'article L 213-14 du code urbanisme est mené à son terme ;

se déclarer incompétent pour statuer sur les demandes de condamnation formées par la société Abiding ;

en tout état de cause,la dire mal fondée en ses demandes,

subsidiairement, sur le fondement de l'article L 311-8 du code de l'expropriation, si la cour estime qu'il existe une contestation sérieuse sur le fond du droit, fixer le montant de la commission sous forme d'une alternative et renvoyer la partie la plus diligente à saisir la juridiction de droit commun ;

'condamner la société Abiding à verser à l'établissement public foncier d'Île-de-France une somme de 3000 euros au titre de l' article 700 du code de procédure civile. ».

Les conclusions d'intervention volontaire hors délai du 24 octobre 2022 de la société Arbiding sont en réponse au mémoire récapitulatif et en réplique de l'EPFIF du 27 septembre 2022 sur le fondement l'article R311-26 du code de l'expropriation, et ne formulant pas de demandes nouvelles, sont en conséquence recevables.

Dans son mémoire récapitulatif et en réplique du 27 septembre 2022, l'EPFIF formule des demandes nouvelles hors délai à savoir, à titre principal se déclarer incompétent pour statuer sur les demandes de condamnation formées par la société Abiding et à titre subsidiaire, sur le fondement l'article L 311-8 du code de l'expropriation, si la cour estime qu'il existe une contestation sérieuse sur le fond du droit, de fixer le montant la commission sous forme d' une alternative et renvoyer la partie la plus diligente à saisir la juridiction de droit commun.

Ces demandes formées hors délai sont effectivement comme l'indique la société Abiding nouvelles et seront donc déclarées irrecevables sur le fondement de l'article R 311-26 du code de l'expropriation.

Les autres demandes n'étant pas nouvelles, ayant été formulées dans le mémoire d'appel, les conclusions susvisées seront déclarées recevables sur ces autres points.

Cependant, la cour doit se prononcer d'office s'agissant de la commission de l'agence immobilière sur la compétence du juge de l' expropriation et sur la compétence du juge du droit commun, et sur la disposition spécifique prévue par le code de l'expropriation à savoir l'article L 311-8.

- Sur le fond

Aux termes de l'article 1er du premier protocole additionnel à la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ratifiée qui s'impose au juge français, toute personne physique ou morale a droit au respect de ses biens. Nul ne peut être privé de sa propriété que pour cause d'utilité publique et dans les conditions prévues par la loi et les principes généraux du droit international ; ces dispositions ne portent pas atteinte au droit que possèdent les Etats de mettre en vigueur les lois qu'il juge nécessaires pour

réglementer l'usage des biens conformément à l'intérêt général ou pour assurer le paiement des impôts ou d'autres contributions ou des amendes.

Aux termes de l'article 17 de la déclaration des droits de l'homme et du citoyen, la propriété est un droit inviolable et sacré, dont nul ne peut être privé si ce n'est lorsque la nécessité publique, légalement constatée, l'exige évidemment, et sous la réserve d'une juste et préalable indemnité.

L'article 545 du code civil dispose que nul ne peut être contraint de céder sa propriété, si ce n'est pour cause d'utilité publique, et moyennant une juste et préalable indemnité.

Aux termes de l'article L 211-5 du code de l'urbanisme, tout propriétaire d'un bien soumis au droit de préemption peut proposer au titulaire de ce droit l'acquisition de ce bien, en indiquant le prix qu'il en demande. Le titulaire doit se prononcer dans un délai de 2 mois à compter de ladite proposition dont copie doit être transmise par le maire au directeur départemental des finances publiques.

À défaut d'accord amiable, le prix est fixé par la juridiction compétente en matière d'expropriation selon les règles mentionnées à l'article L 213-4 du code de l'urbanisme.

En cas d'acquisition, l'article 213-14 est applicable.

Aux termes de l'article L 213-4 du code de l'urbanisme, à défaut d'accord amiable le prix d'acquisition est fixé par la juridiction compétente en matière d'expropriation ; ce prix est exclusif de toute indemnité accessoire, et notamment l'indemnité de remploi.

Conformément aux dispositions de l'article L 322-2, du code de l'expropriation, les biens sont estimés à la date de la décision de première instance, seul étant pris en considération - sous réserve de l'application des articles L 322-3 à L 322-6 dudit code - leur usage effectif à la date définie par ce texte.

L'EPFIF demande la réformation du jugement uniquement au motif de la surévaluation du montant de la commission d'agence mentionnée dans la DIA.

S'agissant de la date de référence, le premier juge l'a fixé à la date du plan local d'urbanisme intercommunal (PLUI) d' Est Ensemble approuvé le 4 février 2020 et rendu opposable le 27 mars 2020.

S'agissant des données d'urbanisme, à cette date le bien est situé en zone UP du PLUI.

Pour ce qui est de la nature du bien, de son usage effectif et de sa consistance, il s'agit d'un terrain en friche, le sol étant en terre et pierre et étant très partiellement bétonné.

Il donne à l'avant sur l'[Adresse 14], à l'arrière se trouve un talus donnant sur un chemin surélevé, [Adresse 19].

Il est situé dans un quartier mixte comprenant des habitations et locaux d'activité, à proximité immédiate du parc départemental de [Localité 20], proche du centre ville et commerces, et à environ 15 minutes de marche de l'arrêt de métro ligne 5 Bobigny-Pantin- Raymond Queneau.

Le premier juge a fixé à la somme de 4 909 800 euros le prix d'acquisition du bien appartenant à AVENTIS PHARMA, en valeur libre et précisé que le prix d'acquisition est fixé hors taxe.

- sur l'appel de l'EPFIF et l'appel incident du commissaire du gouvernement portant sur le montant de la commission d'agence

Le premier juge indique qu'en droit, l'évaluation du prix du bien préempté doit inclure les frais de commission d'agence dès lors que la somme correspondante ainsi que l'indication de la partie qui en a la charge sont mentionnées dans la déclaration d'intention

d'aliéner ; en effet, le titulaire du droit de préemption se substituant à l'acquéreur est, en tant que tel, tenu de prendre en charge les honoraires de négociation qui représentent un élément constitutif du prix;

Il ajoute qu'en l'espèce, la déclaration d'intention d'aliéner, produite en pièce 1 par le demandeur, expose une commission d'agence d'un montant de 603'000 euros TTC, à la charge de l'acquéreur repris en annexe à la DIA en page 4.

Il a donc fixé la commission d'agence à la somme de 502'500 euros hors-taxes, à la charge de l'EPFIF et indiqué dans dispositif de sa décision :

' dit que les frais de commission d'agence dus par l'établissement public foncier d'Île-de-France sont d'un montant de 502'500 euros, dans l'hypothèse d'une réalisation de l'opération de préemption et en cas de besoin, la condamne au paiement ;

précise que le prix d'acquisition et les frais de commission sont fixés hors-taxes'.

L'EPFIF demande de fixer le montant de la commission due à la société Abiding à la somme de 245'490 euros hors-taxes, correspondant à 5 % du prix fixé judiciairement si le processus de transfert de propriété prévue par l'article L213'14 du code urbanisme est mené à son terme.

Il indique que si la déclaration d'intention d'aliéner mentionne dans son cadre F « modalités de la cession » une commission d'agence d'un montant de 603'000 euros TTC à la charge de l'acquéreur et que figure en annexe une note reprenant les conditions essentielles de la promesse de vente conclue entre la SA AVENTIS et la société NOVAXIA IMMO CLUB 6, acquéreur évincé, il convient de préciser que le montant stipulé est déterminé sur la base du prix de cession de 12'060'000 euros TTC mentionné dans la DIA et que le mandat exclusif de vente conclue entre la SA AVENTIS PHARMA et la société Abiding n'avait pas été versé en première instance ; il est précisé à l'article 3.2 « rémunération du mandataire » du mandat (pièce numéro 7) que : « en cas de signature d'un ou de plusieurs actes de vente avec un (des) acquéreur(S) présentée(S) par le mandataire, le mandataire aura droit à une rémunération hors-taxes fixée à :

'5 % du prix de cession des biens hors-taxes,

'la rémunération ne pourra pas être inférieure à 60'000 euros hors-taxes.

Les parties reconnaissent que cette rémunération couvre l'ensemble des frais liés à la mission du mandataire.

Cette rémunération sera à la charge de l'acquéreur et sera exigible le jour où l'opération sera effectivement conclue et constatée dans un acte de vente signé devant notaire.

En cas d'exercice d'un droit de préemption, l'organisme ayant préempté sera subrogé dans tous les droits et obligations de l'acquéreur, en conséquence, toute rémunération incombant, éventuellement, à l'acquéreur sera à la charge de cet organisme.

Le mandant s'engage à mentionner ou à faire mentionner par la personne en charge de la rédaction de l'acte dans tout acte de vente le montant de la rémunération du mandataire et le nom de la partie qui en a la charge. »

L'EPFIF indique qu'il ressort de ces dispositions que la rémunération du mandataire est directement indexée sur le prix auquel la vente se réalisera, ladite rémunération étant alors calculée sur la base 5 % du prix de cession des biens hors-taxes, que la rémunération du mandataire ne peut en tout état de cause être inférieure à 60'000 euros hors-taxes, que la rémunération du mandataire est à la charge de l'acquéreur et que dans l'hypothèse de l'exercice d'un droit de préemption le titulaire ou le délégataire du droit sera subrogé dans les droits et obligations de l'acquéreur initialement pressenti et que par voie de conséquence la rémunération du mandataire sera à la charge de ce dernier ; en conséquence, en conformité avec la valeur vénale fixée par le tribunal à hauteur de 4'909'800 euros, le montant la commission d'intermédiaire sera, en conformité avec les termes du mandat exclusif de vente, ramené à la somme de 245'490 euros correspondant à 5 % du prix fixé judiciairement.

Le commissaire du gouvernement demande également de fixer le montant de la commission à 5 % du prix du bien hors-taxes. Il indique que le prix du bien ayant été fixé à la somme de 4 909 800 euros HT par le juge de première instance, le montant de la commission doit être de 245 490 euros HT.

La société Abiding rétorque que l'EPFIF doit être débouté de sa demande qui contrevient à la jurisprudence constante de la Cour de cassation ; en effet, il n'y a pas eu lieu de tenir compte du mandat, la préemption ayant été effectuée sur la base de la déclaration d'intention d'aliéner et il est établi que tant la promesse unilatérale de vente que la déclaration d'intention d'aliéner mentionnent une commission d'agence à hauteur de 502'500 euros hors-taxes soit 603'000 euros TTC à la charge de l'acquéreur.

Selon l'article 6 de la loi numéro 70-9 du 2 janvier 1970, les mandats de vente préalablement établis pour autoriser un intermédiaire à négocier doivent impérativement être rédigés par écrit et préciser « les conditions de détermination de la rémunération de l'agent immobilier », celle-ci pouvant prendre la forme d'une commission forfaitaire ou une commission calculée en pourcentage du prix de vente.

L'article 73 du décret numéro 72-678 du 20 juillet 1972, compléte cette disposition en précisant que «le montant de la rémunération ou les honoraires sont portés dans l'engagement des parties ».

L'EPFIF ne conteste pas le fait qu'en sa qualité de délégataire du droit de préemption, et que pour autant que le processus de transfert de propriété prévue par l'article L 213-14 du code urbanisme puisse aller à son terme, il est subrogé dans les droits et obligations de la NOVAXIA IMMO CLUB 6 acquéreur évincé.

En effet, en application de l'article 1134 du Code civil, la Cour de cassation par arrêt du 26 septembre 2007 numéro 06-17 333 et du 12 mai 2021 numéro 19-25 226 dit que l'organisme qui exerce son droit de préemption est tenu de prendre en charge la rémunération des intermédiaires immobiliers incombant à l'acquéreur auquel il est substitué, ce droit étant conditionné par l'indication du montant et de la partie qui en a la charge dans l'engagement des parties et dans la déclaration d'intention d'aliéner, ce qui est le cas en l'espèce.

En l'espèce, la DIA fixe une commission d'agence d'un montant de 603'000 euros TTC, à la charge de l'acquéreur, et la note en annexe 4, dans la rubrique négociation mentionne : « les parties déclarent qu'elles ont eu recours à un intermédiaire, la société Abiding, pour les mettre en relation aux fins des présentes, en vertu d'un mandat stipulant une commission à la charge du bénéficiaire.

Le montant de ladite commission s'élevant à 5 % du prix du bien hors-taxes, soit 502'500 euros hors-taxes, soit 603'000 euros TTC. Elle sera payée par le bénéficiaire, qui s'y engage dès à présent, jour de la réalisation des présentes par acte authentique ».

L'EPFIF demande de voir ramener le montant de la commission d'agence à la somme de 245'490 euros hors-taxes, correspondant à 5 % du prix fixé par le tribunal.

Cependant, dans un arrêt du 26 septembre 2007 N°0-17337 , la cour de cassation indique que ' l'organisme qui exerce son droit de préemption est tenu de prendre en charge la rémunération des intermédiaires immobiliers incombant à l'acquéreur auquel il est substitué, ce droit étant conditionné par l'indication du montant et de la partie qui en a la charge dans l'engagement des parties et dans la déclaration d'aliéner'.

Ainsi, la commission est due lorsque la préemption s'exerce aux prix et conditions mentionnés dans la DIA.

De plus, la Cour de cassation par arrêt du 24 janvier 2006 N° 02-18 746, confirmé par arrêt du 12 mai 2021 N°19-226 dit 'qu'il résulte de l'article 6 de la loi numéro 70-9 du 2 janvier 1970, ensemble de l'article 73 du décret N° 72-678 du 20 juillet 1972, que la substitution du préempteur à l'acquéreur ne porte pas atteinte au droit à commission de l'agent immobilier, tel qu'il est conventionnellement prévu, peu important à cet égard que le prix d'acquisition du bien préempté soit inférieur à celui qui avait été initialement convenu entre le vendeur et l' acquéreur'.

En conséquence, en l'espèce, si le prix d'acquisition est fixé par le juge de l'expropriation, la commission est également due selon les conditions mentionnées dans la DIA et annexe.

En outre, la Cour de cassation a dit par arrêts des 15 juin 20000 N°99-70080, du 14 décembre 2017 N° 16-20 150 et 12 mai 2021 N°19-25 226 que le juge de l'expropriation, est compétent pour déterminer, en fonction des indications figurant dans l'engagement des parties et dans la déclaration d'intention d'aliéner, si l'organisme qui exerce son droit de préemption est tenu, en ce qu'il est substitué à l'acquéreur, de prendre en charge la rémunération de l'intermédiaire immobilier ; dans ce même derrier arrêt, la Cour de cassation ajoute que le juge de l' expropriation n'est pas compétent pour réduire ou supprimer cette rémunération.

Enfin, s'agissant de l'article L311-8 du code de l'expropriation qui dispose que lorsqu'il existe une contestation sérieuse sur le fond du droit ou sur la qualité des réclamants et toutes les fois qu'il s'élève des difficultés étrangères à la fixation du montant d'indemnités et l'application des articles L 242-1 à L242-7, L423-2 et L 423-3, le juge fixe, indépendamment de ces contestations et difficultés autant d'indemnités alternatives qu'il y a d'hypothèses envisageables et renvoie les parties à se pourvoir devant qui de droit, la Cour de cassation par une jurisprudence constante ne fait pas application de cette disposition dans le cadre de la fixation de la commission d'agence suite à l'exercice du droit de préemption.

En conséquence, le premier juge a exactement dit qu'il convient de fixer la commission d'agence à la somme de 502'500 euros hors-taxes, à la charge de l'EPFIF.

Si le premier juge dans le dispositif indique que les frais de commission d'agence due par l'établissement public foncier d'Île-de-France sont d'un montant de 502'500 euros, dans l'hypothèse d'une réalisation de l'opération de préemption, il a indiqué à tort qu'il a condamné en cas de besoin au paiement.

Il convient en conséquence d'infirmer le jugement en ce sens et de débouter l'EPFIF de sa demande de fixer le montant la commission due à la société Abiding à la somme de 245'490 euros hors-taxes correspondant à 5 % du prix fixé judiciairement si le processus de transfert de propriété prévue par l'article L 213-14 du code de l'urbanisme est mené à son terme ; le principe du montant HT n'étant pas contesté.

- Sur l'article 700 du code de procédure civile

L'équité commande de débouter l'EPFIF de sa demande au titre de l' article 700 du code de procédure civile et de le condamner sur ce fondement à payer la somme de 2 000 euros à la société Abiding.

- Sur les dépens

Il convient de confirmer le jugement pour les dépens de première instance.

La société Abiding demande de condamner l'EPFIF aux entiers dépens, y compris les frais d'expertise dont le recouvrement sera poursuivi par Maître Cédric Jobelot, conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

L'EPFIF perdant le procès sera condamné aux dépens avec distraction, mais il n'y a pas lieu d'y intégrer les frais d'expertise invoqués.

PAR CES MOTIFS,

La cour statuant publiquement par mise à disposition au greffe, par arrêt réputé contradictoire et en dernier ressort,

Déclare recevable et bien fondée la société Abiding en son intervention volontaire ;

Déclare recevables les conclusions de l'EPFIF du 18 janvier 2022, de la société Abiding du 13 avril 2022 et du commissaire du gouvernement du 21 avril 2022 ;

Déclare recevables les conclusions hors délai de la société Abiding du 30 juin 2022 et du 24 octobre 2022 ;

Déclare recevables le mémoire récapitulatif et en réplique de l'EPFIF du 27 septembre 2022, sauf à déclarer irrecevables les demandes nouvelles suivantes :

- se déclarer incompétent pour statuer sur les demandes de condamnations formées par la société Abiding

- subsidiairement, sur le fondement l'article L 311-8 du code de l'expropriation, si la cour estime qu'il existe une contestation sérieuse sur le fond du droit, fixer le montant la commission suivant des alternatives et renvoyer la partie la plus diligente à saisir la juridiction de droit commun ;

Infirme partiellement le jugement entrepris dans les limites des appels ;

Statuant à nouveau,

Déboute l'établissement public d'île de France( EPFIF) de sa demande de fixer le montant la commission due à l'agence Abiding à la somme de 245'490 euros hors-taxes, correspondant à 5 % du prix fixé judiciairement ;

Dit que les frais de commission d'agence due par l'établissement public foncier d'Île-de-France( EPFIF) à la société Abiding sont d'un montant de 502'500 euros hors-taxes, dans l'hypothèse de la réalisation de l'opération de préemption ;

Déboute les parties de leurs demandes plus amples ou contraires ;

Condamne l'établissement public d'île de France à payer la somme de 2000 euros à la société Abiding au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

Condamne l'établissement public d'Île-de-France aux dépens, dont le recouvrement sera poursuivi par Maître Cédric Jobelot conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 4 - chambre 7
Numéro d'arrêt : 21/18759
Date de la décision : 15/12/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-12-15;21.18759 ?
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