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15/12/2022 | FRANCE | N°21/06622

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 4 - chambre 11, 15 décembre 2022, 21/06622


REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS



COUR D'APPEL DE PARIS



Pôle 4 - Chambre 11



ARRET DU 15 DECEMBRE 2022



(n° , pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 21/06622

N° Portalis 35L7-V-B7F-CDOM2



Décision déférée à la Cour : Jugement du 10 Février 2021 -Tribunal de Grande Instance de CRETEIL - RG n° 19/06494



APPELANTS



Monsieur [T] [K]

[Adresse 5]

[Localité 7]

né le [Date naissance 2] 1958 à [Localité

14] (France)

Représenté et assisté par Me Guillaume FOURRIER, avocat au barreau de PARIS, toque : E2096



Madame [N] [K] épouse [K]

[Adresse 5]

[Localité 7]

née le [Date naissance 1] 196...

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 4 - Chambre 11

ARRET DU 15 DECEMBRE 2022

(n° , pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 21/06622

N° Portalis 35L7-V-B7F-CDOM2

Décision déférée à la Cour : Jugement du 10 Février 2021 -Tribunal de Grande Instance de CRETEIL - RG n° 19/06494

APPELANTS

Monsieur [T] [K]

[Adresse 5]

[Localité 7]

né le [Date naissance 2] 1958 à [Localité 14] (France)

Représenté et assisté par Me Guillaume FOURRIER, avocat au barreau de PARIS, toque : E2096

Madame [N] [K] épouse [K]

[Adresse 5]

[Localité 7]

née le [Date naissance 1] 1960 à [Localité 11] (France)

Représentée et assistée par Me Guillaume FOURRIER, avocat au barreau de PARIS, toque : E2096

INTIMES

FONDS DE GARANTIE DES ASSURANCES OBLIGATOIRES DE DOMMAGES

[Adresse 8]

[Localité 10]

Représentée par Me Laure FLORENT de l'AARPI FLORENT AVOCATS, avocat au barreau de PARIS, toque : E0549

ASSURANCE MUTUELLE DES MOTARDS

[Adresse 4]

[Localité 6]

Représentée par Me Edmond FROMANTIN, avocat au barreau de PARIS, toque : J151

Assistée par Me Elise PIN, avocat au barreau de PARIS

CPAM DE NANTERRE

[Adresse 3]

[Localité 9]

n'a pas constitué avocat

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 22 Septembre 2022, en audience publique, devant la Cour composée de :

Mme Françoise GILLY-ESCOFFIER, présidente de chambre

Mme Nina TOUATI, présidente de chambre

Mme Dorothée DIBIE, conseillère

qui en ont délibéré, un rapport a été présenté à l'audience par Madame Nina Touati, présidente de chambre dans les conditions prévues par l'article 804 du code de procédure civile.

Greffier lors des débats : Mme Roxanne THERASSE

ARRET :

- Réputé contradictoire

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Françoise GILLY-ESCOFFIER, présidente de chambre et par Roxanne THERASSE, greffière, présente lors de la mise à disposition à laquelle la minute a été remise par le magistrat signataire.

FAITS ET PROCÉDURE

Le 10 septembre 2014 à [Localité 16] (93), alors qu'il circulait sur l'autoroute A3 au guidon de sa motocyclette en direction de [Localité 15], M. [T] [K], assuré auprès de la société Assurance mutuelle des motards (la Mutuelle des motards), a été victime d'un accident de la circulation dans lequel était impliqué un véhicule qui le précédait dont le conducteur a pris la fuite et n'a pu être identifié.

M. [K] a invoqué la garantie corporelle du conducteur qu'il avait souscrite auprès de la Mutuelle des motards, laquelle a organisé un examen médical amiable et a saisi le Fonds de garantie des assurances obligatoires de dommages (le FGAO) pour qu'il intervienne dans l'indemnisation de son assuré.

Par lettre du 14 avril 2015, le FGAO a fait connaître son refus d'indemniser M. [K] compte tenu de la faute de conduite commise par ce dernier.

Par ordonnance du 28 septembre 2017, le juge des référés a ordonné une mesure d'expertise médicale de M. [K].

Le Docteur [I] [M] désigné en remplacement de l'expert initialement commis a établi son rapport le 26 septembre 2018.

Par actes des 1er, 2 et 5 août 2019, M. [K] et son épouse, Mme [N] [K] ont fait assigner le FGAO, la Mutuelle des motards et la caisse primaire d'assurance maladie de Nanterre (la CPAM) afin d'obtenir l'indemnisation de leurs préjudices consécutifs à l'accident.

Par jugement du 10 février 2021, le tribunal judiciaire de Créteil a :

- débouté M. et Mme [K] de toutes leurs demandes,

- condamné M. et Mme [K] solidairement aux dépens avec possibilité de recouvrement en application de l'article 699 du code de procédure civile,

- condamné M. et Mme [K], in solidum, à payer à la Mutuelle des motards une indemnité de 2 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- ordonné l'exécution provisoire de la décision,

- rejeté toutes prétentions plus amples ou contraires des parties.

Par déclaration du 7 avril 2021, M. et Mme [K] ont interjeté appel de cette décision en critiquant chacune de ses dispositions.

PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES

Vu les conclusions M. et Mme [K], notifiées le 2 juin 2021, aux termes desquelles ils demandent à la cour de :

Vu la loi du 5 juillet 1985,

- recevoir les époux [K] en leurs appel, les y déclarant bien fondés et y faisant droit,

- réformer le jugement du tribunal judiciaire de Créteil,

Et statuant à nouveau,

- condamner la Mutuelle des motards dans le cadre de la garantie contractuelle du conducteur et le FGAO dans le cadre de la loi du 5 juillet 1985 à indemniser M. [K] de ses préjudices, celui-ci n'ayant commis aucune faute de nature à diminuer ou exclure son droit à indemnisation,

A titre subsidiaire,

- fixer le droit à indemnisation de M. [K] à 85%,

- condamner le FGAO à verser [à M. [K]] :

- 1 300 euros pour les frais de déplacement

- 7 130 euros au titre de la tierce personne avant consolidation

- 1 039,10 euros pour les pertes de gains professionnels actuels

- 9 120 euros au titre de la tierce personne permanente échue

- 52 284 euros au titre de la tierce personne [à échoir]

- 80 000 euros au titre de l'incidence professionnelle

- 225 euros au titre du déficit fonctionnel temporaire total

- 2 338 euros au titre du déficit fonctionnel temporaire partiel

- 25 000 euros au titre de la souffrance endurée

- 45 000 euros au titre du déficit fonctionnel permanent

- 2 000 euros au titre du préjudice esthétique temporaire

- 4 000 euros au titre du préjudice esthétique permanent

- 15 000 euros au titre du préjudice d'agrément,

- faire application des dispositions des articles L.211-9 et suivants du code des assurances, puisque le FGAO n'a pas présenté d'offre d'indemnisation, à compter du 10 décembre 2014 à défaut du 26 février 2019 sur le montant des sommes fixées par la cour avant imputation de la créance de la CPAM,

- condamner le FGAO à verser à Mme [K] une somme de 10 000 euros en réparation de son préjudice moral,

- condamner le FGAO à leur verser la somme de 3 000 euros par application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile pour la procédure devant le tribunal judiciaire et celle de 3 000 euros pour la procédure d'appel,

- condamner le FGAO, à défaut la Mutuelle des motards, aux entiers dépens.

Vu les conclusions du FGAO, notifiées le 17 février 2022, aux termes desquelles il demande à la cour de :

Vu les articles L.421-1 et suivants, R.421-14 et R.421-15 du code des assurances,

Vu la loi du 5 juillet 1985 et en particulier son article 4,

A titre principal,

- juger l'appel formé par M. et Mme [K] [K] mal fondé,

En conséquence,

- les en débouter,

- confirmer le jugement rendu le 10 février 2021 en toutes ses dispositions,

- juger que M. [K] a commis une faute de conduite de nature à exclure son droit à indemnisation,

- débouter M. et Mme [K] de toutes leurs demandes, fins et conclusions,

A titre subsidiaire,

- constater que M. [K] a souscrit une garantie corporelle du conducteur auprès de la Mutuelle des motards,

- rappeler que l'obligation du FGAO est subsidiaire et qu'il ne paie que les indemnités qui ne peuvent être prises en charge à aucun autre titre,

En conséquence,

- débouter M. et Mme [K] de toutes leurs demandes, fins et conclusions dirigées à l'encontre du FGAO,

A titre infiniment subsidiaire,

- limiter le droit à indemnisation de M. [K], et par conséquent de Mme [K], à hauteur de 50% pour tenir compte de sa faute,

- juger que compte tenu du rôle subsidiaire du FGAO, il convient de déduire de l'indemnisation de M. [K] les sommes qui devront être versées par la Mutuelle des motards,

- juger que M. [K] serait justement indemnisé par 50% des sommes suivantes :

- dépenses de santé actuelles : mémoire

- frais divers : néant

- assistance d'une tierce personne temporaire : 6 357 euros

- perte de gains professionnels actuels : néant

- incidence professionnelle : néant après déduction créance

- assistance d'une tierce personne permanente : 10 180,86 euros

- déficit fonctionnel temporaire : 2 563 euros

- souffrances endurées : 12 000 euros

- préjudice esthétique temporaire : 500 euros

- déficit fonctionnel permanent : 2 200 euros

- préjudice d'agrément : rejet

total : 33 800,86 euros

somme due (50%) : 16 900,43 euros,

- rappeler que, compte tenu du rôle subsidiaire du FGAO, toutes les sommes versées au même titre doivent être déduites,

- débouter M. et Mme [K] de leurs autres demandes, fins et conclusions,

- statuer ce que de droit quant aux dépens.

Vu les conclusions de la Mutuelle des motards, notifiées le 30 août 2021, aux termes desquelles elle demande à la cour de :

Vu les dispositions de la loi du 5 juillet 1985,

Vu l'article 1103 du code civil,

- constater que les prestations versées par la CPAM à M. [K] s'élèvent à la somme de 95 144,51 euros dont 59 803,37 euros de rente capitalisée au titre de l'accident du 10 septembre 2014,

En conséquence,

- juger que la rente accident du travail versée par la CPAM absorbe intégralement les sommes qui seraient susceptibles d'être versées par la Mutuelle des motards au titre de la garantie individuelle conducteur,

- confirmer les termes du jugement du 10 février 2021 en ce qu'il a débouté «les consorts [K]» de l'intégralité de leurs demandes à l'encontre de la Mutuelle des motards,

- condamner les «consorts [K]» au paiement d'une somme de 3 000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux dépens dont distraction au profit de Maître Edmond Fromantin dans les conditions de l'article 699 du code de procédure civile.

Par acte d'huissier de justice du 7 juin 2021, délivré à personne habilitée, la CPAM a reçu signification de la déclaration d'appel et n'a pas constitué avocat. Elle a toutefois, à la demande de la cour, communiqué le décompte définitif de ses débours établi le 16 décembre 2021, lequel a été adressée aux avocats des parties par le greffe.

La cour a invité les parties à conclure par note en délibéré sur les moyens suivants :

- sur l'application des articles L. 421-1 et R. 421-13 du code des assurances et L. 131-2 du même code aux prestations prévues par la garantie «protection du conducteur» souscrite par M. [K], étant observé que les conditions générales de la police d'assurance comportent une clause de subrogation (article 9-8 p. 33),

- sur l'application de l'article L. 211-22, alinéa 1, du code des assurances aux termes duquel « les délais prévus à l'article L. 211-9 courent contre le fonds à compter du jour où celui-ci a reçu les éléments justifiant son intervention».

Vu la note en délibéré transmise par RPVA par le FGAO le 12 octobre 2022,

Vu la note en délibéré transmise par RPVA par M. et Mme [K] le 25 octobre 2022,

Vu la note en délibéré transmise par la Mutuelle des motards le 28 octobre 2022.

MOTIFS DE LA DECISION

Sur le droit à indemnisation de M. [K] en application de la loi du 5 juillet 1985

M. et Mme [K] sollicitent la réformation du jugement entrepris en ce qu'il a retenu l'existence d'une faute de conduite de M. [K] et exclu son droit à indemnisation.

Ils avancent, s'agissant des circonstances de l'accident, que celui-ci s'est produit alors que M. [K] venait d'achever un dépassement et de se rabattre sur la voie de gauche lorsqu'il s'est brusquement retrouvé face à un véhicule arrêté en pleine voie sans signalisation avec lequel il n'a pu éviter d'entrer en la collision.

Ils ajoutent qu'il ne peut lui être reproché une vitesse inadaptée aux conditions de circulation alors qu'il ne lui était pas possible d'anticiper la présence de ce véhicule qui constituait un obstacle imprévisible et irrésistible.

A titre subsidiaire, si la cour retenait une faute commise par M. [K], ils demandent que la limitation du droit à indemnisation soit fixée à 15%.

Le FGAO conclut à la confirmation du jugement ayant retenu que M. [K] avait commis une faute excluant son droit à indemnisation.

Il soutient que M. [K], qui admet avoir vu le véhicule qui le précédait, n'a pas adapté sa vitesse aux conditions de la circulation et aux obstacles prévisibles en violation des dispositions de l'article R.413-17 du code de la route.

Il ajoute que s'étant aperçu à temps du ralentissement ou de l'arrêt du véhicule le précédant, M. [K] aurait dû considérablement réduire sa vitesse ou simplement changer de file plus tôt et qu'il n'a pas respecté les distances de sécurité en violation de l'article R. 412-12 du même code.

A titre infiniment subsidiaire, le FGAO demande à la cour de limiter de 50 % le droit à indemnisation de M. [K] pour tenir compte de ses fautes.

Sur ce, il résulte de l'article 4 de la loi n° 85-677 du 5 juillet 1985 que lorsque plusieurs véhicules sont impliqués dans un accident de la circulation, chaque conducteur a droit à l'indemnisation des dommages qu'il a subis, sauf s'il a commis une faute ayant contribué à la réalisation de son préjudice.

En présence d'une telle faute, il appartient au juge d'apprécier si celle-ci a pour effet de limiter ou d'exclure l'indemnisation des dommages que ce conducteur a subi, en faisant abstraction du comportement des autres conducteurs.

En l'espèce, il ressort de l'enquête pénale qu'à l'endroit de l'accident l'autoroute A 3 est composée dans le sens province-[Localité 15] de quatre voies de circulation dont une bande arrêt d'urgence et que la vitesse est limitée à 90 km/h..

A leur arrivée sur place à 18 h 05, les fonctionnaires de police ont constaté la présence d'un véhicule léger et d'une motocyclette accidentés et immobilisés sur les deux voies les plus à gauche.

Ils ont précisé qu'il faisait encore jour, que la chaussée était sèche et rectiligne et le temps ensoleillé.

Ils ont indiqué dans leur rapport que le chef des sapeurs-pompiers de la caserne de [Localité 13], présent sur les lieux, leur avait indiqué que selon deux ambulanciers le motard avait percuté l'arrière du véhicule léger qui était semble-t-il arrêté sur la deuxième voie la plus à gauche sans feux de détresse enclenchés.

Ils ont précisé que le conducteur et le passager du véhicule léger avaient immédiatement quitté les lieux en abandonnant le véhicule et qu'ils ne pouvaient déterminer si ce véhicule était immobilisé à la suite d'un ralentissement ou s'il était en panne.

Ils ont enfin relevé que selon le chef des sapeurs-pompiers le véhicule léger présentait un enfoncement au niveau du coffre et que la motocyclette était endommagée à l'avant.

Les investigations entreprises pour identifier le conducteur du véhicule léger sont demeurées infructueuses.

Entendu par les services de police, M. [K] a expliqué qu'il faisait jour, que le temps était ensoleillé, la chaussée sèche et en bon état et la circulation fluide, qu'il progressait sur la voie de gauche à la vitesse approximative de 90 km/h, qu'il s'était rabattu sur la deuxième file en partant de la gauche car il n'y avait pas de circulation sur cette voie, qu'il avait continué à rouler sur cette file sur une distance de 5 km à une vitesse d'environ 70 km/h, qu'il s' était aperçu qu'un véhicule qui se trouvait devant lui roulait à très faible allure, que plus il se rapprochait, plus il trouvait que ce véhicule roulait doucement, qu'une fois arrivé à distance de celui-ci, il avait constaté qu'il était à l'arrêt et n'avait pas pu l'éviter.

Il résulte de ces éléments que même s'il ne roulait pas au dessus de la vitesse maximale autorisée de 90 km/h, M. [K] bien qu'il ait aperçu en temps utile la présence sur sa voie de circulation d'un véhicule roulant selon lui à très faible allure et qui était en réalité à l'arrêt, n'a pas adapté sa vitesse à cet obstacle parfaitement visible, contrairement aux exigences de l'article R. 413-17 du code de la route.

Par ailleurs, en s'approchant de ce véhicule sans réduire sa vitesse jusqu'à l'impact, il n'a pas maintenu une distance suffisante entre sa motocyclette et la voiture qui le précédait, en violation des dispositions de l'article R. 412-12 du code de la route.

Ces fautes de conduite qui ont contribué à la réalisation des dommages subis par M. [K] ne présentent pas toutefois un degré de gravité tel qu'elles justifient l'exclusion de son droit à indemnisation, étant rappelé que les juges n'ont pas à tenir compte du comportement des autres conducteurs ni à rechercher si la faute qu'ils retiennent est à l'origine de l'accident.

Compte tenu de la nature et de la gravité des fautes commises par M. [K], le droit à indemnisation de ce dernier sera réduit de 30 %, de sorte qu'il pourra ainsi que son épouse, victime par ricochet, obtenir l'indemnisation de 70% des préjudices subis consécutivement à l'accident.

Le jugement qui a retenu que la faute commise par M. [K] excluait son droit à indemnisation sera, en conséquence, infirmé.

Sur l'indemnisation des préjudices de M. [K] par le FGAO

En application de l'article L.421-1, I, du code des assurances, le FGAO indemnise les dommages résultant d'atteintes à la personne nés d'un accident survenu en France dans lequel est impliqué un véhicule terrestre à moteur lorsque le responsable des dommages est inconnu, ce qui est le cas en l'espèce.

Il résulte de l'article L. 421-1, III, du code des assurances, que lorsque le FGAO intervient il paie les indemnités allouées aux victimes ou à leurs ayants droit qui ne peuvent être prises en charge à aucun autre titre lorsque l'accident ouvre droit à réparation et que les versements effectués au profit des victimes ou de leurs ayants droit et qui ne peuvent pas donner lieu à une action récursoire contre le responsable des dommages ne sont pas considérés comme une indemnisation à un autre titre.

L'article R. 421-13 du même code précise que «si la victime ou ses ayants droit peuvent prétendre à une indemnisation partielle à un autre titre, le fonds de garantie ne prend en charge que le complément».

Contrairement à ce qu'avance M. [K] dans sa note en délibéré les prestations servies par la CPAM qui peuvent donner lieu à une action récursoire contre le responsable en application de l'article 29,1° de la loi du 5 juillet 1985 constituent des indemnisations à un autre titre devant être imputées sur les postes de préjudice qu'elles ont à vocation à réparer, la circonstance que la CPAM n'a pu exercer aucun recours contre le responsable du dommage qui n'a pu être identifié étant sans incidence.

Il ressort des pièces versées aux débats que M. [K] a souscrit auprès de la Mutuelle des motards une police d'assurance automobile comportant une garantie des dommages corporels du conducteur.

Il résulte des conditions particulières en date du 8 mars 2012 et des articles 3.1 et 3.2 des conditions générales de la police d'assurance dont l'opposabilité à l'assuré n'est pas discutée que cette garantie ne couvre que deux postes de préjudices, à savoir les dépenses de santé actuelles, y compris le forfait journalier, que l'assuré conserve à sa charge après remboursement des organismes sociaux dans la limite d'un plafond de garantie de 1 100 euros et le déficit fonctionnel permanent, indemnisé, lorsqu'il atteint au moins 11 %, en multipliant le plafond de garantie de 80 000 euros par le taux de déficit fonctionnel évalué selon le barème de droit commun.

L'article 9-8 des conditions générales, intitulé «subrogation» stipule que « nous sommes subrogés dans vos droits et actions contre tout responsable du sinistre à concurrence de l'indemnité que nous avons payée».

Aux termes de l'article L. 131-2, alinéa 2, du code des assurances, «dans les contrats garantissant l'indemnisation des préjudices résultant d'une atteinte à la personne, l'assureur peut être subrogé dans les droits du contractant ou des ayants droit contre le tiers responsable, pour le remboursement des prestations à caractère indemnitaire prévues au contrat».

Le remboursement des dépenses de santé non prises en charge par les organismes sociaux dans la limite d'un plafond de garantie et l'indemnisation du déficit fonctionnel permanent commun en fonction d'un taux d'AIPP évalué selon le droit commun et d'un plafond de garantie constituent des prestations indemnitaires dès lors qu'elles ne sont pas indépendantes, dans leurs modalités de calcul et d'attribution, de celles de la réparation du préjudice selon le droit commun.

C'est ce que rappellent les conditions générales de la police d'assurance dont l'article 3.2 précise que «les prestations versées au titre du déficit fonctionnel permanent au profit du bénéficiaire ont un caractère indemnitaire».

Les prestations dues le cas échéant par la Mutuelle des motards à M. [K] qui revêtent un caractère indemnitaire et ouvrent droit à une action subrogatoire contre le responsable constituent ainsi une indemnisation à un autre titre au sens de l'article L. 421-1, III, du code des assurances.

En revanche, la garantie des dommages corporel du conducteur ne portant que sur deux postes de préjudice, c'est à tort que le FGAO soutient qu'en raison du caractère subsidiaire de son intervention, la souscription par la victime de cette garantie exclut son intervention, alors qu'il résulte de l'article R. 421-13 du code des assurances précité que lorsque la victime ne peut prétendre qu'à une indemnisation partielle à un autre titre, le FGAO prend en charge le complément.

Sur la garantie des dommages causés au conducteur

La Mutuelle des motards qui rappelle que la garantie des dommages corporels du conducteur est limitée aux postes de préjudice des dépenses de santé actuelles et du déficit fonctionnel permanent fait valoir que selon les dispositions de l'article 3.2 des conditions générales«les indemnités garanties ne peuvent se cumuler au profit du bénéficiaire avec d'autres indemnités qui, réparant les mêmes postes de préjudice; lui sont dues par nous par tout autre organisme», ce dont elle déduit que le contrat prévoit un non cumul des prestations indemnitaires.

Elle soutient que sa garantie n'a pas vocation à jouer dans la mesure où M. [K] ne justifie d'aucune dépense de santé demeurée à sa charge et où l'indemnité prévue contractuellement au titre du déficit fonctionnel permanent évalué par l'expert judiciaire à 18 % s'élève à la somme de 14 400 euros (18 % x 80 000 euros) et est totalement absorbée par la rente d'accident du travail servie par CPAM dont le capital représentatif est de 59 803,37 euros.

Sur ce, comme relevé plus haut, il résulte des conditions particulières en date du 8 mars 2012 et des articles 3.1 et 3.2 des conditions générales que la garantie des dommages corporels du conducteur souscrite par M. [K] ne couvre que deux postes de préjudices, à savoir les dépenses de santé actuelles, y compris le forfait journalier, que l'assuré conserve à sa charge après remboursement des organismes sociaux dans la limite d'un plafond de garantie de 1 100 euros et le déficit fonctionnel permanent, indemnisé, lorsqu'il atteint au moins 11 %, en multipliant le plafond de garantie de 80 000 euros par le taux de déficit fonctionnel évalué selon le barème de droit commun.

M. [K] n'invoquant aucune dépense de santé antérieure à la date de consolidation qui n'aurait pas été prise en charge par la CPAM, la garantie de la Mutuelle des motard n'a pas vocation à jouer, s'agissant de ce poste de préjudice.

S'agissant du déficit fonctionnel permanent, l'indemnité contractuelle s'élève, compte tenu du taux de déficit fonctionnel de 18 % retenu par l'expert judiciaire, à la somme de 14 400 euros (18 % x 80 000 euros).

L'article 3.2 des conditions générales auquel l'assureur se réfère dispose que : « Les prestations versées au titre du déficit fonctionnel permannet au profit du bénéficiaire ont un caractère indemnitaire ; les indemnités garanties ne peuvent se cumuler au profit du bénéficiaire avec d'autres indemnités qui, réparant les mêmes postes de préjudice; lui sont dues par nous par tout autre organisme ; ces indemnités sont portées à notre connaissance dès qu'elles lui sont notifiées par l'organisme débiteur et qu'il les a acceptées ; elles viennent en déduction de l'indemnité que nous lui devons ; s'il y a lieu nous lui versons un complément».

Il résulte de l'article L. 434-2 du code de la sécurité sociale que la rente versée à la victime d'un accident du travail indemnise les pertes de gains professionnels et l'incidence professionnelle de l'incapacité et d'autre part, le déficit fonctionnel permanent.

En présence de pertes de gains professionnels ou d'incidence professionnelle de l'incapacité, la rente indemnise prioritairement ces deux postes de préjudice patrimoniaux, tandis que le reliquat éventuel répare le poste de préjudice extra-patrimonial du déficit fonctionnel permanent s'il existe.

En l'espèce, M. [K] invoque une incidence professionnelle de son incapacité dont il réclame l'indemnisation par le FGAO à concurrence de la somme 80 000 euros.

En l'absence de stipulation contractuelle de la police d'assurance prévoyant que la rente d'accident du travail viendra en déduction du déficit fonctionnel permanent même en présence de perte de gains professionnels futurs ou d'incidence professionnelle de l'incapacité, il résulte des termes du contrat que la Mutuelle des motards devra prendre en charge, si elle existe, la fraction de l'indemnité contractuelle due au titre du déficit fonctionnel permanent non réparée par la rente d'accident du travail après imputation préalable sur les postes de préjudice des pertes de gains de gains professionnels futurs et de l'incidence professionnelle qu'elle a prioritairement vocation à indemniser.

Sur la liquidation du préjudice corporel de M. [K]

L'expert, le Docteur [M], indique dans son rapport en date du 26 août 2018 que M. [K] a présenté à la suite de l'accident du 10 septembre 2014 une fracture de type Bennett de la main gauche avec ouverture de type Cauchoix I, une fracture non déplacée de la styloïde radiale gauche et une fracture de type Chance de D8.

Il relève que M. [K] qui est ambidextre conserve des séquelles au niveau du rachis, du poignet gauche et de la colonne du pouce gauche.

Il conclut son rapport dans les termes suivants :

- perte de gains professionnels actuels : sur justificatifs

- déficit fonctionnel temporaire total du 10 septembre2014 au 18 septembre 2014 et le 1er novembre 2014

- déficit fonctionnel temporaire partiel (DFTP) au taux :

* de 66 % entre ces deux périodes [de déficit fonctionnel temporaire total] et du 2 novembre 2014 au 18 novembre 2014

* de 50 % du 19 novembre 2014 au 31 décembre 2014

* de 33 % du 1er janvier 2015 au 1er juin 2015

* de 25 % du 2 juin 2015 au 10 septembre 2015,

- consolidation au 10 septembre 2015,

- souffrances endurées de 4,5 /7

- préjudice esthétique temporaire de 2,5/7

- déficit fonctionnel permanent de 18 %

- préjudice esthétique permanent de 2/7

- préjudice d'agrément

- préjudice sexuel

- un besoin d'assistance temporaire par une tierce personne de :

* 2 heures 30 par jour pendant la période de DFTP à 66 %

* 2 heures par jour pendant la période de DFTP à 50 %

* 1 heure par jour pendant les périodes de DFTP à 33 % et à 25 %

- besoin d'assistance permanente par une tierce personne de 2 heures par semaine pour l'entretien du jardin,

- préjudice d'agrément : la victime ne peut plus nager aussi longtemps qu'elle le faisait auparavant et ne peut plus jouer à la pétanque ; ces limitations et impossibilités sont justifiées par les séquelles qu'elle présente,

- incidence professionnelle : l'expert qui avait dans son pré-rapport mentionné «sans objet, le demandeur est en retraite» a en réponse aux dires du conseil de M. [K] modifié ses conclusions initiales en ces termes «La reprise ne se fera que le 26 avril 2016 avec restriction d'aptitude. A la consolidation il existe donc une incidence professionnelle avec fatigabilité, pénibilité accrue dans l'exercice de l'emploi du fait des séquelles orthopédiques pour l'exercice d'un métier manuel et contraignant de peintre en bâtiment ce qui est retenu par le médecin du travail (cf pièce 10). M. [K] a repris son activité professionnelle le 26 avril 2016 avant d'être licencié pour motif économique le 3 octobre de la même année, puis de partir à la retraite. Il n'y a pas lieu de retenir de préjudice professionnel particulier, outre l'éventuelle perte de revenus consécutive aux arrêts de travail entre le 26 avril 2016 et le 3 octobre 2016. Je précise par ailleurs que je ne suis pas tenu par le taux d'invalidité retenu par la CPAM».

Son rapport constitue sous les précisions ci-dessous exposées une base valable d'évaluation du préjudice corporel de M. [K] à déterminer au vu des diverses pièces justificatives produites, de l'âge de la victime née [Date naissance 12] 1958, de son activité antérieure à l'accident de peintre en bâtiment salarié, de la date de consolidation, afin d'assurer sa réparation intégrale.

Par ailleurs, l'évaluation du dommage doit être faite au moment où la cour statue et le barème de capitalisation utilisé sera celui publié par la Gazette du Palais du 15 septembre 2020 avec un taux d'intérêts de 0 % qui est le plus approprié comme s'appuyant sur les données démographiques, économiques et monétaires les plus pertinentes.

Préjudices patrimoniaux temporaires (avant consolidation)

- Dépenses de santé actuelles

Ce poste de préjudice vise à indemniser l'ensemble des dépenses de santé, incluant les frais d'hospitalisation, médicaux et pharmaceutiques, exposés avant la date de la consolidation.

Ce poste est constitué des frais d'hospitalisation, frais médicaux et pharmaceutiques, frais de transport, pris en charge par la CPAM soit la somme de 2 723,48 euros au vu du décompte définitif de créance du 16 décembre 2021, M. [K] n'invoquant aucun frais de cette nature restés à sa charge.

- Frais divers

M. [K] sollicite le versement d'une somme «forfaitaire» de 1 300 euros au titre des déplacement effectués avec son véhicule automobile pour se rendre à ses consultations médicales et à ses séances de kinésithérapie.

Le FGAO qui relève que la CPAM a pris en charge des frais de transport d'un montant de 31,45 euros soutient que M. [K] ne justifie d'aucun frais de transport resté à sa charge et qu'il doit ainsi être débouté de sa demande.

Sur ce, outre que l'indemnisation du préjudice ne peut être forfaitaire, M. [K] ne justifie pas avoir personnellement exposé des frais de déplacement pour se rendre à ses consultations médicales et à ses séances de kinésithérapie, alors que le certificat d'immatriculation qu'il produit concerne la motocyclette de marque Susuki immatriculée sous le numéro 110 DZE 92 qui a été selon les constatations des services police gravement endommagée à l'avant et dont il n'est justifié ni qu'elle a été réparée ni qu'elle a été remplacée par un autre véhicule.

La demande sera dès lors rejetée.

- Perte de gains professionnels actuels

Ce poste de préjudice vise à indemniser la perte ou la diminution de revenus causée par l'accident pendant la période antérieure à la consolidation.

M. [K] qui expose qu'il travaillait avant l'accident comme peintre en bâtiment salarié évalue sa perte de salaire pendant ses arrêts de travail entre le 10 septembre 2014 et le 26 avril 2016 à la somme de 33 207,10 euros et réclame une indemnité de 1 039,10 euros après déduction des indemnités journalières servies par la CPAM.

Le FGAO objecte que M [K] ne justifie pas suffisamment de sa situation professionnelle, notamment en ce qui concerne la nature de son contrat de travail et un éventuel maintien de salaire par son employeur.

Il ajoute que rien ne permet de prolonger la période de perte de gains professionnels actuels au delà de la date de consolidation fixée au 10 septembre 2015 par l'expert et qu'en tout état de cause aucune perte ne subsiste après déduction des indemnités journalières perçues pour un montant de 32 168 euros.

Sur ce, il convient d'observer à titre liminaire qu'une partie de la demande de M. [K] concerne une perte de salaire postérieure à la date de consolidation et sera ainsi examinée sous la rubrique des pertes de gains professionnels futurs dont elle relève.

Il ressort des constatations de l'expert que M. [K] qui travaillait comme peintre en bâtiment a été dans l'impossibilité d'exercer cette activité entre le 10 septembre 2014, date de l'accident, et le 10 septembre 2015, date de la consolidation et que ce n'est que le 26 avril 2016 qu'il a repris le travail après avoir été déclaré apte à son poste par la médecine du travail avec des restrictions.

M. [K] verse aux débats un certificat de travail établi le 3 octobre 2016 par la société Journo Spinella (la société Journo) dont il résulte qu'il a été employé par cette société en qualité de maître ouvrier du 1er juin 2013 au 3 octobre 2016, date à laquelle il a été licencié pour des motifs économiques sans lien avec l'accident.

Il produit seulement pour justifier du montant de ses salaires antérieurs à l'accident sa déclaration de revenus au titre de l'année 2014, année de l'accident, laquelle fait état sous la rubrique «vos revenus connus» de salaires versés par la société Journo pour un montant de 18 799 euros, de congés intempéries pris en charge par la caisse BTP d'Ile-de-France pour un montant de 2 163 euros et d'indemnités journalières servies par la CPAM pour un montant de 539 euros.

Outre que cette unique pièce ne permet pas de déterminer le revenu de référence antérieur à l'accident dans la mesure où elle inclut des revenus perçus postérieurement au fait dommageable entre le 10 septembre 2014 et le 31 décembre 2014 et notamment des indemnités journalières versées à la suite de l'accident, son examen permet de retenir que M. [K] a bénéficié d'un maintien au moins partiel de son salaire par son employeur.

Il ressort par ailleurs du décompte définitif de créance de la CPAM en date du 16 décembre 2021 que cet organisme a servi à son assuré à la suite de son accident de trajet du 10 septembre 2014 des indemnités journalières d'un montant total de 32 148,84 euros se décomposant comme suit :

- 1064,24 euros pour la période du 11 septembre 2014 au 6 octobre 2014 (41,58 euros x 28 jours)

- 30 984,60 euros pour la période du 9 octobre 2014 au 25 avril 2016 (54,84 euros x 565 jours).

Dans ces conditions, il n'est pas justifié d'une perte de gains professionnels actuels non compensée par les indemnités journalières servies par la CPAM entre le 11 septembre 2014 et le 10 septembre 2015 pour un montant de 19 645,32 euros[1 164,24 euros + ( 54,84 euros x 337 jours)] et par les salaires maintenus par l'employeur.

La demande de M. [K] sera dès lors rejetée.

- Assistance temporaire par une tierce personne

La nécessité de la présence auprès de M. [K] d'une tierce personne selon les périodes et le volume horaire retenu par l'expert pour l'aider dans les actes de la vie quotidienne, préserver sa sécurité et suppléer sa perte d'autonomie avant la date de consolidation n'est pas contestée dans son principe ni son étendue mais elle reste discutée dans son coût.

En application du principe de la réparation intégrale et quelles que soient les modalités choisies par la victime, le tiers responsable est tenu d'indemniser le recours à cette aide humaine indispensable qui ne saurait être réduit en cas d'aide familiale ni subordonné à la production des justificatifs des dépenses effectuées.

Eu égard à la nature de l'aide requise et du handicap qu'elle est destinée à compenser, l'indemnisation se fera sur la base d'un taux horaire unique de 20 euros conformément à la demande de M. [K].

L'indemnité de tierce personne temporaire s'établit ainsi de la manière suivante :

- pour les périodes du 19 septembre 2014 au 31 octobre 2014 et du 2 novembre 2014 au 18 novembre 2014 (60 jours)

* 2,5 heures x 60 jours x 20 euros = 3 000 euros

- pour la période du 19 novembre 2014 au 31 décembre 2014 (43 jours)

* 2 heures x 43 jours x 20 euros = 1 720 euros

- pour les périodes du 1er janvier 2015 au 1er juin 2015 et du 2 juin 2015 au 10 septembre 2015 (253 jours)

* 1 heure x 253 jours x 20 euros = 5 060 euros

Soit une somme totale de 9 780 euros, ramenée à celle de 7 130 euros pour rester dans les limites de la demande.

Après application de la réduction du droit à indemnisation de M. [K], il revient à ce dernier la somme de 4 991 euros (7 130 euros x 70 %).

Préjudices patrimoniaux permanents (après consolidation)

- Assistance permanente par une tierce personne

Ce poste de préjudice vise à indemniser, postérieurement à la consolidation, le besoin d'assistance de la victime directe par une tierce personne pour l'assister dans les actes de la vie quotidienne, préserver sa sécurité, contribuer à restaurer sa dignité et suppléer sa perte d'autonomie.

M. [K] qui se fonde sur les conclusions de l'expert qui a retenu un besoin d'assistance permannet de 2 heures par semaine pour l'entretien du son jardin réclame une indemnité d'un montant de 52 284 euros qu'il évalue sur la base d'un taux horaire de 20 euros sur une année de 410 jours avec capitalisation viagère.

Le FGAO offre d'indemniser ce poste de préjudice jusqu'à l'âge de 65 ans seulement, exposant qu'il est purement hypothétique de considérer que M [K], âgé de 58 ans à la date de consolidation, aurait pu entretenir son jardin sa vie durant, indépendamment même de ses séquelles et propose de retenir un taux horaire de 13 euros.

Il demande ainsi à la cour d'évaluer ce poste de préjudice à la somme de 52 284 euros.

Sur ce, la nécessité de la présence auprès de M. [K] d'une tierce personne 2 heures par semaine pour l'assister dans l'entretien de son jardin a été admise par l'expert et n'est pas contestée en son principe mais seulement dans son étendue dans le temps et dans son coût.

Contrairement à ce qu'avance le FGAO, rien ne permet de retenir que même sans la survenance de l'accident M. [K] n'aurait pas été apte à assurer lui-même l'entretien de son jardin au delà de l'âge de 65 ans, ce que n'a pas retenu l'expert judiciaire qui a admis le besoin d'une tierce personne viagère pour l'entretien du jardin et n'a relevé l'existence d'aucun état antérieur susceptible d'interférer avec les séquelles de l'accident.

Il convient ainsi d'entériner le rapport d'expertise, étant observé que le postulat d'une inaptitude physique liée à l'âge ne repose que sur des affirmations qu'aucun élément de preuve ne vient étayer.

Eu égard à la nature de l'aide requise et du handicap qu'elle est destinée à compenser, l'indemnisation se fera sur la base d'un taux horaire de 20 euros sur une année de 365 jours ou 52 semaines , étant rappelé que l'indemnisation au titre de l'assistance par une tierce personne ne peut être réduite en raison du caractère familial de l'aide apportée ni subordonnée à la justification des dépenses effectives.

L'indemnité de tierce personne permanente s'établit ainsi de la manière suivante :

- pour la période du 11 septembre 2015 (lendemain de la date de consolidation) à la date de la liquidation

* 2 heures x 378,86 semaines x 20 euros = 15 154,40 euros

- pour la période à échoir

* 2 heures x 52 semaines x 20 euros x 19,509 (euro de rente viagère prévu par le barème de capitalisation retenu par la cour pour un homme âgé de 64 ans à la date de la liquidation) = 40 578,72 euros

Soit un total de 55 733,12 euros (15 154,40 euros + 40 578,72 euros) ramené à la somme de 52 284 euros pour rester dans les limites de la demande.

Après application de la réduction du droit à indemnisation de M. [K], il revient à ce dernier la somme de 36 598,80 euros (52 284 euros x 70 %).

- Perte de gains professionnels futurs

Ce poste est destiné à indemniser la victime de la perte ou de la diminution directe de ses revenus à compter de la date de consolidation, consécutive à l'invalidité permanente à laquelle elle est désormais confrontée dans la sphère professionnelle à la suite du fait dommageable.

Comme relevé plus haut une partie de la demande d'indemnisation de M. [K] au titre des pertes de gains professionnels actuels concerne une période postérieure à la consolidation et relève ainsi des pertes de gains professionnels futurs.

Pour les mêmes motifs que ceux énoncés s'agissant de la perte de gains professionnels actuels, il n'est pas justifié entre le 11 septembre 2015 (lendemain de la date de consolidation) et le 25 avril 2015 (veille de la reprise du travail) d'une perte de salaire non compensée par les indemnités journalières servies par la CPAM au cours de cette période pour un montant de 12 503,52 euros ( 54,84 euros x 228 jours) et par les salaires maintenus par l'employeur.

La demande de M. [K] sera dès lors rejetée.

- Incidence professionnelle

Ce chef de dommage a pour objet d'indemniser non la perte de revenus liée à l'invalidité permanente de la victime mais les incidences périphériques du dommage touchant à la sphère professionnelle en raison, notamment, de sa dévalorisation sur le marché du travail, de sa perte d'une chance professionnelle ou de l'augmentation de la pénibilité de l'emploi qu'elle occupe imputable au dommage, ou encore l'obligation de devoir abandonner la profession exercée au profit d'une autre en raison de la survenance de son handicap.

M. [K] expose qu'il a repris son emploi de peintre en bâtiment le 26 avril 2016 avec des restrictions retenues par le médecin du travail, qu'il a fait l'objet d'un licenciement économique le 3 octobre 2016 dont il admet qu'il est sans lien avec l'accident et qu'il a ensuite fait le choix de liquider ses droits à la retraite plutôt que de bénéficier des indemnités de chômage.

Il invoque toutefois une incidence professionnelle caractérisée, selon lui, par une perte de chance en raison de ses séquelles de retrouver un emploi, une dévalorisation sur le marché du travail, une perte de droits à la retraite ainsi qu'une pénibilité accrue dans l'exercice d'une profession manuelle et réclame à ce titre une indemnité de 80 000 euros.

Le FGAO fait valoir que l'expert judiciaire a considéré que M. [K] ne pouvait se prévaloir d'un préjudice professionnel que pendant la période courant du 26 avril 2006, date de la reprise, et le 3 octobre 2006, date de son licenciement économique puis de son départ à la retraite, soit pendant un peu plus de 5 mois.

Le FGAO fait observer que M. [K] admet lui-même que son licenciement économique n'est pas en lien avec l'accident ; il ajoute que son départ à la retraite n'est pas non plus en lien avec l'accident, de sorte que M. [K] ne saurait imposer à la solidarité nationale le choix qui lui est personnel de faire valoir ses droits à la retraite de manière anticipée.

Il considère par ailleurs que la possibilité pour M. [K] de retrouver un emploi à l'âge de 58 ans après son licenciement économique est purement hypothétique, même indépendamment de ses séquelles et que la perte invoquée de droits à la retraite n'est pas justifiée.

Il propose d'évaluer l'incidence professionnelle à la somme de 5 000 euros pour tenir compte de la pénibilité accrue dans l'exercice de son emploi par M. [K] pendant une période de 5 mois entre la date de la reprise de travail et celle de son licenciement économique.

Relevant que la rente d'accident du travail versée par la CPAM qui s'impute prioritaire sur les pertes de gains futurs et l'incidence professionnelle s'élève à la somme de 71 836,55 euros, le FGAO conclut qu'aucune somme ne revient à M. [K] au titre du poste de préjudice de l'incidence professionnelle.

Sur ce, il ressort du rapport d'expertise et de la fiche d'aptitude établie par le médecin du travail que M. [K] a repris son poste de travail de peintre en bâtiment le 26 avril 2016, les conclusions du médecin du travail à l'issue de la visite de reprise étant les suivantes : « renseignements complémentaires demandés - en attendant pas de manutention supérieure à 5 kg - éviter dans la mesure du possible les postures en hyperextension rachidienne et debout prolongée».

Aucune information n'est apportée concernant la nature de ces renseignements complémentaires demandés et des préconisations ultérieures du médecin du travail.

M. [K] a fait l'objet, ainsi qu'il l'admet lui-même, d'un licenciement pour motif économique à compter du 3 octobre 2006 qui est sans lien avec l'accident dont il a été victime le 10 septembre 2014, de même que la perte de gains en résultant.

L'expert judiciaire n'a retenu aucune inaptitude à l'emploi de peintre en bâtiment mais seulement d'une «fatigabilité et une pénibilité accrue dans l'exercice de l' emploi du fait des séquelles orthopédiques pour l'exercice d'un métier manuel et contraignant de peintre en bâtiment».

S'il évoque dans ses conclusions modificatives d'éventuels arrêts de travail entre le 26 avril 2016 et le 3 octobre 2016, cette indication n'est pas documentée par les documents analysés et ne ressort pas des prescriptions d'arrêt de travail versés aux débats.

Par ailleurs, M. [K] qui ne justifie d'aucune inaptitude à son emploi de peintre en bâtiment consécutive à l'accident, a selon ses propres déclarations fait le choix de faire valoir ses droits à la retraite après son licenciement pour motif économique, de sorte que la disparition de l'éventualité favorable de retrouver un emploi à la suite de ce licenciement résulte de ce choix personnel et non du fait dommageable.

Il ne justifie ainsi ni d'une perte de chance de gains ni d'une dévalorisation sur le marché du travail, ni d'une perte de droits à la retraite en lien de causalité direct et certain avec l'accident dont il a été victime le 10 septembre 2014.

Seules sont justifiées au vu du rapport d'expertise judiciaire une pénibilité et une fatigabilité accrues entre le 26 avril 2006, date de la reprise de son travail par M. [K] et le 3 octobre 2006, date de son licenciement pour motif économique suivi de son départ à la retraite.

L'incidence professionnelle imputable à l'accident sera ainsi évaluée compte tenu de sa durée limitée à la somme de 5 000 euros.

Il ressort du décompte définitif de créance de la CPAM en date du 16 décembre 2021 qu'à la suite de son accident de trajet, la CPAM verse à M. [K] depuis le 26 avril 2016 une rente d'accident du travail dont les arrérages échus au 15 décembre 2021 s'élèvent à la somme de 19 255,02 euros et le capital représentatif des arrérages à échoir à la somme de 52 585,63 euros, soit un montant total de 73 836,55 euros.

Comme rappelé plus haut, ces prestations qui peuvent donner lieu à une action récursoire contre le responsable en application de l'article 29,1° de la loi du 5 juillet 1985 constituent des indemnisations à un autre titre devant être imputées sur les postes de préjudice qu'elles ont à vocation à réparer.

Or il résulte de l'article L. 434-2 du code de la sécurité sociale que la rente versée à la victime d'un accident du travail indemnise d'une part, les pertes de gains professionnels et l'incidence professionnelle de l'incapacité et d'autre part, le déficit fonctionnel permanent.

Le préjudice de M. [K] lié à l'incidence professionnelle étant totalement indemnisé par les sommes versées au titre de sa rente d'accident du travail, aucune somme ne lui revient au titre de ce poste de préjudice.

Préjudices extra-patrimoniaux temporaires (avant consolidation)

- Déficit fonctionnel temporaire

Ce poste de préjudice indemnise l'incapacité fonctionnelle totale ou partielle ainsi que le temps d'hospitalisation et les pertes de la qualité de vie et des joies usuelles de la vie courante durant la maladie traumatique, y compris les préjudices d'agrément et sexuel temporaires et les répercussion temporaires du dommage dans la vie sociale et professionnelle de la victime.

M. [K] et le FGAO s'accordent pour évaluer ce poste de préjudice à la somme de 2 563 euros.

Après application de la réduction du droit à indemnisation de M. [K], il revient à ce dernier la somme de 1 794,10 euros (2 563 euros x 70 %).

- Souffrances endurées

Ce poste de préjudice indemnise les souffrances physiques et psychiques et les troubles associés que la victime endure pendant la maladie traumatique, y compris la souffrance morale liée à une perte d'intérêt sur le plan professionnel et la pénibilité accrue liée à la reprise de son activité professionnelle avant la date de consolidation.

M. [K] demande à voir chiffrer ce poste de préjudice à la somme de 25 000 euros alors que le FGAO propose de l'évaluer à la somme de 12 000 euros avant réduction du droit à indemnisation.

Sur ce, il y a lieu de tenir compte pour évaluer ce poste de préjudice coté 4,5/7 par l'expert du traumatisme initial, des souffrances physiques mais également psychiques induites par les différentes lésions, des hospitalisations, des trois interventions chirurgicales décrites par l'expert, de la pénibilité des soins incluant de nombreuses séances de rééducation.

Au vu de ces éléments, ce préjudice sera évalué à la somme de 20 000 euros.

Après application de la réduction du droit à indemnisation de M. [K], il revient à ce dernier la somme de 14 000 euros (20 000 euros x 70 %).

- Préjudice esthétique temporaire

M. [K] réclame en réparation de ce poste de préjudice une indemnité de 2 000 euros en réparation de ce poste de préjudice.

Le FGAO qui soutient que pour caractériser un tel préjudice il faut justifier d'une altération de l'apparence aux conséquences personnelles très préjudiciables et relève que M. [K] a présenté seulement quelques cicatrices au niveau rachidien et de la colonne du pouce et a dû porter temporairement un corset, offre toutefois d'évaluer ce poste de préjudice à la somme de 500 euros.

Sur ce, le préjudice esthétique temporaire indemnise les atteintes physiques et plus généralement l'altération de l'apparence physique de la victime avant la consolidation, sans qu'il soit nécessaire qu'elles revêtent un caractère particulier de gravité pour être indemnisables.

En l'espèce, le préjudice esthétique temporaire de M. [K], côté 2,5/7 par l'expert , est caractérisé par les cicatrices au niveau rachidien et de la colonne du pouce et le port temporaire d'un corset, ces différents éléments ayant altéré l'apparence de la victime.

Ce poste de préjudice, compte tenu de sa durée limitée mais également de son degré d'intensité, sera évalué à la somme de 1 000 euros.

Après application de la réduction du droit à indemnisation de M. [K], il revient à ce dernier la somme de 700 euros (1 000 euros x 70 %).

Préjudices extra-patrimoniaux permanents (après consolidation)

- Déficit fonctionnel permanent

Ce poste de préjudice vise à indemniser, pour la période postérieure à la consolidation, les atteintes aux fonctions physiologiques, les souffrances chroniques, la perte de la qualité de vie et les troubles ressentis par la victime dans ses conditions d'existence personnelles, familiale et sociales.

M. [K] réclame à ce titre une indemnité d'un montant de 45 000 euros.

Le FGAO propose d'évaluer ce poste de préjudice à la somme de 31 000 euros.

Relevant que le reliquat de la rente d'accident versée par la CPAM, soit la somme de 66 836,55 euros, s'impute sur ce poste de préjudice, le FGAO conclut qu'aucune somme ne revient à M. [K] au titre du déficit fonctionnel permanent.

Sur ce, l'expert a retenu un taux de déficit fonctionnel permanent de 18 %, après avoir relevé que M. [K] qui est ambidextre conserve des séquelles consistant en des douleurs et des limitations fonctionnelles au niveau du poignet gauche, des douleurs et limitations fonctionnelles au niveau du rachis dorsal, et une limitation de la mobilité de la colonne du pouce gauche décrite dans son examen clinique.

Au vu des séquelles constatées, des douleurs persistantes et des troubles induits dans les conditions d'existence de M. [K], qui était âgé de 57 ans à la date de consolidation, il convient d'évaluer ce poste de préjudice à la somme de 34 020 euros.

Comme rappelé plus haut, la rente d'accident du travail servie par la CPAM qui ouvre droit à un recours subrogatoire contre le responsable en application de l'article 29,1° de la loi du 5 juillet 1985 constitue une indemnisation à un autre titre devant être imputée sur les postes de préjudice qu'elle a vocation à réparer, à savoir, d'une part les pertes de gains professionnels et l'incidence professionnelle de l'incapacité et d'autre part, le déficit fonctionnel permanent.

Il s'avère que par la perception de la rente accident du travail d'un montant total de 73 836,55 euros, M. [K] a été indemnité non seulement de son incidence professionnelle mais également de son déficit fonctionnel permanent ; dès lors aucune somme ne lui revient au titre de ce poste de préjudice.

- Préjudice esthétique permanent

Ce poste de préjudice indemnise les atteintes physiques et plus généralement l'altération de l'apparence physique de la victime après la consolidation.

M. [K] sollicite en réparation de ce poste de préjudice une indemnité d'un montant de 4 000 euros.

Le FGAO demande pour sa part à la cour de chiffrer ce préjudice à la somme de 2 200 euros avant application de la réduction du droit à indemnisation.

Sur ce, coté 2/7 par l'expert judiciaire, ce préjudice est caractérisé par la présence d'une fine cicatrice d'ostéosynthèse de 14 centimètres dans l'axe du rachis cervical et d'une cicatrice en «Y» au niveau de la colonne du pouce gauche ; il convient de l'évaluer à la somme de 4 000 euros.

Après application de la réduction du droit à indemnisation de M. [K], il revient à ce dernier la somme de 2 800 euros (4 000 euros x 70 %).

- Préjudice d'agrément

M. [K] fait valoir qu'en raison de ses séquelles justifiant un taux de déficit fonctionnel permannet de 18 %, il lui est désormais interdit de pratiquer des activités sportives mobilisant les membres inférieurs comme le ski, la planche à voile, le jardinage, le vélo, le football et la natation, que ses activités pour sa retraite sont ainsi très limitées et que l'expert a retenu l'existence d'un préjudice d'agrément.

Il demande à voir évaluer son préjudice d'agrément à la somme de 15 000 euros.

Le FGAO qui conclut au rejet de la demande fait valoir que M. [K] ne rapporte pas la preuve de la pratique antérieure effective et régulière des activités sportives dont il serait aujourd'hui privé ni la preuve que la souffrance qui en résulte n'est pas déjà réparée au titre du déficit fonctionnel permanent.

Sur ce, le préjudice d'agrément est constitué par l'impossibilité pour la victime de continuer de pratiquer régulièrement une activité spécifique sportive ou de loisirs et inclut la limitation de la pratique antérieure.

Si l'expert a retenu l'existence d'un préjudice d'agrément pour la pratique de la natation en relevant que la victime ne pouvait plus nager aussi longtemps qu'elle le faisait auparavant et pour celle de la pétanque, force est de constater que M. [K] ne justifie pas, en dehors de ses seules affirmations lors des opérations d'expertise, de la pratique régulière et effective de ces activités sportives avant l'accident, les deux seules attestations versées aux débats n'en faisant pas état.

Quant à l'affirmation selon laquelle ses séquelles lui interdiraient de pratiquer tous les sports mobilisant les membres inférieurs, elle ne ressort pas des conclusions de l'expert et n'est pas justifiée médicalement, étant observé que les séquelles de l'accident sont localisées au niveau du rachis, du poignet gauche et de la colonne du pouce gauche.

La demande de M. [K] tendant à obtenir l'indemnisation d'un préjudice d'agrément sera dès lors rejetée.

Sur les indemnités dues par le FGAO et la Mutuelle des motards

Les indemnités dues à M. [K] par le FGAO au titre de ses préjudices patrimoniaux et extra-patrimoniaux s'établissent de la manière suivante après déduction de la créance de la CPAM et application de la réduction de son droit à indemnisation :

- dépenses de santé actuelles : 0 euro

- frais divers : rejet

- pertes de gains professionnels actuels : rejet

- assistance temporaire par une tierce personne : 4 991 euros

- assistante permanente par une tierce personne :36 598,80 euros

- incidence professionnelle : 0 euro

- déficit fonctionnel temporaire : 1 794,10 euros

- souffrances endurées : 14 000 euros

- préjudice esthétique temporaire : 700 euros

- déficit fonctionnel permanent : 0 euro

- préjudice esthétique permanent : 2 800 euros

- préjudice d'agrément : rejet.

Si le FGAO ne peut ni être appelé en déclaration de jugement commun ni faire l'objet d'une condamnation, y compris au titre de l'article 700 du code de procédure, lors de l'instance engagée contre le responsable, il résulte de l'article R. 421-14 du code des assurances qu'à défaut d'accord du FGAO avec la victime sur la fixation de l'indemnité lorsque le responsable des dommages est inconnu, la victime saisit la juridiction compétente pour trancher le litige.

Il en résulte que lorsque comme en l'espèce, l'accident a été causé par un véhicule terrestre à moteur dont le conducteur est demeuré non-identifié, le FGAO peut être assigné en justice et condamné au paiement des indemnités mises à sa charge ainsi qu'à une indemnité de procédure en application de l'article 700 du code de procédure civile.

M. [K] est ainsi bien fondé à obtenir la condamnation du FGAO au paiement des indemnités ci-dessus fixées.

Par ailleurs, l'indemnité contractuelle d'un montant de 14 400 euros (18 % x 80 000 euros) prévue par la police d'assurance souscrite par M. [K] étant intégralement compensée par la rente d'accident du travail, la garantie de la Mutuelle des motards n'a pas vocation à jouer.

Le jugement qui a débouté M. [K] de sa demande formée à l'encontre de la Mutuelle des motards sera ainsi confirmé.

Sur le doublement du taux de l'intérêt légal

M. [K] fait valoir que le FGAO qui devait légalement lui présenter une offre d'indemnisation provisionnelle dans les 8 mois à compter de l'accident et une offre d'indemnisation dans les 5 mois du dépôt du rapport d'expertise médicale n'a pas satisfait à ces obligations dont il ne pouvait s'exonérer en contestant son droit à indemnisation.

Il demande ainsi que les indemnités allouées par la cour avant imputation de la créance de la CPAM soient majorées des intérêts au double du taux de l'intérêt légal à compter du 10 mai 2015, et à défaut du 26 février 2019.

Le FGAO réplique qu'ayant contesté le droit à indemnisation de M. [K], il n'était pas tenu, en application de l'article L. 211-9, alinéa 1, du code des assurances de formuler une offre d'indemnisation et conclut au rejet de sa demande de doublement des intérêts légaux.

Sur ce, en application de l'article L. 211-9 du code des assurances, l'assureur qui garantit la responsabilité civile du fait d'un véhicule terrestre à moteur est tenu de présenter à la victime, lorsque la responsabilité, n'est pas contestée, et le dommage entièrement quantifié, une offre d'indemnité motivée dans le délai de trois mois à compter de la demande d'indemnisation qui lui est présentée. Lorsque la responsabilité est rejetée ou n'est pas clairement établie, ou lorsque le dommage n'a pas été entièrement quantifié, l'assureur doit, dans le même délai, donner une réponse motivée aux éléments invoqués dans la demande.

Une offre d'indemnité comprenant tous les éléments indemnisables du préjudice doit être faite à la victime qui a subi une atteinte à sa personne dans un délai maximal de huit mois à compter de l'accident. Cette offre peut avoir un caractère provisionnel lorsque l'assureur n'a pas, dans les trois mois de l'accident, été informé de la consolidation de l'état de la victime et l'offre définitive d'indemnisation doit alors être faite dans un délai de cinq mois suivant la date à laquelle l'assureur a été informé de cette consolidation.

A défaut d'offre dans les délais impartis, étant précisé que le délai applicable est celui qui est le plus favorable à la victime, le montant de l'indemnité offerte par l'assureur ou allouée par le juge, produit intérêt de plein droit au double du taux de l'intérêt légal, en vertu de l'article L.211-13 du même code, à compter de l'expiration du délai et jusqu'au jour de l'offre ou du jugement devenu définitif. Cette pénalité peut être réduite par le juge en raison de circonstances non imputables à l'assureur.

Selon l'article L. 211-22 du code des assurances sur l'application duquel les parties ont été invitée à conclure par note en délibéré, ces dispositions sont applicables au FGAO dans ses rapports avec les victimes ou leurs ayants droit.

Toutefois, ce texte précise que les délais prévus à l'article L. 211-9 du code des assurances courent contre le FGAO à compter du jour où celui-ci a reçu les éléments justifiant son intervention.

En l'espèce, il ressort des lettres adressées par la Mutuelle des motards au FGAO que ce dernier a été informé des éléments justifiant son intervention le 14 avril 2015, date à laquelle, il a répondu à la demande d'indemnisation présentée par cette dernière pour le compte de son assuré.

Le FGAO avait ainsi, en application des textes rappelés ci-dessus, la double obligation de présenter à M. [K] dont l'état n'était pas consolidé, une offre provisionnelle dans le délai de 8 mois suivant la date à laquelle il a été informé des éléments justifiant son intervention et de lui faire ensuite, une offre définitive dans le délai de 5 mois suivant la date à laquelle il a été informée de la consolidation de son état.

Le FGAO devait ainsi faire une offre d'indemnisation provisionnelle portant sur tous les éléments indemnisables du préjudice au plus tard le 15 décembre 2015, ce qu'il n'a pas fait, étant observé que la contestation du droit à indemnisation de M. [K] ne le dispensait pas de faire une offre d'indemnisation dans le délai de 8 mois prévu à l'article L. 211-22 du code des assurances.

Le FGAO encourt ainsi la sanction du doublement du taux de l'intérêt légal à compter du 15 décembre 2015.

S'agissant de l'offre définitive, le rapport d'expertise du Docteur [M] fixant la consolidation au 10 septembre 2015 a été établi le 26 septembre 2018 et selon ses mentions adressé le même jour au conseil du FGAO qui ne conteste pas en avoir eu connaissance dès cette date.

Le FGAO devait ainsi formuler une offre d'indemnisation définitive au plus tard le 26 février 2019.

Une offre d'indemnisation pouvant valablement être faite à titre subsidiaire, par voie de conclusions, et constituant, même si elle est tardive, l'assiette et le terme de la pénalité prévue à l'article L. 211-13 du code des assurances dès lors qu'elle n'est ni incomplète ni manifestement insuffisante, il convient, avant dire droit, sur l'assiette et le terme de la pénalité encourue par le FGAO d'ordonner la réouverture des débats afin d'inviter les parties à produire toutes les conclusions notifiées par le FGAO devant les premiers juges.

Sur le préjudice moral de Mme [K]

Mme [K] fait valoir que sa vie de famille a été totalement perturbée dans les suites de l'accident, qu'elle a dû se déplacer pour rendre visite à son mari à l'hôpital, que la longue hospitalisation de ce dernier et sa légitime inquiétude après l'annonce de l'accident et face aux douleurs et séquelles de son époux sont constitutifs d'un préjudice moral qu'elle demande à voir évaluer à la somme de 10 000 euros.

Le FGAO soutient que le préjudice d'affection a pour objet d'indemniser, en dehors des cas où la victime est décédée, la douleur morale ressentie par les proches d'une personne très lourdement handicapée.

Il ajoute qu'il n'est pas démontré en l'espèce que l'état de M. [K] revêt un caractère d'exceptionnelle gravité et a des répercussions sur les conditions d'existence de ses proches, justifiant une indemnisation au titre du préjudice moral.

Il considère que Mme [K] n'apporte pas la preuve d'un préjudice personnel direct et certain.

Sur ce, il suffit pour que le préjudice moral des proches soit indemnisable que soit rapportée la preuve de l'existence d'un préjudice personnel, direct et certain.

En l'espèce, Mme [K] qui partageait une communauté de vie effective et affective avec son époux justifie à la fois d'un préjudice d'affection à la vue des souffrances subies par son époux et de troubles dans ses conditions d'existence pendant ses périodes d'hospitalisation.

Ce préjudice sera évalué à la somme de 5 000 euros.

Après application de la réduction du droit à indemnisation de Mme [K], il revient cette dernière la somme de 3 500 euros (5 000 euros x 70 %).

Sur les demandes annexes

Les dispositions du jugement relatives aux dépens et aux frais irrépétibles doivent être infirmées.

Le FGAO, qui succombe partiellement dans ses prétentions, ne pouvant être condamné aux dépens qui ne figurent pas au rang des charges qu'il est tenu d'assurer, les dépens de première instance et les dépens d'appel exposés jusqu'à ce jour seront mis à la charge de l'Etat avec application de l'article 699 du code de procédure civile.

L'équité commande d'allouer à M. et Mme [K] une indemnité globale de 4000 euros au titre des frais irrépétibles exposés en première instance et en cause d'appel jusqu'à ce jour et de rejeter la demande de la Mutuelle des motards formulée au même titre.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant publiquement, par arrêt réputé contradictoire, par mise à disposition au greffe et dans les limites de l'appel,

- Infirme le jugement, hormis en ce qu'il a débouté M. [T] [K] de ses demandes formées à l'encontre de la société Assurance mutuelle des motards,

Statuant à nouveau sur les points infirmés et y ajourant :

- Dit que M. [T] [K] a commis des fautes justifiant la réduction de 30 % de son droit à indemnisation et de celui de son épouse,

  - Condamne le Fonds de garantie des assurances obligatoires de dommages à payer à M. [T] [K] les sommes suivantes, provisions non déduites, au titre des postes de préjudice ci-après :

- pertes de gains professionnels actuels : rejet

- assistance temporaire par une tierce personne : 4 991 euros

- assistante permanente par une tierce personne :36 598,80 euros

- déficit fonctionnel temporaire : 1 794,10 euros

- souffrances endurées : 14 000 euros

- préjudice esthétique temporaire : 700 euros

- préjudice esthétique permanent : 2 800 euros

- Rejette les demandes d'indemnisation présentées par M. [T] [K] au titre des frais divers, des pertes de gains professionnels, de l'incidence professionnelle, du déficit fonctionnel permanent et du préjudice d'agrément,

- Condamne le Fonds de garantie des assurances obligatoires de dommages à payer à Mme [N] [K] la somme de 3 500 euros en réparation de son préjudice moral,

- Dit que le FGAO encourt la pénalité prévue aux articles L. 211-9 et L. 211-22 du code des assurances à compter du15 décembre 2015,

- Avant dire droit sur l'assiette et le terme de cette pénalité ordonne la réouverture des débats à l'audience du 11 mai 2023 à 14 heures (salle d'audience Tocqueville, Escalier Z, 4ème étage),

- Invite les parties à produire toutes les conclusions notifiées par le Fonds de garantie des assurances obligatoires de dommages devant les premiers juges,

- Condamne le Fonds de garantie des assurances obligatoires de dommages à payer à M. [T] [G] et à Mme [N] [K] en application de l'article 700 du code de procédure civile la somme globale de 4000 euros au titre des frais irrépétibles exposés en première instance et en cause d'appel jusqu'à ce jour ,

- Rejette la demande de la société Assurance mutuelle des motards au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- Dit que les dépens de première instance et les dépens d'appel exposés jusqu'à ce jour seront à la charge de l'Etat avec application de l'article 699 du code de procédure civile.

LA GREFFIÈRE LA PRÉSIDENTE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 4 - chambre 11
Numéro d'arrêt : 21/06622
Date de la décision : 15/12/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-12-15;21.06622 ?
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