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14/12/2022 | FRANCE | N°22/06967

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 5 - chambre 15, 14 décembre 2022, 22/06967


Grosses délivrées aux parties le :



RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS









COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 5 - Chambre 15



ORDONNANCE DU 14 DECEMBRE 2022



(n°49 ,26 pages)







Numéro d'inscription au répertoire général : 22/06967 (recours) - N° Portalis 35L7-V-B7G-CFTGC auquel sont joints les RG 22/6973 (recours) et 22/6981 (appel)



Décisions déférées : Ordonnance rendue le 1erAvril 2022 par le Juge des libertés et de la détention du tribu

nal judiciaire d'EVRY-COURCOURONNES



Procès-verbal de visite en date du 6 avril 2022 dans les locaux sis [Adresse 4]



Procès-verbal de visite en date du 6 avril 2022 dans les ...

Grosses délivrées aux parties le :

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 5 - Chambre 15

ORDONNANCE DU 14 DECEMBRE 2022

(n°49 ,26 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : 22/06967 (recours) - N° Portalis 35L7-V-B7G-CFTGC auquel sont joints les RG 22/6973 (recours) et 22/6981 (appel)

Décisions déférées : Ordonnance rendue le 1erAvril 2022 par le Juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire d'EVRY-COURCOURONNES

Procès-verbal de visite en date du 6 avril 2022 dans les locaux sis [Adresse 4]

Procès-verbal de visite en date du 6 avril 2022 dans les locaux sis [Adresse 3]

Nature de la décision : Contradictoire

Nous, Elisabeth IENNE-BERTHELOT, Conseillère à la Cour d'appel de PARIS, déléguée par le Premier Président de ladite Cour pour exercer les attributions résultant de l'article L16B du Livre des procédures fiscales, modifié par l'article 164 de la loi n°2008-776 du 04 août 2008 ;

assistée de Véronique COUVET, greffier lors des débats et de la mise à disposition ;

Après avoir appelé à l'audience publique du 02 novembre 2022 :

LA SOCIÉTÉ LCDA PETS UK LIMITED, société de droit britannique

Prise en la personne de son Directeur M. [V] [J]

Elisant domicile au cabinet de la SCP AFG

[Adresse 2]

[Adresse 2]

Représentée par Me Arnaud GUYONNET de la SCP AFG, avocat au barreau de PARIS, toque : L0044

Assistée de Me Patrice CLAVÉ de la SELARL MENU SEMERIA BROC, avocat au barreau de PARIS

LA SOCIÉTÉ LCDA UK LIMITED, société de droit britannique

Prise en la personne de ses Directeurs Madame [X] [I] et Monsieur [V] [J]

Elisant domicile au cabinet de la SCP AFG

[Adresse 2]

[Adresse 2]

comparant par Madame [X] [I], dirigeante

Représentée par Me Arnaud GUYONNET de la SCP SCP AFG, avocat au barreau de PARIS, toque : L0044

Assistée de Me Patrice CLAVE de la SELARL MENU SEMERIA BROC, avocat au barreau de PARIS

APPELANTES ET REQUERANTES

et

LA DIRECTION NATIONALE D'ENQUETES FISCALES

[Adresse 5]

[Adresse 5]

Représentée par Me Jean DI FRANCESCO de la SCP URBINO ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, toque : P0137

INTIMÉE ET DEFENDERESSE AUX RECOURS

Et après avoir entendu publiquement, à notre audience du 02 novembre 2022, l'avocat des appelantes, et l'avocat de l'intimée ;

Les débats ayant été clôturés avec l'indication que l'affaire était mise en délibéré au 14 décembre 2022 pour mise à disposition de l'ordonnance au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile.

Avons rendu l'ordonnance ci-après :

Le 1er avril 2022, le juge des libertés et de la détention (ci-après JLD) du Tribunal judiciaire (ci-après TJ) d ' Evry- Courcouronnes a rendu, en application de l'article L.16B du Livre des procédures fiscales (ci-après LPF), une ordonnance à l'encontre de  :

- La société de droit britannique LCDA UK LTD représentée par ses directeurs [V] [J] et [X] [I], dont le siège est sis [Adresse 1] au Royaume-Uni et ayant pour objet social « Activités d'autres sociétés holding non classées ailleurs ».

- La société de droit britannique LCDA PETS UK LTD, représentée par son Directeur [V] [J], dont le siège est sis [Adresse 1] et ayant pour objet social « Activités vétérinaires ».

L'ordonnance autorisait des opérations de visite et saisie dans les lieux suivants:

- locaux et dépendances sis [Adresse 3] susceptibles d'être occupés par [V] [J] et/ou [B] [E] et/ou [U] [W] et/ou [Z] [W] et/ou la SCI 29 PECHERIE et/ou la SARL HAURA et/ou la société de droit britannique LCDA UK LTD et/ou la société de droit britannique LCDA PETS UK LTD.

- locaux et dépendances sis [Adresse 4] susceptibles d'être occupés par la SARL LA COMPAGNIE DES ANIMAUX et/ou la SARL La COMPAGNIE DES ANIMAUX LOGISTIQUE et/ou la SARL britannique LCDA UK LTD et/ou la société de droit britannique LCDA PETS UK LTD.

L'autorisation de visite et de saisie des lieux susmentionnés était délivrée aux motifs que la société de droit britannique LCDA UK LTD exercerait en France une activité professionelle dans le domaine de la gestion de participations financières sans souscrire les déclarations fiscales y afférentes, et que la société de droit britannique LCDA PETS UK LTD exercerait en France une activité professionnelle de vente à distance de produits vétérinaires sans souscrire les déclarations fiscales relatives à l'impôt sur les sociétés et ainsi ne procèderait pas à la passation en France des écritures comptables correspondantes, et ainsi sont toutes les deux présumées s'être soustraites et/ou se soustraire à l'établissement et au paiement de l'impôt sur les Bénéfices et/ou des Taxes sur le Chiffre d'Affaires, en se livrant à des achats ou des ventes sans facture, en utilisant ou en délivrant des factures ou des documents ne se rapportant pas à des opérations réelles ou en omettant sciemment de passer ou de faire passer des écritures inexactes ou fictives dans des documents comptables dont la tenue est imposée par le Code Général des Impôts (articles 54 et 209-1 pour l'IS et 286 pour la TVA).

L'ordonnance était accompagnée de 92 pièces annexées à la requête.

Il ressortait des éléments du dossier que :

Concernant la société de droit britannique LCDA UK LIMITED

La société LCDA UK LIMITED créée en 2015 est détenue par [V] [J], vétérinaire, par [X] [I], conseillère financière et par JP [K], avocat, tous de nationalité française, ainsi cette société est détenue par des personnes physiques de nationalité française dont [V] [J], associé majoritaire et dirigeant. Selon les comptes déposés par la société entre 2017 et 2020 le nombre moyen de personnes employées par la société était de trois, à sa création la société a fixé son siège social au 4th Floor Reading Bridge sis [...], lieu où était implantée la société Trogmorton secretaries LLP nommée " corporate secretary " de la société LCDA UK LIMITED. Au titre des bilans 2018 à 2020 la société LCDA UK LIMITED a pour comptable "Harwood Hutton" sis [...] dont un grand nombre d'entreprises sont présentes dans ces lieux, la société Harwood Hutton propose à ses clients de nombreux services dont la fourniture d'adresse de siège social. Une recherche de numéro de téléphone de LCDA UK LIMITED est demeurée infructeuse.

Il est présumé que la société de droit britannique a établi ses deux siège sociaux successifs à des adresses de domiciliations où elle ne disposerait pas de moyens de communications nécessaires à l'exercice de son activité.

Concernant la société de droit britannique La compagnie des animaux UK LTD devenue la LCDA PETS UK LIMITED

[V] [J] a créé la société de droit britannique La compagnie des animaux UK LTD le 17 avril 2015 avec un capital social d'une part, il est le directeur de la société depuis sa création, [X] [I] a occupé la fonction de directeur de juillet 2015 à 2017. Le 31/7/2015 la société LCDA UK LTD devient l'unique associée de la compagnie des animaux UK LTD, en 2019 celle-ci devient la LCDA PETS UK LTD.

Ainsi la société de droit britannique LCDA PETS UK LTD, détenue par la société de droit britannique LCDA UK LTD a, comme cette dernière, pour dirigeant [V] [J]. Il résulte des pièces produites que la société LCDA PETS UK LTD a établi ses deux sièges sociaux successifs aux mêmes adresses de domiciliation que la société LCDA UK LTD où elle ne disposerait pas de moyens de communications nécessaires à l'exercice de son activité, et qu'elle disposait de locaux de 2015 à 2020 sur le territoire britannique.

Suite à une procédure de vérification de comptabilité de 2018 à 2020, subie par la SARL Compagnie des animaux, différents documents ont été transmis, il en résulte que les sociétés de droit britannique LCDA UK LTD et LCDA PETS UK LTD sont représentées par [V] [J], seul signataire, qui déclare résider [Adresse 3].

La signature d'[X] [I] apparaît sur les comptes des sociétés britanniques au titre des années 2015 à 2019, elle est conseillère financière et exerce des mandats dans 3 autres sociétés britanniques . [A] [K] est avocat à [Localité 8].

Dès lors, au regard de sa signature pour représenter la société LCDA UK LTD et de son statut d'associé majoritaire, il est présumé que [V] [J] est le seul directeur effectif dans la prise de décision stratégique et qu'il assure la direction opérationnelle des sociétés LCDA UK LTD et LCDA PETS UK LTD , les autres directeurs (JP [K] et E. [I]) étant présumés assurer des opérations de gestion courante purement administrative de la société, sans assumer les pouvoirs de direction. Dès lors il peut-être présumé que le centre décisionnel des sociétés se situe sur le territoire national en la personne de [V] [J], résident de France.

Concernant la SARL La Compagnie des animaux

A sa création en 1998 la société est située [Adresse 6], puis elle est située [Adresse 4]. A partir de 2015 elle a pour activité principale "vente à distance sur catalogue spécialisé logistique, toute activités et opérations commerciales d'achat, revente, import, au détail ou en gros de tous articles manufacturés, produits d'hygiène et d'alimentation ayant trait au marché de l'animal de compagnie et de production et tous produits vétérinaires non soumis à prescription". Son capital social est détenu à compter de 2014 par [V] [J]( 52%) son unique gérant , et la SARL HAURA ( 48%). En 2015, ces derniers cèdent la totalité des parts sociales de la SARL La Compagnie des animaux à la société de droit britannique LCDA UK LIMITED.

Depuis sa création, la SARL La Compagnie des animaux a pour actionnaire direct ou indirect son gérant [V] [J], elle exploite uun site internet de vente de produits pour animaux administré par ce dernier.

Le site internet" dogteur.com" appartenant à la société britannique LCDA PETS UK LTD est également administré par [V] [J], les deux sites sont similaires dans leur contenu, dès lors il est présumé que ceux-ci sont hébergés et administrés depuis le territoire national, et que la société LCDA PETS UK LTD utilise comme moyen de contact les coordonnées téléphoniques de la SARL La Compagnie des animaux.

Le site internet "dogtor.vet" exploité par la société LCDA PETS UK LTD est destiné à la clientèle britannique, elle exploite également un site présumé être destiné à la clientèle italienne.

Il ressort des pièces à l'appui de la requête que la société LCDA PETS UK LTD dispose de moyens humains au Royaume- Uni (4 employés déclarés selon les comptes de la société de 2017 à 2020 et une équipe composée de deux vétérinaires). Cette société dispose de moyens bancaires en France.

La SARL La compagnie des animaux et La compagnie des animaux logistique (société dont le capital social est détenu par la LCDA UK LIMITEd et dont [V] [J] est le gérant) sont présumées traiter les commandes de la société LCDA PETS UK LTD relatives aux sites internet exploités par cette dernière, ce qui représente une part significative du montant du chiffre d'affaire TVA déclaré en France.

Il résulte de l'ensemble de ces éléments que [V] [J] est présumé être à la tête du groupe formé par la société de droit britannique LCDA UK LTD et ses filiales la société de droit britannique LCDA PETS UK LTD et les SARL La compagnie des animaux, la compagnie des animaux logistique et Docteurassur, toutes exerçant une activité dans le domaine des animaux. Il résulte de tout ce qui précède que la société de droit britannique LCDA UK LTD dispose en France du siège de sa détention capitalistique et de son centre décisionnel en la personne de [V] [J].

Il résulte également de tout ce qui précède que la société de droit britannique LCDA PETS UK LTD dispose en France du siège de sa détention capitalistique et de son centre décisionnel en la personne de [V] [J] et exerce une activité de vente à distance de produits vétérinaires en disposant de moyens matériels et humains sur le territoire national.

Dès lors, la société de droit britannique LCDA UK LTD est présumée exercer sur le territoire national une activité professionnelle dans le domaine de la gestion de participations financières, sans souscrire les déclarations fiscales correspondantes et ainsi omettre de passer en France, les écritures comptables y afférentes.

Dès lors, la société de droit britannique LCDA PETS UK LTD est présumée exercer sur le territoire national une activité professionnelle dans le domaine de vente à distance de produits vétérinaires, sans souscrire les déclarations fiscales correspondantes relatives à l'impôt sur les Sociétés et ainsi omettre de passer en France les écritures comptables y afférentes.

En raison de ses liens capitalistiques avec la société de droit britannique LCDA UK LTD, de ses liens commerciaux avec la société de droit britannique LCDA PETS UK LTD, la SARL LA COMPAGNIE DES ANIMAUX est susceptible de détenir dans les locaux qu'elle occupe des documents et/ou supports d'informations relatifs à la fraude présumée.

En raison de ses liens capitalistiques avec la société de droit britannique LCDA UK LTD et de leur dirigeant commun en la personne de [V] [J], la SARL DOGTEURASSSUR est susceptible de détenir dans les locaux qu'elle occupe des documents et/ou supports d'informations relatifs à la fraude présumée.

Les sociétés SARL LA COMPAGNIE DES ANIMAUX, LA COMPAGNIE DES ANIMAUX LOGISTIQUE et DOGTEURASSUR, la SELARL VETO-N7, la SCI DRN7, la SCI PGS-INVEST, les sociétés de droit britannique LCDA UK LTD et LCDA PETS UK LTD sont susceptibles d'occuper tout ou partie des locaux en commun.

Ainsi les locaux sis [Adresse 4] présumés être occupés par la SARL LA COMPAGNIE DES ANIMAUX et/ou la SARL COMPAGNIE DES ANIMAUX LOGISTIQUE et/ou la SARL DOGTEURASSUR et/ou la SELARL VETO-N7 et/ou la SCI DRN7 et/ou la SCI PGS-INVEST et/ou la société de droit britannique LCDA UK LTD et/ou la société de droit britannique LCDA PETS UK LTD sont susceptibles de contenir des documents et ou supports d'informations relatifs à la fraude présumée.

En raison des fonctions de gérants, de la détention à hauteur de 98% du capital social de [V] [J] et de son siège social déclaré à la même adresse du domicile de celui-ci, la SCI située sis [Adresse 3] est susceptible de détenir dans les locaux qu'elle occupe, des documents et/ou supports d'informations relatifs à la fraude présumée.

En raison de son siège social située à la même adresse, la SARL HAURA est susceptible de détenir dans les locaux qu'elle occupe des documents et/ou supports d'informations relatifs à la fraude présumée.

Au vu de tout ce qui précède, le JLD a autorisé la visite domiciliaire dans les locaux et dépendances sis [Adresse 3] présumés être occupés par [V] [J] [...] et/ou la SARL HAURA et/ou la société de droit britannique LCDA UK LTD et/ou la société de droit britannique LCDA PETS UK sont susceptibles de contenir des documents et/ou supports d'informations relatifs à la fraude présumée, et a autorisé la visite domiciliaire dans les locaux et dépendances sis [Adresse 4].

Les opérations de visite et de saisie se sont déroulés le 06 avril 2022 de 7H20 à 19H45, dans les locaux sis [Adresse 4] .

Les opérations de visite et de saisie se sont déroulés le 06 avril 2022 de 7H00 à 9H30, dans les locaux sis [Adresse 3] .

La société LCDA PETS UK LIMITED et la société LCDA UK LIMITED ont interjeté appel de l'ordonnance du JLD ( RG 22/06981).

La société LCDA PETS UK LIMITED et la société LCDA UK LIMITED ont formé un recours contre les opérations de visite domiciliaires effectuées au [Adresse 4] (RG 22/06967) et au [Adresse 3] (RG 22/06973) .

L'affaire a été audiencée pour être plaidée le 2 novembre 2022, à cette audience la jonction des dossiers a été évoquée et l'affaire a été mise en délibéré pour être rendue le 14 décembre 2022.

SUR l'APPEL

Par conclusions d'appel du 12 juillet 2022 et conclusions récapitulatives déposées à la Cour d'appel le 26 octobre 2022 soutenues à l'audience du 2 novembre 2022, les appelantes font valoir :

Chapitre I. Contexte économique des sociétés et du groupe.

-Un groupe constitué initialement en France.

Les parties appelantes rappellnt e les circonstances de la création de la SARL La compagnie des Animaux en 1998 ( toilettage ) avec une activité commerciale attenante à une clinique vétérinaire. Dès 2010, la SARL étend son activité à la vente à distance sur catalogue spécialisé, logistique et toutes activités et opérations commerciales d'achat, revente, import et export au détail ou en gros de tous articles manufacturés, produits d'hygiène et d'alimentation ayant trait au marché de l'animal de compagnie et de production et de produits vétérinaires, pour lesquels il convient de faire la distinction entre les produits soumis à la prescription par un vétérinaire et ceux qui ne sont pas soumis à prescription obligatoire (dits dérogataires).

Or, d'une part la surfacturation des clients finaux desdits médicaments vétérinaires du fait de ristournes de fin d'année faisant varier les pratiques tarifaires entre professionnels jusqu'à 80% et d'autre part la concurrence sur le marché français de sociétés établies à l'étranger non soumises à ces pratiques tarifaires et bénéficiant de prix fournisseurs attractifs à travers la vente sur internet, expliquent, selon les appelantes, les raisons de leur internationalisation.

-Les motivations économiques d'un développement en France et à l'international.

L'établissement de la société LCDA PETS UK LTD en Angleterre permettait de s'aligner sur la concurrence internationale, l'Angleterre étant le deuxième marché européen après la France, ce qui lui permettait de pouvoir vendre tant en France, au Royaume-Uni que dans d'autres Etats. Cela permettait également de bénéficier de tarifs fournisseurs anglais très concurrentiels sur les produits vétérinaires sans ordonnance.

Sur le plan pratique, le choix du pays d'implantation de la structure initiale résulte notamment de la rencontre des équipes françaises avec Mme [I], résidente fiscale au Royaume-Uni et exerçant des fonctions notamment dans le domaine de capital investissement. Ainsi la société opérationnelle "La compagnie des animaux UK" renommée à compter du 06/02/2019 "LCDA PETS UK LTD", s'est dotée d'une structure de détention holding, la société LCDA UK LTD étant établie également au Royaume-Uni.

Elle exerce une activité de vente à distance de produits vétérinaires et permet le développement du groupe à l'international en vue de conquérir le marché anglais et servir le marché français. La société et les vétérinaires y travaillant, ainsi que le Dr. [J] sont enregistrés au Royal College of Veterinary Medicine au Royaume-Uni. La société est auditée par le Veterinary Medicine Directory en Angleterre.

Mme [I] anime les sociétés anglaises du groupe économique dont sont membres les sociétés requérantes. De plus le groupe économique s'est développé en France avec la création de la SARL "La compagnie des animaux logistique" en 2018, dont le siège social est situé [Adresse 4].

-La substance de la Société au Royaume-Uni.

Pour exercer ses activités de vétérinaire et commerciale ayant trait au marché de l'animal de compagnie, la société LCDA PETS UK LTD dispose :

d'un bail de locaux à usage professionnel d'une superficie de 200m2 constituant son principal établissement opérationnel, à l'adresse de [...] Berkshire, à distinguer de son siège d'enregistrement, d'un effectif salarié de 4 personnes disposant de compétences techniques non contestables dans le domaine vétérinaire au Royaume-Uni, d'une correspondante permanente en la personne de Mme [I] en raison de sa proximité géographique, de prestations comptables externes à savoir la société "Thorgmorton secretaries LLP", puis, à compter de 2018, la société "Harwood Hutton".

Monsieur [J], résident fiscal français et fondateur du groupe est le "Director" de la société LCDA PETS UK LTD.

La société est régulièrement auditée par le commissaire aux comptes anglais.

la société LCDA PETS UK LTD exerce une activité opérationnelle qui se traduit dans sa comptabilité (pièce n°8), elle dispose de moyens matériels d'exploitation et de moyens incorporels ( sites Internet, d'un prestataire de Datacenter, et de 2 numéros de téléphone), elle dépose ses liasses comptables (comptabilité sociale et comptabilité consolidée) ainsi que ses liasses fiscales dans les délais auprès des administrations britanniques.

En raison de son activité de vente à distance réalisée en France, la société dépose régulièrement et sans délai ses déclarations de Taxe sur la valeur ajoutée en France depuis 2015. Elle dispose d'un compte bancaire au Royaume-Uni et d'un compte bancaire en France, notamment pour liquider la Taxe sur la valeur ajoutée française susvisée. Elle ne dispose d'aucun autre bien corporel ou incorporel en France. Ce compte est crédité par les ventes faites en euros .

Chapitre II L'absence de réunion des conditions d'application de la visite domiciliaire.

Les parties appelantes rappellent les conditions de mise en oeuvre de l'article L.16B du LPF, l'infirmation de l'Ordonnance est sollicitée dès lors que les conditions susvisées ne sont pas réunies.

- L'absence de caractérisation de présomption d'actes frauduleux.

L'Ordonnance se fonde sur la présomption selon laquelle les sociétés seraient présumées exercer une activité en France "en omettant sciemment de passer ou faire passer des écritures (...) dans des documents comptables dont la tenue est imposée par le code général des impôts", or elle se fonde sur un ensemble de faits erronés pour en tirer des présomptions également inexactes.

- Le fondement textuel précis de l'article L 16B du LPF est inapplicable au cas de l'espèce.

En effet, l'article L 16B du LPF est une disposition dérogatoire du droit commun dont l'interprétation doit être stricte, qui permet une conciliation entre la recherche légitime par l'administration fiscale des auteurs d'infractions fiscales et le respect des droits et libertés constitutionnellement protégés par une mise en 'uvre stricte des dispositions légales encadrant ce dispositif.

Pour ce faire, il prévoit une liste limitative de présomptions d'infractions.

Parmi les actes énumérés par l'article L 16B du LPF figure l'omission de passer des écritures , il s'agit des écritures comptables, or pour caractériser une présomption de fraude fiscale, le juge de l'autorisation doit constater dans son ordonnance que les écritures comptables prétendument omises qui traduisent les opérations économiques réalisées en France ne figurent pas, elles-mêmes, dans la comptabilité de la société étrangère.

L'article L 16 B du LPF ne fait pas de distinction selon la nationalité de la société, ainsi

le juge de l'autorisation doit constater l'omission ou non d'écriture comptable dans la comptabilité étrangère lorsque celle-ci est établie à l'étranger. La différence de traitement opérée en fonction de l'établissement de la société en France ou dans l'Union européenne, peut constituer une discrimination fondée sur la nationalité et une limitation à la liberté d'établissement des sociétés établies dans l'Union européenne.

Les appelantes citent la décision de la Cour d'appel de Paris dit arrêt " LFB" (CA Paris, 09/09/2020, n°19/16.971) qui a statué dans ce sens.

En l'espèce l'ordonnance justifie l'autorisation de la visite domiciliaire à l'encontre des sociétés LCDA UK LTD et LCDA PETS UK LTD en se fondant sur la même nature d'infraction.

Or, il ressort des pièces de l'Ordonnance que les sociétés tiennent une comptabilité complète en Angleterre dont le dépôt est attesté sur le site Internet "Companies Houes" (équivalent au Registre du commerce et des sociétés en France). Par ailleurs, en vertu des conventions bilatérales d'assistance administrative, l'exhaustivité des comptes anglais et déclarations fiscales sont disponibles sur simple demande de l'administration fiscale française.

Ainsi, alors que ces sociétés n'étaient soumises qu'aux seules règles comptables britanniques et que le juge n'a pas vérifié l'omission de telles écritures dans cette comptabilité anglaise, l'absence de prise en considération des éléments comptables anglais constitue une discrimination fondée sur la nationalité et sur une limitation à la liberté d'établissement contraires à l'article 49 du TFUE.

Pour la période qui suit le Brexit le 01/01/2021, l'absence de prise en considération des éléments de comptabilité anglaise constitue toujours cette même discrimination.

Ainsi l'absence de dépôt de déclaration fiscale en France ne saurait en l'espèce, constituer une présomption d'absence de comptabilité ou d'écriture comptable justifiant la mise en 'uvre de l'article L.16B du LPF. Il en résulte que l' ordonnance du JLD du 01/04/2022 doit être infirmée.

Les appelantes critiquent la réponse de l'administration dans son mémoire en défense.

-Les autres éléments factuels ne permettent pas de présumer la fraude alléguée.

Les juges du fond utilisent la méthode du faisceau d'indices pour apprécier le bien fondé des ordonnances d'autorisation de visites domiciliaires, portant sur l'existence de locaux professionnels permettant l'exercice de l'activité économique, sur des moyens humains et matériels propres.

En l'espèce , il convient de constater l'existence de locaux professionnels qui permettent une activité économique. La base de donnée mondiale sur laquelle l'administration fiscale se fonde ( 339 entreprises hébergées à la même adresse que le siège d'enregistrement des sociétés) n'est pas mise à jour. Le juge dans sa décision considère que la société LCDA PETS UK LTD utilise un "bloc" qui n'est pas constitué de bureaux, or la société précise qu'elle a eu l'autorisation de construire une mézannine dans les locaux qu'elle occupe ( pièce 6), les locaux à usage professionnel pris à bail pour son activité ont une superficie de 200 m2, il s'agit d'un lieu adapté pour son activité commerciale ( activité opérationnelle de réception des marchandises, conditionnement et étiquetage par les salariés).

La société LCDA PETS UK LTD exerce sur le sol britannique au siège de son principal établissement opérationnel une activité de distribution de produits vétérinaires à distance, pour exercer cette activité le juge relève qu'elle emploie 4 personnels salariés et en déduit qu'elle dispose de moyens humains au RU. Pour moduler cette affirmation l'ordonnance retient que les vétérinaires peuvent exercer leur activité pour le compte des 2 sociétés et conclut que" la société LCDA PET UK LTD est présumée disposer en France de moyens d'exploitation matériels et humains au sein des sociétés soeurs". La société LCDA PETS UK LTD précise que son effectif de salarié est composé de 2 vétérinaires et de 2 autres employés, ce qui est suffisant pour gérer son actif et réaliser son objet social en autonomie, et cela d'autant plus que les vétérinaires exerçant en Angleterre ne perçoivent aucun honoraire de la société française.

Madame [I] domiciliée en Angleterre et dirigeante de la société LCDA UK LTD qui est l'actionnaire unique de la société LCDA PETS UK LTD anime localement les sociétés du groupe en Angleterre. Ainsi la société LCDA PETS UK LTD dispose de moyens humains suffisants.

La présence de moyens matériels de la société LCDA PETS UK LTD ( moyens matériels enregistrés à l'actif immobilisé) lui permettent de réaliser son objet social . Cette société dispose de moyens matériels informatiques en Angleterre (3 sites internet pour toucher une clientèle anglophone, italophone et francophone) et de moyens incorporels propres, qui sont adaptés pour réaliser son objet social, s'agissant de la vente de produits médicamenteux non soumis à ordonnance et qui sont concurrentiels par rapport au marché français.

Une simple investigation sur un moteur de recherche permet de relever que la société LCDA PETS UK LTD dispose de 2 lignes téléphoniques en Angleterre au lieu de son principal établissement, et qu'elle dispose de sites internet (dogteur.com et dogtor.vet) permettant la vente par internet, ainsi la société dipose de moyens de communication propres, actifs et disponibles auprès de la clientèle, contrairement à ce qu'énonce l'ordonnance du JLD.

La société LCDA PETS UK LTD a conclu des contrats d'assistance et de support avec des sociétés tierces fournisseurs de service en Angleterre et des contrats d'assistance de fournisseurs et de trésorerie avec des sociétés liées (pièce 21), ce qui permet de contester les présomptions de l'ordonnance selon lesquelles "la compagnie des animaux et la compagnie des animaux logistiques" sont présumées traiter les commandes de la société LCDA PETS UK LTD relatives aux sites internet de cette dernière. L'existence de sociétés soeurs en France avec lesquelles la société LCDA PETS UK LTD a conclu des contrats d'approvisionnement ne peut suffire à présumer que la France constitue le centre de gravité de cette dernière.

Il en résulte que la société LCDA PETS UK LTD dispose de moyens matériels, incorporels et des moyens humains lui peremttant d'exercer son activité commerciale en toute autonomie.

-L'absence de présomption de soustraction à l'établissement ou au paiement de l'impôt.

La société LCDA PETS UK LTD immatriculée au RCS au titre de la TVA, dépose ses déclarations de TVA conformément à la loi fiscale en France et dans les délais et s'acquitte de la TVA également dans les délais. Elle est donc un contribuable diligent et ne peut être présumée se soustraire à l'établissement des déclarations d'impôt alors même que l'administration relève qu'elle a souscrit ses déclarations conformément à la loi en matière de TVA.

Par ailleurs, il peut être présumé qu'elle a fait de même en matière d'impôt sur les sociétés en considérant qu'elle n'avait pas à déposer des déclarations sur les bénéfices en France dès lors qu'elle ne disposait pas d'un établissement stable en France.

La société LCDA PETS UK LTD ne s'est pas soustraite au paiement de la TVA en France. Celle-ci n'a d'ailleurs jamais fait l'objet d'une rectification par l'administration fiscale.

Il ne saurait être présumé une quelconque manifestation matérielle et intentionnelle de se soustraire à l'établissement de l'impôt sur les sociétés. Il en résulte que ni la société LCDA UK LTD, ni la société LCDA PETS UK LTD ne peuvent être présumées s'être volontairement soustraites à l'établissement des déclarations fiscales en France, ni commettre une fraude fiscale.

En matière de TVA, la LCDA PETS UK LTD ne s'est pas soustraite au paiement de la TVA en France. En matière d'IS, la LCDA PETS UK dégage une situation globalement négative depuis sa création. Dans ses conclusions en défense, l'administration rappelle que cette question relève de la compétence du juge administratif de l'impôt , or la procédure de l'article L 16B du LPF poursuit un objectif de valeur constitutionnelle de lutte contre la fraude fiscale et repose sur l'hypothèse de l'existence d'indices permettant de présumer que le contribuable a éludé l'impôt, or en raison de la situation déficitaire comptablement et fiscalement de la société à l'étranger, il peut être au contraire présumé qu'elle n'a pas cherché à éluder l'impôt.

Chapitre III L'absence de vérification concrète par le JLD.

Le juge doit, en vertu de l'article L16B du LPF, vérifier concrètement les éléments matériels sur lesquels se fonde la présomption de fraude mais également l'élément intentionnel à savoir la volonté de se soustraire à l'impôt.

En l'espèce il est argué l'absence de vérification concrète des éléments matériels.

Selon la Cour de cassation le juge du fond doit apprécier l'existence de présomptions d'agissements frauduleux, sans être tenu d'établir l'existence des agissements. En cas d'inexactitude et d'incohérenes flagrantes dans l'ordonnance la Cour d'appel a considéré qu'il y avait une absence d'analyse concrète.

En l'espèce, le juge n'a pu matériellement analyser le dossier du fait du court délai entre la date de la requête et la signature de l'ordonnance (4 jours), la motivation de l'ordonnance est celle de la requête de l'administration fiscale, des contradictions et des erreurs manifestes de raisonnement juridique sont relevées dans l'ordonnance.

Le juge n'a pas procédé à une analyse concrète du marche concerné justifiant une assiette imposable, alors qu'il résulte des éléments du dossier que le métier de la vente de produits sur Internet à destination des animaux de compagnie ne dégage pas de base imposable auprès des entreprises exerçant le même métier et évoluant dans le même marché concurrenciel en France, le juge a signé l'ordonnance sans justifier d'indices permettant d'étayer une quelconque base imposable.

Il est argué l'absence de vérification concrète d'une soustraction volontaire à l'impôt.

L'article 1741 du CGI fait allusion à un dol général : la soustraction à l'impôt doit avoir été réalisée "frauduleusement", l'omission ou la dissimulation doit avoir été commise "volontairement". L'article L 16B du LPF fait une référence explicite à la conscience de l'inexactitude fiscale du contribuable puisqu'il fait référence au terme "sciemment", néanmoins la Cour de cassation a jugé que le juge de l'autorisation n'a pas à caractériser l'élément intentionnel de la fraude fiscale, mais qu'il doit rechercher l'existence de présomption.

La lecture de l'ordonnance permet de conclure que la société LCDA PETS UK LTD a fait ses meilleurs efforts pour se conformer à ses obligations fiscales en France au regard de son activité : immatriculation à la TVA en raison de son activité de vente à distance, déclaration et acquittement de la TVA en France conformément à la loi fiscale française. Il peut être présumé que la société, n'ayant aucune intention de frauder, accomplirait également ses déclarations fiscales en matière d'impôt sur les sociétés si elle disposait d'une établissement stable en France.

L'ordonnance ne fait état d'aucun indice démontrant l'intention de la société de se soustraire à l'établissement ou au paiement de l'impôt en France. La société se conforme à ses obligations comptables anglaises et à ses obligations fiscales en Angleterre et en France.

Ainsi, aucun indice dans l'ordonnance du juge ne permet d'établir la présomption de l'intention de se soustraire à l'impôt.

Par ces motifs, il est demandé de :

Vu l'article 6§1 de la Convention européenne de sauvegard des droits de l'homme et des libertés fondamentales,

Vu l'article L16B du LPF,

In limine litis,

- prononcer la jonction des instances enregistrées sous les numéros RG 22/06981 (appel des Sociétés contre l'Ordonnance) et RG 22/06967 et RG 22/06973 (recours contre les opérations de visites et de saisie des Sociétés) ;

- Déclarer l'appel des sociétés de droit anglais LCDA PETS UK Limited et LCDA UK Limited recevable ;

- Dire et juger que le Juge des libertés et de la détention près le Tribunal Judiciaire a violé l'article L. 16B-I du LPF dès lors qu'il n'a caractérisé ni les actes ou omissions permettant de fonder une visite domiciliaire ni les autres présomptions entrant dans le champ d'application de cet article, qu'il n'a caractérisé aucune présomption de soustraction à l'établissement ou à l'impôt en France ;

- Dire et juger que le Juge des libertés et de la détention près le Tribunal Judiciaire a violé l'article L. 16B-II du LPF en ne vérifiant « de manière concrète » ni les éléments matériels permettant de présumer de la fraude alléguée ni des indices permettant de justifier de l'intention de se soustraire à l'établissement ou à l'impôt en France ;

- Dire et juger que le Juge des libertés et de la détention ne disposait pas de suffisammentd'éléments pour présumer la fraude ;

En conséquence,

- Infirmer en toutes ses dispositions l'ordonnance du 01/04/2022 et l'ordonnance modificative du 15/04/2021 prises par le Juge des libertés et de la détention du Tribunal judiciaire de Paris ;

- Annuler les opérations de visites domiciliaires et de saisie réalisées le 06/04/2022 ;

- Condamner l'Administration fiscale à régler à chacun des appelants la somme de 1.500 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.

Par conclusions déposées le 28 septembre 2022 à la Cour d'appel et soutenues à l'audience du 2 novembre 2022, l'administration fiscale fait valoir :

L'argumentation développée par les appelantes ne remet pas en cause le bien-fondé des présomptions retenues par le premier juge

A) Sur l'applicabilité de l'article L.16 B du LPF au cas d'espèce.

Les appelantes reprochent au JLD de s'être fondé sur des éléments qui ne permettraient pas d'établir l'existence de présomptions selon lesquelles les société se seraient soustraites à l'établissement et au paiement de l'impôt justifiant la mise en oeuvre de l'article L 16B du LPF, or il est rappelé la jurisprudence de la Cour de cassation selon laquelle peuvent être relevées des présomptions relevant des articles 1741 ou 1743 du CGI, l'exercice d'une activité professionnelle occulte sur le territoire national sans souscrire les déclarations fiscales autorise la mise en oeuvre de la procédure de l'article L 16B du LPF, le président justifie sa décision lorsqu'il retient qu'une société a perçu des produits de son activité commerciale sans souscrire la totalité des déclarations fiscales correspondantes.

Les appelantes affirment que l'autorisation de visite et de saisie est infondée dès lors que les sociétés tiennent leur comptabilité régulière au Royaume -Uni, et que ce défaut de prise en considération de cette comptabilité constituerait une discrimination liée à la nationalité de cette société contraire aux dispositions de l'art 49 du TFUE. Cette argumentation ne peut qu'être rejetée. La discussion de l'application d'une convention fiscale relève de la compétence du juge des l'impôt et non de la compétence du juge autorisant la visite domiciliaire, de même la discussion de l'existence de l'établissement stable en France relève du contentieux de l'impôt.

Dans sa décision le juge a bien indiqué les éléments (siège de la détention capitalistique et du centre décisionnel de la société LCDA UK LTD en France, moyens humains et matériels au sein des sociétés soeurs françaises, site internet administrés en France notamment) lui permettant de présumer que les sociétés ne respectaient pas leurs obligations comptables en France, dès lors qu'il a relevé l'absence de toute ou partie de déclaration fiscale relative à leur activité. Cette présomption visait le respect des obligations fiscales et comptables en France.

Contrairement à ce que soutiennent les appelantes, le fait que les sociétés tiennent leur comptabilité en Angleterre n'interdit pas à l'administration d'enquêter sur les conditions effectives d'exercice de leur activité en France et de recourir à l'article L 16B du LPF.

Selon la CJUE, le fait qu'une société tienne une comptabilité dans le pays de son siège est sans incidence sur la possibilité pour l'administration de chaque état membre d'établir ses obligations fiscales et comptables propres et d'en vérifier le respect dès lors que la société exerce une activité dans cet État (CJUE, 15/05/2007, C-250/95).

Selon la CEDH, les dispositions de l'article L.16B du LPF sont valides dès lors que la législation et la pratique des états en la matière offrent des garanties suffisantes contre les abus (CEDH, 2eme section, arrêt n°51578/99 du 8 janvier 2022- Affaire KESLASSY).

La Cour d'appel de PARIS a pu affirmer que peu important qu'une société tienne une comptabilité dans le pays de son siège, le défaut d'une comptabilité en France n'est pas le seul fait susceptible de permettre l'application de l'article L.16B du LPF et que la mise en oeuvre de l'article L.16B du LPF ne constitue pas une violation des principes de liberté d'établissement et de non-discrimination des sociétés au sein de l'U.E (CA, PARIS, 03/03/2021, N°19/12347).

En l'espèce, il ne pourra être invoqué que le défaut de prise en considération de la comptabilité anglaise constitue une discrimination liée à la nationalité au regard des articles 18 et 49 du TFUE. La violation des principes de liberté d'établissement et de non discrimination au sein de l'Union européenne et la présomption d'assujettissement aux impôts français ne peuvent être retenues.

B) Sur la prétendue absence d'éléments de fait faisant présumer de l'existence d'une fraude et sur l'insuffisance de moyens en Angleterre et la présomption de moyens en France.

Les appelantes soutiennent disposer en Angleterre de locaux professionnels et personnels permettant l'exercice de leur activité, sans réellement contester la présomption de l'établissement du siège social à une adresse de domiciliation, mais en contestant les informations du contenu des bases de données internationales.

Or cette présomption n'est pas fondée que sur la consultation des bases de données.

Le JLD a retenu que les sociétés LCDA UK LTD et LCDA PETS UK LTD avaient leur siège social, dans un premier temps à l'adresse de la société THROGMORTON, leur « corporate secretary » , puis dans un second temps à celle de leur comptable, la société HARDWOOD HUTTON. Elles ne semblaient pas avoir de coordonnées disponibles à cette adresse.

S'agissant de la société LCDA PETS UK, le JLD avait, d'une part, relevé l'existence d'un local de 106 m2 mais dépourvu de bureau ou de logement social, ce que confirme l'appelante qui évoque un local destiné à la réception, au conditionnement et à l'étiquetage des marchandises. D'autre part, le JLD avait retenu que la société disposait de moyens humains en Angleterre (présence de salariés), mais la présence des salariés en Angleterre apparaissait limitée à la manutention de marchandises et à la tenue de la comptabilité.

De plus, le JLD relevait, d'une part, qu'il ressortait des relations contractuelles entre la société LA COMPAGNIE DES ANIMAUX,la société LA COMPAGNIE DES ANIMAUX LOGISTIQUE et la société de droit britannique LCDA PETS UK, qu'une part significative des commandes de la société LCDA PETS UK étaient traités par les sociétés françaises, et, d'autre part, que le centre décisionnel des sociétés LCDA UK et LCDA PETS UK LTD pouvait être présumé en FRANCE en la personne de [V] [J], dirigeant des deux sociétés, associé majoritaire de la société LCDA UK, elle-même associée unique de la société LCDA PETS UK.

C) Sur la prétendue absence de vérification concrète du Juge des libertés et de la détention

Selon la jurisprudence constante de la Cour de cassation la pré-rédaction de l'ordonnance par l'administration fiscale n'est pas de nature à l'entacher d'irrégularité, les motifs et le dispositif de l'ordonnance sont réputés avoir été établis par le juge qui l'a rendue et signée, l'article L 16B du LPF ne prévoit aucun délai entre la présentation de la requête et le prononcé de la décision.

La Cour européenne des droits de l'homme a jugé que le grief tiré de l'ineffectivité du contrôle opéré par le JLD ne saurait prospérer dans la mesure ou la Cour d'appel sera amenée à effectuer un second contrôle des pièces produites par l'administration fiscale à l'appui de sa demande d'autorisation pour diligenter une visite domiciliaire.

Il en résulte que l'administration était parfaitement fondée à citer dans sa requête des éléments issus de bases de données, ces éléments étant versés aux débats et laissés à l'appréciation du magistrat.

En l'espèce rien n'autorise les appelantes à suspecter que le premier juge se soit dispensé de contrôler les pièces qui étaient soumises à son appréciation avant de rendre l'ordonnance d'autorisation.

D) Sur la prétendue absence de vérification concrète d'une soustraction volontaire à l'impôt.

Sur la question de la démonstration du caractère intentionnel des agissements de fraude la Chambre commerciale a jugé que l'article L 16B du LPF exigeait de simples présomptions et que que le Premier Président en recherchant à caractériser l'élément intentionnel avait ajouté à la loi une condition qu'elle ne comportait pas (Cass. 07/02/2010, n°10-923).

E) Sur l'absence de vérification concrète d'une soustraction volontaire à l'impôt.

Concernant la notion d'existence d'un établissement stable en France contestée par les parties, il sest rappelé que la discussion de l'existence d'un établissement stable en France ou de l'application d'une convention fiscale relève du contentieux de l'impôt (Cass. 29 juin 2010, n°09-15706; Cass. 30/05/2012 n°11-14601).

Les appelantes ne peuvent invoquer cette notion afin d'estimer qu'il ne peut leur être reproché de ne pas avoir établi les déclarations fiscales en France, étant rappelé que la société LCDA PETS UK est immatriculée en France depuis 2015 et effectue des déclarations relatives à la taxe sur la valeur ajoutée.

S'agissant de la société LCDA PETS UK, il est rappelé que la situation fiscale bénéficiaire ou non, et le montant des impôts dûs ne sauraient être déterminés qu'après le dépôt d'une déclaration et au regard des règles fiscales françaises.

Par ces motifs, il est demandé de :

- Confirmer l'ordonnance du JLD d'EVRY du 01 avril 2022,

- Rejeter toutes demandes, fins et conclusions,

- Condamner l'appelante au paiement de la somme de 2.000€ au titre de l'article 700 du Code de procédure civile.

SUR LES RECOURS :

Sur le recours à l'encontre du procès-verbal de visite du 6 avril 2022 dans les locaux et dépendances sis [Adresse 4] :

Par conclusions du 12 juillet 2022 soutenues à l'audience du 2 novembre 2022 les requérantes font valoir :

Des moyens de droits et de fait justifient l'annulation de la visite, de la saisie et du procès-verbal de saisie effectués le 6 avril 2022.

I) Sur la qualité d'Officier de police judiciaire.

Absence de l'information de la qualité d'OPJ.

Selon les requérantes, aucun élément dans le procès-verbal de visite et de saisie du 06/04/2022, ne mentionne que lesdits officiers de police judiciaire ont présenté leurs cartes professionnelles pour attester leurs noms et de leur qualité « d'officier de police judiciaire» alors que cela a bien été précisé dans le procès-verbal de visite et de saisie dans les locaux sis [Adresse 3].

Absence de moyen de vérifier le lien entre le chef de service et le prétendu OPJ.

En l'absence de présentation de la carte professionnelle des OPJ et de l'absence de leur numéro individuel apparent (RIO) lors de la visite domiciliaire, contrairement à ce que prévoit l'article R 434-15 du CSI, le contribuable visité ne peut pas même entreprendre la vérification de la désignation de l'OPJ a posteriori.

Il est demandé l'annulation de la visite domiciliaire, de la saisie et du procès-verbal de saisie.

II) L'illégalité de la saisie massive et indifférenciée.

Les modalités des opérations de visite prévues par l'art L 16 B du LPF ainsi que l'article 8 de la CEDH sont rappelés. Dans ce cadre la Cour de cassation considère que les saisies massives de documents caractérisent une ingérence disproportionnée justifiant leur annulation. Les éléments permettant de justifier l'annulation d'une telle saisie sont l'existence d'un élément matériel à savoir une saisie massive de documents et un élément moral c'est-à-dire la volonté de prendre sans distinguer et sans discernement.

L'analyse du caractère massif doit se faire in concreto au regard de l'entreprise et des pièces saisies.

En l'espèce, une saisie massive a été effectuée, en effet 78.812 documents et mail ont été saisis. De plus l'inventaire des éléments saisis est inexact et ne permet pas d'appréhender les pièces saisies.Les requérantes avancent le caractère massif de la saisie, au regard des deux clés USB restitués le 27/06/2022 représentant plus de 75 giga-octets.

La saisie est disproportionnée eu égard aux entreprises visitées qui sont de petites ou moyennes entreprises (la compagnie des animaux 2020, la compagnie des animaux logistiques 2020, Dogteur Assur 2020), elle est également disproportionnée eu égard à la situation des société étrangères ( LCDA UK PET LTD et LCDA PETS UK LTD) qui sont implantées à l'étranger pour des raisons économiqueset qui accusent un perte comptable en Angleterre.

Il en résulte que la saisie d'au moins 78 812 documents et emails dans les locaux que se partagent trois petites et moyennes entreprises apparaît excessive. Elle viole le droit de propriété et de vie privée de manière disproportionnée car sans rapport avec une présomption de fraude fiscale.

Ainsi, la proportion entre le but poursuivi par l'administration et les moyens mis en 'uvre n'est pas respectée. Cette saisie s'est réalisée, par ailleurs, sans discernement.

La collecte de pièces indifférenciées et sans discernement.

Les entreprises n'ont pas été dans la possibilité de s'assurer du champ d'application de la saisie : les modalités de récupération des données dématérialisées n'ont pas été communiquées préalablement et postérieurement au contribuable.

Le caractère indifférencié de la saisie se justifie, tout d'abord, par le fait qu'il n'existe aucune limite temporelle concernant les documents « aspirés ».

La saisie a été réalisée sans discernement dès lors que l'administration fiscale a saisi des documents sous format papier dont elle disposait déjà en tant que pièce annexée à sa requête.

En outre, la saisie a concerné la quasi-intégralité du personnel des sociétés « La compagnie des animaux » et « La compagnie des animaux logistique » présentes, soit 13 personnels. Par ailleurs, l'accès aux ordinateurs des cadres donnent un accès direct aux fichiers communs à l'ensemble d'un service. Ainsi les requérantes demandent que les opérations de visites et de saisies soient considérées comme irrégulières et annulées intégralement.

III) La violation répétée du secret professionnel

La saisie a concerné également des documents soumis au secret professionnel sans filtrage préalable sur les ordinateurs, ce qui démontre une fois de plus l'absence de discernement dans les documents saisis.Il est rappelé que L'officier de police judiciaire est chargé de s'assurer, dans le cadre de la visite domiciliaire et de la saisie, du respect du secret professionnel et des droits à la défense, ce qui n'a pas été le cas en l'espèce.

S'il ressort du procès-verbal de visite et de saisie du 06/04/2022, que, concernant les courriels reçus ou envoyés aux avocats, le secret professionnel a été respecté ; concernant les fichiers ' dont notamment les consultations d'avocat éventuellement numérisées ' , le procès-verbal ne fait pas état d'une exclusion de la saisie de ces fichiers en vertu du respect au secret professionnel.

Ainsi, ladite saisie s'est réalisée en violation de l'article L. 16 B du LPF et l'OPJ n'ayant pas assuré le respect des droits de la défense en veillant au secret professionnel.

Le non-respect de cette garantie des droits assurée, en théorie par l'OPJ, fait grief à la société, cela d'autant plus que des pièces couvertes par le secret professionnel ont été saisies.

Des emails ont été saisis alors qu'ils relèvent de la confidentialité entre un client et son avocat.

A titre d'exemple, 3 courriels sélectionnés dans le dossier « L.16B » créé par l'administration fiscale confirme que le respect du secret professionnel n'a pas été respecté (pièce 14).

Ces pièces relevant de la confidentialité attachée aux échanges entre un avocat et son client, sont couvertes par le secret professionnel des avocats. Ainsi la saisie de ces pièces doit être annulée.

Par ces motifs, il est demandé de :

A titre principal

- Declarer les sociétés de droit anglais LCDA PETS UK Limited et LCDA UK Limited recevables et bien fondés :

- Declarer irrégulières les opérations de visite et de saisie effectuées le 06/04/2022 dans les locaux situés [Adresse 4] :

- D'annuler en conséquence l'opération de visite domiciliaire et de saisies ainsi que les procès- verbaux de saisies

A titre subsidiaire

- Déclarer les sociétés de droit anglais LCDA PETS UK Limited et LCDA UK Limited recevables et bien fondés :

- Déclarer les emails saisis présentés dans la Pièce 14 comme entrant dans le champ d'application des dispositions afférentes au secret professionnel ;

- D'annuler en conséquence lesdites pièces ;

En tout etat de cause

Condamner l'Administration fiscale à régler à chacun des appelants la somme de 1.500 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.

Par conclusions déposées à la Cour d'appel le 28 septembre 2022 et soutenues à l'audience du 2 novembre 2022 l'administration fiscale fait valoir :

La visite domiciliaire a été effectuée le 6 avril 2022, un procès-verbal a été établi.

1 Sur la qualité d'Officier de police judiciaire (« OPJ »)

Sans contester leur désignation par l'Ordonnance, ni leur habilitation, les requérantes font valoir l'absence de présentation de la carte professionnelle des OPJ et de l'absence de leur numéro individuel d'identification apparent (RIO) lors de la visite domiciliaire.

En droit, l'article L.16B du LPF impose que le procès-verbal fasse mention du nom et de la qualité de l'OPJ en charge de surperviser les opérations de visite et saisie.

Il ressort expréssement du procès-verbal que l'OPJ a présenté sa commission d'emploi à l'occupant des lieux. Son nom, sa qualité d'OPJ ainsi que le lieu de sa résidence sont clairement énoncés, permettant ainsi son identification.

Selon la jurisprudence, les constatations des agents des impôts habilités relatées dans un PV signé par eux et par un OPJ qui en a authentifié les mentions, valent jusqu'à la preuve contraire.

2 L'absence de caractère massive et indifférenciée de la saisie

.

En droit, conformément à la jurisprudence, c'est à la charge des requérantes de produire les pièces qu'elles estiment insaisissables afin d'établir si elles sont hors champ, ou si il existe une éventuelle atteinte au secret professionnel, ou à leur caractère personnel (Cass. Com. 5 mai 1998, n°96-30,115, confirmée par CEDH, 02 avril 2015, Vinci Construction et GTM Génie Civil et Services c/ France n°63629/10).

Selon la jurisprudence de la CEDH, le caractère massif des saisies n'est pas établi par le volume des saisies, la Cour de cassation en 2016 a validé une perquisition et a estimé que, concernant la saisie de fichiers informatiques, les agents de l'administration "n'ont pas l'obligation de justifier de ce que chacun d'eux est en relation avec la fraude présumée , ni même de s'expliquer sur leur quantité".

L'administration rappelle que l'ordonnance du JLD autorise la saisie de tous documents se rapportant aux agissements présumés de fraude, et qu'il a été jugé que la saisie d'une boite de messagerie n'était pas contraire aus ens et à la portée des textes applicables, que la Cour de cassation a jugé qu'un fichier informatique indivisible peut-être saisi dans son entier s'il est susceptible de contenir des éléments intéressant l'enquête.

Tant la chambre criminelle que la chambre commerciale de la Cour de cassation ont toujours jugé que les pièces contestées devaient être versées aux débats , en en expliquant les raisons pour chacune.

En l'espèce, les requérantes ne produisent aucune pièce saisie ni justification permettant d'affirmer le caractère massif et indifférencié des saisies pratiquées.

3 Sur la validité de l'inventaire

Les requérantes soutiennent que l'inventaire serait irrégulier, il est rappelé que l'article L.16B du LPF ne soumet l'inventaire à aucune forme particulière. En l'espèce, l'identification des mails saisis ne présentent aucune difficulté, puisqu'il ressort du procès-verbal que tous les répertoires et dossiers de messagerie crées ou copiés à l'occasion des opérations ont été conservés par les occupants à leur demande. Il ressort des propres écritures des requérantes que les courriels visés ont été parfaitement identifiés.

4 Sur la saisie de courriels couverts par le secret professionnel des avocats

Il n'est nullement discuté que les documents couverts par le secret professionnel ne sont pas saisissables. En l'espèce si les agents de l'administration ont procédé à un tri de manière à exclure les pièces protégées par le secret professionnel des avocats, ce tri ne peut prétendre à l'exhaustivité eu égard aux contraintes techniques et de temps.

Les requérantes ont versé trois courriels qu'elles estiment être contraires à la protection du secret professionnel (pièce 14).

L''administration acquiesce à l'annulation de la saisie de l'email annonçant le décès de Me [K] (pièce n°1) et s'oppose à l'annulation des deux premiers emails relatifs à la société LA COMPAGNIE DES ANIMAUX BV, société appartenant au groupe LA COMPAGNIE DES ANIMAUX et constituant un établissement secondaire en Hollande de la SARL LA COMPAGNIE DES ANIMAUX.

Par ces motifs, il est demandé de :

- Donner acte l'administration de ce qu'elle accepte l'annulation de la saisie de l'email figurant en pièce 1.

- Rejeter toutes autres demandes, fins et conclusions

- Condamner les appelantes au paiement de la somme de 2.000 € au titre de l'article 700 du Code de procédure civile.

Sur le recours à l'encontre du procès-verbal de visite du 6 avril 2022 dans les locaux et dépendances sis [Adresse 3]

les parties requérantes n'ont communiqué aucune écriture à l'appui de leur recours, à l'audience du 2 novembre 2022, le conseil des parties confirme que le recours n'est pas soutenu .

SUR CE,

SUR LA JONCTION

Dans l'intérêt d'une bonne administration de la justice, il convient en application de l'article 367 du Code de procédure civile et eu égard aux liens de connexité entre les affaires, de joindre les instances enregistrées sous les numéros de RG 22/06981 (appel) et 22/ 06967 et 22/ 06973 (recours), qui seront regroupées sous le numéro le plus ancien.

SUR L'APPEL

Sur l'absence de réunion des conditions d'application de la visite domiciliaire du fait de l'absence de caractérisation de présomption d'actes frauduleux.

Les parties appelantes font valoir une lecture restrictive de l'article L 16B du LPF et estiment que son fondement textuel précis ne s'applique pas aux cas des sociétés visées dans l'ordonnance. Or, il convient de rappeler la jurisprudence de la Cour de cassation selon laquelle peuvent être relevées des présomptions relevant des articles 1741 ou 1743 du CGI et que l'exercice d'une activité professionnelle occulte sur le territoire national sans souscrire les déclarations fiscales autorise la mise en oeuvre de la procédure de l'article L.16B du LPF.

En ce qui concerne l'argument selon lequel les sociétés visées tiennent leur comptabilité régulière aux Royaume Uni, celui-ci doit être rejeté dans la mesure où la discussion de l'application d'une convention fiscale relève de la compétence du juge de l'impôt et non de celle du juge autorisant la visite domiciliaire. En l'espèce le JLD a relevé les éléments permettant de présumer que les sociétés britanniques ne respectaient pas leurs obligations comptables en France dès lors qu'il a relevé l'absence de déclaration fiscales en France, la présomption visant le respect des obligations fiscales et comptables en France.

Si les sociétés visées par l'ordonnance tiennent leur comptabilité au Royaume Uni, cela ne fait pas obstacle à l'administration française de rechercher d'éventuelles conditions d'exercice de leur activité sur le territoire national et d'utiliser l'article L16B du LPF. Il résulte d'ailleurs d'une décision de la CJUE que le fait qu'une société tienne une comptabilité dans le pays de son siège est sans incidence sur la possibilité pour l'administration de chaque état membre d'établir ses obligations fiscales et comptables propres et d'en vérifier le respect dès lors que la société exerce une activité dans cet État.

En l'espèce, l'administration fiscale ne reproche pas aux sociétés LCDA UK LTD et LCDA PETS UK LTD d'être pour chacune une société de droit britannique et de tenir leur comptabilité au Royaume-Uni, ce qui est en cause c' est la présomption d'une activité exercée à partir du territoire national, où il pouvait être présumé concernant ces sociétés qu'elles ne respectaient pas leurs obligations comptables en FRANCE, dès lors qu'il est relevé l'absence de toute déclaration fiscale relative à leur activité. La mise en ouvre de l'article L 16B du LPF ne constitue en aucune manière la violation des principes de liberté d'établissement et de non discrimination des sociétés au sein de l'Union européenne.

Ce moyen sera rejeté.

Sur l'absence de réunion des conditions d'application de la visite domiciliaire du fait de l'absence d'autres éléments factuels ne permettant pas de présumer la fraude alléguée.

Le JLD a relevé à juste titre dans son ordonnance plusieurs éléments s'agissant des moyens insuffisants au Royaume UNI et s'agissant du centre décisionnel et capitalistique situé sur le territoire national : tant la société LCDA UK LIMITED que la société LCDA PETS UK LIMITED disposent au Royaume Uni d'une adresse de domiciliation, auprès de la société Throgmorton Secretaries LLP qui propose à ses clients de nombreux services dont la domiciliation (pièces 1 à 5), elles ne diposent pas à ces adresses de moyens de communication nécessaires à leur activité, en ce qui concerne l'activité commerciale de LCDA PETS UK LIMITED elle exerce une activité de vente à distance de produits vétérinaires destinée à une clientèle française, le site internet "dogteur.com" appartenant à cette société est administré par [V] [J], ce site est similaire au site de la société française la SARL compagnie des animaux, ces deux sites sont présumés être hébergés et administrés depuis le territoire national (pièces 35 à 45), les liens capitalistiques entre les deux sociétés britanniques LCDA UK LIMITED et LCDA PETS UK LIMITED et les fonctions de [V] [J] au sein des sociétés (seul directeur effectif dans la prise de décision stratégique) permettent de présumer que [V] [J] est à la tête du groupe formé par la société de droit britannique LCDA UK LIMITED et ses filiales (la société LCDA PETS UK LIMITED et la SARL La compagnie des animaux) (pièces 11, 12,25,75,78), la société de droit britannique dispose en France du siège de sa détention capitalistique et de son centre décisionnel en la personne de [V] [J] . Si la société LCDA PETS UK LIMITED déclare 4 employés au Royaume Uni, elle dispose de moyens bancaires en France, il résulte des pièces de l'administration fiscale que la société LCDA PETS UK LIMITED utilise comme moyen de contact les coordonnées téléphoniques de la SARL la compagnie des animaux, qui est présumée traiter les commandes de la société LCDA PETS UK LIMITED par le biais des sites internets (pièces 20,50, 82).

Il résulte de l'examen des pièces produites à l'audience par les parties appelantes que :

les deux pièces n° 5, les pièces 8 et 12, 13 et 14 à 19, 21 et 22 sont des pièces produites par l'administration fiscale ( pièces 5,8, 12 et 19 ) à l'appui de la requête concernant la situation des sociétés britanniques pour lesquelles les parties appelantes n'expliquent pas en quoi ces pièces contredisent les arguments à l'appui des présomptions de fraude retenus par le JLD.

la pièce 6 concernant des plans de travaux ne comporte aucune mention de la société LCDA PETS UK LTD, la pièce 7 concernant une facture de travaux est rédigée en langue anglaise et difficilement exploitable.

Les pièces 9 et 10 intitulées comme" lignes téléphoniques de la société LCDA PETS UK LIMITED" sont rédigées en anglais et difficilement exploitables.

La pièce 11 est le justificatif du compte bancaire de la société LCDA PETS UK LIMITED auprès de la banque HSBC,qui laisse apparaître de faibles montants concernant l'activité commerciale d'une société.

Les pièces 23 à 24 sont des pièces comptables concernant la société LCDA PETS UK LIMITED rédigées en anglais, la pièce 25 est un tableau comparatif qui n' apporte aucun élément exploitable.

Ainsi, les pièces produites par les parties appelantes ne viennent pas contredire les éléments retenus par le JLD afin de caractériser la présomption de fraude conformément à l'article L 16B du LPF.

Il en résulte que le moyen soulevé par les parties appelantes selon lequel aucun autre élément factuel ne permet pas de présumer la fraude alléguée, n'est pas fondé. En effet le premier juge a, à partir des éléments factuels qui étaient soumis à son appréciation, retenu qu'il pouvait être présumé que les sociétés de droit britannique sont présumées exercer sur le territoire national une activité professionnelle dans le domaine de vente à distance de produits vétérinaires, sans souscrire les déclarations fiscales correspondantes relatives à l'Impôt sur les Sociétés et ainsi omettre de passer en France les écritures comptables y afférentes, l'ordonnance du JLD délivrée sur le fondement de l'article L 16B du LPF est parfaitement justifiée.

Ce moyen sera rejeté.

Sur l'absence de présomption de soustraction à l'établissement ou au paiement de l'impôt

Les appelantes arguent qu'une visite domiciliaire ne pourrait être autorisée que si sont réunis des éléments selon lesquels les sociétés se seraient soustraites à l'établissement et au paiement de l'impôt sur les bénéfices et des taxes sur le chiffre d'affaires, qu'il convient d'établir exclusivement "une quelconque manifestation matérielle et intentionnelle de se soustraire à l'établissement de l'impôt sur les sociétés" et qu'en l'espèce les sociétés n'ont pas cherche à éluder l'impôt.

Or il convient de rappeler que l'article L. 16 B du LPF n'exige du juge des libertés et de la détention que la vérification concrète que la demande d'autorisation est fondée et si la présomption de fraude est établie, qu'au stade des présomptions, aucun élément intentionnel ne peut-être exigé, de plus concernant la démonstration de ce caractère intentionnel des agissements frauduleux, la Cour de cassation a jugé que l'article L. 16B du LPF exigeait de simples présomptions et que le Premier président, en recherchant à caractériser l'élément intentionnel avait ajouté à la loi une condition qu'elle ne comportait pas.

Ce moyen sera rejeté.

Sur l'absence de vérification concrète par le JLD des éléments matériels et d'une soustraction volontaire à l'impôt.

Selon une jurisprudence constante, les motifs et le dispositif de l'ordonnance sont réputés avoir été établis par le juge qui l'a rendue et signée et cette présomption ne porte pas atteinte aux principes d'impartialité et d'indépendance du juge qui statue sur requête, dans le cadre d'une procédure non contradictoire. D'ailleurs, au titre de l'effet dévolutif de l'appel, il appartient au Premier Président, saisi d'un recours contre une décision autorisant des visites domiciliaires, de statuer à nouveau en fait et en droit sur le bien-fondé de la requête de l'administration.

En l'espèce, les appelantes estiment que le JLD n'a pas effectué une vérification concrète de la requête et des pièces par l'administration, or en l'espèce rien n'autorise les appelantes à suspecter que le JLD se soit dispensé de contrôler les pièces qui étaient soumises à son appréciation, avant de rendre l'ordonnance autorisant la mise en 'uvre de la procédure de visite domiciliaire, le delai de 4 jours étant suffisant au JLD pour l'étude complète du présent dossier.

En ce qui concerne la critique portant sur la motivation de l'ordonnance, il résulte des éléments du dossier que le JLD a parfaitement motivé sa décision au vue de la requête de l'administration fiscale et des pièces produites, le JLD a relevé dans sa décision les éléments (développés supra) qui apparaissaient comme des indices pouvant établir l'existence de présomptions de fraude à l'encontre des sociétés britanniques, il n'a aucunement excédé l'office qui est le sien dans le cadre de l'article L 16B du LPF.

Sur l 'absence de vérification d'une soustraction volontaire à l'impôt, il convient de rappeler que l'article L 16B du LPF prévoit que l'autorité judiciaire saisie par l'administration fiscale, peut autoriser l'administration fiscale à effectuer des visites et saisies en tous lieux, lorsqu'il existe des présomptions qu'un contribuable se soustrait à l'établissement ou au paiement de l'impôt [...], et que le juge doit vérifier de manière concrète que la demande d'autorisation qui lui est soumise est bien fondée, sans avoir à démontrer le caractère intentionnel.

Ce moyen sera rejeté.

Ainsi l'ordonnance rendue le 1er avril 2022 par le JLD du Tribunal judiciaire d'Evry-Courcouronnes sera déclarée régulière et confirmée, étant observé que dans ses motifs les parties appelantes demandent à la Cour d'infirmer l'ordonnance modificative du 15/04/2021 prises par le Juge des libertés et de la détention du Tribunal judiciaire de Paris, dont la Cour n'a pas été saisie.

SUR LE RECOURS à l'encontre du procès-verbal de visite du 6 avril 2022 dans les locaux et dépendances sis [Adresse 4] :

Sur l'absence d'information de la qualité d'OPJ et l'absence de leur identification lors des opérations de visite

Il convient de relever que lors des opérations de visite domiciliaire du 6 avril 2022, les inspecteurs des finances publiques étaient assistés de deux OPJ, en la personne de [M] [H] et de [P] [S], gendarmes à la gendarmerie d'Evry, conformément à l'article L 16B du LPF, que le procès-verbal de visite précise que les inspecteurs des finances publiques et les OPJ ont présenté leur commission d'emploi dès leur arrivée dans les locaux à 7H20 à deux salariés présents, qu'ils ont contacté [V] [J] téléphoniquement , que celui-ci a désigné [T] [Y] et [C] [L], présents sur les lieux à partir de 8H15, comme représentants de l'occupant des lieux, que le procès-verbal précise que la désignation a été confirmée téléphoniquemet aux gendarmes OPJ à 8H45 par [V] [J] , en présence des représentants de l'occupant des lieux qui ont alors accepté leur mission, que l'ordonnance rendue par le JLD du Tribunal d'Evry-Courcouronnes prévoit "désignons [R] [G], [D], Commandant du Groupement de gendarmerie départementale de l'Essonne à [Localité 7] qui nommera les OPJ placés sous son autorité pour assister à ces opérations pour les locaux situés dans le ressort de leur compétence territoriale [...]", que cette ordonnance a été notifiée aux représentants de l'occupant des lieux Monsieur [Y] et Madame [L] qui ont donc pris connaisssance de cette désignation, qu'il convient de relever que les opérations de saisies (visite des loacux , vérification des ordinateurs, ouverture d'un coffre fort, communication des mots de passe, communication des noms des avocats précédent les opérations de saisie, saisie des données ..) ont été effectuées par les inspecteurs en présence constante des représentants de l' occupant des lieux et des gendarmes OPJ, que le procès-verbal a été signé par Monsieur [Y] et Madame [L] ainsi que par les OPJ, que chaque page a été paraphée, qu'il en résulte que s'agissant d'opérations qui se sont déroulées de 8H45 à 19H45 en présence de tous les protagonistes, les deux gendarmes ainsi que leur qualification d'OPJ ont été identifiés de fait par les représentants de l'occupant des lieux, que de plus ceux-ci ont signé le procès-verbal sans formuler aucune réserve à ce sujet.

Il convient de préciser que l'article R 434-15 du CSI évoqué par les parties requérantes se prononce sur "l'identification individuelle" du policier ou gendarme, sans prévoir l'obligation pour celui-ci de faire apparaître son numéro de matricule.

Ce moyen sera rejeté.

Sur l'illégalité de la saisie massive, indifférenciée et disproportionnée.

Les parties requérantes arguent que la saisie concernant des documents numériques et papier a été effectuée de façon massive et indifférenciée, que les entreprises n'ont pas pu s'assurer du champ d'application de la saisie qui a été disproportionnée, que cela a porté atteinte au principe de proportionnalité découlant de l'article 8 de la CESDH.

Il convient de relever qu'il résulte du procès-verbal du 6 avril 2022 que les agents ont précisé dans le PV : "avons découvert et saisis les documents relatifs à la fraude présumée", qu'un tableau récapitulatif des documents papier saisis et compostés fait état de 479 documents saisis, que les intitulés des documents tels que reportés dans le tableau ne permettent pas d'établir que ces documents ne sont pas en lien avec la fraude présumée, que les parties requérantes se limitent à contester leur saisie sans soumettre les pièces dont le bien fondé de la saisie est contesté à l'appréciation du premier président de la Cour d'appel, qu'il en résulte que la saisie des documents tels que répertoriés dans le procés-verbal (page 4 et 5), ne peut -être qualifiée de massive, indifférenciée et disproportionnée.

Il convient de relever qu'il résulte du procès-verbal du 6 avril 2022 que les agents des finances publiques, sous le contrôle des OPJ et en présence des représentants de l'occupant des lieux, ont précisé : "il a été procédé à l'examen des données accessibles à partir des ordinateurs et supports suivants : [13 ordinateurs présents dans le bureaux]". A partir de l'examen des adresses de messagerie dont la liste est donnée, les agents ont constaté " la présence de documents entrant dans le champ des autorisations de visite et de saisie donnée par le JLD ", les agents précisent avoir "procédé à la création d'un fichier PST contenant les archives de messageries et/ou une sélection de messages en lien avec la fraude présumée sous la forme d'un fichier PST sur le bureau des machines visitées". Il en résulte que ces mentions, non contestées, attestent que les agents ont effectué un repérage et un tri avant de procéder à la saisie des documents, que les agents de l'administration fiscale utilisent les fonctionalités d'un logiciel numérique qui permet de sélectionner les documents en fonction de mots clés, que selon la jurisprudence de la CEDH, le caractère massif des saisies n'est pas établi par le volume des saisies, que l'argument selon lequel la saisie aurait été massive et indifférenciée n'est pas recevable en l'espèce.

En ce qui concerne l'argument selon lequel l'inventaire est "inexact et ne permet pas d'appréhender les pièces effectivement saisies", il convient de rappeler que l'occupant des lieux est en possession des documents saisis, que selon le procès-verbal du 6 avril 2022 il est indiqué que l'authentification numérique de chaque fichier informatique a été identifiée, que les inventaires des fichiers copiés ainsi que l'authentification numérique de chaque fichier ont été gravés sur 4 CD de marque Verbatim, qu'un exemplaire du CD concernant chaque société a été remis au représentant de l'occupant des lieux, que le PV a été signé par celui-ci sans réserve, qu'il en résulte que les dispositions de l'article L 16B du LPF concernant l'inventaire ont été respectées, que la Cour de cassation a jugé qu'il suffit que les fichiers ainsi copiés soient identifiables par leur nom d'origine, leur chemin complet et leur empreinte numérique, qu'il en résulte que la procédure d'établissement et de remise de l'inventaire à l'occupant des lieux a été effectuée conformément à l'article L16B du LPF.

En ce qui concerne les documents pour lesquels les sociétés n'ont pu s'assurer du champ d'application de la saisie et pour lesquels il n'existe aucune limitation temporelle concernant les documents "aspirés" selon les requérantes, il convient de rappeler que la Cour de cassation a jugé de façon constante que les pièces contestées devaient être versées aux débats, en en expliquant les raisons pour chacune, qu'il appartient aux requérantes de verser aux débats, afin qu'il puisse en être jugé, les documents dont elles estiment qu'ils n'étaient pas saisissables, au regard du champ de l'autorisation, qu'en l'espèce les requérantes n' ont soumis aucune pièce pour appréciation par le premier président du bien fondé de leur saisie.

En ce qui concerne le grief selon lequel le principe de proportionnalité n'a pas été respecté, il convient de rappeler qu'en exerçant son contrôle in concreto sur le dossier présenté par l'administration fiscale, le JLD exerce de fait un contrôle de proportionnalité. En conséquence, la signature de l'ordonnance par le JLD signifie que ce dernier entend privilégier l'enquête dite «'lourde'» de l'article L.16B du LPF et que les diligences auprès du contribuable seraient insuffisantes et dénuées de «'l'effet de surprise'».

L'article 8 de la CESDH, tout en énonçant le droit au respect de sa vie privée et familiale, est tempéré par son paragraphe 2 qui dispose que "il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui".

En l'espèce, il n'y a pas eu de violation des dispositions de l'article 8 de la CESDH et la mesure n'a aucunement été disproportionnée eu égard au but poursuivi.

Ainsi, la saisie des fichiers informatiques n'étant ni massive, ni indifférenciée, ni disproportionnée , il n' y a aucune atteinte aux droits de la défense et au droit au respect du domicile et de la vie privée garantis pat la CEDH.

Ce moyen sera rejeté.

Sur la violation du secret professionnel d'avocat

Il convient de rappeler qu'il n'est nullement contesté que les documents couverts par le secret professionnel de l'avocat ne sont pas saisissables, que cependant le secret professionnel de l'avocat n'est pas général et que seules sont couvertes les correspondances échangées entre le client et son avocat ou entre l'avocat et ses confrères. Ainsi, le seul fait qu'un courrier émane d'un avocat n'a pas pour effet d'en interdire la saisie.

Les parties requérantes arguent qu'aucune exclusion liée au nom des avocats n'a été effectuée concernant la saisie des fichiers et que le non respect de cette garantie fait grief aux sociétés saisies, or il convient de rappeler que la Cour de cassation a toujours jugé que les pièces contestées devaient être versées aux débats, en en expliquant les raisons pour chacune et qu'en l'espèce les requérantes contestent la saisie sans soumettre au débat contradictoire ni à la Cour, aux fins d'examen in concreto, les documents dont elle veut voir annuler la saisie.

Les parties requérantes arguent qu'aucun filtrage préalable n'a été effectué alors qu'il résulte du procès-verbal du 6 avril 2022 que les inspecteurs ont précisé avoir "procédé à l'exclusion des courriels se rapportant à des données couvertes par le secret professionnel d'avocat, avant la saisie des fichiers informatiques", que la liste des noms d'avocat et cabinets concernés a été communiquée par les représentants des société et est précisée sur le procès-verbal. Il en résulte que les inspecteurs des finances et les OPJ ont bien veillé au respect du secret professionnel d'avocat.

Ce moyen sera rejeté.

Sur la demande d'annulation de saisie de 3 courriels saisis (pièce 14).

Les parties requérantes soumettent 3 courriels saisis par l'administration fiscale qui selon elles sont protégés par le secret professionnel d'avocat et dont la saisie doit être annulée (pièce 14) :

- un email interne adressé par madame [I] à [V] [J] concernant le décès de maitre [K] (dont l'administration fiscale acquiesce à l'annulation en pièce 1),

- un courriel de [V] [J] adressé à [O] [F] - [N] en date du 1er avril 2022 ayant pour objet "statuts la compagnie des animaux" .

- un courriel de [X] [I] adressé à [V] [J] concernant "la compagnie des animaux BV".

Concernant le premier email, l'administration fiscale acquiesce à l'annulation de sa saisie, concernant le second mail, il concerne la transmission d'un projet de statuts concernant "la compagnie des animaux BV " à un avocat avec une demande de conseil, ce document doit être considéré comme couvert par le secret professionnel d'avocat étant une correspondance échangée entre le client et son avocat dans le cadre du conseil, concernant le 3ème mail celui-ci étant en partie illisible, l'appréciation de son contenu est inopérante.

Il convient de constater que l'administration fiscale acquiesce à l'annulation du premier mail de la pièce 14, il convient d'annuler la saisie du deuxième mail de la pièce 14 (courriel du 1er avril 2022) et de rejeter la demande d'annulation de la saisie du troisième mail de la pièce 14.

SUR LE RECOURS à l'encontre du procès-verbal de visite du 6 avril 2022 dans les locaux et dépendances sis [Adresse 3].

Il convient de constater que ce recours n'a pas été soutenu à l'audience.

Enfin les circonstances de l'instance commandent de faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile au bénéfice de l'administration fiscale.

PAR CES MOTIFS

Statuant contradictoirement et en dernier ressort:

- Disons que l'appel et le recours des sociétés de droit anglais LCDA PETS UK Limited et LCDA UK Limited sont recevables ;

- Ordonnons la jonction des instances enregistrées sous les numéros de RG 22/06981 (appel) et de RG 22/06967 et 22/06973 (recours), qui seront regroupées sous le numéro le plus ancien (RG 22/06967) ;

- Déclarons régulière et confirmons en toutes ses dispositions l'ordonnance rendue par le juge des libertés et de la détention du Tribunal judiciaire de EVRY-COURCOURONNES en date du 1er avril 2022 ;

- Constatons que le recours à l'encontre des opérations de visite domiciliaires en date du 6 avril 2022 dans les locaux et dépendances sis [Adresse 3] n'a pas été soutenu ;

- Déclarons régulières les opérations de visite et saisies effectuées en date du 6 avril 2022 dans les locaux et dépendances sis : [Adresse 3] et [Adresse 4] ;

- Donnons acte à l'administration fiscale de son acquiescement concernant l'annulation de la saisie du 1er mail de la pièce 14, reprise en pièce n° 1 de l'administration fiscale, sans possibilité pour l'administration fiscale d'en garder copie ;

- Ordonnons l'annulation de la saisie du deuxième mail de la pièce 14 (courriel du 1er avril 2022 de [J] [V] ) sans possibilité pour l'administration fiscale d'en garder copie;

- Rejetons toute autre demande ;

- Disons qu'il convient d'accorder la somme de 500 euros (cinq cent euros) à charge pour les parties appelantes à verser à la DNEF au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- Disons que la charge des dépens sera supportée par les parties appelantes.

LE GREFFIER LE DÉLÉGUÉ DU PREMIER PRESIDENT

Véronique COUVET Elisabeth IENNE-BERTHELOT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 5 - chambre 15
Numéro d'arrêt : 22/06967
Date de la décision : 14/12/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-12-14;22.06967 ?
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