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14/12/2022 | FRANCE | N°20/03827

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 6 - chambre 4, 14 décembre 2022, 20/03827


Copies exécutoires REPUBLIQUE FRANCAISE

délivrées le : AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS



COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 4



ARRET DU 14 DECEMBRE 2022



(n° , 5 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 20/03827 - N° Portalis 35L7-V-B7E-CB6JH



Décision déférée à la Cour : Jugement du 08 Juin 2020 -Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de VILLENEUVE SAINT GEORGES - RG n° 19/00035



APPELANT



Monsieur [R] [L]

[Adresse 2]

[Localité 3

]

Représenté par Me Xavier HUGON, avocat au barreau de PARIS, toque : U0001



INTIMEE



S.A. AEROPORTS DE [Localité 6]

[Adresse 1]

[Localité 4]

Représentée par Me Ale...

Copies exécutoires REPUBLIQUE FRANCAISE

délivrées le : AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 4

ARRET DU 14 DECEMBRE 2022

(n° , 5 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 20/03827 - N° Portalis 35L7-V-B7E-CB6JH

Décision déférée à la Cour : Jugement du 08 Juin 2020 -Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de VILLENEUVE SAINT GEORGES - RG n° 19/00035

APPELANT

Monsieur [R] [L]

[Adresse 2]

[Localité 3]

Représenté par Me Xavier HUGON, avocat au barreau de PARIS, toque : U0001

INTIMEE

S.A. AEROPORTS DE [Localité 6]

[Adresse 1]

[Localité 4]

Représentée par Me Alexandra LORBER LANCE, avocat au barreau de PARIS, toque : K0020

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 05 Septembre 2022, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Monsieur Jean-François DE CHANVILLE, président, chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, entendu en son rapport, composée de :

Monsieur Jean-François DE CHANVILLE, président

Madame Anne-Ga'l BLANC, conseillère

Madame Florence MARQUES, conseillère

Greffier, lors des débats : Mme Victoria RENARD

ARRET :

- contradictoire

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Jean-François DE CHANVILLE, Président de chambre et par Victoria RENARD, Greffière, présente lors de la mise à disposition.

EXPOSÉ DU LITIGE :

M. [R] [L], né le 4 avril 1966, a été engagé par la SA Aéroport de [Localité 6], selon contrat de travail à durée indéterminée à compter du 16 mai 1994, en qualité de praticien traitant au centre de diagnostic et de soins de l'aéroport d'[Localité 5].

L'article III du contrat de travail liant les parties disposait que les vacations de M. [R] [L] seraient d'une durée minimale de 3 heures et auraient lieu :

- le lundi matin de 9 heures à 12 heures ;

- le mercredi après-midi de 14 heures à 17 heures.

L'article IV ajoutait que le traitement serait liquidé mensuellement en fonction du nombre d'actes médicaux (consultation et autres actes donnant lieu à remboursement) et sur la base de 55 % de la valeur des lettres clés relatives à son activité et telles que le définit la nomenclature générale des actes professionnels. Il était précisé que les vacations non travaillées, de même que celles coïncidant avec un jour férié, exception faite du 1er mai, ne seraient pas rémunérées.

Selon avenant du 8 décembre 1994, il était stipulé :

Les vacations que M. [R] [L] devra assurer seront d'une durée minimale de 3 heures et auront lieu :

- le lundi matin de 9 heures 12 heures ;

- le mercredi après-midi de 14 heures à 17 heures ;

- le vendredi de 11 heures 30 à 15 heures 30.

En dernier lieu, M. [L] occupait les fonctions d'orthoptiste réducteur.

A la suite de la fermeture du centre de diagnostic et de soins, le salarié a adhéré le 25 septembre 2017 au congé de reclassement de 12 mois proposé, conformément aux dispositions prévues par l'accord du plan de sauvegarde de l'emploi du 16 juin 2017.

Estimant avoir subi une inégalité de traitement et un harcèlement moral, il a saisi le conseil des prud'hommes de Villeneuve-Saint-Georges aux fins d'obtenir le paiement de diverses indemnités et rappels de salaires.

Par jugement du 8 juin 2020, auquel la cour se réfère pour l'exposé de la procédure antérieure et des prétentions initiales des parties, la SA Aéroport de [Localité 6] a été condamnée à verser à M. [R] [L] les sommes suivantes :

- 986,75 euros de rappel de salaires,

- et 100 euros en application de l'article 700 du Code de procédure civile ;

- en mettant les dépens, y compris les frais éventuels d'exécution de la présente décision, à la charge de la défenderesse.

La décision déboutait les parties de leurs autres demandes et rappelait que les créances à caractère indemnitaire portaient intérêts au taux légal à compter du jour du prononcé du jugement et les créances de nature salariale à compter de la réception par la partie défenderesse de la convocation devant le bureau de conciliation.

Par déclaration du 30 juin 2020, M. [L] a interjeté appel de cette décision.

Dans ses dernières conclusions remises au greffe par le réseau privé virtuel des avocats le 2 juin 2022, M. [L] demande à la cour de confirmer le jugement en ce qu'il a condamné l'intimée à lui payer la somme de 986,75 euros de rappel de salaire et 100 euros en application de l'article 700 du Code de procédure civile et d'infirmer la décision en ce qu'elle a rejeté ses prétentions au titre de la réparation du préjudice causé par l'inégalité de traitement subie du 1er janvier 2016 au 31 décembre 2017. Il demande à la cour, statuant à nouveau, de condamner l'employeur à lui payer la somme de 14 495 euros de rappels sur salaires et compléments de salaires pour la période du 1er janvier 2016 au 31 décembre 2017, se répartissant comme suit :

- Rappels de traitement de base, pour un montant de 4.904 euros pour la période du 1er janvier 2016 au 31 décembre 2017 ;

- Rappels de compléments de primes équivalentes aux primes d'assiduité, prime d'ancienneté, treizième mois, et indemnité complémentaire, pour un montant de 9.591 euros ;

- avec intérêts au taux légal depuis le 1er janvier 2018 ;

- 5 000 euros de dommages-intérêts pour inégalité de traitement, en réparation du préjudice moral subséquent ;

- 5.000 en application de l'article 700 du code de procédure civile ;

- avec mise des dépens, y compris le remboursement des frais de timbre fiscal, pour un montant de 225,00 euros.

Dans ses dernières conclusions remises au greffe par le réseau privé virtuel des avocats le 31 mai 2022, la SA Aéroport de [Localité 6] demande à la cour d'infirmer le jugement en ce qu'il l'a condamnée à verser à l'appelant un rappel de salaire sur congé de reclassement et de le confirmer sur le rejet des demandes fondées sur l'inégalité de traitement et l'application du statut du personnel. Elle entend voir débouter son adversaire de toutes ses demandes et se voir allouer la somme de 5.000 euros en application de l'article 700 du Code de procédure civile.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 7 juin 2022 et l'affaire a été fixée à l'audience du 5 septembre 2022.

Pour un plus ample exposé des faits, des prétentions et des moyens des parties, la cour se réfère à leurs conclusions écrites conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile.

MOTIFS :

1 : Sur les rappels de salaire au titre du congé de reclassement

M. [R] [L] sollicite un rappel de salaire de 986,75 heures par mois, correspondant à un manque à gagner de rémunération au titre de la période écoulée du 1er février 2018 au 21septembre 2018, qui est celle du congé de reclassement, faute par l'employeur d'avoir respecté le taux de 85% du salaire minimum de croissance, comme le prévoit l'article R 1232-2 du Code du travail, sur la base d'un temps partiel de 11 heures par semaine.

La SA Aéroport de [Localité 6] objecte que le salarié a été rempli de ses droits, dès lors qu'il était soumis à une organisation de travail spécifique, à savoir des vacations de 3 heures par semaine au niminum et qu'en tout état de cause, en application dudit texte il n'avait droit qu'à 65% du salaire mensuel moyen des trois derniers mois précédant son licenciement conformément à l'article 6.1 de l'accord relatif au plan de sauvegarde de l'emploi.

Sur ce

L'employeur est tenu de fournir du travail au salarié pendant les heures où celui-ci se tient à sa disposition, soit en l'espèce pendant 11 heures par semaine. Le contrat de travail litigieux tel que modifié par l'avenant du 8 décembre 1994 s'interprète donc comme étant un contrat à temps partiel à hauteur de 11 heures par semaine.

Aux termes de l'article R 1233-32 du Code du travail pendant la période de congés de reclassement excédant la durée du préavis, le salarié bénéficie d'une rémunération mensuelle à la charge de l'employeur.

Le montant de cette rémunération est au moins égal à 65% de sa rémunération mensuelle brute moyenne soumise aux contributions mentionnées à l'article L. 5422-9 au titre des douze derniers mois précédant la modification du licenciement.

Il peut être inférieur à un salaire mensuel égal à 85 % du produit du salaire minimum de croissance prévu à l'article L. 3231-2 par le nombre d'heures correspondant à la durée collective de travail fixée dans l'entreprise.

L'article 32 de la loi n° 2000-37 du 19 janvier 2000 dispose que les salariés à temps partiel ne peuvent percevoir un salaire inférieur au minimum calculée à due proportion.

Ainsi le salaire versé pendant la période de congés de reclassement excédant la durée du préavis est soumis à un double minimum, 85 % du salaire minimum de croissance ou 65 % de la rémunération brute moyenne des 12 derniers mois, sauf accord plus favorable au salarié.

Compte tenu de la valeur du SMIC mensuel brut qui s'élevait pour 151,67 heures de travail à la somme de 1 498,47 euros en 2018, soit 470,95 euros pour 11 heures par mois, l'employeur ne pouvait servir au salarié un salaire inférieur à 85 % de 470,85 euros par mois, soit 400,31 euros, si le salarié estime ce pourcentage plus avantageux que celui de 65 % précité.

Il sera donc fait droit à sa demande en paiement de la somme de 986,75 euros couvrant la période comprise entre le 1er février 2018 et le 21 septembre 2018.

Cette somme de nature salariale portera intérêts au taux légal à compter de la date de convocation de l'employeur devant le bureau de conciliation du conseil des prud'hommes.

2 : Sur le rappel de salaire au titre du principe 'à travail égal, salaire égal'

M. [R] [L] sollicite un rappel de salaire de 14 495 euros à titre de rappel de salaire pour la période non prescrite allant du 1er janvier 2016 au 31 décembre 2017, à raison de la violation du principe 'A travail égal, salaire égal' qui serait caractérisée par une rupture d'égalité par rapport à ses collègues infirmiers et en particulier Mme [B]. Il fait valoir que ces personnes sont d'un niveau équivalent, qu'ils sont rattachés hiérarchiquement à des cadres de niveau équivalent, à savoir le directeur du centre de médecine du travail et le directeur du dispensaire médical, qu'il exerce, quant à lui, des responsabilités de niveau supérieur à celui des infirmiers. Il demande un rappel de salaire correspondant à une inégalité au regard du salaire de base, mais aussi à la privation des primes d'assiduité, d'ancienneté, complémentaire et de treizième mois qui sont servies aux infirmiers et non à lui.

La SA Aéroport de [Localité 6] oppose que les éléments de salaire dont le salarié se plaint d'être privés relèvent du statut du personnel des ADP auquel sont soumis les infirmiers et qui exclut du mode de rémunération revendiqué les médecins et personnels paramédicaux. S'agissant d'un régime réglementaire, l'employeur souligne que le juge judiciaire ne peut le remettre en cause, d'autant plus que les juridictions administratives ont reconnu la validité de l'exclusion des médecins urgentistes de ce mode de rémunération. Sur l'inégalité de traitement invoquée, la SA Aéroport de [Localité 6] objecte que l'intéressé n'exerce par les mêmes fonctions que ceux auxquels il se compare, notamment car ceux-ci dépendent du service de santé au travail, la formation de M. [R] [L] qui est titulaire d'un certificat de capacité d'orthoptiste lui confère le statut de cadre, il n'était pas régi par les mêmes règles d'organisation et de durée de travail, puisqu'il n'était pas à temps complet avec un horaire dit administratif.

Sur ce

Il résulte du principe 'à travail égal, salaire égal', dont s'inspirent les articles'L.1242-14, L.1242-15, L.2261-22.9 , L.2271-1.8° et L.3221-2 du Code du travail, que tout employeur est tenu d'assurer, pour un même travail ou pour un travail de valeur égale, l'égalité de rémunération entre tous ses salariés placés dans une situation identique et effectuant un même travail ou un travail de valeur égale.

Sont considérés comme ayant une valeur égale par l'article L.3221-4 du Code du travail les travaux qui exigent des salariés un ensemble comparable de connaissances professionnelles consacrées par un titre, un diplôme ou une pratique professionnelle, de capacités découlant de l'expérience acquise, de responsabilités et de charge physique ou nerveuse.

M. [R] [L] était soumis à un statut réglementaire, qui s'imposait à l'employeur et que le juge judiciaire ne peut remettre en cause, sauf à porter atteinte au principe de la séparation des pouvoirs. Ainsi ce statut imposait à l'employeur de ne pas soumettre l'intéressé au régime de rémunération des infirmiers.

La demande de rappel de salaire sera donc rejetée, ainsi que par voie de conséquence, la demande en paiement de dommages-intérêts en réparation du préjudice moral né de cette inégalité de traitement.

3 : Sur l'application de l'article 700 du code de procédure civile et les dépens

Il est équitable au regard de l'article 700 du code de procédure civile d'allouer au salarié la somme de 100 euros au titre des frais irrépétibles de première instance et de rejeter sa demande au titre des frais irrépétibles d'appel. Les demandes de la SA Aéroport de [Localité 6] de ces chefs seront rejetées.

Dès lors qu'il a triomphé en première instance, les dépens exposés devant le conseil des prud'hommes seront mis à la charge de son adversaire et ceux d'appel à sa charge.

Il convient de rejeter les demandes au titre des frais d'exécution et du droit de recouvrement de l'huissier qui ne relèvent pas des dépens.

PAR CES MOTIFS :

La Cour statuant contradictoirement, par mise à disposition au greffe et en dernier ressort ;

Confirme le jugement déféré sauf sur les depens ;

Condamne la SA aéroports de [Localité 6] aux dépens de première instance, lesquels ne comprennent pas les frais d'exécution ;

Y ajoutant ;

Rejette les demandes des parties au titre des frais irrépétibles d'appel ;

Condamne M. [R] [L] aux dépens d'appel, lesquels ne comprennent pas les frais d'exécution.

LA GREFFIÈRE LE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 6 - chambre 4
Numéro d'arrêt : 20/03827
Date de la décision : 14/12/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-12-14;20.03827 ?
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