RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 6 - Chambre 12
ARRÊT DU 09 Décembre 2022
(n° , 2 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : S N° RG 17/08391 - N° Portalis 35L7-V-B7B-B3SCO
Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 04 Mai 2017 par le Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale de BOBIGNY RG n° 16/02449
APPELANTE
CAF DU NORD
[Adresse 3]
[Adresse 3]
[Localité 2]
représentée par M. [U] [K] en vertu d'un pouvoir spécial
INTIMEE
Madame [I] [R]
[Adresse 1]
[Localité 4]
non comparante, non représentée, ayant pour conseil Me Laurent FELDMAN, avocat au barreau de PARIS (toque : D1388)
(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2022/008608 du 27/04/2022 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de PARIS)
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 25 Octobre 2022, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Mme Sophie BRINET, Présidente de chambre, chargé du rapport.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Mme Sophie BRINET, Présidente de chambre
M. Raoul CARBONARO, Président de chambre
M. Gilles REVELLES, Conseiller
Greffier : Mme Claire BECCAVIN, lors des débats
ARRET :
- REPUTE CONTRADICTOIRE
- prononcé
par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour,initialement prévu le 02 décembre 2022 et prorogé au 09 décembre 2022, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
-signé par Mme Sophie BRINET, Présidente de chambre et par Mme Claire BECCAVIN, greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
La cour statue sur l'appel interjeté par la caisse d'allocations familiales du Nord d'un jugement rendu le 4 mai 2017 par le tribunal des affaires de sécurité sociale de Bobigny dans un litige l'opposant à Mme [I] [R].
FAITS, PROCÉDURE, PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES
Les circonstances de la cause ayant été correctement rapportées par le tribunal dans son jugement au contenu duquel la cour entend se référer pour un plus ample exposé, il suffit de rappeler que Mme [R] (l'allocataire) a fait opposition le 29 novembre 2016 à la contrainte émise par la caisse d'allocations familiales du Nord (la caisse) le 22 septembre 2016 et signifiée le 22 novembre 2016, aux fins de recouvrement de la somme de 4 215,52 euros correspondant à un indu d'allocations familiales de 2013 à 2014.
Le tribunal des affaires de sécurité sociale de Bobigny, par jugement du 4 mai 2017, a :
- rejeté la note en délibéré reçue le 15 mars 2017,
- constaté la prescription de la créance due pour les périodes du 1er mai 2013 au 31 mars 2014 et du 1er janvier 2013 au 30 avril 2013,
- dit la demande en paiement de la caisse irrecevable pour les périodes du 1er mai 2013 au 31 mai 2014 et du 1er janvier 2013 au 30 avril 2013,
- rappelé que la caisse ne pourra plus demander à Mme [I] [R] le paiement des sommes pour les périodes du 1er mai 2013 au 31 mars 2014 et du 1er janvier 2013 au 30 avril 2013,
- condamné Mme [I] [R] à payer à la caisse la somme de 1 273,95 euros correspondant à l'indu d'allocations logement sociales durant la période du 1er avril 2014 au 31 août 2014.
Le jugement lui ayant été notifié le 6 juin 2017, la caisse en a interjeté appel le 20 juin 2017.
A l'audience du 16 mars 2022, la caisse présente ses observations par la voix de son représentant reprenant oralement ses écritures.
Mme [R] n'est ni présente, ni représentée, bien qu'elle ait été régulièrement convoquée.
L'affaire est mise en délibéré.
Après l'audience, est parvenu au greffe un avis de dépôt de demande d'aide juridictionnelle formée le 9 mars 2022 par Mme [R] en vue de la présente instance et dans un second temps, le greffe a été destinataire d'une décision du bureau d'aide juridictionnelle du 27 avril 2022 désignant Maître Laurent Feldman, avocat, pour assister Mme [R].
La présente cour au vu de ces éléments, par arrêt du 20 Mai 2022, a :
-ordonné la réouverture des débats,
- renvoyé l'affaire pour être plaidée à l'audience du vendredi 25 octobre 2022 à 13h30,
- enjoint à la caisse de communiquer ses écritures à l'intimée, avant le 15 juin 2022,
- enjoint à Mme [R] de communiquer ses écritures en réponse avant le 15 septembre 2022.
La notification de cet arrêt valant convocation des parties à la nouvelle audience a été délivrée à Mme [R] ainsi qu'à la caisse le 31 mai 2022. Il ressort de l'accusé de réception signé par Mme [R] qu'elle a reçu l'arrêt avant-dire-droit le 31 mai 2022. Par ailleurs, la caisse a notifié ses conclusions au conseil désigné à l'intimée par le service de l'aide juridictionnelle, par lettre recommandée dont l'accusé de réception a été signé.
Dans des écritures reprises oralement à l'audience par son représentant, la caisse demande à la cour de:
- déclarer fondée l'opposition formée par Mme [R],
- infirmer le jugement entrepris,
- déclarer régulière la contrainte du 22 septembre 2016 émise par elle, signifiée le 22 novembre 2016,
- valider la contrainte en son entièreté.
A l'audience du 25 octobre 2022, Mme [R] n'est ni présente, ni représentée.
En application de l'article 455 du code de procédure civile, il est renvoyé aux conclusions de la caisse déposées le 25 octobre 2022 pour un plus ample exposé de ses moyens développés et soutenus à l'audience.
SUR CE, LA COUR
Il ressort des éléments de la procédure qu'une allocation au logement social (l'ALS) a été versée par la caisse d'allocations familiales du Nord (la CAF) à compter d'août 2013 à Mme [I] [R], (la bailleresse) , pour le compte de M. [Y] [R], qui était son locataire. La bailleresse a informé en août 2014 la CAF du déménagement du locataire depuis le 31 mars 2014. La caisse a alors notifié le 1er septembre à la bailleresse un indu d'ALS pour les mois d'avril à août 2014 pour la somme de 1 273,95 euros, lequel a été suivi d'une mise en demeure du 9 décembre 2014.
Par ailleurs, en novembre 2013, la caisse a diligenté une enquête sur les moyens de subsistance de M. [Y] [R]. Il est ressorti de ce contrôle que l'allocataire était en réalité hébergé gracieusement par sa soeur, Mme [I] [R], et qu'aucun loyer n'avait été versé depuis l'entrée dans les lieux en décembre 2012. La caisse a alors notifié à Mme [R] un indu complémentaire le 29 janvier 2015 les mois de janvier à avril 2013, pour un montant de 138,88 euros, et le 31 janvier 2015 pour les mois de mai 2013 à mars 2014 pour un montant de 2 802, 69 euros. La caisse a signifié une mise en demeure du 7 avril 2015 pour avoir paiement de la somme de 2 802, 69 euros et une seconde mise en demeure du 12 mai 2015 pour avoir paiement de la somme de 138,88 euros. Elle a émis le 22 septembre 2016 une contrainte pour la somme de 4 125,52 euros qui a été notifiée à Mme [R] par acte d'huissier du 22 novembre 2016.
Le premier juge a soulevé la prescription de la créance pour les sommes réclamées pour les périodes comprises entre le 1er janvier 2013 et 30 avril 2013 et entre le 1er mai 2013 et le 31 mars 2014, en sollicitantles dispositions de l'article L.553-1 du code de la sécurité sociale qui disposent :
« L'action de l'allocataire pour le paiement des prestations se prescrit par deux ans.
Cette prescription est également applicable à l'action intentée par un organisme payeur en recouvrement des prestations indûment payées, sauf en cas de man'uvre frauduleuse ou de fausse déclaration, l'action de l'organisme se prescrivant alors par cinq ans.
La prescription est interrompue tant que l'organisme débiteur des prestations familiales se trouve dans l'impossibilité de recouvrer l'indu concerné en raison de la mise en 'uvre d'une procédure de recouvrement d'indus relevant des articles L. 553-2, L. 821-5-, L. 835-3 ou L. 845-3, L. 844-3 du code de la sécurité sociale, L. 262-46 du code de l'action sociale et des familles ou L. 823-9 du code de la construction et de l'habitation.»
Pour contester l'application de ce texte à l'indu dont elle demande le remboursement, la caisse soutient que ces dispositions ne sont pas applicables au cas d'espèce au motif qu'elles ne concerneraient que les actions en recouvrement des prestations indûment versées mises en oeuvre à l'encontre de l'allocataire. Mais la cour constate qu'il ne ressort pas de l'alinéa 2 du texte susvisé que seules les actions en recouvrement à l'encontre des allocataires seraient soumises à la prescriptions biennale. Dès le champ d'application de ce texte recouvre l'ensemble des actions en recouvrement de prestations indûment versées.
Par ailleurs, une réclamation adressée par une caisse d'allocations familiales à un allocataire à l'effet de lui demander le remboursement d'un trop-perçu vaut commandement interruptif de la prescription dès lors qu'il est constant qu'elle est parvenue au destinataire.
Pour la période du 1er mai 2013 au 31 mars 2014
Le point de départ courait à compter du 31 mars 2014 et la caisse avait jusqu'au 31 mars 2016 pour interrompre le délai de prescription. Elle se prévaut à cet effet de la mise en demeure du 7 avril 2015, adressé par courrier avec accusé de réception. Elle produit à cet égard un accusé de réception signé mais non daté (pièce n°13 de la caisse), mais dont il ressort qu'il correspond à la mise en demeure du 7 avril 2015 puisque son numéro 2C10052853592 est reporté sur la mise en demeure. Dès lors le délai de prescription a été interrompu et la caisse est fondée à obtenir la répétition de l'indu pour cette période à hauteur de 2 802, 69 euros.
Pour la période du 1er janvier 2013 au 31 avril 2013
Le point de départ courait à compter du 31 avril 2013 et la caisse avait jusqu'au 31 avril 2015 pour interrompre le délai de prescription. Elle a adressé le 12 mai 2015 une mise en demeure pour avoir paiement de la somme de 138,68 euros correspondant à l'indu d'ALS pour la période 1er janvier 2013 au 31 avril 2015. La cour constate que cette mise en demeure a été adressée à l'intimée à une date à laquelle la prescription était acquise. Le premier juge a décidé à bon droit que cette créance était prescrite.
S'agissant de l'indu réclamé au titre de la période du 1er avril 2014 au 31 août 2014, la cour adopte les motifs pertinents du premier juge.
Dans la mesure où le tribunal était saisi d'une opposition à contrainte, il lui appartenait de statuer sur le sort de cet acte de poursuites, ce qui ne ressort pas du dispositif de la décision déférée. En conséquence, le jugement sera infirmé en toutes ses dispositions et la contrainte sera partiellement validée à hauteur de 4 076,90 euros correspondant à 2802,69 euros et de 1273, 95 euros.
Mme [I] [R], succombant en cette instance, devra en supporter les dépens engagés depuis le 1er janvier 2019.
PAR CES MOTIFS
LA COUR,
INFIRME le jugement du tribunal des affaires de sécurité sociale de Paris du 4 mai 2017 en toutes ses dispositions ;
Statuant à nouveau ;
DÉCLARE recevable l'opposition formée par Mme [I] [R],
VALIDE partiellement la contrainte émise par le directeur de la la caisse d'allocations familiales du Nord le 22 septembre 2016 et signifiée le 22 novembre 2016 à Mme [I] [R] pour la somme de 4 076,90 euros correspondants au remboursement de l'allocation de logement social pour les périodes du 1er mai 2013 au 31 mars 2014 et du 1er avril 2014 au 31 août 2014,
CONDAMNE Mme [I] [R] à payer à la la caisse d'allocations familiales du Nord la somme de 4 076,90 euros,
DÉBOUTE les parties de leurs autres demandes,
CONDAMNE Mme [I] [R] aux dépens de l'instance, incluant les frais de signification de la contrainte et, le cas échéant, les frais de son exécution forcée.
La greffière La présidente