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08/12/2022 | FRANCE | N°22/10212

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 1 - chambre 2, 08 décembre 2022, 22/10212


Copies exécutoires RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS





COUR D'APPEL DE PARIS



Pôle 1 - Chambre 2



ARRÊT DU 08 DECEMBRE 2022



(n° , 10 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 22/10212 - N° Portalis 35L7-V-B7G-CF4II



Décision déférée à la Cour : Ordonnance du 08 Avril 2022 -Président du TJ de BOBIGNY - RG n° 22/00394





APPELANTE



LE SYNDICAT DES COPROPRIÉTAIRES DE L'IMMEUBLE [Localit

é 4], représenté par son Syndic le Cabinet BERYL IMMOBILIER, domicilié en cette qualité audit siège



[Adresse 3]

[Localité 8]



Représenté et assisté par Me Victor BONNEMAY, avocat...

Copies exécutoires RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 1 - Chambre 2

ARRÊT DU 08 DECEMBRE 2022

(n° , 10 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 22/10212 - N° Portalis 35L7-V-B7G-CF4II

Décision déférée à la Cour : Ordonnance du 08 Avril 2022 -Président du TJ de BOBIGNY - RG n° 22/00394

APPELANTE

LE SYNDICAT DES COPROPRIÉTAIRES DE L'IMMEUBLE [Localité 4], représenté par son Syndic le Cabinet BERYL IMMOBILIER, domicilié en cette qualité audit siège

[Adresse 3]

[Localité 8]

Représenté et assisté par Me Victor BONNEMAY, avocat au barreau de PARIS, toque : E1286

INTIMEES

S.C.I. NACIMA, RCS de BOBIGNY n°843 547 027, prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

[Adresse 6]

[Localité 4] FRANCE

Représentée par Me Erwann COIGNET, avocat au barreau de PARIS, toque : G0230

Substitué à l'audience par Me Sarah ROUMANE, avocat au barreau de PARIS

S.A.S.U. NURE, RCS de BOBIGNY n°891 490 484, prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

[Adresse 2]

[Localité 9]

Représentée par Me William FEUGÈRE de la SELEURL FEUGERE AVOCATS, avocat au barreau de PARIS, toque : P0486

Assistée à l'audience par Me Corentin DORO, avocat au barreau de PARIS, toque : P0486

S.A.S.U. HALLES DE [Localité 9], RCS de BOBIGNY n°892 463 787

[Adresse 2]

[Localité 9]

Défaillante, signifiée le 04.07.2022 à étude

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 10 Novembre 2022, en audience publique, devant la Cour composée de :

Marie-Hélène MASSERON, Présidente de chambre chargée du rapport,

Thomas RONDEAU, Conseiller

Michèle CHOPIN, Conseillère

qui en ont délibéré

Greffier, lors des débats : Saveria MAUREL

ARRÊT :

- RENDU PAR DÉFAUT

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Marie-Hélène MASSERON, Présidente de chambre et par Saveria MAUREL, Greffier, présent lors de la mise à disposition.

*****

EXPOSE DU LITIGE

La société Nacima est propriétaire de plusieurs lots au sein de l'immeuble en copropriété situé au [Localité 4] et [Adresse 5] (93), lesquels sont donnés à bail, notamment à la société Halles de [Localité 9] selon bail commercial du 5 novembre 2020, exerçant une activité de primeur, et à la société Nure, exploitant un restaurant-grill.

Le syndicat des copropriétaires de l'immeuble se plaint, d'une part de la réalisation de travaux sur les parties communes sans autorisation de l'assemblée générale des copropriétaires (mise en place d'une installation de cuisine au gaz de ville pour le restaurant, changement de toutes les vitrines commerciales, pose d'enseignes, pose d'enseignes lumineuses, percement de la dalle du parking pour permettre la pose d'évacuation, pose de caméras de surveillance), d'autre part de sinistres constatés sur les parties communes (éclats et dégradations en périphérie des vitrines commerciales posées, dégradations en périphérie des boîtiers des rideaux métalliques, percements dans les parties communes au niveau des escaliers), enfin de nuisances sonores et olfactives en provenance du restaurant.

Par acte du 11 février 2022, le syndicat des copropriétaires a fait assigner les sociétés Nacima, Halles de [Localité 9] et Nure devant le tribunal judiciaire de Bobigny aux fins de :

- les voir condamner solidairement et à défaut in solidum, sous astreinte de 500 euros par jour à compter de la décision à intervenir, à procéder à la remise en état antérieure des lieux, à savoir :

déposer les enseignes et les enseignes lumineuses';

déposer le raccordement au gaz de ville';

déposer les caméras de surveillance';

- les voir condamner solidairement et à défaut in solidum, sous astreinte de 500 euros par jour à compter de la décision à intervenir, à cesser ou faire cesser les nuisances olfactives ;

- désigner un expert judiciaire aux fins de donner son avis sur les désordres allégués';

- voir condamner les trois sociétés à lui verser une provision de 797,20 euros au titre du coût du constat d'huissier ;

- voir condamner les trois sociétés à lui verser la somme de 1.500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux dépens.

Par ordonnance de référé réputée contradictoire du 8 avril 2022, le juge des référés du tribunal judiciaire de Bobigny a :

- condamné les sociétés Nure, Halles de [Localité 9] et Nacima à déposer les enseignes publicitaires et les enseignes lumineuses installées en façade de leur commerce respectif en violation du règlement de copropriété, et ce sous astreinte de 50 euros par jour de retard à compter du 15ème jour suivant la signification de la présente décision ;

- condamné les sociétés Halle de [Localité 9] et Nacima à déposer les dispositifs de caméra de vidéo surveillance installées en façade du commerce de primeur exploité par la société Halles de [Localité 9] en violation de l'article 25 de la loi du 10 juillet 1965, et ce sous astreinte de 50 euros par jour de retard à compter du 15ème jour suivant la signification de la présente décision ;

- débouté le syndicat des copropriétaires de ses demandes visant à voir ordonner la dépose du raccordement au gaz de ville, la cessation des nuisances olfactives, la désignation d'un expert judiciaire, ainsi que sa demande de provision ;

- condamné les sociétés Nure, Halles de [Localité 9] et Nacima à payer au syndicat des copropriétaires de l'immeuble [Localité 4] et [Adresse 5], la somme de 1.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamné les sociétés Nure, Halles de [Localité 9] et Nacima aux dépens de l'instance ;

- rappelé que la présente ordonnance est exécutoire par provision.

Par déclaration du 23 mai 2022, le syndicat des copropriétaires a relevé appel de cette décision.

Dans ses dernières conclusions remises et notifiées le 13 juillet 2022, il demande à la cour de :

- infirmer l'ordonnance du 8 avril 2022 en ce qu'elle l'a débouté de sa demande de dépose du raccordement au gaz de ville, d'expertise, de cessation des nuisances sonores et olfactives et de condamnation par provision ;

Statuant à nouveau,

- condamner les sociétés Nacima et Nure solidairement et à défaut in solidum, sous astreinte de 500 euros par jour à compter de la décision à intervenir, à déposer le raccordement au gaz de ville ;

- désigner tel expert qui lui plaira avec pour mission d'examiner les désordres allégués dans l'assignation, les décrire, en indiquer la nature, l'importance et les causes ; chiffrer, le cas échéant et à partir des devis fournis par les parties, éventuellement assistées d'un maître d''uvre, le coût des travaux propres à y remédier'; fournir tous éléments de nature à permettre ultérieurement à la juridiction saisie d'évaluer les préjudices de toute nature, directs ou indirects, matériels ou immatériels résultant des désordres, notamment le préjudice de jouissance subi ou pouvant résulter des travaux de remise en état ; dire si des travaux urgents sont nécessaires soit pour empêcher l'aggravation des désordres et du préjudice qui en résulte, soit pour prévenir les dommages aux personnes ou aux biens ; dans l'affirmative, à la demande d'une partie ou en cas de litige sur les travaux de sauvegarde nécessaires, décrire ces travaux et en faire une estimation sommaire dans un rapport intermédiaire qui devra être déposé aussitôt que possible ; examiner les percements, les canalisation et raccordement en PVC réalisés en sous-sol, et en établir la provenance'; décrire et chiffrer les travaux de dépose desdits percements, canalisations et raccordement en PVC et de remise en état antérieur'; faire toutes observations utiles au règlement du litige ;

- condamner les sociétés Nacima, Nure et Halles de [Localité 9], solidairement et à défaut in solidum, à lui payer la somme de 3.000 euros au titre de l'article 700'du code de procédure civile';

- condamner les sociétés Nacima, la Nure et Halles de [Localité 9] aux entiers dépens.

Dans ses dernières conclusions remises et notifiées le 29 juillet 2022, la société Nacima demande à la cour de :

- débouter le syndicat des copropriétaires de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions telles que dirigées à son encontre';

- débouter la société Nure de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions telles que dirigées à son encontre';

- confirmer l'ordonnance prononcée le 8 avril 2022 en ce qu'elle a débouté le syndicat des copropriétaires de ses demandes visant à voir ordonner la cessation des nuisances olfactives et sonores, la désignation d'un expert judiciaire ainsi que sa demande de provision ;

- juger recevable son appel incident';

- infirmer l'ordonnance entreprise en ce qu'elle a débouté le syndicat des copropriétaires de ses demandes visant à voir ordonner la dépose du raccordement au gaz de ville, condamné les sociétés Nure, Halles de [Localité 9] et Nacima à déposer les enseignes publicitaires et les enseignes lumineuses installées en façade de leur commerce respectif en violation du règlement de copropriété, et ce sous astreinte de 50 euros par jour de retard à compter du 15ème jour suivant la signification de la décision, condamné les sociétés Halles de [Localité 9] et Nacima à déposer les dispositifs de caméra de surveillance installés en façade du commerce de primeur exploité par la société Halles de [Localité 9] en violation de l'article 25 de la loi du 10 juillet 1965, et ce sous astreinte de 50 euros par jour de retard à compter du 15ème jour suivant la signification de la décision, condamné les sociétés Nure, Halles de [Localité 9] et Nacima à payer au syndicat des copropriétaires la somme de 1.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux dépens de l'instance ;

Et statuant à nouveau,

Relativement à la demande de dépose de raccordement au gaz de ville :

A titre principal,

- ordonner sa mise hors de cause';

A titre subsidiaire,

- condamner la société Nure à la garantir de toute condamnation prononcée à son encontre sur ce chef de demande';

A titre infiniment subsidiaire,

- confirmer l'ordonnance entreprise en ce qu'elle a débouté le syndicat des copropriétaires de cette demande';

Relativement à la demande de dépose des enseignes publicitaires et lumineuses et du dispositif de caméra de vidéo surveillance :

A titre principal,

- ordonner sa mise hors de cause,

A titre subsidiaire,

- condamner les sociétés Nure et Halles de [Localité 9] à la garantir de toute condamnation prononcée à son encontre sur ce chef de demande';

En tout état de cause,

- condamner le syndicat des copropriétaires et tout succombant à lui payer solidairement une somme de 3.000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile';

- condamner le syndicat des copropriétaires tout succombant aux entiers dépens de l'instance.

Dans ses dernières conclusions remises et notifiées le 29 juillet 2022, la société Nure demande à la cour de :

- débouter le syndicat des copropriétaires de toutes ses demandes, fins et conclusions ;

- confirmer l'ordonnance du 8 avril 2022 en ce qu'elle a débouté le syndicat des copropriétaires de ses demandes visant à voir ordonner la dépose du raccordement au gaz de ville, la cessation des nuisances olfactives, la désignation d'un expert judiciaire, ainsi que sa demande de provision ;

- dire et juger son appel incident recevable et bien fondé ;

- infirmer l'ordonnance du 8 avril 2022 en ce qu'elle a condamné les sociétés Nure, Halles de [Localité 9] et Nacima à déposer les enseignes publicitaires et les enseignes lumineuses installées en façade de leur commerce respectif en violation du règlement de copropriété, et ce sous astreinte de 50 euros par jour de retard à compter du 15ème jour suivant la signification de la présente décision, condamné les sociétés Nure, Halles de [Localité 9] et Nacima à payer au syndicat des copropriétaires la somme de 1.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux dépens de l'instance ;

Et statuant à nouveau,

A titre principal,

- dire n'y avoir lieu à référé sur les demandes du syndicat des copropriétaires';

À titre subsidiaire,

- ordonner que la dépose des enseignes lumineuses et du raccordement au gaz de ville soient effectués aux frais exclusifs de la société Nacima';

En tout état de cause,

- condamner le syndicat des copropriétaires à verser à la société Nure une somme de 5.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamner le syndicat des copropriétaires aux entiers dépens.

La société Halles de [Localité 9] n'a pas constitué avocat.

Par acte d'huissier de justice du 4 juillet 2022, le syndicat des copropriétaires lui a signifié sa déclaration d'appel et ses conclusions d'appelant (par dépôt de l'acte à l'étude).

Pour l'exposé des moyens des parties, il est renvoyé à leurs conclusions susvisées conformément à l'article 455 du code de procédure civile.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Il convient de rappeler qu'en application des dispositions de l'article 954 du code de procédure civile, la cour ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif des conclusions et n'examine les moyens au soutien de ces prétentions que s'ils sont invoqués dans la discussion.

Or en l'espèce, bien que discutant dans ses dernières conclusions les quatre points sur lesquels il sollicite l'infirmation de l'ordonnance entreprise, à savoir les travaux de raccordement au gaz de ville effectués sans autorisation, la désignation d'un expert, les nuisances sonores et olfactives et la provision au titre des frais de constat d'huissier de justice, les prétentions formulées par le syndicat appelant dans le dispositif de ses dernières conclusions se limitent aux travaux de raccordement au gaz de ville et à l'expertise.

Ce point a été soulevé par la société Nure dans ses conclusions.

Il s'en suit que la cour n'est saisie, au titre de l'appel du syndicat des copropriétaires, que de la demande de dépose du raccordement au gaz de ville et de la demande d'expertise.

Par ailleurs, sur l'appel incident de la société Nure, la cour est saisie de la demande de dépose des enseignes à laquelle il a été fait droit en première instance, la société Nure sollicitant l'infirmation de l'ordonnance de ce chef et qu'il soit dit n'y avoir lieu à référé.

Enfin, sur l'appel incident de la société Nacima (propriétaire des locaux commerciaux), la cour est saisie de la demande du syndicat des copropriétaires de dépose des caméras de surveillance installées en façade du commerce de primeur par la société La halle de [Localité 9], et de la demande de la société Nacima aux fins de mise hors de cause et à défaut de garantie par ses locataires.

En application de l'article 835 du code de procédure civile, le juge des référés peut toujours, même en présence d'une contestation sérieuse, prescrire en référé les mesures conservatoires ou de remise en état qui s'imposent, soit pour prévenir un dommage imminent, soit pour faire cesser un trouble manifestement illicite.

Le dommage imminent s'entend du dommage qui n'est pas encore réalisé, mais qui se produira sûrement si la situation présente doit se perpétuer. Le trouble manifestement illicite découle de toute perturbation résultant d'un fait qui directement ou indirectement constitue une violation évidente de la règle de droit.

Sur la demande relative aux enseignes

Il ressort de deux constats d'huissier de justice établis les 9 février 2021 et 22 janvier 2022, à la requête du syndicat des copropriétaires :

- que d'une part, le local commercial à usage de primeur (Halles de [Localité 9]) présente sur ses façades donnant, l'une sur la [Localité 4], l'autre sur l'angle de [Localité 4] et de la [Adresse 2], un bandeau d'enseigne, ainsi que des néons destinés à éclairer ce bandeau d'enseigne installés sur la sous-face du plancher haut de la façade située à l'angle des [Localité 4] et [Adresse 2] ;

- que d'autre part, au-dessus de la façade du local commercial à usage de restaurant est installé un bandeau d'enseigne ainsi que, de part et d'autre de cette façade, sur le mur de l'immeuble, deux enseignes drapeau "Grill Akdeniz".

La cour observe que les conclusions du syndicat des copropriétaires manquent de précision à deux niveaux de la démonstration à apporter en référé de l'existence du trouble manifestement illicite allégué.

D'une part, quant aux éléments de l'enseigne compris dans la demande de dépose, le syndicat ne précise pas s'il s'agit de faire retirer, pour le local commercial de primeur, les bandeaux d'enseigne posés en façade du local commercial et les néons posés sous l'avancée de l'immeuble éclairant ces bandeaux, ou bien seulement le dispositif lumineux à savoir les néons. Il ne précise pas plus, pour le local commercial de restaurant, s'il s'agit de faire retirer les bandeaux en façade et les deux enseignes drapeau ou seulement ces enseignes drapeau. Il se borne en effet à exposer qu'il ressort des pièces du dossier que "des enseignes ont été posées sur chacune" et que "des enseignes lumineuses ont été posées en façade au niveau du restaurant". Or, le terme général d'enseignes apparaît concerner l'ensemble des éléments de l'enseigne, bandeaux y compris, alors que le terme plus précis d'enseignes lumineuses semble concerner seulement les enseignes drapeau du restaurant et les néons éclairant les bandeaux d'enseigne du primeur.

D'autre part, s'agissant d'identifier la nature des parties de l'immeuble sur lesquelles sont posés chacun des éléments d'enseigne (partie commune ou partie privative), le syndicat des copropriétaires se borne à affirmer que "tous ces travaux affectent les parties communes de l'immeuble et son aspect extérieur", sans étayer cette affirmation.

En outre, le syndicat se prévaut notamment d'une clause du règlement de copropriété "h) Harmonie extérieure 3° Publicité" aux termes de laquelle "Aucun dispositif publicitaire ne peut être installé en quelqu'endroit que ce soit sans l'agrément de l'assemblée générale des copropriétaires statuant dans les conditions prévues à l'article 25 de la loi du 10 juillet 1965". Or il ne peut être affirmé, avec l'évidence requise en référé, que cette clause "Publicité" est bien applicable aux enseignes des locaux commerciaux de l'immeuble. En effet, une enseigne commerciale a simplement pour objet d'informer les clients de la présence du commerce, il n'est pas évident qu'elle constitue un "dispositif publicitaire" au sens de la clause du règlement de copropriété, laquelle nécessite une interprétation du juge du fond.

Aussi, pour ces seuls motifs, sans qu'il soit nécessaire d'examiner chacune des contestations soulevées, le trouble manifestement illicite dont se prévaut le syndicat quant aux enseignes n'est pas caractérisé avec l'évidence requise en référé.

L'ordonnance entreprise sera infirmée de ce chef.

Sur la demande relative aux caméras de surveillance

Il ressort du procès-verbal de constat d'huissier du 22 janvier 2022 et d'une photographie produite par le syndicat en pièce 9, que des caméras de surveillance ont été installées sur une partie de la façade de l'immeuble à proximité de la devanture du commerce de primeur Halles de [Localité 9].

S'agissant de travaux réalisés sur une partie commune sans l'autorisation préalable de l'assemblée générale des copropriétaires conformément aux dispositions de l'article 25 de la loi du 10 juillet 1965, ils caractérisent, comme l'a dit le premier juge, un trouble manifestement illicite auquel il convient de mettre fin en ordonnant la dépose des caméras.

Propriétaire et locataire devant répondre envers le syndicat des copropriétaires du respect des dispositions impératives de la loi du 10 juillet 1965 et du règlement de copropriété, c'est à bon droit que le premier juge a mis l'obligation de remise en état à la charge non seulement du locataire, la société Halles de [Localité 9], mais aussi du propriétaire, la société Nacima. Cette dernière n'est fondée qu'à se voir garantie par son locataire de la condamnation prononcée contre elle, alors qu'il n'est pas discuté que les travaux irréguliers ont été effectués par la société Halles de [Localité 9] sans en avoir avisé sa bailleresse et obtenu son accord, cela en contravention aux dispositions du bail, lequel stipule que le preneur "restera garant vis-à-vis du bailleur de toute action notamment en dommages et intérêts de la part des autres locataires ou voisins que pourrait provoquer l'exercice de ses activités.", et aussi que "Dans le cas où l'immeuble est soumis au régime de la copropriété, préalablement à l'excécution de tous travaux, le locartaire communique au bailleur les éléments nécessaures à l'autorisation du syndicat des copropriétaires."

Sur la demande relative au raccordement au gaz de ville

Le syndicat des copropriétaires reproche à la société Nure d'avoir fait installer un raccordement au gaz de ville dans ses locaux, sans avoir reçu l'autorisation de l'assemblée générale des copropriétaires. Il soutient que cette installation lui cause un trouble manifestement illicite en ce qu'elle engendre un risque supplémentaire auquel il n'est pas soumis, puisqu'auparavant non raccordé au gaz de ville. Il ajoute que ces travaux affectent les parties communes dès lors que selon le règlement de copropriété, constituent des parties communes "les canalisations ou câbles qui, bien que desservant exclusivement telle ou telle partie privative, sont noyés dans le gros oeuvre", ce qui est nécessairement le cas de ladite installation des câbles installés, de surcroît si l'installation est conforme.

Au soutien de sa demande, le syndicat produit un certificat de conformité d'installation au gaz de ville qui a été délivré par l'installateur au gérant de l'établissement "Grill Akdeniz" qui correspond au local commercial de la société Nure.

Toutefois, le syndicat ne se prévaut d'aucune clause du règlement de copropriété prohibant le raccordement des parties privatives au gaz de ville, et ne suffit pas à caractériser une violation évidente de la règle de droit le fait que l'immeuble n'était pas précédemment raccordé au gaz de ville.

Par ailleurs, le seul certificat de conformité produit ne permet pas de déterminer les conditions matérielles du raccordement effectué, en sorte que le syndicat ne fait qu'affirmer sans le démontrer que les canalisations ou câbles qui ont été mises en place sont noyés dans le gros oeuvre et constituent dès ors des parties communes, auxquelles il aurait été porté atteinte sans autorisation préalable de l'assemblée générale des copropriétaires.

Le trouble manifestement illicite n'est donc pas caractérisé avec l'évidence requise en référé ; l'ordonnance sera confirmée en ce qu'elle a rejeté cette demande sur laquelle, plus exactement, il n'y a pas lieu à référé.

Sur la demande d'expertise

Au visa de l'article 145 du code de procédure civile, le syndicat des copropriétaires sollicite la désignation d'un expert pour voir examiner les désordres qui ont été relevés dans ses constats d'huissier, à savoir des désordres en périphérie des vitrines commerciales et des boîtiers des rideaux métalliques, des percements dans les parties communes au niveau des escaliers au sous-sol aux droits des locaux de la société Nacima, définir la cause de ces désordres et déterminer les responsabilités en découlant. Il demande aussi de donner pour mission à l'expert d'examiner les nuisances sonores et olfactives provenant du restaurant de la société Nure.

Aux termes de l'article 145 du code de procédure civile, s'il existe un motif légitime de conserver ou d'établir avant tout procès la preuve de faits dont pourrait dépendre la solution d'un litige, les mesures d'instruction légalement admissibles peuvent être ordonnées à la demande de tout intéressé sur requête ou en référé.

L'article 145 suppose l'existence d'un motif légitime, c'est à dire un fait crédible et plausible, ne relevant pas de la simple hypothèse, qui présente un lien utile avec un litige potentiel futur dont l'objet et le fondement juridique sont suffisamment déterminés et dont la solution peut dépendre de la mesure d'instruction sollicitée, à condition que cette mesure ne porte pas une atteinte illégitime aux droits d'autrui. Elle doit être pertinente et utile.

Le procès-verbal de constat dressé le 9 février 2021 fait effectivement état de désordres qui ont pu être causés à l'immeuble par les travaux réalisés par les sociétés Halles de [Localité 9] et Nure pour l'aménager leurs locaux commerciaux.

Il est ainsi relevé par l'huissier, photographies à l'appui, "des éclats et quelques dégradations en périphérie de la baie vitrée sur la façade de l'immeuble", s'agissant du local de la société Halles de [Localité 9]. L'huissier constate le même type de désordres en périphérie de la devanture du restaurant de la société Nure, sur la façade de l'immeuble et notamment au sous-bassement. Au sous-sol de l'immeuble, il constate au plafond la présence de trois raccords en PVC, traversant la dalle, ces raccords étant à l'état neuf, et en périphérie de ces trois raccordements, il constate que le flocage du plafond a été déposé et qu'autour des raccords le calfeutrement n'est pas réalisé. Il constate enfin une importante reprise de ciment en périphérie des deux évacuations, d'aspect récent, en haut du mur de droite.

Si les désordres constatés sur la façade au pourtour des devantures de chaque commerce apparaissent bien résulter des travaux d'aménagement de ces ouvrages, sans qu'une expertise ait besoin de le confirmer comme le souligne la société Nacima, une telle mesure est toutefois utile pour évaluer ces désordres. S'agissant des percements des dalles au sous-sol pour y faire passer des tuyaux dans des parties privatives, une expertise est nécessaire pour déterminer l'auteur et la nature de ces travaux par l'accès aux partie privatives.

Aussi, le syndicat des copropriétaires justifie bien d'un intérêt légitime à désigner un expert pour examiner ces désordres, la responsabilité des sociétés intimées étant potentiellement engagée.

Par ailleurs, le syndicat produit le témoignage de deux copropriétaires de l'immeuble se plaignant de nuisances sonores et olfactives en provenance du restaurant "kebab" exploité dans les locaux de la société Nure, justifiant donc aussi sur ce point d'un intérêt légitime à voir vérifier la réalité de ces nuisances et déterminer si elles excèdent les inconvénients normaux du voisinage.

Il sera donc fait droit à la demande d'expertise, l'ordonnance entreprise étant infirmée de ce chef, aux frais avancés du syndicat des copropriétaires.

Sur les dépens et l'application de l'article 700 du code de procédure civile

Le sens du présent arrêt commande de confirmer l'ordonnance entreprise sur les dépens et l'application de l'article 700 du code de procédure civile et en appel, de condamner in solidum les sociétés intimées aux entiers dépens et à payer au syndicat des copropriétaires la somme de 2000 euros au titre de ses frais irrépétibles.

PAR CES MOTIFS

La cour,

Statuant dans les limites de sa saisine,

Infirme l'ordonnance entreprise en ce qu'elle a :

- condamné les sociétés Nure, Halles de [Localité 9] et Nacima à déposer les enseignes publicitaires et les enseignes lumineuses installées en façade de leur commerce respectif en violation du règlement de copropriété, et ce sous astreinte de 50 euros par jour de retard à compter du 15ème jour suivant la signification de la présente décision,

- rejeté la demande d'expertise du syndicat des copropriétaires,

La confirme pour le surplus, sauf à préciser que :

- l'astreinte de 50 euros par jour de retard qui assortit la condamnation in solidum des sociétés Halles de [Localité 9] et Nacima à déposer les caméras de surveillance court à l'issue du délai d'un mois à compter de la signification du présent arrêt, et pendant quatre mois,

- la société Halles de [Localité 9] est condamnée à garantir la société Nacima de cette condamnation prononcée sous astreinte ;

Statuant à nouveau des chefs infirmés et y ajoutant,

Dit n'y avoir lieu à référé sur la demande de dépose des enseignes,

Ordonne une expertise et commet pour y procéder :

M. [O] [I],

demeurant [Adresse 7]

([XXXXXXXX01] - [Courriel 10] )

avec pour mission de :

- convoquer les parties et se faire communiquer tous documents utiles à l'accomplissement de sa mission,

- se rendre sur les lieux sis [Localité 4] et [Adresse 5] (93),

- examiner les désordres allégués par le syndicat des copropriétaires et notamment ceux mentionnés dans le procès-verbal de constat d'huissier du 9 février 2021,

- décrire ces désordres, en indiquer la nature, l'importance et les causes,

- chiffrer, le cas échéant et à partir des devis fournis par les parties, éventuellement assistées d'un maître d''uvre, le coût des travaux propres à y remédier,

- dire si le restaurant exploité par la société Nure est la cause de nuisances sonores et/ou olfactives pour les copropriétaires et mesurer leur importance, en ayant recours si nécessaire à tout sachant,

- déterminer et évaluer les travaux propres à faire cesser ces nuisances,

- fournir tous éléments de nature à permettre ultérieurement à la juridiction saisie d'évaluer les préjudices de toute nature résultant des désordres, nuisances et travaux de remise en état,

- dire si des travaux urgents sont nécessaires soit pour empêcher l'aggravation des désordres et du préjudice qui en résulte, soit pour prévenir les dommages aux personnes ou aux biens ; dans l'affirmative, à la demande d'une partie ou en cas de litige sur les travaux de sauvegarde nécessaires, décrire ces travaux et en faire une estimation sommaire dans un rapport intermédiaire qui devra être déposé aussitôt que possible,

- faire toutes observations utiles au règlement du litige,

- répondre aux dires des parties ;

Fixe à 3.000 euros la provision à valoir sur la rémunération de l'expert qui sera réglée par le syndicat des copropriétaires à la régie du service des expertises du tribunal judiciaire de Bobigny dans les six semaines du présent arrêt, à peine de caducité de la mesure d'expertise,

Dit que l'expert devra déposer son rapport dans les six mois de l'avis de dépôt de la consignation par le greffe,

Dit que la mesure d'instruction sera suivie par le juge du contrôle des expertises du tribunal judiciaire de Bobigny,

Condamne les sociétés Nacima, Nure et Halles de [Localité 9] in solidum aux dépens d'appel,

Condamne les sociétés Nacima, Nure et Halles de [Localité 9] in solidum à payer au syndicat des copropriétaires la somme de 2.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile, au titre de ses frais irrépétibles exposés en appel,

Rejette toute demande plus ample ou contraire.

LE GREFFIER LA PRESIDENTE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 1 - chambre 2
Numéro d'arrêt : 22/10212
Date de la décision : 08/12/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-12-08;22.10212 ?
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