La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

08/12/2022 | FRANCE | N°22/08944

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 1 - chambre 2, 08 décembre 2022, 22/08944


Copies exécutoires RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS





COUR D'APPEL DE PARIS



Pôle 1 - Chambre 2



ARRÊT DU 08 DECEMBRE 2022



(n° , 6 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 22/08944 - N° Portalis 35L7-V-B7G-CFYZR



Décision déférée à la Cour : Ordonnance du 20 Avril 2022 -Président de chambre de BOBIGNY - RG n° 22/00295





APPELANTS



Mme [H] [I]

[Adresse 6]

[Localité 5]

(GABON)



M. [D] [I]

[Adresse 6]

[Localité 5] (GABON)



Représentés et assistés par Me Grégoire NORMIER, avocat au barreau de PARIS, toque : D1747







INTIMEE



S.A.S. YAN & MAC, RCS de ...

Copies exécutoires RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 1 - Chambre 2

ARRÊT DU 08 DECEMBRE 2022

(n° , 6 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 22/08944 - N° Portalis 35L7-V-B7G-CFYZR

Décision déférée à la Cour : Ordonnance du 20 Avril 2022 -Président de chambre de BOBIGNY - RG n° 22/00295

APPELANTS

Mme [H] [I]

[Adresse 6]

[Localité 5] (GABON)

M. [D] [I]

[Adresse 6]

[Localité 5] (GABON)

Représentés et assistés par Me Grégoire NORMIER, avocat au barreau de PARIS, toque : D1747

INTIMEE

S.A.S. YAN & MAC, RCS de Bobigny : 843 939 406

[Adresse 1]

[Localité 2]

Représentée par Me David WOLFF, avocat au barreau de PARIS

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 10 Novembre 2022, en audience publique, devant la Cour composée de :

Marie-Hélène MASSERON, Présidente de chambre,

Thomas RONDEAU, Conseiller,

Michèle CHOPIN, Conseillère chargée du rapport,

qui en ont délibéré

Greffier, lors des débats : Saveria MAUREL

ARRÊT :

- CONTRADICTOIRE

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Marie-Hélène MASSERON, Présidente de chambre et par Saveria MAUREL, Greffier, présent lors de la mise à disposition.

*****

EXPOSE DU LITIGE

M. et Mme [I] ont pris attache avec la société Yan &Mac Company, société spécialisée dans le transport par containers, pour le transport de mobilier vers le Gabon.

Par exploit du 1er février 2022, M. et Mme [I] ont fait assigner en référé devant le président du tribunal judiciaire de Bobigny la société Yan &Mac Company aux fins de voir':

condamner la société Yan & Mac Company à leur remettre le véhicule Jaguar F-Pace immatriculé [Immatriculation 3] ainsi que tous les objets transportés à [Localité 5] (Gabon) dans un délai de 5 jours à compter de la signification de la décision à intervenir et ce, sous astreinte provisoire de 200 euros par jour de retard';

condamner la société Yan &Mac Company à leur payer la somme de 3.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens.

Par ordonnance contradictoire de référé du 20 avril 2022, le juge des référés du tribunal judiciaire de Bobigny a :

- rejeté l'exception d'incompétence soulevée par la société Yan & Mac Company et dit le juge des référés du tribunal judiciaire de Bobigny compétent';

- dit que le trouble manifestement illicite invoqué par M. et Mme [I] n'est pas caractérisé ;

- dit n'y avoir lieu à référé';

- dit la société Yan &Mac Company irrecevable en sa demande en paiement';

- dit que la demande provisionnelle en paiement formée par la société la société Yan &Mac Company se heurte à des contestations sérieuses';

- dit n'y avoir lieu à référé ;

- dit n'y avoir lieu à application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile';

- condamné in solidum M. et Mme [I] aux dépens.

Par déclaration du 4 mai 2022 les consorts [I] ont relevé appel de cette décision.

Dans leurs dernières conclusions remises et notifiées le 10 octobre 2022, les consorts [I] demandent à la cour de :

- infirmer l'ordonnance de référé, rendue par le tribunal judiciaire de Bobigny le 20 avril 2022,

- condamner la société Yan & Mac Company à leur remettre le véhicule Jaguar F- PACE, immatriculée [Immatriculation 3], ainsi que tous les objets transportés à [Localité 5] et ce, dans un délai de 5 jours à compter de la signification de la décision à intervenir ;

- condamner la société Yan & Mac Company à leur payer une astreinte provisoire de 200 euros par jour de retard en cas de défaut de remise dans les délais ;

- condamner la société Yan & Mac Company à leur payer la somme de 3.500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamner la société Yan & Mac Company aux entiers dépens.

Les époux [I] soutiennent en substance que :

- il n'existe aucun contrat entre les parties,

- la société Yan & Mac Company a commis une voie de fait en imposant unilatéralement le transport d'une voiture et d'autres objets mobiliers pour les obliger à régler une facture émise ultérieurement, alors que les biens étaient remis à des fins de stockage,

- elle n'hésite pas à les menacer de commettre un abus de confiance de sorte qu'il existe bien un trouble manifestement illicite et un risque de dommage imminent,

- la société Yan & Mac Company n'a pas interjeté appel de sorte qu'elle n'est pas recevable à demander l'infirmation de la décision de première instance,

- il existe manifestement une procédure à [Localité 5] dont ils n'ont pas été avertis,

- aucune médiation n'a été envisagée.

Dans ses dernières conclusions remises et notifiées le 25 octobre 2022, la société Yan & Mac Company demande à la cour de :

Avant dire droit,

- déclarer irrecevable l'assignation des consorts [I] du 1er février 2021';

- rejeter les demandes adverses comme étant non fondées ;

Principalement,

- constater que l'appel du 21 juin 2022 de consorts [I] est devenu sans objet';

Subsidiairement,

- confirmer l'ordonnance de référé du 20 avril 2022 en ce sens qu'elle retient que le trouble manifestement illicite n'est pas caractérisé ;

- condamner les parties appelantes au paiement du montant de 3.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

La société Yan & Mac Company soutient en substance que :

- la demande des époux [I] est devenue sans objet puisque la vente du véhicule et des effets personnels litigieux a eu lieu,

- la version donnée par les époux [I] est contredite par les faits,

- ils ont accepté le principe de l'envoi des marchandises au Gabon, mais ne se sont jamais acquittés de leur dette,

- les parties ont longuement échangé sur les modalités d'expédition et n'ont jamais marqué leur désaccord, de sorte qu'il existe bien un contrat qui les lie,

- le montant des prestations leur a été communiqué et n'a jamais été contesté.

Pour un plus ample exposé des moyens des parties, il est renvoyé à leurs conclusions susvisées conformément à l'article 455 du code de procédure civile.

SUR CE

A titre liminaire, il convient d'observer que la cour n'est pas saisie de l'appel de l'ordonnance de référé rendue en ce qu'elle a rejeté l'exception d'incompétence matérielle soulevée par la société Yan & Mac et la demande de provision formulée par la société Yan & Mac Company.

Sur la recevabilité de l'assignation de M et Mme [I]

La société Yan & Mac Company sollicite aux termes du dispositif de ses écritures que l'assignation délivrée par M. et Mme [I] soit avant dire droit déclarée irrecevable.

L'article 954 du code de procédure civile dispose que les écritures des parties en cause d'appel doivent formuler expressément les prétentions des parties et les moyens de fait et de droit sur lesquels chacune de ces prétentions est fondée avec indication pour chaque prétention des pièces invoquées et de leur numérotation. La cour ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif et n'examine les moyens au soutien de ces prétentions que s'ils sont invoqués dans la discussion.

Or, en l'espèce, la société Yan & Mac Company n'articule aucun moyen de fait ou de droit à l'appui de cette prétention, de sorte qu'elle ne peut qu'être rejetée.

Sur l'objet de l'appel

La société Yan & Mac Company soutient que l'appel interjeté par les époux [I] serait devenu sans objet dans la mesure où la vente du véhicule et des effets personnels litigieux a été ordonnée par le tribunal de commerce de [Localité 5] par ordonnance du 8 juin 2022. Elle en déduit que la demande d'injonction n'est dès lors pas 'réaliste' alors que 'les objets pour lesquels la remise est réclamée n'existent plus'.

Outre que la société Yan & Mac Company ne produit aucun élément sur la date et les modalités de la vente ordonnée, dont la cour ignore si elle est survenue, force est de constater que l'ordonnance du 8 juin 2022 vise le 'véhicule et les effets personnels détenus par le sieur [R]' et ne peut donc être rattachée avec certitude au litige.

De plus, les époux [I] se fondent sur les dispositions de l'article 835 du code de procédure civile et l'existence alléguée d'un trouble manifestement illicite voire d'un dommage imminent afin de solliciter la remise à leur profit du véhicule Jaguar F-PACE immatriculée [Immatriculation 3] et de tous objets transportés à [Localité 5] (Gabon).

Dès lors, il ne peut être considéré que leur appel serait sans objet, la vente du véhicule et des objets visés, à supposer qu'elle ait eu lieu, et qu'elle concerne le véhicule Jaguar F-PACE immatriculée [Immatriculation 3] et les objets personnels des époux [I], étant sans effet sur l'appréciation de l'existence du trouble manifestement illicite ou du dommage imminent allégués.

Ce moyen sera rejeté.

Sur le fond du référé

L'article 835 du code de procédure civile dispose que le président du tribunal judiciaire ou le juge des contentieux de la protection dans les limites de sa compétence peuvent toujours, même en présence d'une contestation sérieuse, prescrire en référé les mesures conservatoires ou de remise en état qui s'imposent, soit pour prévenir un dommage imminent, soit pour faire cesser un trouble manifestement illicite.

Dans les cas où l'existence de l'obligation n'est pas sérieusement contestable, ils peuvent accorder une provision au créancier, ou ordonner l'exécution de l'obligation même s'il s'agit d'une obligation de faire.

Le trouble manifestement illicite désigne toute perturbation résultant d'un fait matériel ou juridique qui, directement ou indirectement, constitue une violation évidente de la règle de droit et le dommage imminent s'entend de celui qui n'est pas encore réalisé mais qui se produira sûrement si la situation dénoncée perdure.

L'urgence n'est pas une condition d'intervention du juge des référés qui, aux termes de l'article 835 du code de procédure civile, peut toujours, même en présence d'une contestation sérieuse, prescrire en référé les mesures conservatoires ou de remise en état qui s'imposent, soit pour prévenir un dommage imminent, soit pour faire cesser un trouble manifestement illicite, et, dans les cas où l'existence de l'obligation n'est pas sérieusement contestable, peut accorder une provision au créancier, ou ordonner l'exécution de l'obligation même s'il s'agit d'une obligation de faire.

Les époux [I] excipent d'une voie de fait qui aurait été commise par la société Yan & Mac Company du fait du transport de leur véhicule et autres biens mobiliers sans leur accord.

Il convient d'observer que :

- un devis a été établi par la société Yan & Mac Company le 30 juin 2021 à l'attention des époux [I], ce devis étant intitulé 'Expédition maritime voiture et effets personnels' et comportant la description suivante : Manutention et chargement conteneur (effets personnels), sanglage véhicule conteneur, transfert conteneur Port [Localité 4], déclaration douanière export, Transport Principal Maritime', pour un prix indiqué de 5.160 euros,

- il est constant que ce devis n'a pas été signé par les époux [I],

- il n'est pas discuté non plus que le véhicule Jaguar F-PACE immatriculé [Immatriculation 3] ainsi que des objets personnels ont été remis à la société Yan &Mac Company, bien que le devis susvisé n'ait pas été signé par les époux [I], ceux-ci indiquant au sein de leurs écritures qu'ils s'interrogeaient sur 'l'envoi' du véhicule qui impactait de manière importante le prix principalement au regard des frais de douane,

- il n'est pas plus discuté que ce véhicule et les objets personnels des époux [I] ont fait l'objet d'un transport par voie maritime vers le Gabon,

- une facture a été établie le 20 août 2021 par la société Yan & Mac Company pour un prix de 27.360 euros dont 22.870 euros au titre du dédouanement,

- une seconde facture a été établie le 24 septembre 2021 incluant une remise sur dédouanement de 10%, portant le prix prévu à la somme de 25.073 euros.

Il s'en déduit que les époux [I] ont remis volontairement leur véhicule et autres objets personnels à la société Yan & Mac Company, ont été destinataires d'un devis, qu'ils n'ont certes pas signé, mais qui décrivait un 'transport maritime principal'et était intitulé 'Expédition maritime voiture et effets personnels'. Dans ces conditions, ils ne peuvent sérieusement soutenir avoir seulement convenu avec la société Yan & Mac Company, dont l'activité est le e-commerce et la livraison de colis, d'un simple stockage des biens, alors qu'il est par ailleurs établi que la remise de leur véhicule et objets personnels s'inscrivait dans le cadre d'un projet de déménagement au Gabon, déménagement dont ils avaient fait part au prestataire et qui s'est depuis réalisé.

Le trouble manifestement illicite qui serait issu du transport du véhicule et autres objets personnels sans leur accord n'est donc pas caractérisé tandis qu'aucun dommage imminent ne peut être déduit de ce transport qui est d'ores et déjà survenu et ne peut constituer un dommage qui ne serait pas encore réalisé, de sorte qu'il n'y a pas lieu à référé.

L'ordonnance rendue sera ainsi confirmée en toutes ses dispositions.

Les époux [I] qui succombent seront condamnés aux dépens de l'appel.

Il n'est pas équitable de faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant dans les limites de sa saisine,

Confirme l'ordonnance rendue en toutes ses dispositions,

Rejette toutes autres demandes,

Condamne M. [D] [I] et Mme [H] [I] aux dépens de l'appel,

Dit n'y avoir lieu à faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel.

LE GREFFIER LA PRESIDENTE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 1 - chambre 2
Numéro d'arrêt : 22/08944
Date de la décision : 08/12/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-12-08;22.08944 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award