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07/12/2022 | FRANCE | N°20/03726

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 6 - chambre 4, 07 décembre 2022, 20/03726


Copies exécutoires REPUBLIQUE FRANCAISE

délivrées le : AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS



COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 4



ARRET DU 07 DECEMBRE 2022



(n° , 4 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 20/03726 - N° Portalis 35L7-V-B7E-CB5UI



Décision déférée à la Cour : Jugement du 25 Mars 2020 -Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de CRÉTEIL - RG n° 17/00157



APPELANTE



S.A.S. HOLDING ABT

[Adresse 2]

[Localité 4]

Repr

ésentée par Me Carine COHEN, avocat au barreau de PARIS



INTIMEE



Madame [W] [Y]

[Adresse 1]

[Localité 3]

Représentée par Me Dan NAHUM, avocat au barreau de VAL-DE-MARNE, t...

Copies exécutoires REPUBLIQUE FRANCAISE

délivrées le : AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 4

ARRET DU 07 DECEMBRE 2022

(n° , 4 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 20/03726 - N° Portalis 35L7-V-B7E-CB5UI

Décision déférée à la Cour : Jugement du 25 Mars 2020 -Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de CRÉTEIL - RG n° 17/00157

APPELANTE

S.A.S. HOLDING ABT

[Adresse 2]

[Localité 4]

Représentée par Me Carine COHEN, avocat au barreau de PARIS

INTIMEE

Madame [W] [Y]

[Adresse 1]

[Localité 3]

Représentée par Me Dan NAHUM, avocat au barreau de VAL-DE-MARNE, toque : PC 36

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 31 Octobre 2022, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Madame Anne-Ga'l BLANC, conseillère, chargée du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, entendu en son rapport, composée de :

Monsieur Jean-François DECHANVILLE, président

Madame Anne-Gael BLANC, conseillère

Madame Florence MARQUES, conseillère

Greffier, lors des débats : Mme Victoria RENARD

ARRET :

- contradictoire

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Jean-François DE CHANVILLE, Président de chambre et par Victoria RENARD, Greffière, présente lors de la mise à disposition.

RAPPEL DES FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES :

Mme [W] [Y] a été engagée en qualité d'assistante comptable par la SAS Holding ABT, par contrat de travail à durée déterminée à temps partiel du 2 mars au 31 décembre 2015.

Ce contrat a été renouvelé le 1er janvier suivant par un second contrat à durée déterminée dont le terme était fixé au 1er septembre 2016.

La société Holding ABT emploie habituellement moins de 11 salariés. Les relations contractuelles entre les parties étaient soumises à la convention collective nationale des sociétés financières (IDCC 478).

Le 6 janvier 2017, sollicitant la requalification de ces contrats à durée déterminée à temps partiel en contrat à durée indéterminée à temps complet et demandant à voir juger que la cessation de la relation de travail s'analysait en licenciement sans cause réelle et sérieuse, Mme [Y] a saisi le conseil de prud'hommes de Créteil qui, par jugement du 25 mars 2020, a requalifié le contrat à durée déterminée en contrat à durée indéterminée et condamné l'employeur au paiement d'une indemnité de requalification, de dommages et intérêts pour rupture abusive, d'indemnité compensatoire de préavis, de congés payés afférents et de dommages et intérêts pour préjudice moral. Le surplus des demandes était en revanche rejeté.

Par déclaration du 24 juin 2020, la société Holding ABT a fait appel de cette décision qui lui avait été notifiée le 26 mai précédent.

Dans ses conclusions remises au greffe par le réseau privé virtuel des avocats le 22 septembre 2020, la société Holding ABT demande à la cour d'infirmer le jugement en ce qu'il la condamne à payer une indemnité pour rupture abusive, une indemnité compensatrice de préavis, les congés payés afférents, une indemnité pour préjudice moral, et statuant à nouveau et y ajoutant, de :

- débouter Mme [Y] de sa demande de dommages et intérêts pour rupture abusive ;

- débouter Mme [Y] de sa demande d'indemnité compensatrice de préavis et de congés payés afférents ;

- débouter Mme [Y] de sa demande d'indemnité pour préjudice moral ;

- condamner Mme [Y] à lui payer 2.000 euros ainsi qu'aux entiers dépens.

Mme [Y], bien qu'ayant constitué avocat, n'a pas conclu.

En application de l'article 455 du code de procédure civile, il est expressément renvoyé aux conclusions des parties pour l'exposé des moyens soutenus.

MOTIFS DE LA DÉCISION :

A titre préliminaire, il convient de rappeler que la cour n'est saisie d'aucune demande d'infirmation de la décision sur la requalification du premier contrat, sur la condamnation de l'employeur au paiement de l'indemnité de requalification subséquente et sur les frais irrépétibles de première instance.

Par ailleurs, l'intimé qui ne conclut pas est réputé adopter les motifs de la décision de première instance sans pouvoir se référer à ses conclusions ou pièces déposées devant cette juridiction. Ainsi, la cour d'appel qui n'est pas saisie de conclusions de l'intimé doit uniquement examiner les motifs du jugement ayant accueilli les prétentions de cette partie en première instance.

1 : Sur l'analyse de la cessation de la relation de travail

L'employeur qui prend l'initiative de la rupture du contrat de travail à durée indéterminée, le rompt ou le considère comme rompu, en dehors de toute manifestation de volonté expresse du salarié tendant à la rupture, doit engager la procédure de licenciement. A défaut, la rupture s'analyse en un licenciement sans cause réelle et sérieuse.

Selon le jugement déféré dont l'intimée est réputée s'approprier les motifs, le conseil a considéré que, du fait de la requalification du contrat à durée déterminée en contrat à durée indéterminée, la rupture de la relation de travail produisait les effets d'un licenciement abusif.

En l'espèce, dans la mesure où le premier contrat à durée déterminée a été requalifié en contrat à durée indéterminée, l'absence de fourniture de travail, à compter du 1er septembre 2016, après le terme du second contrat à durée déterminée, en l'absence de mise en oeuvre de la procédure de licenciement, alors même que le salarié n'avait pas manifesté expressément une intention de rompre le contrat, s'analyse nécessairement en licenciement sans cause réelle et ouvre droit au paiement des indemnités de rupture et de dommages-intérêts.

La décision sera confirmée sur ce point.

2 : Sur les conséquences financières de la rupture

2.1 : Sur l'indemnité compensatrice de préavis

En application des dispositions de l'article L.1234 -1 du code du travail, le préavis de la salariée était d'un mois, il convient donc de confirmer la décision du conseil qui a alloué une indemnité compensatrice de 1.288,22 euros, outre 128,82 euros de congés payés afférents.

Le jugement sera confirmé sur ce point.

2.2 : Sur les dommages et intérêts pour rupture abusive

En application de l'article L.1235-5 du code du travail dans sa version applicable au litige, compte tenu de l'ancienneté de la salariée et de la taille de l'entreprise, Mme [Y] dont la rupture du contrat de travail s'analyse en licenciement sans cause réelle et sérieuse a droit à une indemnité correspondant au préjudice subi.

Au cas présent, au regard de l'absence d'éléments sur les circonstances du retour à l'emploi de la salariée et du préjudice moral causé par la rupture abusive de la relation de travail, les dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse seront fixés à 1.000 euros.

Le jugement sera infirmé sur le montant alloué à ce titre.

3 : Sur le préjudice moral en raison des circonstances de la rupture

Aux termes de l'article 1147 devenu 1231-1 du code civil, le débiteur est condamné, s'il y a lieu, au paiement de dommages et intérêts, soit à raison de l'inexécution de l'obligation, soit à raison du retard dans l'exécution, toutes les fois qu'il ne justifie pas que l'inexécution provient d'une cause étrangère qui ne peut lui être imputée, encore qu'il n'y ait aucune mauvaise foi de sa part.

Il résulte de ces dispositions que l'octroi de dommages et intérêts en réparation du préjudice résultant des circonstances brutales et vexatoires de la rupture nécessite, d'une part, la caractérisation d'une faute dans les circonstances de la rupture du contrat de travail qui doit être différente de celle tenant au seul caractère abusif du licenciement, ainsi que, d'autre part, la démonstration d'un préjudice.

Le conseil a considéré que la rupture était intervenue dans des conditions vexatoires au regard du contenu d'un SMS de l'employeur ('Vu ta réaction nous avons très bien fait de ne pas te prévenir puisque tu nous aurais planté sans scrupule') en réponse à un message de la salariée aux termes duquel cette dernière se plaignait de ne pas avoir été prévenue du retour de la salariée qu'elle remplaçait. Il a alloué des dommages et intérêts au regard du préjudice moral résultant de ces conditions.

Cependant, la salariée ne démontrant pas de préjudice moral distinct de celui d'ores et déjà compensé par les dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, la demande ce titre sera rejetée et le jugement infirmé de ce chef.

4 : Sur les intérêts

Les sommes de nature salariale porteront intérêts au taux légal à compter de la signature par l'employeur de l'accusé de réception de sa convocation devant le bureau de jugement du conseil et du jugement du 25 mars 2020 pour le surplus.

5 : Sur les demandes accessoires

La décision sera confirmée sur les dépens. L'employeur, partie essentiellement perdante, sera également condamné aux dépens de l'appel en sorte que sa demande au titre des frais irrépétibles sera nécessairement rejetée.

PAR CES MOTIFS :

La cour, statuant dans les limites de sa saisine :

- confirme le jugement du conseil de prud'hommes de Créteil du 25 mars 2020 sauf sur le montant des dommages et intérêts pour rupture abusive et le principe des dommages et intérêts pour préjudice moral ;

- condamne la SAS Holding ABT à payer à Mme [W] [Y] la somme de 1.000 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

- rejette la demande de dommages et intérêts pour préjudice moral ;

- rappelle que les sommes de nature salariale porteront intérêts au taux légal à compter de la signature par l'employeur de l'accusé de réception de sa convocation devant le bureau de jugement du conseil et du jugement du 25 mars 2020 pour le surplus ;

- rejette la demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamne la SAS holding ABT aux dépens.

LA GREFFIÈRE LE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 6 - chambre 4
Numéro d'arrêt : 20/03726
Date de la décision : 07/12/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-12-07;20.03726 ?
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