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06/12/2022 | FRANCE | N°20/01094

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 6 - chambre 11, 06 décembre 2022, 20/01094


Copies exécutoires REPUBLIQUE FRANCAISE

délivrées le : AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS







COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 11



ARRET DU 06 DECEMBRE 2022



(n° , 6 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 20/01094 - N° Portalis 35L7-V-B7E-CBM76



Décision déférée à la Cour : Jugement du 24 Janvier 2020 -Conseil de Prud'hommes - Formation de départage de PARIS - RG n° 17/04547



APPELANTE



SAS BAR BRASSERIE DES TROIS QUARTIERS

[Adr

esse 1]

[Adresse 1]

Représentée par Me François-Marie IORIO, avocat au barreau de PARIS, toque : D0649



INTIME



Monsieur [F] [B]

[Adresse 2]

[Adresse 2]

Représenté par M...

Copies exécutoires REPUBLIQUE FRANCAISE

délivrées le : AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 11

ARRET DU 06 DECEMBRE 2022

(n° , 6 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 20/01094 - N° Portalis 35L7-V-B7E-CBM76

Décision déférée à la Cour : Jugement du 24 Janvier 2020 -Conseil de Prud'hommes - Formation de départage de PARIS - RG n° 17/04547

APPELANTE

SAS BAR BRASSERIE DES TROIS QUARTIERS

[Adresse 1]

[Adresse 1]

Représentée par Me François-Marie IORIO, avocat au barreau de PARIS, toque : D0649

INTIME

Monsieur [F] [B]

[Adresse 2]

[Adresse 2]

Représenté par Me Emmanuelle GINTRAC, avocat au barreau de PARIS, toque : P0164

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 25 Octobre 2022, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Madame Isabelle LECOQ-CARON, Présidente de chambre, chargée du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, entendu en son rapport, composée de :

Madame Isabelle LECOQ-CARON, Présidente de chambre,

Madame Anne HARTMANN, Présidente de chambre,

Madame Catherine BRUNET, Présidente de chambre,

Greffier, lors des débats : Madame Manon FONDRIESCHI

ARRET :

- contradictoire

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Madame Isabelle LECOQ-CARON Présidente de chambre, et par Madame Manon FONDRIESCHI, Greffière présente lors du prononcé.

EXPOSE DU LITIGE

M. [F] [B], né en 1965, a été engagé par la SAS Bar Brasserie Des Trois Quartiers, par un contrat de travail à durée indéterminée à compter du 12 février 2013 en qualité de responsable en application de la convention collective nationale de hôtels, cafés restaurants.

Mme [K] ayant cédé ses parts dans la société, celle-ci a changé de direction à compter du 1er avril 2017.

Sollicitant des rappels de salaires pour heures supplémentaires outre différentes indemnités, M. [B] a saisi le 14 juin 2017 le conseil de prud'hommes de Paris qui, en sa formation de départage, par jugement du 24 janvier 2020 auquel la cour se réfère pour l'exposé de la procédure antérieure et des prétentions initiales des parties, a statué comme suit :

- condamne la société Bar brasserie des trois quartiers à payer à M. [B] les sommes suivantes:

* à titre de rappel d'heures supplémentaires : 70.000 euros,

* au titre des congés payés afférents : 7.000 euros,

* à titre d'indemnité compensatrice de contrepartie obligatoire en repos pour heures supplémentaires accomplies au-delà du contingent annuel : 10.651,45 euros,

* au titre des congés payés afférents : 1.065,14 euros,

* au titre de l'article 700 du code de procédure civile : 2.000 euros,

- rappelle que les condamnations de nature contractuelle et/ou conventionnelle produisent des intérêts à compter de la réception par l'employeur de la convocation devant le bureau de conciliation et celles de nature indemnitaire à compter de la présente décision,

- ordonne la capitalisation des intérêts selon les modalités de l'article 1154 devenu 134-2 du code civil,

- ordonne la remise à M. [B] de bulletins de paie rectifiés conformément à la présente décision,

- ordonne l'exécution provisoire de la présente décision,

- déboute M. [B] du surplus de ses demandes,

- condamne la société Bar brasserie des trois quartiers aux entiers dépens de l'instance.

Par déclaration du 5 février 2020, la société Bar Brasserie Des Trois Quartiers a interjeté appel de cette décision, notifiée le 24 janvier 2020.

Dans ses dernières conclusions adressées au greffe par le réseau privé virtuel des avocats le 24 août 2020, la société SAS Bar Brasserie Des Trois Quartiers demande à la cour de :

- dire et juger qu'il échet de recevoir la société Bar Brasserie des trois quartiers en son appel et l'y déclarer bien fondée,

- dire et juger qu'il échet d'infirmer le jugement entrepris et de débouter M. [F] [B] de l'intégralité de ses demandes,

- dire et juger qu'il convient de le condamner au versement d'une somme de 10.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Dans ses dernières conclusions adressées au greffe par le réseau privé virtuel des avocats le 2 juin 2020, M. [B] demande à la cour de':

- déclarer M. [B] recevable et bien fondé en ses présentes écritures,

y faisant droit,

- constater que les horaires effectués par M. [B] du 1er juin 2014 au 22 février 2017 ont été les suivants :

- lors des périodes où il était d'ouverture, du mardi au vendredi de 6h30 à 12h et de 12h30 à 17h30 ainsi que le samedi de 12h à 15h30 et de 16h à 00h, soit 10h30 à 11h30 de travail par jour et 53h30 de travail par semaine,

- lors des périodes où il était de fermeture, du lundi au vendredi de 12h à 15h30 et de 16h à 00h, soit 11h30 de travail par jour et 57h30 de travail par semaine,

- constater que M. [B] a effectué, sur la période courant du 1 er juin 2014 au 22 février 2017, 2.163 heures supplémentaires non décomptées et non payées,

- constater que la société Bar brasserie des trois quartiers a privé M. [B] de 496 heures au titre de la contrepartie obligatoire en repos pour la période courant du 1 er juin 2014 au 22 février 2017,

- constater que la société Bar brasserie des trois quartiers a manqué à ses obligations notamment d'exécution de bonne foi du contrat de travail,

en conséquence,

- confirmer le jugement prononcé le 24 janvier 2020 par le conseil de prud'hommes de Paris en ce qu'il a condamné la société Bar brasserie des trois quartiers à verser à Monsieur [B] des sommes à titre de rappel d'heures supplémentaires, à titre d'indemnité compensatrice de contrepartie obligatoire en repos pour heures supplémentaires accomplies au-delà du contingent annuel, au titre des congés payés afférents à ces sommes, ainsi qu'au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, en ce qu'il a rappelé que les condamnations prononcées produiront intérêts au taux légal et ordonné la capitalisation des intérêts,

- infirmer le jugement prononcé le 24 janvier 2020 par le conseil de prud'hommes de Paris pour le surplus,

le réformant,

- condamner la société Bar brasserie des trois quartiers à verser à M. [B] les sommes suivantes:

* 79.815,30 € au titre du paiement des heures supplémentaires effectivement réalisées mais non encore décomptées et indemnisées,

* 7.981,53 € au titre de l'indemnité compensatrice des congés payés afférents,

* 12.144,99 € au titre de la privation de la contrepartie obligatoire en repos,

*1.214,50 € au titre de l'indemnité compensatrice des congés payés afférents,

* 11.000,00 € à titre de dommages et intérêts pour inexécution fautive par l'employeur de ses obligations,

- condamner la société Bar brasserie des trois quartiers à verser M. [B] la somme de 4.000 € en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

- la condamner aux entiers dépens.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 24 novembre 2021 et l'affaire a été fixée à l'audience du 25 octobre 2022.

Pour un plus ample exposé des faits, des prétentions et des moyens des parties, la cour se réfère à leurs conclusions écrites conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur les heures supplémentaires

Pour infirmation de la décision entreprise, la société Bar Brasserie Des Trois Quartiers soutient en substance qu'elle n'était ouverte que de 7h du matin à 23h ; que M. [B] travaillait soit de 7h à 14h30, soit de 12h à 19h30 ; que le service du soir et la fermeture de l'établissement étaient assurés par la directrice générale de la société, Mme [K], puis par M. [L] ; que s'il réalisait réellement les horaires qu'il mentionne, sans être rémunéré, il s'en serait plaint immédiatement, et n'aurait jamais signé un nouveau contrat de travail en 2013 après avoir démissionné.

M. [B] rétorque qu'il a bien réalisé des heures supplémentaires non rémunérées durant la période du 1er juin 2014 au 22 février 2017, à hauteur de 545 heures de juin à décembre 2014, de 744 heures en 2015, de 783 heures en 2016 et de 147 heures de janvier à février 2017 ; que lorsqu'il était d'ouverture, il travaillait du mardi au vendredi de 06h30 à 12h puis de 12h30 à 17h30, ainsi que le samedi de 12h à 15h30 et de 16h à 00h, soit 10h30 à 11h30 de travail par jour et 53h30 de travail par semaine ; que lors des périodes où il était de fermeture, du lundi au vendredi de 12h à 15h30 et de 16h à 00h, soit 11h30 de travail par jour et 57h30 de travail par semaine, alternativement par cycles de 4 semaines consécutives, tout en étant rémunéré sur la base des 35 heures contractuellement prévues.

L'article L.3121-27 du code du travail dispose que la durée légale de travail effectif des salariés à temps complet est fixée à 35 heures par semaine.

L'article L.3121-28 du même code précise que toute heure accomplie au delà de la durée légale hebdomadaire ou de la durée considérée comme équivalente est une heure supplémentaire qui ouvre droit à une majoration salariale ou, le cas échéant, à un repos compensateur équivalent.

En application de l'article L.3171-4 du code du travail, en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail accomplies, il appartient au salarié de présenter, à l'appui de sa demande, des éléments suffisamment précis quant aux heures non rémunérées qu'il prétend avoir accomplies afin de permettre à l'employeur, qui assure le contrôle des heures de travail effectuées, d'y répondre utilement en produisant ses propres éléments. Le juge forme sa conviction en tenant compte de l'ensemble de ces éléments au regard des exigences rappelées aux dispositions légales précitées. Après analyse des pièces produites par l'une et l'autre des parties, dans l'hypothèse où il retient l'existence d'heures supplémentaires, il évalue souverainement, sans être tenu de préciser le détail de son calcul, l'importance de celles-ci et fixe les créances salariales s'y rapportant.

En l'espèce, à l'appui de sa demande, M. [B] présente les éléments suivants :

- un tableau récapitulatif hebdomadaire des heures supplémentaires réalisées et non rémunérées;

- de nombreuses attestations de collègues, de clients, de voisins ou salariés de commerces voisins relatives aux heures d'ouverture de la société et à la présence de M. [B] ;

- les menus mentionnant les heures d'ouverture de l'établissement avec mention d'un service continu de 6H30 à 23H30 ;

- des extraits d'agenda ;

- des extraits du cahier des consignes ;

- des tickets de carte bleue ;

- l'avenant n°2 du 5 février 2007 relatif à l'aménagement du temps de travail ;

- le courrier de l'inspection du travail du 27 mars 2017 indiquant qu'un contrôle de l'établissement Bar Brasserie Des Trois Quartiers avait été réalisé et qu'il a été constaté 'qu'aucun document de décompte de la durée du travail n'était établi par l'employeur conformément à l'annexe 3 de l'avenant n°2 du 5 février 2007 relatif à l'aménagement du temps de travail de la convention collective nationale des hôtels, cafés, restaurants et à l'article L. 3171-2 du code du travail'.

M. [B] présente ainsi des éléments suffisamment précis quant aux heures non rémunérées qu'il dit avoir réalisées, permettant ainsi à la société Bar brasserie des trois quartiers qui assure le contrôle des heures effectuées d'y répondre utilement.

A cet effet, la société fait valoir que les tableaux produits par le salarié sont erronés en ce qu'il prétend avoir travaillé certains jours alors qu'en réalité il était en congé ou que l'établissement était fermé, ou à l'inverse il dit n'avoir pas travaillé alors que justement il a bien travaillé ; que les menus versés aux débats par le salarié sont très anciens et obsolètes; que les attestations sont de complaisance, rédigées sur le même modèle, impersonnelles et non circonstanciées ; qu'il est faux de prétendre que M. [B] travaillait jusqu'à minuit ; que Mme [K] assurait la direction de la salle à partir de 19H30 et était accompagnée d'un serveur et d'un commis de cuisine.

Sur ce, la cour retient à l'instar des premiers juges, qu'en application de l'article 5 de l'avenant n°2 du 5 février 2007 relatif à l'aménagement du temps de travail de la convention collective nationale des hôtels. cafés, restaurants, le chef d'entreprise enregistre obligatoirement sur un registre ou tout autre document l'horaire nominatif et individuel de chaque salarié ainsi que les périodes de travail qu'il a réellement effectuées pour chacun des jours où il n'est pas fait une stricte application de celui-ci ; que ce document est émargé par le salarié au moins 1 fois par semaine et tenu à la disposition de l'inspecteur du travail ; que le salarié est tenu régulièrement informé de ses droits acquis en matière de repos compensateur sur son bulletin de paie ou sur une fiche annexée qui indique pour le mois considéré le nombre d'heures supplémentaires effectuées, le nombre d'heures de repos compensateur auxquelles elles ouvrent droit en application de l'article L. 212-5 du code du travail et le nombre d'heures de repos attribuées dans le cadre de ce dispositif.

En l'espèce, la société Bar Brasserie Des Trois Quartiers ne fait valoir en cause d'appel aucun élément de fait ou de droit de nature à remettre en cause la décision rendue par les premiers juges au terme d'une analyse approfondie des faits et d'une exacte application du droit par des motifs pertinents que la cour adopte.

En effet, alors que M. [B] verse aux débats des éléments circonstanciés sur les heures supplémentaires réalisées et non rémunérées, son employeur, qui est défaillant dans la production d'un document portant enregistrement de l'horaire nominatif et individuel de son salarié et des périodes de travail réellement effectuées chaque jour, produit des photographies sans valeur probante, une multitude de tickets d'enregistrement de paiement qui ne permettent pas de déterminer les horaires de travail de M. [B], des cartes et menus illisibles sans pour autant établir que celles versées par le salarié sont obsolètes, des bons de livraison également sans valeur probante au regard des heures réalisées par le salarié et l'attestation de M. [H] mais qui n'a été embauché qu'à compter du 22 février 2017.

En conséquence, eu égard aux éléments présentés par le salarié et des critiques de l'employeur notamment au regard des quelques incohérences relevées sur son emploi du temps, la cour a la conviction que M. [B] a exécuté des heures supplémentaires qui n'ont pas été rémunérées mais après analyse des pièces produites, dans des proportions moindres que ce qui est réclamé et justement appréciées par les premiers juges. La décision déférée sera confirmée de ce chef.

Eu égard aux heures supplémentaires retenues et au dépassement du contingent annuel conventionnel de 360 heures, c'est à juste titre que les premiers juges ont condamné l'employeur à verser au salarié la somme de 10.651,41 euros au titre de la contrepartie obligatoire en repos compensateur majorée des congés payés afférents.

Sur la demande de dommages-intérêts

Pour infirmation de la décision critiquée sur ce point, M. [B] fait valoir que son employeur n'a pas respecté les obligations qui lui incombent au titre de l'enregistrement des horaires et l'information des droits acquis en matière de repos compensateur ; qu'il est donc bien fondé à solliciter réparation du préjudice causé par ces manquements.

La société réplique que le salarié ne démontre aucun préjudice spécifique.

En l'espèce, M. [B] ne justifie pas des éléments de son préjudice ni de son quantum. En conséquence, c'est à juste titre que les premiers juges l'ont débouté de la demande à ce titre.

Sur les frais irrépétibles

La société Bar Brasserie Des Trois Quartiers sera condamnée aux entiers dépens et devra verser à M. [B] la somme de 2.500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La Cour, statuant publiquement, par arrêt contradictoire et mis à disposition au greffe,

CONFIRME le jugement ;

Y ajoutant,

CONDAMNE la SAS Bar Brasserie Des Trois Quartiers aux entiers dépens ;

CONDAMNE la SAS Bar Brasserie Des Trois Quartiers à verser à M. [F] [B] 2.500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.

La greffière, La présidente.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 6 - chambre 11
Numéro d'arrêt : 20/01094
Date de la décision : 06/12/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-12-06;20.01094 ?
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