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06/12/2022 | FRANCE | N°19/08108

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 6 - chambre 11, 06 décembre 2022, 19/08108


Copies exécutoires REPUBLIQUE FRANCAISE

délivrées le : AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS







COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 11



ARRET DU 06 DECEMBRE 2022



(n° , 6 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 19/08108 - N° Portalis 35L7-V-B7D-CAL2K



Décision déférée à la Cour : Jugement du 20 Juin 2019 -Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de MELUN - RG n° 18/00405



APPELANT



Monsieur [W] [C]

[Adresse 4]

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Représenté par Me Cyrielle GENTY, avocat au barreau d'ESSONNE



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La SELARL ARCHIBALD prise en la personne de Me [Y] [M] ès-qualités de mandataire liquidateur de la SARL NAT...

Copies exécutoires REPUBLIQUE FRANCAISE

délivrées le : AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 11

ARRET DU 06 DECEMBRE 2022

(n° , 6 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 19/08108 - N° Portalis 35L7-V-B7D-CAL2K

Décision déférée à la Cour : Jugement du 20 Juin 2019 -Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de MELUN - RG n° 18/00405

APPELANT

Monsieur [W] [C]

[Adresse 4]

[Localité 5]

Représenté par Me Cyrielle GENTY, avocat au barreau d'ESSONNE

INTIMEE

La SELARL ARCHIBALD prise en la personne de Me [Y] [M] ès-qualités de mandataire liquidateur de la SARL NATIONALE LES COMPAGNONS DU DESENFUMAGE (SNCD)

[Adresse 1]

[Localité 3]

Représentée par Me Jean-Claude CHEVILLER, avocat au barreau de PARIS, toque : D0945

PARTIE INTERVENANTE FORCEE

L'UNEDIC DELEGATION AGS CGEA CHALON SUR SAONE

[Adresse 2]

[Localité 6]

Représentée par Me Hélène NEGRO-DUVAL, avocat au barreau de PARIS, toque : L0197

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 25 Octobre 2022, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Madame Isabelle LECOQ-CARON, Présidente de chambre, chargée du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, entendu en son rapport, composée de :

Madame Isabelle LECOQ-CARON, Présidente de chambre,

Madame Anne HARTMANN, Présidente de chambre,

Madame Catherine BRUNET, Présidente de chambre,

Greffier, lors des débats : Madame Manon FONDRIESCHI

ARRET :

- contradictoire

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Madame Isabelle LECOQ-CARON Présidente de chambre, et par Madame Manon FONDRIESCHI, Greffière présente lors du prononcé.

EXPOSE DU LITIGE

M. [W] [C], né en 1979, a été engagé par la SARL société nationale des compagnons du désenfumage (SNCD), par un contrat de travail à durée indéterminée à compter du 14 février 2006 en qualité de poseur en application de la convention collective nationale des ouvriers du bâtiment.

M. [C] a été placé en arrêt de travail pour maladie du 8 novembre 2017 au 14 janvier 2018.

A l'issue de deux visites médicales les 15 et 29 janvier 2018, M. [C] a été déclaré inapte à son poste précisant qu'un reclassement était à « étudier pour éviter le port de charges supérieures à 15 kg de façon répétitive ».

Par lettre datée du 6 février 2018, M. [C] a été convoqué à un entretien préalable fixé au 15 février 2018 avant d'être licencié pour inaptitude avec impossibilité de reclassement par lettre datée du 19 février 2018.

A la date du licenciement, M. [C] avait une ancienneté de 12 ans et la SNCD occupait à titre habituel plus de onze salariés.

Contestant la légitimité de son licenciement et réclamant diverses indemnités, M. [C] a saisi le 06 juillet 2018 le conseil de prud'hommes de Melun qui, par jugement du 20 juin 2019, auquel la cour se réfère pour l'exposé de la procédure antérieure et des prétentions initiales des parties, a statué comme suit :

- déboute M. [C] de l'intégralité de ses demandes,

- déboute la SNCD de sa demande reconventionnelle,

- condamne M. [C] aux dépens.

Par déclaration du 16 juillet 2019, M. [C] a interjeté appel de cette décision, notifiée par lettre du greffe adressée aux parties le 26 juin 2019.

Par un jugement du 7 juin 2021, le tribunal de commerce de Melun a prononcé la liquidation judiciaire de la société nationale les compagnons du désenfumage et a désigné la Selarl Archibald en qualité de liquidateur.

Dans ses dernières conclusions adressées au greffe par le réseau privé virtuel des avocats le 14 juin 2022, M. [C] demande à la cour de :

- infirmer le jugement rendu par le conseil de prud'hommes de Melun, en ce qu'il a débouté M. [C] de l'intégralité de ses demandes,

et statuant à nouveau :

A titre principal,

- dire et juger que le licenciement de M. [C] est dépourvu de cause réelle et sérieuse,

- en conséquence, condamner et fixer au passif de la liquidation judiciaire de la société SNCD, les créances suivantes, au profit de M. [C] :

* 36.766,92 € au titre de dommages et intérêts,

* 6.127,82 € au titre de l'indemnité compensatrice de préavis,

* 612,78 € au titre des congés payés afférents,

A titre subsidiaire,

- dire et juger que le licenciement de M. [C] est nul,

- et en conséquence, condamner et fixer au passif de la liquidation judiciaire de la société SNCD la somme de 36.766,92 € au titre des dommages et intérêts,

en tout état de cause,

- dire que l'AGS-CGEA de [Localité 6] sera tenue de garantir cette créance dans les limites du plafond légal à défaut pour la société SNCD de pouvoir y faire droit,

- déclarer le jugement à intervenir opposable à l'AGS-CGEA de [Localité 6],

- condamner et fixer au passif de la liquidation judiciaire de la société SNCD au profit de M. [C], la somme de 5.000 € au titre du préjudice subi pour la remise tardive des documents de fin de contrat,

- condamner la société SNCD au paiement de la somme de 3.500 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- ordonner à la SELARL Archibald, prise en la personne de Mme [M], es qualités de mandataire liquidateur, la remise d'un certificat de travail, d'un bulletin de salaire rectificatif, et d'une attestation Pôle emploi, conformes au jugement à intervenir.

Dans ses dernières conclusions adressées au greffe par le réseau privé virtuel des avocats le 21 juillet 2022, l'UNEDIC délégation AGS CGEA de [Localité 6] demande à la cour de':

- confirmer le jugement dont appel,

- donner acte à la concluante des conditions d'intervention de l'AGS dans le cadre des dispositions du code de commerce rappelées ci-dessus, et des conditions, limites et plafonds de la garantie de l'AGS prévus notamment par les articles L.3253-6 à L.3253-17, L.3253-19 à L.3253-20 du code du travail,

- rejeter toute demande contraire dirigée à l'encontre de l'AGS,

- dire en tout état de cause que la décision à intervenir de fixation de créances ne sera opposable à l'AGS que dans les conditions, limites et plafond de sa garantie légale subsidiaire,

- dire que l'AGS ne devra procéder à l'avance des créances visées aux articles L.3253-8 et suivants du Code du travail que dans les termes et conditions résultant de ces dispositions, limitées au plafond de garantie applicable, en vertu des articles L.3253-17 et D.3253-5 du code du travail, et payable sur présentation d'un relevé de créances par le mandataire judiciaire, et sur justification par ce dernier de l'absence de fonds disponibles entre ses mains pour procéder à leur paiement en vertu de l'article L.3253-20 du code du travail.

Dans ses dernières conclusions adressées au greffe par le réseau privé virtuel des avocats le 31 mai 2022, la société nationale des compagnons du désenfumage demande à la cour de:

- Dire et juger que le licenciement de M. [W] [C] est fondé sur une cause réelle et sérieuse ;

En conséquence, le débouter de toutes ses demandes, fins et conclusions ;

- Le condamner à payer à la S.E.L.A.R.L ARCHIBALD, es-qualités de mandataire liquidateur

de la société nationale des compagnons du désenfumage la somme de 1 200 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

- Le condamner en tous les dépens.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 5 octobre 2022 et l'affaire a été fixée à l'audience du 25 octobre 2022.

Pour un plus ample exposé des faits, des prétentions et des moyens des parties, la cour se réfère à leurs conclusions écrites conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur le licenciement

Pour infirmation de la décision entreprise, M. [C] soutient à titre principal que son employeur a manqué à son obligation de reclassement en ce qu'il pouvait reprendre son poste de responsable maintenance et qu'à tout le moins un aménagement était possible ; qu'aucune élection des délégués du personnel n'a été organisée malgré un effectif supérieur à 11 salariés. A titre subsidiaire, il fait valoir qu'à l'issue d'une première visite médicale, le médecin du travail a déclaré le salarié apte avec réserves, pour l'exercice des fonctions de responsable maintenance ; que la société a refait passer une visite médicale au salarié en faisant mention d'un poste qui n'était pas le sien, dans l'unique but de le voir déclarer inapte, alors même qu'il était en réalité apte à l'exercice des fonctions de responsable maintenance, qui étaient les siennes depuis 7 ans. Ce procédé rend le licenciement nul, et ouvre droit pour le salarié à des dommages et intérêts.

Le mandataire liquidateur de la société SNCD réplique que M. [C] n'a jamais été responsable de maintenance ; qu'eu égard à ses problèmes de dos, il n'a pas pu être reclassé comme poseur ou chef poseur ; que des élections des délégués du personnel ont été organisées et un procès verbal de carence établi à défaut de candidat.

L'AGS se rapporte aux conclusions du mandataire judiciaire de la société SNCD.

L'article L.1226-2 du code du travail dispose que lorsque, à l'issue des périodes de suspension du contrat de travail consécutives à une maladie ou un accident non professionnel, le salarié est déclaré inapte par le médecin du travail à reprendre l'emploi qu'il occupait précédemment, l'employeur lui propose un autre emploi approprié à ses capacités. Cette proposition prend en compte, après avis du comité social et économique lorsqu'il existe, les conclusions écrites du médecin du travail et les indications qu'il formule sur les capacités du salarié à exercer l'une des tâches existantes dans l'entreprise. Le médecin du travail formule également des indications sur la capacité du salarié à bénéficier d'une formation le préparant à occuper un poste adapté.

L'emploi proposé est aussi comparable que possible à l'emploi précédemment occupé, au besoin par la mise en oeuvre de mesures telles que mutations, aménagements, adaptations ou transformations de postes existants ou aménagement du temps de travail.

En l'espèce, le contrat de travail précise que M. [C] a été engagé en qualité de poseur et les derniers bulletins de salaire produits aux débats font état de la qualité de chef poseur. La société reconnaît cependant que depuis 2011 et jusqu'en 2017, il a été confié à M. [C] des travaux de maintenance des installations de désenfumage.

Lors de la visite de reprise du 15 janvier 2018, le médecin du travail a indiqué que le poste de travail de M. [C] était 'responsable maintenance', et a déclaré que son état de santé était 'compatible avec la reprise du travail sur un poste aménagé pour éviter le port de charges sup à 15kg de façon répétitive et les postures contraignantes de la colonne vertébrale (rotations et/ou flexions forcées du troc)'.

A l'issue de la seconde visite médicale du 29 janvier 2018, l'avis d'inaptitude précise que le poste occupé était chef poseur, qu'une étude de poste a été réalisée le 25 janvier 2018 et que M. [C] était inapte au poste de chef poseur en mentionnant 'reclassement à étudier pour éviter le port de charges sup à 15 kg de façon répétitive et les postures contraignantes de la colonne vertébrale (rotations et/ou flexions forcées du tronc'. Ces préconisations du médecin du travail ont été faites pour un reclassement d'un salarié chef poseur et après étude de ce poste et non en considération du poste occupé réellement par M. [C] de façon habituelle depuis 2011 au sein du département de maintenance des installations de désenfumage.

Dès lors la société SNCD ne saurait prétendre qu'elle a recherché loyalement un emploi aussi proche que possible de celui occupé par son salarié et selon les préconisations du médecin du travail qui ne s'est prononcé qu'au vu du poste de chef poseur et non au regard du poste réellement occupé.

En conséquence, et par infirmation de la décision entreprise, la cour retient que le licenciement de M. [C] est dépourvu de cause réelle et sérieuse, mais non nul.

Sur les conséquences financières

M. [C] est en droit de percevoir l'indemnité compensatrice de préavis correspondant aux salaires qu'il aurait perçus s'il avait exécuté le préavis, soit la somme de 6.127,82 euros majorée de 612,78 euros de congés payés afférents qu'il conviendra de fixer au passif de la liquidation judiciaire de la société SNCD.

En application de l'article L.1235-3 du code du travail dans sa version issue de l'ordonnance n°2017-1387 du 22 septembre 2017, si le licenciement d'un salarié survient pour une cause qui n'est pas réelle et sérieuse, le juge peut proposer la réintégration du salarié dans l'entreprise, avec maintien de ses avantages acquis. Si l'une ou l'autre des parties refuse cette réintégration, le juge octroie au salarié une indemnité à la charge de l'employeur, dont le montant, eu égard à l'ancienneté du salarié, est compris entre 3 mois et 11mois de salaire.

Au jour du licenciement, M. [C], âgé de 39 ans, bénéficiait d'une ancienneté de 12 ans et justifie avoir perçu des indemnités de chômage de décembre 2018 à janvier 2019.

En conséquence, au vu des bulletins de salaire produits, il convient de fixer à la liquidation judiciaire de la SNCD la somme de 30.000 euros d'indemnité au titre du licenciement sans cause réelle et sérieuse.

Sur les indemnités de chômage

En application de l'article L.1235-4 du code du travail, dans les cas prévus aux articles L.1235-3 et L.1235-11, le juge ordonne le remboursement par l'employeur fautif aux organismes intéressés de tout ou partie des indemnités de chômage versées au salarié licencié, du jour de son licenciement au jour du jugement prononcé, dans la limite de six mois d'indemnités de chômage par salarié intéressé. Ce remboursement est ordonné d'office lorsque les organismes intéressés ne sont pas intervenus à l'instance ou n'ont pas fait connaître le montant des indemnités versées.

En l'espèce, il convient fixer au passif de la liquidation judiciaire de la société SNCD le remboursement des indemnités de chômage versées à M. [C] dans la limite de 6 mois.

Sur la remise des documents

Le mandataire liquidateur de la société SNCD devra remettre à M. [C] un certificat de travail, un bulletin de salaire rectificatif et une attestation Pôle emploi conformes à la présente décision dans un délai de deux mois à compter de sa signification.

Sur les frais irrépétibles

Les entiers dépens seront supportés par la liquidation judiciaire de la société SNCD. Il n'y a pas lieu à indemnité en application de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La Cour, statuant publiquement, par arrêt contradictoire et mis à disposition au greffe,

INFIRME le jugement déféré,

Statuant à nouveau et y ajoutant,

JUGE que le licenciement de M. [W] [C] est sans cause réelle et sérieuse ;

FIXE au passif de la liquidation judiciaire de la SARL société nationale les compagnons du désenfumage les créances de M. [W] [C] ainsi :

- 6.127,82 euros d'indemnité compensatrice de préavis ;

- 612,78 euros de congés payés afférents ;

- 30.000 euros d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

RAPPELLE que l'ouverture de la procédure collective emporte arrêt du cours des intérêts;

ORDONNE à la Selarl Archibald en qualité de mandataire liquidateur de SARL société nationale les compagnons du désenfumage de remettre à M. [W] [C] un certificat de travail, un bulletin de salaire rectificatif et une attestation Pôle emploi conformes à la présente décision dans un délai de deux mois à compter de sa signification ;

FIXE au passif de la liquidation judiciaire de la SARL société nationale les compagnons du désenfumage le remboursement à Pôle Emploi des indemnités de chômages versées à M. [W] [C] à hauteur de 6 mois ;

DÉCLARE le présent arrêt opposable à l'UNEDIC délégation AGS CGEA de [Localité 6] dont la garantie s'exercera dans les limites légales et réglementaires en l'absence de fonds disponibles en application des articles L.3253-8 et suivants du code du travail ;

FIXE au passif de la liquidation judiciaire de la SARL société nationale les compagnons du désenfumage les entiers dépens ;

DIT n'y avoir lieu à indemnité en application de l'article 700 du code de procédure civile.

La greffière, La présidente.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 6 - chambre 11
Numéro d'arrêt : 19/08108
Date de la décision : 06/12/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-12-06;19.08108 ?
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