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25/11/2022 | FRANCE | N°17/12014

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 6 - chambre 12, 25 novembre 2022, 17/12014


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS







COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 12



ARRÊT DU 25 Novembre 2022



(n° , 8 pages)





Numéro d'inscription au répertoire général : S N° RG 17/12014 - N° Portalis 35L7-V-B7B-B4FJ2



Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 18 Mai 2017 par le Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale de Créteil Val de Marne RG n° 16-00985CR



APPELANTE

SAS [5]

[Adresse 1]

[Adresse 1]

représe

ntée par Me Françoise VERGNE-BEAUFILS, avocat au barreau de PARIS, toque : R147



INTIMEE

URSSAF [Localité 4]

[Adresse 3]

[Adresse 3]

représentée par Mme [N] [V] en vertu d'un pouvoir généra...

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 12

ARRÊT DU 25 Novembre 2022

(n° , 8 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : S N° RG 17/12014 - N° Portalis 35L7-V-B7B-B4FJ2

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 18 Mai 2017 par le Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale de Créteil Val de Marne RG n° 16-00985CR

APPELANTE

SAS [5]

[Adresse 1]

[Adresse 1]

représentée par Me Françoise VERGNE-BEAUFILS, avocat au barreau de PARIS, toque : R147

INTIMEE

URSSAF [Localité 4]

[Adresse 3]

[Adresse 3]

représentée par Mme [N] [V] en vertu d'un pouvoir général

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 21 Octobre 2022, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Mme Sophie BRINET, Présidente de chambre, chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Mme Sophie BRINET, Présidente de chambre

M. Raoul CARBONARO, Président de chambre

M. Gilles REVELLES, Conseiller

Greffier : Mme Claire BECCAVIN, lors des débats

ARRET :

- CONTRADICTOIRE

- prononcé

par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

-signé par Mme Sophie BRINET, Présidente de chambre et par Mme Claire BECCAVIN, greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

La cour statue sur l'appel interjeté par la société [5] d'un jugement rendu le 18 mai 2017 par le tribunal des affaires de sécurité sociale de Créteil dans un litige l'opposant à l'Urssaf de la Région [Localité 7].

FAITS, PROCEDURE, PRETENTIONS ET MOYENS DES PARTIES

Dans le cadre d'opérations de contrôle aux fins de recherches d'infractions de travail dissimulé, prévues à l'article L.8221-1 du code du travail, les services de police, accompagnés d'inspecteurs de l'Urssaf ont procédé à un contrôle le 17 juin 2015 sur un chantier sis à [Adresse 6]. Ils ont constaté la présence de deux salariés en action de travail, qui n'avaient pas fait l'objet de déclaration d'embauche de la part de leur employeur, la société [2] (la société sous-traitante), laquelle était sous-traitante de la société [5] (le donneur d'ordres), suivant un contrat du 4 juin 2015 devant s'exécuter du 17 juin au 3 juillet 2015, pour la somme forfaitaire de 5 753, 65 euros. Destinataire du procès-verbal de constat d'infraction, l'Urssaf a mis en oeuvre un contrôle d'assiette et de vérification de l'application des législations de sécurité sociale, d'assurance chômage et de garantie des salaires à l'encontre de la société sous-traitante et lui a notifié le 5 août 2015 un redressement de 467 565 euros s'agissant du chef de « travail dissimulé : minoration des heures de travail- taxation forfaitaire ».

L'organisme de sécurité sociale a adressé le 23 octobre 2015 à la société [5] en qualité de donneur d'ordres une lettre d'observation lui notifiant un redressement d'un montant de 210 113 euros au titre de la solidarité financière. Par lettre d'observations 6 novembre 2015, il lui a été également notifié un redressement d'un montant de 35 621 euros correspondant à la remise en cause des exonérations Fillon au titre de la période du 4 décembre 2012 au 19 juin 2015.

La société sous-traitante ayant formé des observations au cours de la période contradictoire, les inspecteurs de l'Urssaf ont maintenu leurs observations et la société a saisi la commission de recours amiable. Cette instance ayant rejeté son recours, elle a saisi le tribunal des affaires de sécurité sociale de Créteil, qui par jugement du 18 mai 2017 a :

- ordonné la jonction des recours n°16-00985/CR et 16-00988/CR

- dit qu'en qualité de donneur d'ordre auprès de la société [2], la société [5] n'a pas satisfait à ses obligations de vérification auprès de son sous-traitant, - dit que c'est à bon droit que la solidarité financière de la société [5] a été mise en oeuvre en application L.8222-2 du code du travail,

- maintenu le montant des cotisations et majorations calculé pour 210 113 euros des prestations confiées à la société [2],

- maintenu le montant de 35 621 euros, suite à l'annulation des réductions « Fillon »,

- déclaré recevable la demande en paiement de l'Urssaf,

- condamné la société [5] à payer à l'Urssaf les sommes suivantes :

- 210 113 euros représentant les cotisations dues pour la période du 4 décembre 2012 au 19 juin 2015,

- 38 504 euros représentant l'annulation des « réductions Fillon » pour 35 621 euros en cotisations pour la période du 1er janvier 2014 au 19 juin 2015 et les majorations de retard pour 2 983 euros,

- débouté la société [5] de ses demandes,

- dit que tout appel de la présente décision doit être, à peine de forclusion, interjeté dans le mois de la réception de la notification.

La société [5] a interjeté appel de ce jugement dont la date de notification n'apparaît pas dans le dossier de la Cour.

Par conclusions écrites soutenues oralement à l'audience par son conseil, la société [5] demande à la cour de :

- la déclarer recevable en son action et en son appel,

- infirmer le jugement en toutes ses dispositions,

Statuant à nouveau,

- à titre principal,

- prononcer la nullité des lettres d'observation et des actes subséquents, dont les mises en demeure des 29 février et 4 mars 2016,

- à titre subsidiaire,

- constater que les conditions de la mise en oeuvre de la solidarité financière de la société [5] ne sont pas réunies,

En conséquence,

- infirmer le jugement et annuler les mises en demeure des 29 fév4 mars 2016,

A titre infiniment subsidiaire,

- juger que la solidarité financière ne peut être mise en oeuvre uniquement dans le cadre du contrat de sous-traitance conclu le 4 juin 2015 et afférent au chantier sis à [Adresse 6],

- juger que l'assiette sur laquelle doivent être calculées les cotisations et contributions sociales exigibles dans le cadre de la solidarité financière doit être fixée à la somme de 17 489,04 euros, correspondant à la rémunération des deux salariés travaillant sur le chantier ayant fait l'objet du contrôle,

En tout état de cause,

- condamner l'Urssaf à verser à la société [5] la somme de 5 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Par conclusions écrites soutenues oralement à l'audience par son représentant, l'Urssaf demande à la cour de :

- déclarer la société [5] recevable en son appel mais la dire mal fondée,

- l'en débouter,

- confirmer le jugement déféré,

En tout état de cause,

- débouter la société [5] en ses plus amples demandes, fins et conclusions,

- condamner la société [5] au paiement de la somme de 3 000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

En application de l'article 455 du code de procédure civile, il est renvoyé aux conclusions des parties déposées pour un plus ample exposé des moyens développés et soutenus à l'audience.

SUR CE, LA COUR

1. Sur la mise en oeuvre de la solidarité financière

La société sous-traitante soutient au visa de l'article R. 243-59 et de l'article R. 133-8-1 du code de la sécurité sociale que les lettres d'observations du 23 octobre 2015 et du 6 novembre 2015 devaient mentionner les références du procès-verbal d'infraction dressé à l'encontre de la sous-traitante et en retranscrire l'abstract.

L'intimée rétorque que l'indication des ces informations dans la lettre d'observations ne découle ni des dispositions du code de la sécurité sociale, ni de l'interprétation constante qu'en font les juridictions, que les lettres d'observations litigieuses sont conformes aux exigences légales et que ce moyen est mal fondé.

La sollicitation des articles R. 243-59 et R.133-8-1 du code de la sécurité sociale démontrent une confusion s'agissant de la mise en oeuvre de la solidarité financière.

L'article R.133-8-1 du code de la sécurité sociale dispose :

« Lorsqu'il ne résulte pas d'un contrôle effectué en application de l'article L. 243-7 du présent code ou de l'article L. 724-7 du code rural et de la pêche maritime, tout redressement consécutif à la mise en 'uvre des dispositions de l'article L. 133-4-5 est porté à la connaissance du donneur d'ordre ou du maître d'ouvrage par un document signé par le directeur de l'organisme de recouvrement, transmis par tout moyen permettant de rapporter la preuve de sa date de réception.

Ce document rappelle les références du procès-verbal pour travail dissimulé établi à l'encontre du cocontractant, précise le manquement constaté, la période sur laquelle il porte et le montant de la sanction envisagé.

Ce document informe également la personne en cause qu'elle dispose d'un délai de trente

jours pour présenter ses observations par tout moyen permettant de rapporter la preuve de leur date de réception et qu'elle a la faculté de se faire assister par une personne ou un conseil de son choix. A l'expiration de ce délai et, en cas d'observations du donneur d'ordre ou du maître d'ouvrage, après lui avoir notifié le montant de la sanction, le directeur de l'organisme de recouvrement met en recouvrement les sommes dues selon les règles et sous les garanties et sanctions applicables au recouvrement des cotisations de sécurité sociale. »

Ce texte prévoit la mise en oeuvre de la solidarité financière au vu d'un procès-verbal de constat de travail dissimulé et son application est exclusif de l'application de l'article R. 243-59 de code du travail.

En effet, l'Urssaf a la possibilité de mettre en oeuvre un redressement à l'encontre de la société sous-traitante à la suite d'un contrôle d'assiette et de vérification de l'application des législations de sécurité sociale, d'assurance chômage et de garantie des salaires de la société sous-traitante après l'exploitation du procès-verbal d'infraction de travail dissimulé.

Au cas particulier, l'appelante ne conteste pas que cette procédure a effectivement été utilisée l'intimée et ce choix explique que le redressement dirigé à l'encontre de la société sous-traitante n'est pas été cantonné aux rémunérations des seuls salariés rencontrés lors de la visite du chantier sis à [Adresse 6]. Dès lors que l'organisme de sécurité sociale diligente un contrôle d'assiette, il doit appliquer les dispositions de l'article R. 243-59 du code de la sécurité sociale, s'agissant de la lettre d'informations. Or, il ressort de l'application de ce texte, pour ce qui concerne la mise en oeuvre de la solidarité d'un donneur d'ordre, que les mentions de la lettre d'observations et celles de la mise en demeure doivent permettre au redevable de connaître les causes, les périodes, les bases ainsi que le montant des redressements opérés et que la lettre d'observations doit, pour assurer le caractère contradictoire du contrôle et la garantie des droits de la défense à l'égard du donneur d'ordre dont la solidarité financière est recherchée, préciser année par année le montant des sommes dues. Il y a lieu de constater que contrairement à ce que soutient l'appelante, les lettres d'observations du 23 octobre 2015 et du 6 novembre 2015 contenaient toutes les informations utiles, notamment le montant année par année des sommes dues, à la compréhension par l'appelante des conditions du redressement au titre de la solidarité financière. Le moyen tiré du caractère incomplet des mentions des lettres d'observations est donc mal fondé.

2. Sur les conditions de la mise en oeuvre de la solidarité financière

L'appelante soutient qu'elle a rempli son obligation de vigilance, en exigeant régulièrement de la société sous-traitante la production d'attestations de vigilance, qu'elle a communiquées à l'Urssaf avant l'introduction de la procédure contentieuse.

L'Urssaf rétorque que l'obligation de vigilance n'est pas purement formelle et qu'il appartenait au donneur d'ordre de s'assurer de la compatibilité des attestations fournies par la société sous-traitante avec l'ampleur des tâches qu'il lui confiait.

Selon l'article L. 8222-1 du code du travail , 'toute personne vérifie lors de la conclusion d'un contrat dont l'objet porte sur une obligation d'un montant minimum en vue de l'exécution d'un travail, de la fourniture d'une prestation de services ou de l'accomplissement d'un acte de commerce, et périodiquement jusqu'à la fin de l'exécution du contrat, que son cocontractant s'acquitte :

1° des formalités mentionnées aux articles L. 8221-3 et L. 8221-5 ;

2° de l'une seulement des formalités mentionnées au 1°, dans le cas d'un contrat conclu par un particulier pour son usage personnel, celui de son conjoint, partenaire lié par un pacte civil de solidarité, concubin, de ses ascendants ou descendants.'

L'article D. 8222-5 du même code précise que la personne qui contracte, 'lorsqu'elle n'est pas un particulier répondant aux conditions fixées par l'article D. 8222-4, est considérée comme ayant procédé aux vérifications imposées par l'article L. 8222-1 si elle se fait remettre par son cocontractant, lors de la conclusion et tous les six mois jusqu'à la fin de son exécution :

1° Une attestation de fourniture des déclarations sociales et de paiement des cotisations et contributions de sécurité sociale prévue à l'article L. 243-15 émanant de l'organisme de protection sociale chargé du recouvrement des cotisations et des contributions datant de moins de six mois dont elle s'assure de l'authenticité auprès de l'organisme de recouvrement des cotisations de sécurité sociale.

2° Lorsque l'immatriculation du cocontractant au registre du commerce et des sociétés ou au répertoire des métiers est obligatoire ou lorsqu'il s'agit d'une profession réglementée, l'un des documents suivants :

a) Un extrait de l'inscription au registre du commerce et des sociétés (K ou K bis) ;

b) Une carte d'identification justifiant de l'inscription au répertoire des métiers ;

c) Un devis, un document publicitaire ou une correspondance professionnelle, à condition qu'y soient mentionnés le nom ou la dénomination sociale, l'adresse complète et le numéro d'immatriculation au registre du commerce et des sociétés ou au répertoire des métiers ou à une liste ou un tableau d'un ordre professionnel, ou la référence de l'agrément délivré par l'autorité compétente ;

d) Un récépissé du dépôt de déclaration auprès d'un centre de formalités des entreprises pour les personnes en cours d'inscription.'

S'il résulte de l'article D. 8222-5 du code du travail que le donneur d'ordre est considéré comme ayant procédé aux vérifications requises par l'article L. 8222-1 du même code lorsqu'il s'est fait remettre par son cocontractant les documents qu'il énumère, cette présomption ne joue pas en cas de discordance entre les déclarations mentionnées sur ces documents et le volume d'heures de travail nécessaire à l'exécution de la prestation.

Au cas particulier, l'Urssaf fait valoir, sans être contesté par le donneur d'ordre, que les données ressortant des attestations de fourniture de déclarations sociales sont les suivantes :

date de l'attestation

période de référence

effectif déclaré

masse salariale du trimestre

10/06/2013

1er trimestre 2013

1 personne

4 291, 00 euros

31/07/2013

2ème trimestre 2013

2 personnes

4 291,00 euros

01/11/2013

3ème trimestre 2013

2 personnes

4 243,00 euros

17/02/2014

4ème trimestre 2013

2 personnes

4 354, 00 euros

16/09/2014

2ème trimestre 2014

3 personnes

4 342,00 euros

16/04/2015

4ème trimestre 2014

1 personne

2 869,00 euros

L'intimée indique également que les relevés de compte fournisseur de l'appelante ont permis de constater le montant des prestations TTC sous-traitées à la société [2] :

- 280 687 euros en 2013, soit 15% du chiffre d'affaires de la société [2]

- 305 419 euros, en 2014, soit 46% du chiffre d'affaires de la société [2]

- 131 385 euros du 1er janvier au 31 mai 2015, soit 69% du chiffres d'affaires de la société [2].

L'appelante explique la discordance entre le montant des prestations sous-traitées et le nombre de salariés déclarés et la masse salarié pour les mêmes périodes par le fait que la société [2] exerce une activité de courtage en BTP, ce qui lui permettait de confier l'exécution des travaux, objets de la sous-traitance à des entreprises externes. Les statuts de la société [2] indique que son objet social est : « courtage en BTP, maçonnerie et peinture ».

Cependant, si l'appelante soutient qu'au titre de cette activité de courtier, la société sous-traitante pouvait être amenée à confier l'exécution des travaux à des entreprises tierce, la cour constate qu'elle n'étaye pas cette pétition de principe et notamment qu'elle ne précise aucunement la nature de l'activité de courtier en BTP qu'aurait exercée ladite société à son profit. En effet, l'activité de courtier en BTP s'exerce, soit au profit de particuliers qui entendent confier des travaux nécessitant l'intervention de plusieurs corps de métiers à une seule entreprise, à charge pour elle de planifier et diriger les travaux en qualité de maître d'oeuvre, ce qui n'est bien évidemment pas le cas en l'espèce, soit au profit d'une autre entreprise de travaux, ce qui est le cas en l'espèce, et elle se caractérise comme une activité de recherche de prospect et de mise en relation entre un client et une entreprise de travaux.

Force est de constater que n'est pas alors mis en oeuvre le recours à des entreprises tierces pour exécuter un contrat de sous-traitance conclu entre les deux entreprises, contrairement à ce que soutient l'appelante. Par ailleurs, cette dernière ne produit aucune pièce établissant qu'elle a conclu un ou plusieurs contrats de courtage avec la société [2].

Au contraire, les contrats produits à l'appui d'autre moyen qui sera examiné plus avant sont tous des contrats de sous-traitance, ce qui établit que le caractère de pure opportunité de cet argument, qui est donc inopérant à justifier le peu de salariés et le caractère minime de la masse salariale de la société [2], au cours des années contrôlées, alors qu'elle était sous-traitante de l'appelante pour un nombre conséquent de prestations.

Enfin, le donneur d'ordre soutient que la réponse de l'Urssaf du 21 décembre 2015, suite aux observations qu'il a formé à propos de la lettre d'observations, contient des erreurs susceptibles de ruiner la démonstration de l'organisme de sécurité social quant à la nécessité d'un plus grand nombre de travailleurs que ceux effectivement déclarés par la société sous-traitante.

L'appelante soutient que l'Urssaf, se basant sur des dates manuscrites indiquées sur les contrats de sous-traitance, qu'elle a considéré comme des dates de fin de chantier, alors qu'il s'agirait de date butoir de livraison du chantier, a allongé les durées de chantier et partant a majoré l'estimation du nombre de salariés nécessaire pour l'exécution des travaux prévus. Mais ce raisonnement, qui ne repose en tout état de cause sur la seule interprétation du donneur d'ordre de la signification des dates manuscrites figurant sur les contrats de sous-traitance, n'est pas de nature à démontrer, compte tenu du nombre de contrats de sous-traitance conclus entre les deux sociétés, que le nombre de salariés déclarés suffisait à exécuter les dits travaux.

Compte tenu de l'ensemble de ces éléments, le donneur d'ordre, nonobstant la production des attestations prévues à l'article D. 8222-5 du code du travail, avait nécessairement conscience de l'emploi de travailleurs dissimulés par sa cocontractante et n'a pas rempli son obligation de vigilance.

3. Sur le quantum

Pour contester le quantum des sommes mises à sa charge, l'appelante soutient qu'une grande majorité des contrats de sous-traitance avec la société [2] sont d'un montant inférieur au seuil de 3 000 euros hors taxes, puis de 5 000 euros hors taxe, à compter du 1er avril 2015, et ne nécessitait pas la mise en oeuvre de l'obligation de vigilance et que dès lors, elle n'est pas tenue des cotisations et contributions sociales exigibles auprès de la société sous-traitante au titre de ces contrats. Elle produit à cet égard à hauteur de cour la totalité des contrats conclus avec la société [2]

L'Urssaf fait valoir que la société n'a jamais produit ces documents dans la phase contradictoire, ne permettant à l'inspecteur d'exercer son contrôle. En réponse la société indique que l'organisme de sécurité sociale ne lui a jamais réclamé l'intégralité des contrats et des factures. Mais force est de constater qu'il appartenait à la société qui s'opposait au mode de calcul de l'Urssaf de produire les pièces pour justifier de l'exclusion de certains contrats de l'assiette de la solidarité financière.

En tout état de cause, les pièces versées aux débats à hauteur d'appel par le donneur d'ordre doivent être écartées dès lors que le contrôle est clos après la période contradictoire telle que définie à l'article R. 243-59 du code de la sécurité sociale et que la société n'a pas, pendant cette période, apporté des éléments contraires aux constatations de l'inspecteur.

Enfin, l'appelante soutient que la solidarité financière aurait du être cantonnée aux cotisations et contributions sociales redressées sur les rémunérations des deux salariés dont la présence avait été constatée sur lors du contrôle physique sur le chantier sis à [Adresse 6] . Mais il a été rappelé dans les motifs précédents que la solidarité financière a été mise en oeuvre à la suite d'un contrôle d'assiette et de vérification de l'application des législations de sécurité sociale, d'assurance chômage et de garantie des salaires sur l'ensemble de la comptabilité de la société [5], ce qui est justifie que la solidarité financière soit mise en oeuvre sur une assiette bien plus large que les deux rémunérations des travailleurs contrôlés le 17 juin 2015.

Au vu de l'ensemble de ces éléments, aucun des moyens soutenus par l'appelante étant susceptibles d'emporter la conviction de la cour, la décision du premier juge doit être confirmée.

4. Sur l'article 700 du code de procédure civile

La société [5] sera condamnée au paiement de la somme de 2 000 euros au titre des frais irrépétibles.

5. Sur les dépens

La société [5], succombant en cette instance, devra en supporter les dépens engagés depuis le 1er janvier 2019.

PAR CES MOTIFS

LA COUR,

CONFIRME le jugement du tribunal des affaires de sécurité sociale de Créteil du 18 mai 2017,

Y ajoutant,

DÉBOUTE les parties de toutes leurs autres demandes,

CONDAMNE la société [5] à payer à l'Urssaf [Localité 4] la somme de 2 000 euros au titre des frais irrépétibles d'appel,

CONDAMNE la société [5] aux dépens de la procédure d'appel engagés depuis le 1er janvier 2019.

La greffière Le président


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 6 - chambre 12
Numéro d'arrêt : 17/12014
Date de la décision : 25/11/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-11-25;17.12014 ?
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