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24/11/2022 | FRANCE | N°20/02185

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 6 - chambre 7, 24 novembre 2022, 20/02185


Copies exécutoires REPUBLIQUE FRANCAISE

délivrées le : AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS







COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 7



ARRET DU 24 NOVEMBRE 2022



(n° , 9 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 20/02185 - N° Portalis 35L7-V-B7E-CBTIQ



Décision déférée à la Cour : Jugement du 16 Septembre 2019 -Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de BOBIGNY - RG n° F 18/01520



APPELANTE



S.A.R.L. LAPARISIENNE TRANSPORT

[Adresse

3]

[Adresse 3] / FRANCE

Représentée par Me Olivier BONGRAND, avocat au barreau de PARIS, toque : K0136



INTIMES



Monsieur [O] [T]

[Adresse 2]

[Adresse 2]

Représenté par ...

Copies exécutoires REPUBLIQUE FRANCAISE

délivrées le : AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 7

ARRET DU 24 NOVEMBRE 2022

(n° , 9 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 20/02185 - N° Portalis 35L7-V-B7E-CBTIQ

Décision déférée à la Cour : Jugement du 16 Septembre 2019 -Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de BOBIGNY - RG n° F 18/01520

APPELANTE

S.A.R.L. LAPARISIENNE TRANSPORT

[Adresse 3]

[Adresse 3] / FRANCE

Représentée par Me Olivier BONGRAND, avocat au barreau de PARIS, toque : K0136

INTIMES

Monsieur [O] [T]

[Adresse 2]

[Adresse 2]

Représenté par Me Pasquale BALBO, avocat au barreau de SEINE-SAINT-DENIS, toque : PB131

(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2021/25828 du 25/06/2021 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de PARIS)

S.E.L.A.R.L. [R] ET ASSOCIES - Maître [V] [R], es qualité de Commissaire à l'éxécution du plan de la SARL LAPARISIENNE TRANSPORT

(Maître [V] [R] auparavant administrateur judiciaire de la SARL LAPARISIENNE TRANSPORT dans le cadre de la procédure de redressement judiciaire)

[Adresse 4]

[Adresse 4]

N'ayant pas constitué avocat, signification à personne morale

Association AGS CGEA IDF EST UNEDIC, Délégation AGS CGEA IDF EST

[Adresse 1]

[Adresse 1]

Représentée par Me Christian GUILLOT, avocat au barreau de PARIS, toque : A0474

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 14 Septembre 2022, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Monsieur Laurent ROULAUD, conseiller chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, entendu en son rapport, composée de :

Madame Bérénice HUMBOURG, Présidente

Madame Guillemette MEUNIER, Présidente

Monsieur Laurent ROULAUD, Conseiller

Greffier, lors des débats : Madame Joanna FABBY

ARRET :

- REPUTE CONTRADICTOIRE

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Madame Guillemette MEUNIER, Présidente, et par Madame Marie-Charlotte BEHR, Greffière stagiaire en préaffectation sur poste, présente lors du prononcé.

FAITS, PROCEDURE, PRETENTIONS ET MOYENS DES PARTIES :

M. [O] [T] a été engagé en qualité de chauffeur livreur par la société Laparisienne Transport (ci-après désignée la société LT) par contrat de travail à durée déterminée à temps plein à compter du 25 juin 2015 puis par contrat de travail à durée indéterminée à temps plein à compter du 1er janvier 2016.

Les relations contractuelles étaient soumises à la convention collective des transports routiers.

Par courrier du 28 juillet 2017, la société LT a notifié à M. [T] un licenciement pour faute simple pour le motif suivant : 'Le 17 juillet, vous avez eu un comportement inacceptable vis-à-vis de votre direction, notamment en proférant des injures lors d'un entretien'.

Contestant le bien fondé de son licenciement, M. [T] a saisi le conseil de prud'hommes de Bobigny le 24 mai 2018 aux fins d'obtenir la condamnation de la société LT au paiement de diverses sommes de nature salariale et indemnitaire.

Par jugement du 2 août 2018, le tribunal de commerce de Bobigny a prononcé l'ouverture d'une procédure de redressement judiciaire à l'égard de la société LT.

Par jugement du 10 juillet 2019, le tribunal de commerce de Bobigny a arrêté le plan de redressement de la société LT d'une durée de cinq ans et a désigné la société Blériot et associés en qualité de commissaire à l'exécution du plan.

Par jugement du 16 septembre 2019, le conseil de prud'hommes a :

Fixé la moyenne des salaires de référence à la somme de 2.143,09 euros,

Fixé la créance de M. [T] au passif du redressement judiciaire de la société LT aux sommes suivantes :

- 8.000 euros au titre de l'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

- 2.143,09 euros à titre d'indemnité pour non-respect de la procédure,

- 4.286,18 euros à titre d'indemnité de préavis,

- 428,61 euros de congés payés afférents,

- 261,25 euros au titre du solde de l'indemnité de licenciement,

- 12.858,54 euros au titre du travail dissimulé,

- 1.200 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

Rappelé que les créances salariales porteront intérêts de droit à compter du 29 mai 2018, date de réception par la partie défenderesse de la convocation devant le bureau de conciliation jusqu'à la date du redressement judiciaire, soit le 2 août 2018,

Déclaré les créances opposables à l'AGS dans la limite des articles L. 3253-6 et suivants du code du travail,

Dit que les sommes au titre de l'article 700 du code de procédure civile ne sont pas opposables à l'AGS,

Ordonné la remise de bulletins de paye récapitulatifs, de l'attestation de Pôle emploi et d'un certificat de travail conformes au jugement,

Débouté les parties des surplus de leurs demandes,

Dit que les dépens seront inscrits au titre des créances privilégiés conformément à l'article L. 622-17 du code de commerce.

Le 9 mars 2020, la société LT a interjeté appel du jugement.

Selon ses conclusions transmises par la voie électronique le 2 juillet 2021, elle demande à la cour d'infirmer le jugement en toutes ses dispositions et de :

Débouter M. [T] de ses demandes :

- d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

- d'indemnité pour non-respect de la procédure de licenciement,

- d'indemnité de préavis et de congés payés afférents,

- d'indemnité de licenciement,

- d'indemnité pour travail dissimulé,

- d'indemnité sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- de remise sous astreinte d'attestation Pôle emploi, d'attestation sécurité sociale, d'un certificat

de travail et de bulletins de paie correspondant au préavis,

Fixer la moyenne des salaires à 1.691,73 euros,

Condamner M. [T] à lui verser la somme de 900 euros au titre des acomptes sur salaires non remboursés,

Condamner M. [T] à lui verser la somme de 2.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile au titre des frais de première instance et d'appel,

Condamner M. [T] aux entiers dépens.

Selon ses conclusions transmises par la voie électronique le 20 juillet 2021, M. [T] demande à la cour de :

Déclarer la société LTirrecevable et en tout cas mal fondée en ses demandes,

Confirmer purement et simplement le jugement,

Condamner la société LT à lui payer une somme de 2.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

Condamner la société LTaux dépens dont distraction au profit de Maître Pasquale BALBO, conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

Selon ses conclusions transmises par la voie électronique le 7 juillet 2020, l'Unedic Délégation AGS - Centre de gestion et d'études AGS (CGEA) d'Ile-de-France Est (ci-après désignée l'AGS) demande à la cour de :

Dire recevable et bien fondée la société LTen son appel,

Dès lors,

Infirmer en toutes ses dispositions le jugement dont appel,

Très subsidiairement,

Dire que le salaire de base sur 12 mois a été de 1.691,73 euros,

Dire en tout état de cause que le salarié ne peut prétendre à la fois à un cumul d'indemnités au titre d'un licenciement sas cause réelle et sérieuse et du fait d'une procédure de licenciement irrégulière,

Constater que M. [T] ne justifie d'aucun préjudice particulier pour le cas où la cour croirait devoir considérer que nous sommes en présence d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse alors que nous sommes dans une entreprise de moins de 11 salariés,

Dire en tout état de cause irrecevable et mal fondé M. [T] au titre de sa demande pour travail dissimulé, alors qu'aucun élément intentionnel n'est ici apporté à l'encontre de l'employeur,

Dès lors,

Infirmer en tout état de cause le jugement dont appel au titre du travail dissimulé,

Dire que sa garantie n'est pas contestée dans la limite de ses plafonds et des dispositions conjointes des articles L3253-6 et suivants à L3253-17 inclus du code du travail,

Statuer ce que de droit quant aux dépens

Pour un exposé des moyens des parties, la cour se réfère expressément aux conclusions transmises par la voie électronique.

L'instruction a été déclarée close le 22 juin 2022.

MOTIFS

Sur le bien fondé du licenciement

Aux termes de l'article L. 1235-1 du code du travail, en cas de litige relatif au licenciement, le juge, à qui il appartient d'apprécier la régularité de la procédure et le caractère réel et sérieux des motifs invoqués par l'employeur, forme sa conviction au vu des éléments fournis par les parties, au besoin après toutes mesures d'instruction qu'il estime utiles ; si un doute subsiste, il profite au salarié.

Ainsi, l'administration de la preuve en ce qui concerne le caractère réel et sérieux des motifs du licenciement n'incombe pas spécialement à l'une ou l'autre des parties, l'employeur devant toutefois fonder le licenciement sur des faits précis et matériellement vérifiables.

Aux termes de la lettre de licenciement du 28 juillet 2017, qui fixe les limites du litige, il est reproché au salarié d'avoir eu un comportement inacceptable à l'égard de la direction le 17 juillet 2017, notamment en proférant des injures lors d'un entretien.

Afin d'établir ces griefs, l'employeur se borne à produire un dépôt de plainte du 2 décembre 2017 de M. [M] [E], supérieur hiérarchique de M. [T] dans lequel le premier reproche au second des faits de menaces à compter du 15 octobre 2017, d'injures commis le 4 novembre 2017 et de menaces de mort des 30 novembre et 1er décembre 2017.

Toutefois, la cour constate qu'aucun des faits mentionnés dans la plainte et contestés par le salarié dans ses écritures ne sont reprochés à ce dernier dans le cadre de la lettre de licenciement dont la notification à l'intimé est antérieure à la survenance de ces faits.

La lettre de licenciement fixant les limites du litige, ces griefs ne peuvent donc justifier le licenciement disciplinaire de M. [T].

De même, il n'est nullement fait état dans la plainte précitée ou dans un autre élément produit de faits commis par le salarié le 17 juillet 2017 et qui seuls sont reprochés à ce dernier dans la lettre de licenciement.

Il se déduit de ce qui précède que les griefs contenus dans cette lettre ne sont pas établis. Le licenciement est donc dépourvu de cause réelle et sérieuse. Le jugement sera confirmé en conséquence.

Sur la demande reconventionnelle de remboursement des acomptes sur salaire :

La société soutient qu'elle a versé à M. [T] deux acomptes sur salaire d'un montant global de 900 euros qui n'ont pas été déduits de la rémunération de ce dernier par erreur. Elle sollicite donc à titre reconventionnel la restitution de ces acomptes.

A l'appui de ses allégations, elle se réfère à l'historique du compte courant de M. [T] qui mentionne les deux virements suivants :

- acompte de 400 euros versé au salarié le 23 janvier 2017,

- acompte de 500 euros versé au salarié le 21 février 2017.

La société se fonde également sur des échanges de courriels dans lesquels l'intimé demande à plusieurs reprises à l'employeur une aide financière et notamment deux acomptes d'un montant respectifs de 400 et 500 euros.

En défense, M. [T] ne produit aucun argumentaire.

En l'espèce, il ressort des éléments précités que l'employeur a versé les 23 janvier et 21 février 2017 deux acomptes sur salaire à M. [T], le premier d'un montant de 400 euros et le second d'un montant de 500 euros.

Comme l'affirme la société dans ses écritures, il ne résulte pas des bulletins de paye produits que ces acomptes ont été déduits du salaire de M. [T].

Par suite, il sera fait droit à la demande reconventionnelle de l'employeur tendant à la condamnation du salarié à lui payer la somme de 900 euros au titre des deux acomptes versés et non déduits de la rémunération de celui-ci.

Le jugement sera infirmé en conséquence.

Sur le travail dissimulé :

M. [T] reproche à l'employeur de ne pas avoir inclus dans ses bulletins de paye certaines sommes qu'il lui avait versées par virement bancaire et, par suite, de ne pas avoir déclaré ces sommes aux organismes sociaux. Il sollicite ainsi la confirmation du jugement par lequel le conseil de prud'hommes a condamné la société LT à lui verser la somme de 12.858,54 euros à titre d'indemnité forfaitaire pour travail dissimulé.

La société et l'AGS concluent au débouté notamment en l'absence d'élément intentionnel. Ils indiquent que les sommes versées au salarié sont bien mentionnées dans les bulletins de paye produits, que ceux-ci comportent des acomptes pour un montant de 900 euros que le salarié n'a pas remboursé à l'employeur et que l'employeur a procédé à la déclaration préalable à l'embauche de M. [T] le 25 juin 2015.

Aux termes des dispositions de l'article 8221-5 du code du travail, « est réputé travail dissimulé par dissimulation d'emploi salarié le fait pour tout employeur :

1° Soit de se soustraire intentionnellement à l'accomplissement de la formalité prévue à l'article L1221-10, relatif à la déclaration préalable d'embauche;

2° Soit de se soustraire intentionnellement à l'accomplissement à la délivrance d'un bulletin de paie ou d'un document équivalent défini par voie réglementaire, ou de mentionner sur le bulletin de paie ou le document équivalent un nombre d'heures de travail inférieur à celui réellement accompli, si cette mention ne résulte pas d'une convention ou d'un accord collectif d'aménagement du temps de travail conclu en application du titre II du livre 1er de la troisième partie;

3° Soit de se soustraire intentionnellement aux déclarations relatives aux salaires ou aux cotisations sociales assises sur ceux-ci auprès des organismes de recouvrement des contributions et cotisations sociales ou de l'administration fiscale en vertu des dispositions légales ».

En l'espèce, il ressort de la comparaison des bulletins de paye versés aux débats et des historiques bancaires du salarié que les sommes suivantes ont été versées à ce dernier sans être expressément mentionnées dans les bulletins de paye produits :

- prime de 600 euros versée le 23 décembre 2016,

- acompte de 400 euros versé le 23 janvier 2017,

- acompte de 500 euros versé le 21 février 2017,

- virement de 700 euros réalisé le 16 mai 2017,

- virement de 500 euros réalisé le 18 juillet 2017.

Toutefois, comme il a été dit précédemment, les acomptes versés les 23 janvier et 21 février 2017 sont des acomptes sur salaire qui n'ont pas été déduits de la rémunération du salarié par erreur. Ils ne constituent donc pas des éléments de rémunération devant être déclarés aux organismes fiscaux et sociaux.

S'agissant des autres sommes susmentionnées qui doivent quant à elle être déclarées aux organismes fiscaux et sociaux, l'élément intentionnel du travail dissimulé ne peut se déduire du seul fait qu'elle ont été versées au salarié sans être expressément mentionnées dans les bulletins de paye produits, alors que par ailleurs ces sommes ont été remises à M. [T] par virement bancaire et non en espèces, que l'emploi de ce dernier a été déclaré aux organismes sociaux et que des bulletins de paye comprenant l'essentiel de sa rémunération lui ont bien été délivrés.

Faute d'élément intentionnel, la demande indemnitaire sera rejetée et le jugement sera infirmé en conséquence.

Sur les indemnités de rupture :

Au préalable, il ressort de l'attestation Pôle emploi versée aux débats que la société LT employait à titre habituel moins de onze salariés.

De même, comme le mentionne à juste titre le conseil de prud'hommes dans le jugement entrepris, le salaire mensuel brut au cours des trois derniers mois doit prendre en compte, d'une part, le salaire stipulé dans les bulletins de paye (1.676,13 euros) et, d'autre part, les deux virements effectués par l'employeur au profit du salarié au cours de ces trois derniers mois (16 mai et 18 juillet 2017) et non mentionnés dans les bulletins de paye et ce, pour un montant total de 1.400,88 euros bruts (700+500=1.200 euros nets soit 1.400,88 euros bruts). Comme l'a retenu le conseil de prud'hommes, ce salaire mensuel moyen brut doit ainsi être fixé à la somme de 2.143,09 euros ((1.676,13x3)+1.400,88)/3).

Enfin, le salarié bénéficiait au moment de la rupture du contrat de travail d'une ancienneté de deux ans, un mois et treize jours.

* Sur l'indemnité compensatrice de préavis :

M. [T] expose que le délai de préavis de deux mois ne pouvait commencer à courir dans la mesure où la lettre de licenciement ne lui a pas été notifiée par lettre recommandée avec avis de réception comme l'impose l'article L. 1235-6 du code du travail mais lui a été remis en main propre. De même, il indique avoir travaillé jusqu'au 15 octobre 2017 alors que la lettre de licenciement lui a été remis le 28 juillet 2017, ce qui impliquait une fin de préavis le 28 septembre 2017. Enfin, il soutient avoir été placé en congés payés tout au long du mois d'août 2017 et en congé sans solde le 31 août 2017 et expose que la période de préavis ne peut se confondre avec une période de congés payés ou de congés sans solde. Il sollicite ainsi la confirmation du jugement en ce qu'il a fixé au passif de la société les sommes de 4.286,18 euros à titre d'indemnité de préavis et de 428,61 euros de congés payés afférents.

La société et l'AGS concluent au débouté, exposant que M. [T] a été rémunéré pour le préavis de deux mois dont il n'a pas été dispensé.

Le seul défaut d'envoi de la lettre de licenciement ne rend pas le licenciement sans cause réelle et sérieuse et il appartient au juge de rechercher si la lettre de licenciement n'a pas été remise en main propre au salarié.

En l'espèce et en premier lieu, il ressort de la lettre de licenciement que celle-ci a été remise en main propre au salarié contre décharge le 28 juillet 2017, comme en atteste la signature que l'intimé a apposé sur ce document. Par suite, contrairement à ce qu'allègue M. [T] dans ses écritures, la lettre de licenciement lui a utilement été notifié à cette date.

En deuxième lieu, il ressort des termes de la lettre de licenciement que : 'conformément aux règles applicables à votre situation, vous disposez d'une période de préavis de deux mois. Votre licenciement interviendra le 15 octobre 2017". Il s'en déduit que le délai de deux mois de préavis a commencé à courir deux mois à rebours par rapport à cette date, soit le 15 août 2017. Plus précisément, l'employeur était ainsi tenu de verser le préavis du salarié pour la période du 15 août au 15 octobre 2017.

En troisième lieu, il ressort des bulletins de paye versés aux débats que le salarié a travaillé et a perçu sa rémunération du 1er septembre au 15 octobre 2017.

En quatrième et dernier lieu, il ressort des dispositions de l'article D.3141-3 du code du travail que les périodes de préavis ne peuvent être déduites du congé annuel.

Or, il ressort du bulletin de paye d'août 2017 que le salarié était en congés payés du 1er au 30 août 2017 et en congé sans solde le 31 août 2017.

Par suite, l'employeur reste redevable du préavis pour la période du 15 au 31 août 2017.

Il sera ainsi fixé au passif de la société la somme de 1.071,54 euros bruts à titre d'indemnité compensatrice de préavis, outre 107,15 euros bruts de congés payés afférents.

Le jugement sera infirmé en conséquence.

* Sur le complément d'indemnité de licenciement :

Les parties s'accordent sur le fait que M. [T] a perçu la somme de 944,23 euros à titre d'indemnité de licenciement, cette somme étant déterminée par application des dispositions de l'article R. 1234-2 du code du travail et d'un salaire moyen brut de 1.691,73 euros.

M. [T] sollicite la confirmation du jugement entrepris qui lui a accordé un complément de 261,25 euros en se fondant sur le même texte mais sur un salaire moyen mensuel brut de 2.143,09 euros.

Ce salaire moyen ayant été retenu par la cour dans les développements précédents, il sera donc fait droit à la demande du salarié et le jugement sera confirmé en conséquence.

* Sur l'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse :

Pour les licenciements notifiés avant le 24 septembre 2017 par une entreprise employant habituellement moins de onze salariés et jugés sans cause réelle et sérieuse, les salariés ont droit à une indemnité calculée en fonction du préjudice nécessairement subi du fait de la perte injustifiée de leur emploi et dont l'étendue est souverainement appréciée par le juge prud'homal.

En l'espèce, compte tenu de l'ancienneté de M. [T], de son âge au moment de la rupture (34 ans), de son salaire et de la période de chômage justifiée jusqu'au 27 novembre 2017 par les attestations Pôle emploi produites, il y a lieu de fixer au passif de la société la somme de 4.500 euros à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.

Le jugement sera infirmé en conséquence sur le quantum, en ce qu'il a alloué au salarié la somme de 8.000 euros.

* Sur l'indemnité pour non-respect de la procédure de licenciement :

Il résulte du rapprochement des articles L.1235-2 et L.1235-5 du code du travail dans leur version applicable au litige que, lorsque le licenciement d'un salarié de moins de deux ans d'ancienneté ou intervenu dans une entreprise employant habituellement moins de onze salariés survient sans que la procédure requise ait été observée, le salarié ne peut prétendre à une indemnité pour irrégularité de la procédure, sauf en cas de méconnaissance des dispositions relatives à l'assistance du salarié par un conseiller. Dans ce cas le salarié peut prétendre à une indemnité pour irrégularité de la procédure, qu'il s'agisse ou non d'un licenciement pour cause réelle et sérieuse,

En l'espèce, aucun élément du dossier n'établit que M. [T] a été régulièrement convoqué à un entretien préalable au licenciement. Le défaut de convocation à un entretien préalable au licenciement induit la méconnaissance des dispositions relatives à l'assistance du salarié par un conseiller. Cette irrégularité de procédure a causé au salarié un préjudice en ce qu'il n'a pas pu faire valoir ses droits.

En conséquence, il convient de fixer au passif de la société la somme de 500 euros à titre d'indemnité pour irrégularité de procédure. Le jugement sera infirmé sur le quantum, en ce qu'il a alloué au salarié la somme de 2.143,09 euros à ce titre.

Sur les demandes accessoires :

La société LT qui succombe partiellement dans la présente instance, doit supporter les dépens d'appel et être condamnée à payer à la M. [T] la somme de 1.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile au titre de la procédure d'appel. En revanche, la société LT sera déboutée de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant publiquement, en dernier ressort, par arrêt contradictoire mis à disposition au greffe,

INFIRME le jugement :

- sur le quantum en ce qui concerne les demandes au titre de l'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, de l'indemnité pour non-respect de la procédure, de l'indemnité compensatrice de préavis et des congés payés afférents,

- en ce qu'il a fixé au passif de la société Laparisienne Transport une somme au titre de l'indemnité forfaitaire pour travail dissimulé,

- en ce qu'il a débouté la société Laparisienne Transport de sa demande reconventionnelle au titre des acomptes sur salaire non remboursés,

- en ce qu'il a rappelé que les créances salariales porteront intérêts de droit à compter du 29 mai 2018, date de réception par la partie défenderesse de la convocation devant le bureau de conciliation jusqu'à la date du redressement judiciaire, soit le 2 août 2018,

CONFIRME le jugement pour le surplus,

Statuant à nouveau des chefs infirmés et y ajoutant :

FIXE la créance de M. [O] [T] au passif de la société Laparisienne Transport aux sommes suivantes :

- 4.500 euros à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

- 500 euros à titre d'indemnité pour non-respect de la procédure,

- 1.071,54 euros bruts d'indemnité compensatrice de préavis,

- 107,15 euros bruts de congés payés afférents,

- 1.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

RAPPELLE que le jugement d'ouverture de la procédure collective emporte arrêt du cours des intérêts,

DECLARE le présent arrêt opposable à l'Unedic Délégation AGS - Centre de gestion et d'études AGS (CGEA) d'Ile-de-France Est dans les limites de sa garantie légale,

CONDAMNE M. [O] [T] à payer à la société Laparisienne Transport la somme de 900 euros au titre des acomptes sur salaire non remboursés,

DEBOUTE les parties de leurs autres demandes,

MET les dépens d'appel à la charge de la société en redressement judiciaire.

AUTORISE Maître Pasquale Balbo à recouvrer directement les dépens d'appel, conformément à l'article 699 du code de procédure civile.

La Greffière, La Présidente.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 6 - chambre 7
Numéro d'arrêt : 20/02185
Date de la décision : 24/11/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-11-24;20.02185 ?
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