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23/11/2022 | FRANCE | N°22/08685

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 6 - chambre 4, 23 novembre 2022, 22/08685


Copies exécutoires REPUBLIQUE FRANCAISE

délivrées le : AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS



COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 4



ARRET DU 23 NOVEMBRE 2022



(n° , 5 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 22/08685 - N° Portalis 35L7-V-B7G-CGP3I



Décision déférée à la Cour : Jugement du 07 Février 2019 -Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de PARIS - RG n° 18/02783



APPELANTE



Madame [H] [P]

[Adresse 1]

[Localité 4]

Représ

entée par Me Florent HENNEQUIN, avocat au barreau de PARIS, toque : R222



INTIMEE



S.A.R.L. LE WE CLUB

[Adresse 3]

[Localité 2]

Représentée par Me Fabrice DI VIZIO de la SEL...

Copies exécutoires REPUBLIQUE FRANCAISE

délivrées le : AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 4

ARRET DU 23 NOVEMBRE 2022

(n° , 5 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 22/08685 - N° Portalis 35L7-V-B7G-CGP3I

Décision déférée à la Cour : Jugement du 07 Février 2019 -Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de PARIS - RG n° 18/02783

APPELANTE

Madame [H] [P]

[Adresse 1]

[Localité 4]

Représentée par Me Florent HENNEQUIN, avocat au barreau de PARIS, toque : R222

INTIMEE

S.A.R.L. LE WE CLUB

[Adresse 3]

[Localité 2]

Représentée par Me Fabrice DI VIZIO de la SELARL BAROK AVOCATS, avocat au barreau de PARIS, toque : E0306

Représentée par Me Emmanuel JARRY de la SELARL RAVET & ASSOCIÉS, avocat au barreau de PARIS, toque : P0209

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l'article 462 du code procédure civile, l'affaire a été examinée par Madame Anne-Ga'l BLANC, conseillère , qui en a rendu compte à Monsieur Jean-François DE CHANVILLE, président et à Madame Florence MARQUES, conseillère.

ARRET :

- contradictoire

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile

- signé par Jean-François DE CHANVILLE, président et par Victoria RENARD, Greffière, présente lors de la mise à disposition.

FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS :

Le 19 septembre 2019, la société Le WE club a fait appel d'un jugement du conseil de prud'hommes de Paris du 7 février 2019 notifiée le 2 septembre précédent qui requalifiait le contrat de travail de Mme [H] [P] en temps plein, jugeait que la prise d'acte de cette dernière produisait les effets d'un licenciement nul et la condamnait au versement des sommes subséquentes, outre une indemnité pour travail dissimulé et des dommages-intérêts pour non-respect de l'obligation de sécurité et harcèlement sexuel.

Dans ses conclusions d'intimée adressées au greffe par le réseau privé virtuel des avocats le 27 juin 2022, Mme [P] demandait à la cour de confirmer le jugement en ce qu'il requalifiait le contrat en temps complet et la prise d'acte en licenciement nul et en ce qu'il condamnait la société Le WE club à lui payer 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile mais de l'infirmer pour le surplus et, statuant à nouveau et y ajoutant, de :

'- condamner la société Le WE club à lui payer 11.230 euros de dommages-intérêts pour harcèlement sexuel'.'

La cour d'appel de Paris a rendu sa décision le 5 octobre 2022 sous le numéro de RG 19/09320.

L'arrêt était notamment motivé comme suit :

'1.3 : Sur le harcèlement sexuel

Aux termes de l'article L.1153-1 du code du travail dans sa version alors en vigueur, aucun salarié ne doit subir des faits :

1° Soit de harcèlement sexuel, constitué par des propos ou comportements à connotation sexuelle répétés qui soit portent atteinte à sa dignité en raison de leur caractère dégradant ou humiliant, soit créent à son encontre une situation intimidante, hostile ou offensante ;

2° Soit assimilés au harcèlement sexuel, consistant en toute forme de pression grave, même non répétée, exercée dans le but réel ou apparent d'obtenir un acte de nature sexuelle, que celui-ci soit recherché au profit de l'auteur des faits ou au profit d'un tiers.

Il est en outre constant que le harcèlement sexuel peut non seulement être le fait de l'employeur mais également de collègues ou de personnes extérieures à l'entreprise. Par ailleurs, le harcèlement peut être constitué lorsqu'un même salarié subit de tels propos ou comportements venant de plusieurs personnes, de manière concertée ou à l'instigation de l'une d'elles, alors même que chacune de ces personnes n'a pas agi de façon répétée ou lorsqu'un même salarié subit de tels propos ou comportements, successivement, venant de plusieurs personnes qui, même en l'absence de concertation, savent que ces propos ou comportements caractérisent une répétition.

Selon l'article L.1154-1 du même code, lorsque survient un litige relatif à l'application des articles L. 1152-1 à L. 1152-3 et L. 1153-1 à L. 1153-4, le candidat à un emploi, à un stage ou à une période de formation en entreprise ou le salarié présente des éléments de fait laissant supposer l'existence d'un harcèlement. Au vu de ces éléments, il incombe à la partie défenderesse de prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs d'un tel harcèlement et que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement. Le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles.

(...)

Au regard de la concordance et de la constance des très nombreux témoignages versés aux débats, peu important que l'une des personnes attestant soit le compagnon de Mme [P] et qu'une plainte avec constitution de partie civile ait été déposée par l'appelante alors que sa plainte pour faux a été classée, la salarié établit la matérialité de propos ou de comportements à connotation sexuelle répétés que les éléments produits par l'employeur sur le bon fonctionnement du club ne sont pas de nature à remettre en cause.

Ce faisant, Mme [P] présente des éléments de faits, qui, pris ensemble, laissent supposer l'existence d'un harcèlement sexuel dans la mesure où elle établit qu'elle a été l'objet, avec l'aval de son employeur voire son incitation, de propos ou comportements à connotation sexuelle répétés qui ont porté atteinte à sa dignité en raison de leur caractère dégradant ou humiliant du fait de plusieurs personnes qu'elle soient des clients ou des membres du personnel peu important que ceux-ci ne se soient pas concertés dans la mesure où ils ne pouvaient ignorer que ces propos ou comportements caractérisaient une répétition.

Il appartient dès lors à l'employeur de démontrer que le harcèlement sexuel n'est pas constitué. Or, s'il critique les éléments produits par la salarié, l'employeur n'apporte pas la preuve qui lui incombe que les éléments ainsi présentés ne caractérisent pas un harcèlement sexuel.

Celui-ci est donc caractérisé

Au regard du préjudice moral subi par la salariée qui établit un contexte anxieux réactionnel subséquent, sa demande de dommages-intérêts sera accueillie à hauteur de 3.000 euros.

Le jugements sera confirmé sur le principe de cette condamnation mais infirmé sur le montant alloué à ce titre.'

Aux termes du dispositif de la décision, la cour infirmait le jugement du conseil de prud'hommes de Paris du 7 février 2019 sur le montant des dommages-intérêts pour 'harcèlement moral' et condamnait la SARL le WE Club à payer à Mme [H] [P] la somme de 3.000 euros de dommages-intérêts pour 'harcèlement moral'.

Par requête du 12 octobre 2022, Mme [P] a saisi la cour d'une demande de rectification d'une erreur matérielle qui affecterait cet arrêt. Aux termes de celle-ci, elle demande à la cour de rectifier le dispositif en remplaçant les termes de 'harcèlement moral' par ceux de 'harcèlement sexuel'.

La cour pouvant statuer sans audience lorsqu'elle est ainsi saisie par une partie d'une requête en rectification d'erreur matérielle, les observations de la partie adverse ont été sollicitées.

Par conclusions transmises par le réseau privé virtuel des avocats le 8 novembre 2022, la société Le WE Club demande à la cour de :

- prononcer l'irrecevabilité de la requête en rectification d'erreur matérielle introduite par Mme [P] pour défaut du droit d'agir ;

- rejeter la requête en rectification d'erreur matérielle introduite par Mme [P] en ce qu'elle est mal fondée ;

- debouter Mme [P] de toutes les autres demandes ;

- condamner Mme [P] à la somme de 2.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Il fait valoir que le juge ne peut, par la voie d'une rectification d'erreur matérielle, modifier les droits et obligations reconnus aux parties par cette décision et que les appellations 'harcèlement moral' et 'harcèlement sexuel' sont deux qualifications juridiques bien distinctes.

MOTIFS DE LA DÉCISION :

L'article 462 du code de procédure civile dispose que les erreurs et omissions matérielles qui affectent un jugement, même passé en force de chose jugée, peuvent toujours être réparées par la juridiction qui l'a rendu ou par celle à laquelle il est déféré, selon ce que le dossier révèle ou, à défaut, ce que la raison commande. Le juge est saisi par simple requête de l'une des parties, ou par requête commune ; il peut aussi se saisir d'office. Le juge statue après avoir entendu les parties ou celles-ci appelées. Toutefois, lorsqu'il est saisi par requête, il statue sans audience, à moins qu'il n'estime nécessaire d'entendre les parties. La décision rectificative est mentionnée sur la minute et sur les expéditions du jugement. Elle est notifiée comme le jugement. Si la décision rectifiée est passée en force de chose jugée, la décision rectificative ne peut être attaquée que par la voie du recours en cassation.

Dans ce cadre, le juge ne peut toutefois modifier les droits et obligations des parties tels qu'ils résultent du jugement et se livrer à une nouvelle appréciation des éléments de la cause.

Cependant, au cas présent, il ressort clairement du jugement de première instance, des demandes de Mme [P] comme de la motivation de la décision que ce n'est que par une erreur de plume que le dispositif de l'arrêt parle de harcèlement moral alors que seule une demande au titre du harcèlement sexuel était formée que seuls les articles relatifs au harcèlement sexuel sont visés et que, dans la motivation, des dommages et intérêts pour harcèlement sexuel et non moral sont alloués.

Dès lors, il convient de rectifier le dispositif de a décision en remplaçant les termes de 'harcèlement moral' par ceux de 'harcèlement sexuel', le reste sans changement.

Les éventuels dépens seront laissés à la charge du Trésor public.

La demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile sera rejetée.

PAR CES MOTIFS :

La cour :

- Ordonne la rectification de l'erreur matérielle affectant le dispositif de la décision en remplaçant par deux fois dans le dispositif les termes de 'harcèlement moral' par les termes de 'harcèlement sexuel', celui étant désormais rédigé comme suit :

'La cour :

- Confirme le jugement du conseil de prud'hommes de Paris du 7 février 2019 sauf en ce qu'il requalifie le contrat de travail à temps partiel en temps plein, condamne l'employeur au paiement de 36.179,10 euros et 3.617,91 euros à titre de rappels de salaire et congés payés afférents subséquents, rejette la demande au titre de la mutuelle ainsi que sur les montants des dommages-intérêts pour harcèlement sexuel et manquement à l'obligation de sécurité, de l'indemnité au titre du repos compensateur, de l'indemnité de préavis, des congés payés afférents, de l'indemnité de licenciement, de l'indemnité pour licenciement nul et au titre du travail dissimulé ;

Statuant à nouveau et y ajoutant :

- Rejette la demande de requalification du contrat de travail en temps plein ;

- Rejette la demande de rappel de salaire et de congés payés afférents subséquente ;

- Condamne la SARL le WE Club à payer à Mme [H] [P] la somme de 20.280, 61euros de rappel de salaire, outre 2.028 euros de congés payés afférents. ;

- Condamne la SARL le WE Club à payer à Mme [H] [P] la somme de 3.000 euros de dommages-intérêts pour harcèlement sexuel ;

- Condamne la SARL le WE Club à payer à Mme [H] [P] la somme de 1.000 euros de dommages-intérêts pour manquement de l'employeur à son obligation de sécurité ;

- Condamne la SARL le WE Club à payer à Mme [H] [P] la somme de 142,50 euros à titre d'indemnité de repos compensateur pour travail de nuit, outre 14,25 euros de congés payés afférents ;

- Condamne la SARL le WE Club à payer à Mme [H] [P] la somme de 504 euros pour le remboursement de la mutuelle, outre 50,40 euros au titre de congés payés afférents ;

- Rejette la demande de dommages-intérêts sur le fondement des articles L. 3241-1 et L. 1222-1 du code du travail ;

- Condamne la SARL le WE Club à payer à Mme [H] [P] la somme de 2.278,43 euros d'indemnité de préavis outre les congés payés sur préavis de 227,84 euros ;

- Condamne la SARL le WE Club à payer à Mme [H] [P] la somme de 616 euros d'indemnité conventionnelle de licenciement ;

- Condamne la SARL le WE Club à payer à Mme [H] [P] la somme de 8.000 euros d'indemnité pour licenciement nul ;

- Condamne la SARL le WE Club à payer à Mme [H] [P] la somme de 6.835,26 euros d'indemnité travail dissimulé ;

- Rappelle que les intérêts au taux légal courront à compter de la date de réception de la convocation de l'employeur devant le bureau de conciliation pour les créances salariales, du jugement du 7 février 2019 pour les créances indemnitaires confirmées et du présent arrêt pour le surplus ;

- Ordonne la capitalisation des intérêts ;

- Ordonne la remise des bulletins de paie et des documents sociaux conformes à la présente décision sous quinzaine de la signification du présent arrêt

- Condamne la SARL le WE Club à payer à Mme [H] [P] la somme de 2.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- Condamne la SARL le WE Club aux dépens.', le reste sans changement ;

- Dit que le présent arrêt sera mentionné sur la minute et sur les expéditions de l'arrêt rectifié ;

- Rejette la demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- Laisse les dépens à la charge du Trésor public.

LA GREFFIÈRE LE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 6 - chambre 4
Numéro d'arrêt : 22/08685
Date de la décision : 23/11/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-11-23;22.08685 ?
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