La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

23/11/2022 | FRANCE | N°20/01539

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 6 - chambre 4, 23 novembre 2022, 20/01539


Copies exécutoires REPUBLIQUE FRANCAISE

délivrées le : AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS



COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 4



ARRET DU 23 NOVEMBRE 2022



(n° , 10 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 20/01539 - N° Portalis 35L7-V-B7E-CBPVQ



Décision déférée à la Cour : Jugement du 30 Octobre 2019 -Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de BOBIGNY - RG n°



APPELANTE



Madame [N] [B]

[Adresse 1]

[Adresse 1]

Représentée p

ar Me Olivier VILLEVIEILLE, avocat au barreau de PARIS, toque : P0423



INTIMEE



Société FEDEX EXPRESS FR anciennement TNT EXPRESS FRANCE

[Adresse 2]

[Adresse 2]

Représentée...

Copies exécutoires REPUBLIQUE FRANCAISE

délivrées le : AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 4

ARRET DU 23 NOVEMBRE 2022

(n° , 10 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 20/01539 - N° Portalis 35L7-V-B7E-CBPVQ

Décision déférée à la Cour : Jugement du 30 Octobre 2019 -Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de BOBIGNY - RG n°

APPELANTE

Madame [N] [B]

[Adresse 1]

[Adresse 1]

Représentée par Me Olivier VILLEVIEILLE, avocat au barreau de PARIS, toque : P0423

INTIMEE

Société FEDEX EXPRESS FR anciennement TNT EXPRESS FRANCE

[Adresse 2]

[Adresse 2]

Représentée par Me Philippe DANESI, avocat au barreau de PARIS, toque : R235

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 19 Septembre 2022, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Madame Florence MARQUES, conseillère, chargée du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, entendu en son rapport, composée de :

Monsieur Jean-François DE CHANVILLE, président

Madame Anne-Ga'l BLANC, conseillère

Madame Florence MARQUES, conseillère

Greffier, lors des débats : Mme Victoria RENARD

ARRET :

- contradictoire

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Jean-François DE CHANVILLE, Président de chambre et par Victoria RENARD, Greffière, présente lors de la mise à disposition.

RAPPEL DES FAITS, PROCÉDURE ET MOYEN DES PARTIES :

La société TNT EXPRESS FRANCE exploite une entreprise spécialisée dans le transport express de plis et colis.

Mme [N] [B] a été embauchée suivant contrat à durée déterminée à effet du 1er mars 2010 jusqu'au 31 décembre 2010 par la société TNT EXPRESS FRANCE en qualité de responsable des projets services clients.

La salariée a ensuite été embauchée selon un contrat à durée indéterminée en qualité de chef de projet solutions clients par cette même société à effet du 1 janvier 2011, moyennant une rémunération fixe mensuelle de 4356,98 euros, outre une partie variable. La salariée était soumise à une convention de forfait annuel en jours.

Mme [N] [B] a été élue membre titulaire du Comité d'entreprise à compter du 25 novembre 2013, pour une durée de 4 ans.

Les relations contractuelles entre les parties étaient soumises à la convention collective nationale des Transports Routiers (IDCC 16).

Pour des raisons économiques, la société TNT EXPRESS France et le Groupe TNT ont engagé une réorganisation entraînant des suppressions de postes et des modifications de contrats ainsi que la mise en 'uvre d'un Plan de Sauvegarde de l'Emploi ( PSE).

Dans ce cadre, il a été proposé à Mme [N] [B] une modification de son contrat de travail par courrier du 19 juin 2014, que cette dernière a refusé. La salariée a refusé toutes les offres de reclassement qui lui ont été faites.

Par décision en date du 20 avril 2015, l'inspecteur du travail a refusé d'autoriser le licenciement de Mme [N] [B].

Le Ministre du travail a annulé la décision contestée du 20 avril 2015, par une décision reçue le 3 décembre 2015 par la société TNT EXPRESS FRANCE, et a autorisé le licenciement de Mme [B] lequel est intervenu pour motif économique par LRAR en date du 10 décembre 2015.

Par décision du 13 février 2018, le tribunal administratif de Lyon a annulé cette autorisation.

Madame [B] a adhéré au dispositif du congé de reclassement.

Mme [N] [B] a saisi le conseil de prud'hommes de Bobigny le 16 octobre 2015 aux fins, notamment, de voir dire nulle la convention de forfait en jours et son licenciement sans cause réelle et sérieuse et voir la société condamnée lui payer diverses sommes, notamment au titre des heures supplémentaires, du travail dissimulé, des dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.

Par jugement en date du 30 octobre 2019, le conseil de prud'hommes de Bobigny a':

- déclaré les demandes de Mme [B] partiellement recevables et fondées,

- dit le licenciement sans cause réelle et sérieuse,

- condamné la SA TNT Express France à verser à Mme [B] les sommes suivantes':

* 6.657,88 euros au titre de la prime de maintien dans l'emploi pour la période d'avril 2015 à décembre 2015,

* 665,78 euros au titre des congés payés afférents,

* 1.435,00 euros au titre du rappel des primes annuelles,

* 143,50 euros au titre des congés payés afférents,

* 2.051,15 euros au titre du complément d'allocation de congé de reclassement,

* 205,15 euros au titre des congés payés afférents,

* 28.500,00 euros au titre des dommages et intérêts pour licenciement sans cause et sérieuse,

* 500,00 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

La décision a débouté Mme [B] du surplus de ses demandes et l'a condamnée à verser à la SAS TNT Express France la somme de 1.500,00 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile. Les dépens ont été partagés entre les parties.

Par déclaration du 20 février 2020, Mme [N] [B] a régulièrement interjeté appel de cette décision.

Dans ses dernières conclusions adressées au greffe par le réseau privé virtuel des avocats le 29 mars 2022, Mme [N] [B] demande à la Cour de':

- Confirmer le jugement rendu déféré en ce qu'il a condamné la Société FEDEX EXPRESS FR anciennement dénommée TNT EXPRESS France aux sommes suivantes':

* 6 657,88 Euros au titre de la prime de maintien de l'emploi,

* 665,78 Euros au titre des congés payés afférents,

* 1 435 Euros au titre des primes annuelles,

* 143,50 Euros au titre des congés payés afférents,

- l'infirmer pour le surplus

Et, statuant à nouveau,

- Juger que la convention de forfait jours liant Madame [N] [B] à la Société FEDEX EXPRESS FR anciennement dénommée TNT EXPRESS France est nulle et de nul effet, ou, en tout état de cause privée de tout effet,

- Condamner la société FEDEX EXPRESS FR anciennement dénommée TNT EXPRESS France à payer à Madame [N] [B] les sommes de':

* 18 234,48 à titre de rappel de salaire (heures supplémentaires), outre la somme de 1 823,48 Euros au titre de congés payés afférents,

* 38 036,70 Euros à titre de dommages et intérêts pour travail dissimulé,

* 5 612,31 Euros au titre de l'allocation de classement, outre 561,23 Euros au titre des congés payés afférents,

* 19 886,09 Euros à titre de complément d'indemnité de licenciement,

* 88 499,04 Euros en application des dispositions de l'article L2422-4 du Code du travail,

* 114 000 Euros à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle ni sérieuse,

- dire les condamnations porteront intérêt au taux légal à compter de la saisine du Conseil,

- condamner la société TNT EXPRESS France à payer à Madame [N] [B] la somme de 3 000 Euros en application des dispositions de l'article 700 du CPC, ainsi qu'aux entiers dépens.

Dans ses uniques conclusions adressées au greffe par le réseau privé virtuel des avocats le 24 juillet 2020, la société FEDEX EXPRESS FR, anciennement TNT EXPRESS France demande à la Cour de':

A titre principal,

- Infirmer le jugement rendu par le Conseil de prud'hommes de Bobigny en date du 30 octobre 2019, en ce qu'il a condamné la Société au paiement des sommes suivantes':

* 6.657,88 euros au titre de la prime de maintien dans l'emploi pour la période d'avril 2015 à décembre 2015,

* 665,78 euros au titre des congés payés afférents,

* 1.435 euros au titre du rappel des primes annuelles,

* 143,50 au titre des congés payés afférents,

* 2.051,15 euros au titre du complément d'allocation de congé de reclassement,

* 205,15 euros au titre des congés payés afférents,

* 28.500 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

* 500 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile,

- Confirmer le jugement rendu par le Conseil de prud'hommes de Bobigny en date du 30 octobre 2019 en ce qu'il a débouté Madame [B] du surplus de ses demandes et l'a condamné à verser à la Société la somme de 1.500 au titre de l'article 700 du Code de procédure civile,

- Débouter Madame [B] de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions,

A titre subsidiaire,

- Limiter le montant de l'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse au minimum prévu par l'article L.1235-3 du Code du travail dans sa rédaction applicable aux faits d'espèce,

- Débouter Madame [B] du surplus de ses demandes,

En tout état de cause,

- Débouter Madame [B] de sa demande au titre de l'article 700 du Code de procédure civile,

- Débouter Madame [B] de sa demande au titre des intérêts au taux légal,

- Débouter Madame [B] de sa demande au titre des dépens d'instance,

- Condamner Madame [B] à payer à la Société la somme de 2.000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile.

L'ordonnance de clôture est intervenue le 17 mai 2022.

Par un plus ample exposé des faits, des prétentions et des moyens des parties, la Cour se réfère à leurs conclusions écrites conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile.

MOTIFS DE LA DECISION :

1- Sur la validité de la convention de forfait en jours

Le forfait annuel en jours consiste à décompter le temps de travail en jours ou en demi-journées et non plus en heures. Il fixe le nombre de jours que le salarié doit s'engager à effectuer chaque année. Sa mise en place est subordonnée d'une part à la conclusion d'un accord collectif d'entreprise ou d'établissement ou, à défaut, d'une convention ou un accord de branche qui détermine les catégories de salariés susceptibles de conclure une convention individuelle de forfait, ainsi que la durée annuelle du travail à partir de laquelle le forfait est établi, et fixe les caractéristiques principales de ces conventions ainsi qu'à une convention individuelle de forfait passée avec le salarié par écrit.

Il incombe à l'employeur de rapporter la preuve qu'il a respecté les stipulations de l'accord collectif destinées à assurer la protection de la santé et de la sécurité des salariés soumis au régime du forfait en jours et d'établir que le salarié a été soumis à un moment quelconque à un contrôle de sa charge de travail et de l'amplitude de son temps de travail, la convention de forfait en jours étant sans effet à défaut, en sorte que le salarié est en droit de solliciter le règlement de ses heures supplémentaires.

Au cas d'espèce, l'accord collectif d'entreprise en date du 21 décembre 1999 prévoit la mise en place d'un forfait annuel en jours et fixe des modalités de suivi du temps de travail en prévoyant qu'il sera établi un bilan hebdomadaire des amplitudes des journées travaillées, lequel pourra donner lieu à un entretien entre le collaborateur et le responsable. Par ailleurs, il est rappelé que la journée travaillée doit se situer à l'intérieur de la plage 8h-21 heures.

La salariée soutient que ces garanties son insuffisantes et en tout état de cause non respectées par la direction, aucun suivi n'ayant été en réalité mis en place, ce qui a été admis par le directeur du comité d'entreprise, lors de la réunion extraordinaire du 28 mai 2015.

La société FEDEX EXPRESS FR affirme que la convention de forfait en jours est parfaitement valable en ce que l'accord laisse à la libre appréciation des parties les modalités d'exécution du bilan dont il s'agit et que «'les obligations de suivi ont bien été respectées'».

Pour autant, la cour ne peut que constater que la société procède par affirmations, sans justifier de quelque manière que ce soit qu'elle a satisfait à son obligation de contrôle de la charge de travail de la salariée ainsi que du caractère raisonnable de l'amplitude et de la charge de travail et d'une bonne répartition du travail dans le temps, sur la période considérée.

Dès lors, la convention de forfait en jours est sans effet'et la salariée peut prétendre au paiement des éventuelles heures supplémentaires accomplies.

2- Sur la demande au titre des heures supplémentaires

Aux termes de l'article L. 3171-2 alinéa 1er du code du travail, lorsque tous les salariés occupés dans un service ou un atelier ne travaillent pas selon le même horaire collectif, l'employeur établit les documents nécessaires au décompte de la durée de travail, des repos compensateurs acquis et de leur prise effective, pour chacun des salariés concernés.

Selon l'article L. 3171-4 du code du travail, en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail accomplies, l'employeur fournit au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié. Au vu de ces éléments et de ceux fournis par le salarié à l'appui de sa demande, le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles. Si le décompte des heures de travail accomplies par chaque salarié est assuré par un système d'enregistrement automatique, celui-ci doit être fiable et infalsifiable.

Il résulte de ces dispositions, qu'en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail accomplies, il appartient au salarié de présenter, à l'appui de sa demande, des éléments suffisamment précis quant aux heures non rémunérées qu'il prétend avoir accomplies afin de permettre à l'employeur, qui assure le contrôle des heures de travail effectuées, d'y répondre utilement en produisant ses propres éléments. Le juge forme sa conviction en tenant compte de l'ensemble de ces éléments au regard des exigences rappelées aux dispositions légales et réglementaires précitées. Après analyse des pièces produites par l'une et l'autre des parties, dans l'hypothèse où il retient l'existence d'heures supplémentaires, il évalue souverainement, sans être tenu de préciser le détail de son calcul, l'importance de celles-ci et fixe les créances salariales s'y rapportant.

Il a été jugé que constituent des éléments suffisamment précis des tableaux mentionnant le décompte journalier des heures travaillées, peu important qu'ils aient été établis par le salarié lui-même pour les besoins de la procédure.

Par ailleurs, même en l'absence d'accord exprès, les heures supplémentaires justifiées par l'importance des tâches à accomplir ou réalisées avec l'accord tacite de l'employeur, qui ne pouvait en ignorer l'existence et qui ne s'y est pas opposé, doivent être payées.

En l'espèce, au soutien de ses prétentions, la salarié produit un tableau précis établi par ses soins récapitulant ses horaires de travail sur la période concernée, pause méridienne déduite, ainsi que des mails attestant d'un travail parfois tard le soir.

Ce faisant, elle produit des éléments suffisamment précis quant aux heures non rémunérées qu'elle prétend avoir accomplies au-delà de'l'horaire légal ce qui permet à l'employeur, qui assure le contrôle des heures de travail effectuées, d'y répondre utilement en produisant ses propres éléments.

En réponse cependant, l'employeur se contente de critiquer les éléments de preuve ainsi communiqués et de soutenir d'une part qu'aucune heure supplémentaire ne peut être retenue, la salariée étant soumise à un forfait annuel en jours et non aux horaires collectifs de la société et d'autre part qu'elle ne prouve pas qu'elle les respectait.

La société ne produit en revanche pas ses propres éléments de contrôle en sorte qu'il convient de retenir que des heures supplémentaires non rémunérées ont bien été effectuées.

Au regard des éléments produits de part et d'autre, il n'y a pas lieu de remettre en cause le décompte de la salariée .

Il convient dès lors de condamner l'employeur à payer à Mme [N] [B] la somme de 18.234,83 euros au titre des heures supplémentaires, outre celle de 1.823,48 euros au titre de congés payés afférents.

Le jugement est infirmé sur ce point.

3- Sur la demande de dommages-intérêts pour travail dissimulé

L'article L.8221-5 du code du travail dispose qu'est réputé travail dissimulé par dissimulation d'emploi salarié le fait pour tout employeur :

1° Soit de se soustraire intentionnellement à l'accomplissement de la formalité prévue à l'article L. 1221-10, relatif à la déclaration préalable à l'embauche ;

2° Soit de se soustraire intentionnellement à la délivrance d'un bulletin de paie ou d'un document équivalent défini par voie réglementaire, ou de mentionner sur le bulletin de paie ou le document équivalent un nombre d'heures de travail inférieur à celui réellement accompli, si cette mention ne résulte pas d'une convention ou d'un accord collectif d'aménagement du temps de travail conclu en application du titre II du livre Ier de la troisième partie ;

3° Soit de se soustraire intentionnellement aux déclarations relatives aux salaires ou aux cotisations sociales assises sur ceux-ci auprès des organismes de recouvrement des contributions et cotisations sociales ou de l'administration fiscale en vertu des dispositions légales.

L'article L.8223-1 du même code dispose quant à lui que, en cas de rupture de la relation de travail, le salarié auquel un employeur a eu recours dans les conditions de l'article L. 8221-3 ou en commettant les faits prévus à l'article L. 8221-5 a droit à une indemnité forfaitaire égale à six mois de salaire.

Au cas d'espèce, il n'est pas rapporté la preuve d'un élément intentionnel de la part de l'employeur, cet élément ne pouvant se déduire de la seule application d'une convention de forfait illicite.

La salariée doit être déboutée de sa demande de ce chef. Le jugement est confirmé.

4- Sur la prime du maintien dans l'emploi

La salariée expose que, dans le cadre du PSE, le groupe TNT a pris la décision d'octroyer une prime dite de « maintien dans l'emploi » de 15 %, calculée sur les 12 derniers mois précédent le premier mois de versement. Elle souligne que cette prime devait être versée non seulement aux salariés dont l'activité était maintenue, mais également aux salariés titulaires d'un mandat jusqu'à l'issue de la procédure.

Mme [N] [B] indique que son employeur lui a bien réglé cette prime de septembre 2014 à mars 2015 mais est revenue sur cet engagement à compter d'avril 2015.

Mme [N] [B] soutient que cet engagement et son extension aux salariés en dispense d'activité caractérisent un engagement unilatéral de l'employeur dont les modalités de dénonciation n'ont pas été respectées.

La société FEDEX EXPRESS FR explique que si l'accord collectif d'entreprise sur le plan de sauvegarde de l'emploi conclu entre la Société TNT EXPRESS France et les Partenaires Sociaux prévoit en son article 3.12 le versement d'une prime de 15% au bénéfice des salariés dont le licenciement est échelonné dans le temps, et ce afin de conserver leur motivation, sous réserve d'un travail effectif et efficient et qu'elle a décidé, de manière discrétionnaire, de faire bénéficier de cette prime les salariés placés en dispense d'activité du fait de la société, cet avantage était réservé aux salariés dispensés d'activité jusqu'à la notification du licenciement, et aux salariés protégés, si le départ était décalé à cause de l'entreprise.

L'employeur explique qu'en ce qui concerne Mme [N] [B], celle-ci a bénéficié de cette prime alors qu'elle était en dispense d'activité payée et alors même que sa situation n'entrait pas dans le cadre de l'accord collectif, de septembre 2014 à février 2015, puis qu'ensuite il s'est trouvé dans l'attente de la décision d'autorisation de licenciement de l'inspection du travail puis dans l'attente du recours hiérarchique formé contre la décision de ce dernier et qu'ainsi le décalage de la notification du licenciement à la salariée n'est pas de son fait.

La cour constate que l'employeur a pris l'engagement unilatéral de verser la prime d'activité aux salariés dispensés d'activité lorsque cette dispense est à son initiative jusqu'à la notification de leur licenciement.

Il résulte de la pièce n° 20 de la salariée ( arrêt de la cour d'appel, chambre 6-2, en date du 2 novembre 2017, dont les mentions valent jusqu'à inscription de faux) que dans un mail du 20 janvier 2015 la direction a précisé que si après la date de suppression du poste, elle n'avait pas l'autorisation de licenciement, dans la mesure où il s'agit d'un salarié protégé et que son poste est supprimé, le collaborateur percevra pendant cette dispense d'activité, la prime de 15%.

Dès lors, la prime du maintien dans l'emploi, que l'employeur ne pouvait unilatéralement supprimer s'agissant d'un élément de salaire, sans préavis et sans d'éventuelles négociations et information préalable des représentants du personnel et des salariés concernés est due sur toute la période.

Il est ainsi dû la somme de 6.657,88 euros de ce chef, outre celle de 665,78 euros au titre des congés payés afférents.

Le jugement est confirmé de ce chef.

5- Sur la demande de réévaluation du salaire de référence ses incidences

Contrairement à ce que prétend la salariée, il ne lui est pas dû de complément de primes commerciales sur la période de janvier 2015 à décembre 2015, pour laquelle elle ne peut se prévaloir de la réalisation d'aucun objectif commercial,.

Son salaire de référence doit simplement inclure le rappel de la prime ci-dessus allouée.

Compte tenu des documents versés aux débats, le salaire de référence est de'6172,67 euros.

5-1 incidence sur l'allocation de reclassement

Il est dû de ce chef un reliquat de 4.052,01 euros,outre 405,02 euros à la salariée.

Le jugement est infirmé sur le quantum alloué.

5-2 incidence sur l'indemnité de licenciement

Le conseil de prud'hommes n'a pas statué de ce chef.

La salariée indique qu'elle a perçu au titre de l'indemnité de licenciement légale et extra-légale, la somme de 132.573,93 euros. Compte tenu de la réintégration de la prime du maintien dans l'emploi dans la calcul du salaire de référence, elle aurait dû toucher la somme de 133.569,72 euros. Il lui reste ne conséquence dû la somme de 995,79 euros de ce chef.

Le jugement sera complété en ce sens.

6- Sur la demande d'indemnisation en application de l'article L 2422-4 du code du travail

Aux termes de l'article L. 2422-4 du code du travail, 'lorsque l'annulation d'une décision d'autorisation est devenue définitive, le salarié investi d'un des mandats mentionnés à l'article L. 2422-1 a droit au paiement d'une indemnité correspondant à la totalité du préjudice subi au cours de la période écoulée entre son licenciement et sa réintégration, s'il en a formulé la demande dans le délai de deux mois à compter de la notification de la décision.

L'indemnité correspond à la totalité du préjudice subi au cours de la période écoulée entre son licenciement et l'expiration du délai de deux mois s'il n'a pas demandé sa réintégration.

Ce paiement s'accompagne du versement des cotisations afférentes à cette indemnité qui constitue un complément de salaire.'

Au cas d'espèce, par jugement en date du 13 février 2018 du tribunal administratif de Lyon l'autorisation du ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social, de licencier Mme [B] a été annulée. En application de l'article sus visé, madame [N] [B] peut prétendre à une indemnité du 10 décembre 2015 au 13 avril 2018, dont à déduire les sommes déjà versées par la société sur la période considérée y compris le salaire de décembre 2015 et, celles perçues de pôle emploi.

Il lui est ainsi dû à la salariée la somme de 84.252,68 euros.

Le jugement est infirmé de ce chef.

7- Sur la rupture du contrat de travail

Aux termes de l'article L 1233-4 du code du travail dans sa version applicable au litige, «'Le licenciement pour motif économique d'un salarié ne peut intervenir que lorsque tous les efforts de formation et d'adaptation ont été réalisés et que le reclassement de l'intéressé ne peut être opéré sur les emplois disponibles, situés sur le territoire national dans l'entreprise ou les autres entreprises du groupe dont l'entreprise fait partie.

Le reclassement du salarié s'effectue sur un emploi relevant de la même catégorie que celui qu'il occupe ou sur un emploi équivalent assorti d'une rémunération équivalente. A défaut, et sous réserve de l'accord exprès du salarié, le reclassement s'effectue sur un emploi d'une catégorie inférieure.

Les offres de reclassement proposées au salarié sont écrites et précises.'»

La salariée conteste le motif économique de son licenciement , indiquant qu'il n'a pas été pris en compte le rachat de la société TNT par la société Fedex dans l'appréciation de la sauvegarde de la compétitivité. Par ailleurs, elle souligne que son employeur n'a pas respecté son obligation de reclassement.

La société ne répond rien à ce propos, contestant cependant le montant réclamé du chef de l'indemnité de licenciement sans cause réelle et sérieuse .

La lecture de la motivation du jugement en date du 13 février 2018 du tribunal administratif de Lyon permet de constater que si l'employeur a fait de nombreuses propositions de reclassement à Mme [N] [B] , qu'elle refusées, il n'a pas justifié que deux postes occupés par elle précédemment n'étaient pas vacants et qu'il ne pouvait en conséquence les lui proposés. En tout état de cause, à hauteur d'appel, la société ne justifie d'aucune recherche de reclassement.

Dès lors, le licenciement est sans cause réelle et sérieuse, sans qu'il ne soit nécessaire de s'intéresser à la réalité du motif économique.

Le jugement est confirmé.

8- Sur l'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse

Aux termes de l'article L 1235-3 du code du travail dans sa version applicable au litige «'Si le licenciement d'un salarié survient pour une cause qui n'est pas réelle et sérieuse, le juge peut proposer la réintégration du salarié dans l'entreprise, avec maintien de ses avantages acquis.

Si l'une ou l'autre des parties refuse, le juge octroie une indemnité au salarié. Cette indemnité, à la charge de l'employeur, ne peut être inférieure aux salaires des six derniers mois. Elle est due sans préjudice, le cas échéant, de l'indemnité de licenciement prévue à l'article L. 1234-9.'»

En considération notamment de l'effectif de l'entreprise, des circonstances de la rupture, du montant de la rémunération versée à Mme [N] [B] de son âge au jour de son licenciement (47 ans), de son ancienneté à cette même date (15 ans), de sa capacité à trouver un nouvel emploi eu égard à sa formation et à son expérience professionnelle et des conséquences du licenciement à son égard, tels que ces éléments résultent des pièces et des explications fournies à la cour, il y a lieu de lui allouer la somme de 37.036,02 euros ( 6 mois de salaires) à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.

Le jugement est infirmé de ce chef.

9- Sur les intérêts

Conformément aux dispositions de l'article 1231-7 du code civil, les intérêts au taux légal courent sur les créances salariales à compter de la réception par l'employeur de sa convocation devant le bureau de conciliation du conseil de prud'hommes et sur le présent arrêt pour les créances indemnitaires

10- Sur les demandes accessoires

Le jugement est confirmé sur les dépens et l'article 700 du code de procédure civile.

Partie perdante, la Société FEDEX EXPRESS FR est condamnée aux dépens d'appel.

L'équité commande de faire application de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel au profit de M'me [B] ainsi qu'il sera dit au dispositif.

La Société FEDEX EXPRESS FR est déboutée de sa demande au titre des frais irrépétibles en cause d'appel.

PAR CES MOTIFS :

La cour,

Infirme le jugement déféré sauf en ce qu'il a débouté Mme [N] [B] de sa demande de dommages-intérêts pour travail dissimulé, a condamné la société FEDEX EXPRESS FR à payer à Mme [B] la somme de 6657,88 euros au titre de rappel de prime pour maintien dans l'emploi outre celle de 665,78 euros au titre des congés payés afférents, a dit le licenciement sans cause réelle et sérieuse et sur les dépens et les frais irrépétibles,

Complète le jugement déféré comme suit';

Condamne la société FEDEX EXPRESS FR à payer à Mme [N] [B] la somme de 995,79 euros à titre de reliquat d'indemnité de licenciement,

Statuant à nouveau et y ajoutant,

Dit sans effet la convention de forfaits en jours,

Condamne la société FEDEX EXPRESS FR à payer à Mme [N] [B] les sommes suivantes':

- 18.234,83 euros au titre des heures supplémentaires, outre celle de 1.823,48 euros au titre de congés payés afférents,

- 4.052,01 euros à titre de reliquat de l'allocation de reclassement, outre celle de 405,02 euros au titre de congés payés afférents,

- 37.036,02 euros à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

- 84.252,68 euros au titre de l'article L 2422-4 du code du travail,

RAPPELLE que les sommes de nature salariale porteront intérêts au taux légal à compter de la date de la réception par l'employeur de sa convocation devant le bureau de conciliation, les autres sommes portant intérêts au taux légal à compter du présent arrêt,

Condamne la société FEDEX EXPRESS FR à payer à Mme [N] [B] la somme de 1.500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, en cause d'appel,

Déboute la société FEDEX EXPRESS FR de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

Condamne la société FEDEX EXPRESS FR aux dépens d'appel.

LA GREFFIÈRE LE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 6 - chambre 4
Numéro d'arrêt : 20/01539
Date de la décision : 23/11/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-11-23;20.01539 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award