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23/11/2022 | FRANCE | N°19/05335

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 6 - chambre 4, 23 novembre 2022, 19/05335


Copies exécutoires REPUBLIQUE FRANCAISE

délivrées le : AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS



COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 4



ARRET DU 23 NOVEMBRE 2022



(n° , 9 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 19/05335 - N° Portalis 35L7-V-B7D-B73DO



Décision déférée à la Cour : Jugement du 20 Mars 2019 -Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de PARIS - RG n° 17/08171



APPELANT



Monsieur [C] [Y]

[Adresse 1]

[Adresse 1]

Représenté

par Me Philippe RENAUD, avocat au barreau D'ESSONNE



INTIMEE



Association UNEDIC DELEGATION AGS CGEA IDF EST représentée par sa Directrice, Madame [M] [P]

[Adresse 2]

[Adre...

Copies exécutoires REPUBLIQUE FRANCAISE

délivrées le : AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 4

ARRET DU 23 NOVEMBRE 2022

(n° , 9 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 19/05335 - N° Portalis 35L7-V-B7D-B73DO

Décision déférée à la Cour : Jugement du 20 Mars 2019 -Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de PARIS - RG n° 17/08171

APPELANT

Monsieur [C] [Y]

[Adresse 1]

[Adresse 1]

Représenté par Me Philippe RENAUD, avocat au barreau D'ESSONNE

INTIMEE

Association UNEDIC DELEGATION AGS CGEA IDF EST représentée par sa Directrice, Madame [M] [P]

[Adresse 2]

[Adresse 2]

Représentée par Me Claude-marc BENOIT, avocat au barreau de PARIS, toque : C1953

PARTIE INTERVENANTE :

Maître [O] [J] es qualité de mandataire ad'hoc de la société EDITIONS BEAUMARCHAIS EURL

[Adresse 3]

[Adresse 3]

Avis de fixation signifié à tiers présent au domicile le 19 août 2022

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 03 Octobre 2022, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Madame Florence MARQUES, conseillère, chargée du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, entendu en son rapport, composée de :

Monsieur Jean-François DE CHANVILLE, président

Madame Anne-Ga'l BLANC, conseillère

Madame Florence MARQUES, conseillère

Greffier, lors des débats : Mme Victoria RENARD

ARRET :

- par défaut

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Jean-François DE CHANVILLE, Président de chambre et par Victoria RENARD, Greffière, présente lors de la mise à disposition.

FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES :

M. [C] [Y] a été engagé par l'Eurl Editions Beaumarchais à compter du 1er avril 2015 en qualité de responsable administratif et commercial suivant contrat à durée indéterminé, moyennant une rémunération brute de 1458,55 euros, outre une rémunération variable.

Par avenant du 1 er septembre 2015, la rémunération est portée à 2000 euros + 25% HT du CA sur les clients professionnels.

Un nouveau contrat de travail à effet du 1er juillet 2016 a été conclu entre la société Beaumarchais et M. [C] [Y] avec reprise d'ancienneté au 1er avril 2015.

La convention collective nationale du sport s'applique.

Le 15 septembre 2017, une lettre de convocation à un entretien préalable a été adressée à M. [C] [Y] avec mise à pied à titre conservatoire.

Le 2 octobre 2017, M. [C] [Y] a été licencié pour faute grave.

M. [C] [Y] a saisi le Conseil de Prud'hommes de Paris le 2 octobre 2017 aux fins de voir :

-Constater que l'employeur a procédé par travail dissimulé, en fraude de ses obligations légales, entre le 1er janvier 2016 et 30 juin 2016.

-Dire et juger que les salaires sont dus au titre de cette période qui n'a pas qui n'a pas été rémunérée durant laquelle il a poursuivi le même travail.

-Dire et juger que depuis l'origine du contrat de travail, soit le 1er avril 2015, M. [C] [Y] , au sens des dispositions de la convention collective et à raison des fonctions, occupe bien un emploi de cadre dans la société Editions Beaumarchais Eurl et qu'il convient d'en tirer les conséquences à tous égards.

-fixer au passif de la liquidation judiciaire de la société éditions Beaucharmais Eurl les sommes suivantes :

- 35.000 euros d'indemnité pour travail dissimulé ;

- 35.504 euros salaire fixe ;

- 3.550 euros de congés payés afférents ;

- 7.309 euros sur salaire variable ;

- 730,90 euros de congés payés afférents ;

- 4.803 euros d'heures supplémentaire ;

- 480,30 euros de congés payés afférents ;

-juger que l'employeur et donc la société éditions Beaumarchais Eurl s'est livrée sur la personne de M. [C] [Y] à un harcèlement inadmissible en refusant depuis le 21 août 2017 la fourniture de travail et les moyens de travail.

-constater que la société éditions Beaumarchais Eurl avoue ne pas avoir cotisé à une caisse de cadre en violation des dispositions légales, contractuelles et conventionnelles.

-Prononcer la résiliation judiciaire du contrat de travail aux torts et grief de la société éditions Beaumarchais Eurl avec les conséquences d'un licenciement nul :

- 50.000 euros de dommages et intérêts pour licenciement abusif ;

- 2.500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- intérêts aux taux légal ;

- capitalisation des intérêts ;

- exécution provisoire article 515 du code de procédure civile ;

- dépens.

La société EDITIONS BEAUMARCHAIS a été placée en liquidation judiciaire le 15 octobre 2018 et Maître [A] [T] désignée en qualité de mandataire liquidateur.

Par jugement en date du 20 mars 2019, le Conseil de Prud'hommes de Paris a débouté M. [C] [Y] de l'ensemble de ses demandes et débouté le mandataire liquidateur de ses demandes.

Appel a été régulièrement interjeté par M. [C] [Y] le 17 avril 2019.

Par assignation forcée notifiée par le réseau privé virtuel des avocats, le 22 août 2022, M. [C] [Y] demande à la cour d'infirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions et de :

-juger que l'employeur a procédé par travail dissimulé entre le 1er janvier 2016 et le 30 juin 2016, et en conséquence, fixer la créance salariale pour cette période à hauteur de : rappel de salaires, la somme de 30.000 € outre les congés-payés afférents soit la somme de 3.000 €,

-Vu l'article L.8223-1 du Code du Travail, sanctionnant le travail dissimulé, fixer la créance de Monsieur [C] [Y] à ce titre à hauteur de 35.000 € au passif de la liquidation de la société EDITIONS Beaumarchais Eurl,

Lesdites sommes avec intérêts et capitalisation, cette demande ayant été formée dès l'origine sur le fondement des articles 1231-6 et 1343-2 du Code Civil,

En outre, fixer les créances salariales complémentaires de Monsieur [Y] aux sommes suivantes :

- 4.803 € + 7.309 € = 12.112 €, outre les congés- payés afférents 1.211,20 €,

Ladite somme avec intérêts et capitalisation, cette demande ayant été formée dès l'origine sur le fondement des articles 1231-6 et 1343-2 du Code Civil,

-Prononcer la résolution judiciaire du contrat de travail aux torts et griefs de la société EDITIONS Beaumarchais Eurl à la date de notification de la saisine, soit le 22 octobre 2017, après avoir constaté que cette demande a été formée avant le licenciement,

-juger que cette rupture prend les conséquences d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse, et subsidiairement du fait du harcèlement moral, d'un licenciement nul,

- juger à titre subsidiaire que le licenciement notifié par l'employeur ne repose pas sur une cause réelle et sérieuse,

En conséquence,

- Fixer les créances de Monsieur [C] [Y] au passif de la liquidation de la société EDITIONS Beaumarchais Eurl ainsi qu'il suit :

- indemnité de préavis, la somme de 15.000 €, outre les congés payés sur préavis pour 1.500 €,

- indemnité de licenciement, la somme de 5.156,25 €,

- dommages et intérêts pour licenciement abusif ou licenciement nul , la somme de 50.000 €,

- dommages et intérêts pour non-inscription à une caisse de retraite de cadre, la somme de 10.000€,

- dommages et intérêts pour harcèlement moral et atteinte à la dignité et à la santé, la somme de 20.000 € à titre de, au profit de Monsieur [C] [Y],

- Dire que les sommes à caractère salarial fixé par la Cour porteront intérêt au taux légal à compter de la saisine,

- Dire que les indemnités à caractère indemnitaire prononcées par le Conseil de Prud'hommes produiront intérêt au taux légal à compter du 28 septembre 2017,

- Ordonner la capitalisation des intérêts échus par année entière conformément à l'article 1343-2 du Code civil,

- Dire que l'AGS CGEA devra garantir l'intégralité des créances alléguées au profit de Monsieur [C] [Y], dans les limites légales et réglementaires, jusque et compris les intérêts de droit,

- Déclarer l'arrêt à intervenir opposable à l'AGS CGEA,

- Condamner Maître [O] [J] es qualité de mandataire ad hoc de la société EDITIONS Beaumarchais Eurl à payer à Monsieur [C] [Y] une somme de 2.000 € au titre de l'article 700 du CPC,

- Condamner les défendeurs en tous les dépens de première instance et d'appel.

Par conclusions notifiées par réseau privé virtuel des avocats, le 17 août 2022, L'UNEDIC DELEGATION AGS CGEA IDF EST sollicite la confirmation du jugement rendu par le Conseil de prud'hommes de Paris le 20 mars 2019 en toutes ses dispositions ;

Y faisant droit,

- Débouter Monsieur [Y] de ses demandes, fins et conclusions contraires aux présentes ;

Sur la garantie de l'AGS,

- JUGER que, s'il y a lieu à fixation, celle-ci ne pourra intervenir que dans les limites de la garantie légale ;

- Juger que la garantie de l'AGS est plafonnée, toutes créances avancées pour le compte du salarié, à un des trois plafonds définis à l'article D. 3253-5 du Code du travail ;

- Juger qu'en tout état de cause, la garantie prévue aux dispositions de l'article L.3253-6 du Code du travail ne peut concerner que les seules sommes dues en exécution du contrat de travail au sens dudit article, les astreintes, dommages et intérêts mettant en oeuvre la responsabilité de droit commun de l'employeur ou de l'article 700 du Code de procédure civile étant ainsi exclus de la garantie.

- Juger qu'en tout état de cause la garantie de l'AGS ne pourra excéder, toutes créances avancées pour le compte du salarié, le plafond des cotisations maximum au régime d'assurance chômage, en vertu des dispositions des articles L. 3253-17 et D. 3253-5 du Code du travail.

- Statuer ce que de droit quant aux frais d'instance sans qu'ils puissent être mis à la charge de l'UNEDIC AGS.

Par jugement en date du 2 octobre 2020, le tribunal de commerce d'Evry a prononcé la clôture pour insuffisance d'actif des opérations de liquidation judiciaire de l'Eurl Editions Beaumarchais, Maître [O] [J] étant désigné en qualité de mandataire avec pour mission de poursuivre les instances en cours.

L'ordonnance de clôture rendue initialement le 9 novembre 2021 a été révoquée le 11 août 2022 afin de permettre l'assignation du mandataire de la société.

Une nouvelle ordonnance de clôture a été rendue le 27 septembre 2022 et l'affaire a été fixée à l'audience du 3 octobre 2022.

En application de l'article 455 du code de procédure civile, il est expressément renvoyé aux conclusions des parties pour un exposé complet du litige.

MOTIFS DE LA DECISION :

Le mandataire de la société n'a pas constitué avocat.

La cour rappelle que l'intimé qui ne conclut pas, ou dont les conclusions sont irrecevables, est réputé adopter les motifs de la décision de première instance, sans pouvoir se référer à ses conclusions ou pièces déposées devant la juridiction de première instance. Ainsi, la cour d'appel qui n'est pas saisie de conclusions de l'intimé doit uniquement examiner les motifs du jugement ayant accueilli les prétentions de cette partie en première instance.

1- Sur la demande de rappel de salaire de janvier à juin 2016

Le salarié soutient que suite à des difficultés économiques en raison de la perte du local de tir, le dirigeant de la société Editions Beaumarchais a «'singé'» une sorte de rupture pour cause économique tout en lui demandant de continuer à travailler afin de garder le contact avec la clientèle et ce sans être déclaré. Il précise que c'est ce qu'il a fait en étant «'hébergé'» dans des locaux prêtés par un dirigeant d'entreprise.

M. [C] [Y] souligne que durant ces six mois, son employeur a été mis en copie du travail qu'il a effectué et n'a cessé de le contrôler et de le diriger.

L'AGS fait valoir que M. [C] [Y] ne rapporte pas la preuve qu'il a travaillé ou qu'il s'est tenu à la disposition de la société sur la période considéré.

La cour constate que le jugement déféré fait état d'une lettre de notification de licenciement en date du 3 décembre 2018, ( ce qui compte tenu de la date du jugement ne peut que constituer une erreur matérielle, ce que confirme d'ailleurs l'exposé des prétentions et moyens de l'employeur lequel mentionne une notification en date du 3 décembre 2015). Le salarié n'a pas contesté son licenciement. Il ne peut qu'être constaté que le contrat de travail a cessé.

Par ailleurs, ce que le salarié appelle «' l'avenant du 1 er juillet 2016'» constitue en réalité un nouveau contrat de travail et nullement un avenant, peu important de ce chef la reprise de l'ancienneté au 1er avril 2015.

Contrairement à ce qu'il prétend, le salarié ne rapporte nullement la preuve qu'il a travaillé pour la société de janvier à juin 2016, l'attestation de madame [S], amie de longue date de M. [Y], étant bien insuffisante à établir la réalité de cette prestation de travail, d'autant que le salarié qui, aux termes de ses écritures, annonce la production de 500 mails adressés à la société n'en produit aucun et ne rapporte aucune preuve du travail qu'il affirme avoir effectué ou du contrôle exercé sur lui.

M. [C] [Y] est débouté de ce chef.

Le jugement est confirmé de ce chef.

2- Sur la demande de dommages et intérêts pour travail dissimulé

Compte tenu de ce qui précède, M. [C] [Y] ne peut qu'être débouté de sa demande de ce chef.

Le jugement est confirmé.

3- Sur les autres demandes de rappel de salaires

3-1- Sur les heures supplémentaires

Aux termes de l'article L. 3171-2 alinéa 1er du code du travail, lorsque tous les salariés occupés dans un service ou un atelier ne travaillent pas selon le même horaire collectif, l'employeur établit les documents nécessaires au décompte de la durée de travail, des repos compensateurs acquis et de leur prise effective, pour chacun des salariés concernés.

Selon l'article L. 3171-4 du code du travail, en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail accomplies, l'employeur fournit au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié. Au vu de ces éléments et de ceux fournis par le salarié à l'appui de sa demande, le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles. Si le décompte des heures de travail accomplies par chaque salarié est assuré par un système d'enregistrement automatique, celui-ci doit être fiable et infalsifiable.

Il résulte de ces dispositions, qu'en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail accomplies, il appartient au salarié de présenter, à l'appui de sa demande, des éléments suffisamment précis quant aux heures non rémunérées qu'il prétend avoir accomplies afin de permettre à l'employeur, qui assure le contrôle des heures de travail effectuées, d'y répondre utilement en produisant ses propres éléments. Le juge forme sa conviction en tenant compte de l'ensemble de ces éléments au regard des exigences rappelées aux dispositions légales et réglementaires précitées. Après analyse des pièces produites par l'une et l'autre des parties, dans l'hypothèse où il retient l'existence d'heures supplémentaires, il évalue souverainement, sans être tenu de préciser le détail de son calcul, l'importance de celles-ci et fixe les créances salariales s'y rapportant.

Il a été jugé que constituent des éléments suffisamment précis des tableaux mentionnant le décompte journalier des heures travaillées, peu important qu'ils aient été établis par le salarié lui-même pour les besoins de la procédure.

Par ailleurs, même en l'absence d'accord express, les heures supplémentaires justifiées par l'importance des tâches à accomplir ou réalisées avec l'accord tacite de l'employeur, qui ne pouvait en ignorer l'existence et qui ne s'y est pas opposé, doivent être payées.

En l'espèce, le salarié se contente de produire un tableau établi par ses soins qui mentionne par mois le nombres d'heures supplémentaires qu'il soutient avoir accomplies.

Ce faisant, il ne produit pas d' éléments suffisamment précis quant aux heures non rémunérées qu'il prétend avoir accomplies, ce qui ne permet pas à l'employeur, qui assure le contrôle des heures de travail effectuées, d'y répondre utilement en produisant ses propres éléments.

Dès lors le salarié ne peut qu'être débouté de sa demande de chef.

Le jugement est confirmé sur ce point.

3-2- Sur le rappel de salaire au titre de la rémunération variable

Le salarié ne justifie pas qu'il est en droit de réclamer une somme supérieure à celles qui ont été versées de ce chef. Il est débouté de sa demande et le jugement déféré confirmé.

4- Sur la demande de dommages-intérêts pour non inscription à une caisse de retraite de cadre

Le salarié a été embauché sur un emploi de responsable administratif et commercial. Si le contrat de travail initial ne mentionne pas que l'intéressé a été emploi sur un poste de cadre, son avenant du 23 novembre 2015 à effet du 1er septembre 2015 et le nouveau contrat de travail en date du 1er juillet 2017, le précise, étant constaté que le poste correspond effectivement à la catégorie cadre groupe 6 ( cadres salariés de structures dont l'effectif est inférieur à 6 salariés équivalent temps plein, notamment).

La demande du salarié est ainsi fondée. Une somme de 1.500 euros de dommages-intérêts lui est allouée de ce chef. Le jugement est infirmé.

5- Sur le harcèlement moral

Aux termes de l'article L.1152-1 du code du travail, aucun salarié ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation de ses conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel. Selon l'article L.1154-1 du même code, le salarié a la charge de présenter des éléments de fait laissant supposer l'existence d'un harcèlement et il incombe ensuite à la partie défenderesse de prouver que les faits qui lui sont imputés ne sont pas constitutifs de harcèlement et qu'ils sont justifiés par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement.

Au cas présent, le salarié fait valoir qu''après un entretien qui s'est déroulé le 28 août 2017, son employeur lui a retiré son accès au site internet de la société et la carte Sim de son téléphone professionnel et ce afin de le déstabiliser et de l'amener à la démission.

L'employeur reconnaît le retrait de la carte sim du téléphone portable professionnel de son salarié dans un mail du 5 septembre 2017. Le retrait de l'accès au site internet de la société est affirmé par l'attestation de M. [H] et n'a pas été contesté par l'employeur alors que le salarié s'en plaignait auprès de lui par courrier en date du 31 août 2017. Ce grief est retenu.

Le salarié se plaint également du non paiement de son salaire, de la «' non délivrance de bulletin de paie'» et de travail dissimulé. Ces éléments ne sont pas établit ainsi qu'il a été dit plus haut.

Ainsi ce seul élément, intervenu dans un contexte de tension entre le salarié et son employeur, liés par une amitié ancienne, et la très courte période sur laquelle s'est déroulé le retrait des instruments de travail du salarié ( lequel avait néanmoins à sa disposition le fichier clientèle), ne peut caractériser un harcèlement moral .

Le salarié est débouté de sa demande de ce chef. Le jugement est confirmé.

6- Sur la rupture du contrat de travail

L'action en résiliation judiciaire ne met pas fin au contrat de travail et implique la poursuite des relations contractuelles dans l'attente de la décision. Si le salarié est licencié avant qu'intervienne la décision judiciaire sur une demande de résiliation présentée avant la notification du licenciement, les juges doivent, en premier lieu, rechercher si la demande de résiliation était justifiée et c'est seulement dans le cas où ils estiment que la demande de résiliation judiciaire n'est pas justifiée qu'ils se prononcent sur le licenciement notifié par l'employeur postérieurement à la saisine. Si les manquements de l'employeur invoqués par le salarié sont suffisamment graves pour empêcher la poursuite du contrat de travail, le juge prononce la résiliation avec effets à la date d'envoi de la notification du licenciement.

La réalité et la gravité des manquements de l'employeur invoqués par le salarié sont souverainement appréciés par les juges du fond. La rupture du contrat de travail par résiliation judiciaire aux torts de l'employeur produit les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse ou nul, le cas échéant.

Au cas d'espèce, le salarié reproche notamment à son employeur de lui avoir retiré , après le 28 août 2017, son accès au site internet de la société et la carte Sim de son téléphone professionnel et ce afin de le déstabiliser et de l'amener à la démission.

Il a été dit plus haut que ces éléments sont établis.

L'employeur a ainsi retiré au salarié ses outils de travail, ce qui constitue des manquements suffisamment graves pour empêcher la poursuite du contrat de travail, sans pour autant constituer un harcèlement moral comme cela a été dit plus haut, sans qu'il ne soit besoin de s'intéresser au autres griefs adressés à l'employeur.

La résiliation judiciaire du contrat de travail produisant les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse doit ainsi être prononcée avec effets au jour du licenciement, soit le 2 octobre 2017.

Le jugement est infirmé de ce chef.

7- Sur les conséquence financières de la rupture

Le salaire mensuel de référence à retenir est de 5.000 euros.

7-1- Sur l'indemnité compensatrice de préavis et les congés payés afférents

Le salarié peut prétendre à 3 mois de préavis en application de la convention collective. Il lui est dû de ce chef la somme de 15.000 euros, outre la somme de 1.500 euros pour les congés payés afférents. Ces sommes seront fixées au passif de la société.

Le jugement est infirmé de ce chef.

7-2- Sur l'indemnité légale de licenciement

Elle est d'un montant de 2.708,33 euros. Cette somme sera fixée au passif de la société .

Le jugement est infirmé de ce chef.

7-3- Sur l'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse

Selon l'article L 1235-3 du code du travail dans sa version applicable au litige, 'si le licenciement d'un salarié survient pour une cause qui n'est pas réelle et sérieuse, le juge peut proposer la réintégration du salarié dans l'entreprise, avec maintien de ses avantages acquis.

Si l'une ou l'autre des parties refuse, le juge octroie une indemnité au salarié. Le montant de cette indemnité, à la charge de l'employeur, est compris entre les montants minimaux et maximaux fixés par avance audit article. Au cas d'espèce le minimum est fixé à 0,5 mois et le maximum à 3,5 mois de salaire.

Au cas d'espèce, en considération notamment de l'effectif de l'entreprise ( 1 salarié), des circonstances de la rupture, du montant de la rémunération versée à

M. [C] [Y], de son âge au jour de son licenciement ( 55 ans), de son ancienneté à cette même date en années pleine ( 2 ans), il y a lieu de lui allouer la somme de 2.500 euros ( 0,5 mois de salaire) soit l'indemnité minimale à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.

Cette somme sera fixée au passif de la société.

Le jugement est infirmé de ce chef.

8- Sur les intérêts

En application de l'article L622-28 du code de commerce, il n'y a pas lieu à intérêts légaux.

9- Sur la garantie des AGS

L'AGS doit sa garantie dans les conditions et limites prévues aux articles L.3253-6 et suivants du code du travail, notamment dans la limite des plafonds visés à l'article L.3253-17.

10- Sur les demandes accessoires

Le jugement est infirmé sur l'article 700 du code de procédure civile et sur les dépens.

Il est allouée une somme de 1.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile au salarié, en première instance.

Les dépens d'appel, suivant le principal, seront supportés par Maître [O] [J] désigné en qualité de mandataire de l'Eurl Editions Beaumarchais.

L'équité ne commande pas qu'il soit fait application de l'article 700 du code de procédure civile au profit de M. [C] [Y], en cause d'appel.

PAR CES MOTIFS :

La cour,

Infirme le jugement déféré en ce qu'il a débouté M. [C] [Y] de ses demandes de résiliation de son contrat de travail, d'indemnité compensatrice de préavis, d'indemnité légale de licenciement, de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et de celle pour non inscription à une caisse de retraite de cadre et l'a débouté de sa demande au titre des frais irrépétibles et a mis à sa charge les dépens de première instance,

Le confirme pour le surplus,

Statuant à nouveau des chefs infirmés et y ajoutant,

Prononce la résiliation judiciaire du contrat de travail de M. [C] [Y] aux torts de l'Eurl Editions Beaumarchais à effet du 2 octobre 2017,

Fixe au passif de l 'Eurl Editions Beaumarchais les créances de M. [C] [Y] comme suit':

- 15.000 à titre d'indemnité compensatrice de préavis, outre la somme de 1.500 euros pour les congés payés afférents,

- 2.708,33 euros à titre d'indemnité légale de licenciement,

- 2.500 euros à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

- 1.500 euros à titre de dommages-intérêts pour non inscription à une caisse de retraite de cadre,

- 1.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

Dit que la garantie de l'UNEDIC Délégation AGS CGEA IDF EST ne pourra intervenir que dans les limites de la garantie légale,

Dit que la garantie de l'AGS est plafonnée, toutes créances avancées pour le compte du salarié, à un des trois plafonds définis à l'article D. 3253-5 du Code du travail,

Dit n'y avoir lieu à intérêts légaux,

DEBOUTE M. [C] [Y] de sa demande fondée sur l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel ,

Condamne Maître [O] [J] es qualité de mandataire de l'Eurl Editions Beaumarchais aux dépens de première instance et d'appel.

LA GREFFIÈRE LE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 6 - chambre 4
Numéro d'arrêt : 19/05335
Date de la décision : 23/11/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-11-23;19.05335 ?
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