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18/11/2022 | FRANCE | N°17/11944

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 6 - chambre 12, 18 novembre 2022, 17/11944


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS







COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 12



ARRÊT DU 18 Novembre 2022



(n° , 2 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : S N° RG 17/11944 - N° Portalis 35L7-V-B7B-B4FAO



Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 28 Juin 2017 par le Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale de CRETEIL RG n° 14/00012



APPELANTE

URSSAF ILE DE FRANCE

[Adresse 1]

[Localité 5]

représentée p

ar Mme [G] [V] en vertu d'un pouvoir général



INTIMES

SARL [8] anciennement dénommé [7]

[Adresse 2]

[Localité 6]

non comparante, non représentée



Me [F] [Y] (SELARL [F]) - Mandataire...

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 12

ARRÊT DU 18 Novembre 2022

(n° , 2 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : S N° RG 17/11944 - N° Portalis 35L7-V-B7B-B4FAO

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 28 Juin 2017 par le Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale de CRETEIL RG n° 14/00012

APPELANTE

URSSAF ILE DE FRANCE

[Adresse 1]

[Localité 5]

représentée par Mme [G] [V] en vertu d'un pouvoir général

INTIMES

SARL [8] anciennement dénommé [7]

[Adresse 2]

[Localité 6]

non comparante, non représentée

Me [F] [Y] (SELARL [F]) - Mandataire liquidateur de S.E.L.A.R.L. [F] FLOREK

[Adresse 4]

[Localité 3]

non comparant, non représenté

S.E.L.A.R.L. [F] FLOREK

[Adresse 4]

[Localité 3]

non comparante, non représentée

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 06 Octobre 2022, en audience publique et double rapporteur, les parties ne s'y étant pas opposées, devant M. Raoul CARBONARO, Président de chambre et M. Gilles REVELLES, Conseiller, chargés du rapport.

Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

M. Raoul CARBONARO, Président de chambre

M. Gilles REVELLES, Conseiller

M. Gilles BUFFET, Conseiller

Greffier : Mme Claire BECCAVIN, lors des débats

ARRET :

- REPUTE CONTRADICTOIRE

- prononcé

par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

-signé par M. Raoul CARBONARO, Président de chambre et par Mme Claire BECCAVIN, greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

La cour statue sur l'appel interjeté par l'URSSAF de l'Île-de-France d'un jugement rendu le 28 juin 2017 par le tribunal des affaires de sécurité sociale de Créteil dans un litige l'opposant à la SARL [8] exerçant sous l'enseigne [7].

Les circonstances de la cause ayant été correctement rapportées par le tribunal dans son jugement au contenu duquel la cour entend se référer pour un plus ample exposé, il suffit de rappeler que les services de l'URSSAF se sont aperçus que la société [7] devenue [8] appliquait l'exonération de cotisations patronales de sécurité sociale et d'allocations familiales dont bénéficiaient les jeunes entreprises innovantes réalisant des projets de recherches et de développement en intégralité alors qu'en vertu de la réglementation et de sa date de création, elle ne pouvait bénéficier que d'un taux de 80 % à compter du 1er janvier 2012 est de 70 % à compter du 1er janvier 2013. L'URSSAF a donc envoyé un courrier informatif le 3 juin 2013 et, faute de réaction de la société, une mise en demeure en date du 22 octobre 2013 pour réclamer les cotisations manquantes au titre de l'année 2012 et des mois de janvier à juin 2013 soit la somme de 44'128 euros de cotisations augmentée de 3 336 euros de majorations de retard provisoires. Le 20 décembre 2013, elle signifiait une contrainte dans le cadre du recouvrement des sommes en question. La société en a formé opposition.

Par jugement en date du 28 juin 2017, le tribunal a :

- déclaré recevable et bien fondée l'opposition formée par la société ;

- annulé la mise en demeure délivrée le 22 octobre 2013 ;

- annulé la contrainte émise le 22 novembre 2013 ;

- débouté la société de sa demande en application de l'article 700 du code de procédure civile ;

- dit que les frais de signification resteraient à la charge de l'URSSAF.

Pour motiver ainsi, le tribunal a considéré que le litige concernait l'année pour laquelle la société aurait dû commencer l'application de la dégressivité, l'URSSAF prétendant à l'année 2012 et la société à l'année 2013. Il a considéré que la mise en demeure était irrégulière, les simples indications d'absence de versement pour le mois de janvier 2013 et d'insuffisance suite au rapprochement du tableau annuel et des bordereaux récapitulatifs ne permettant pas à l'employeur de connaître le motif de la mise en demeure, de contrer son argumentation et d'assurer sa défense.

Le jugement a été notifié par lettre recommandée avec demande d'accusé de réception remise le 31 août 2017 à l'URSSAF de l'Île-de-France qui en a interjeté appel par lettre recommandée avec demande d'accusé de réception adressée le 27 septembre 2017.

Suite à la liquidation judiciaire de la SARL [8] exerçant sous l'enseigne [7], l'URSSAF de l'Île-de-France a assigné Me [Y] [F], pris en sa qualité de liquidateur de la société pour l'audience du 6 octobre 2022 à 13 h30, date à laquelle le dossier a été plaidé, en lui signifiant ses conclusions.

Par conclusions écrites conjointes aux recours enrôles sous les numéros 17/11944, 17/11946 17/14535, visées et développées oralement à l'audience par son représentant, l'URSSAF de l'Île-de-France demande à la cour de :

- déclarer recevable son appel ainsi que bien fondé ;

- réformer le jugement du 28 juin 2017 rendu par le tribunal des affaires de sécurité sociale de Créteil

- statuant nouveau

- fixer sa créance à la somme de 44 128 euros ;

- condamner la SARL [8] exerçant sous l'enseigne [7] à lui payer la somme de 1 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.

L'URSSAF conteste l'interprétation du tribunal et considère que sa mise en demeure est conforme puisqu'elle comportait le numéro de cotisant, la mention générale, la période concernée, le motif de la mise en recouvrement ainsi que le montant des cotisations réclamées et majorations de retard. La jurisprudence ne prévoit pas notamment que le motif qui est spécifié sur les mises en demeure doive correspondre à un certain degré de précision contrairement à ce qui est allégué dans le jugement critiqué.

Au fond, elle indique avoir notifié le 3 juin 2013 à la société qu'elle ne pouvait plus appliquer le taux code type de personnel 734 correspondant à l'exonération à taux plein, ce que cette dernière n'a pas fait. La société ne pouvait donc ignorer qu'un appel de cotisation allait intervenir par le biais de la mise en demeure. Elle ajoute que la SARL [8] exerçant sous l'enseigne [7] ne pouvait prétendre à un avis favorable de l'administration fiscale à la reconnaissance de son statut, la demande présentée étant incomplète, ce qui ne permet pas de retenir un accord tacite. La Direction Départementale des Services Fiscaux a conclu au fait que la société ne pouvait bénéficier du statut de jeune entreprise innovante. En outre, les conditions requises de l'article 44 sexies O du code général des impôts n'étaient pas réunies, au regard de l'existence de liens personnels, de relations commerciales privilégiées entre les société [7] et [9].

L'URSSAF de l'Île-de-France a justifié de sa déclaration de créance réalisée le 10 décembre 2021.

Me [Y] [F], pris en sa qualité de liquidateur de la SARL [8] exerçant sous l'enseigne [7] a écrit pour indiquer ne pas avoir de fonds pour présenter sa défense et n'a pas comparu à l'audience.

SUR CE,

Sur la régularité de la mise en demeure

Selon les articles L. 244-2 et L. 244-9 du code de la sécurité sociale, rendus applicables au recouvrement des cotisations et contributions par les organismes du régime social des indépendants par les articles L. 133-6-4, I et L. 612-12 du même code, la mise en demeure qui constitue une invitation impérative adressée au débiteur d'avoir à régulariser sa situation dans le délai imparti, et la contrainte délivrée à la suite de cette mise en demeure restée sans effet, doivent permettre à l'intéressé d'avoir connaissance de la nature, de la cause et de l'étendue de son obligation ; qu'à cette fin, il importe qu'elles précisent, à peine de nullité, outre la nature et le montant des cotisations réclamées, la période à laquelle elles se rapportent, sans que soit exigée la preuve d'un préjudice.

Le fait de mentionner dans la mise en demeure que les cotisations étaient appelées au titre du régime général et incluaient la contribution à l'assurance-chômage et les cotisations AGS, en précisant la période en cause est suffisant pour permettre à la société de connaître la nature des cotisations mises à sa charge (2e Civ., 12 mai 2021, pourvoi n° 20-12.264).

Il résulte des articles L. 244-2 et R. 244-1 du code de la sécurité sociale que le défaut de réception par son destinataire d'une mise en demeure adressée par lettre recommandée avec demande d'avis de réception n'affecte ni la validité de celle-ci ni la validité des actes de poursuite subséquents (2e Civ., 27 janvier 2022, pourvoi n° 20-21.538)

En l'espèce, la mise en demeure du 22 octobre 2013 mentionne qu'elle constitue une mise en demeure récapitulative des cotisations du régime général. Elle rappelle que les cotisations appelées au titre du régime général incluent les contributions d'assurance chômage et les cotisations AGS et, pour chaque mois, le montant des cotisations appelées et des majorations de retard.

La mise en demeure ne distingue pas avec précision la nature des cotisations appelées dans le détail, alors qu'elle ne fait pas suite à une lettre d'observations. Cependant, elle comporte le renvoi aux cotisations du régime général incluant les cotisations d'assurance maladie, d'assurance vieillesse, d'allocations familiales ou d'accidents du travail. Elle précise en outre que la cause de la créance est un état de rapprochement du tableau récapitulatif annuel et des bordereaux de cotisations. Elle permettait à la société de connaître la cause, la nature et l'étendue de son obligation, s'agissant de cotisations calculées sur la différence de taux entre l'exonération à taux plein appliqué par la SARL [8] exerçant sous l'enseigne [7] et le taux réduit que l'URSSAF de l'Île-de-France estimait applicable avant le contrôle qu'elle a réalisé postérieurement, puisqu'elle faisait suite à un courrier du 3 juin 2013 indiquant que l'exonération ne serait plus que partielle.

La mise en demeure a été adressée en lettre recommandée avec demande d'accusé de réception remise le 23 octobre 2013.

Dès lors, la mise en demeure est régulière et le jugement rendu sera infirmé.

La contrainte faisant référence à la mise en demeure et rappelant pour les mêmes montants les cotisations appelées et les majorations calculées pour les mêmes périodes est donc régulière.

Sur le fond du droit

L'article 131 de la loi de finances pour 2004, n° 2003-1311 du 30 décembre 2003, énonce que :

'I. - Les gains et rémunérations, au sens de l'article L. 242-1 du code de la sécurité sociale et de l'article L. 741-10 du code rural, versés au cours d'un mois civil aux personnes mentionnées au II appartenant aux jeunes entreprises innovantes réalisant des projets de recherche et de développement définies à l'article 44 sexies-0 A du code général des impôts sont exonérés des cotisations à la charge de l'employeur au titre des assurances sociales, des allocations familiales, des accidents du travail et des maladies professionnelles.

II. - Les cotisations exonérées sont celles qui sont dues au titre, d'une part, des salariés énumérés au III et au titre desquels l'employeur est soumis à l'obligation édictée par l'article L. 351-4 du code du travail et, d'autre part, des mandataires sociaux qui participent, à titre principal, au projet de recherche et de développement de l'entreprise.

III. - Les salariés mentionnés au II sont les chercheurs, les techniciens, les gestionnaires de projets de recherche et de développement, les juristes chargés de la protection industrielle et des accords de technologie liés au projet et les personnels chargés des tests préconcurrentiels.

IV. - L'avis exprès ou tacite délivré par l'administration fiscale, saisie par une entreprise dans les conditions prévues au 4° de l'article L. 80 B du livre des procédures fiscales, est opposable à l'organisme chargé du recouvrement des cotisations de sécurité sociale compétent.

V. - L'exonération prévue au I est applicable au plus jusqu'au dernier jour de la septième année suivant celle de la création de l'entreprise. Toutefois, si au cours d'une année l'entreprise ne satisfait plus à l'une des conditions requises pour bénéficier du statut de jeune entreprise innovante réalisant des projets de recherche et de développement et fixées par l'article 44 sexies-0 A du code général des impôts, elle perd définitivement le bénéfice de l'exonération prévue au I.

VI. - Le bénéfice des dispositions du présent article ne peut être cumulé, pour l'emploi d'un même salarié, ni avec une aide d'Etat à l'emploi, ni avec une autre exonération totale ou partielle de cotisations patronales, ni avec l'application de taux spécifiques, d'assiettes ou de montants forfaitaires de cotisations.

VII. - Le droit à l'exonération est subordonné à la condition que l'entreprise ait rempli ses obligations de déclaration et de paiement à l'égard de l'organisme de recouvrement des cotisations de sécurité sociale et d'allocations familiales.

VIII. - Un décret détermine les modalités d'application du présent article.'

Il est constant, comme cela résulte de la lettre d'observations du 5 novembre 2013, que la société n'a pas bénéficié du rescrit fiscal suite à sa demande du 15 novembre 2009. Le 12 août 2013, la Direction Départementale des Finances Publiques du Val-de-Marne a indiqué que la société ne pouvait bénéficier du statut de jeune entreprise innovante, la condition tenant au caractère réellement nouveau de l'entreprise n'étant pas remplie. La société ne peut donc s'abriter derrière un avis exprès délivré par l'administration fiscale au sens du paragraphe IV de l'article précité. Elle ne démontre pas avoir rempli les conditions permettant d'exciper d'un accord tacite.

La SARL [8] exerçant sous l'enseigne [7] ne dépose aucune pièce justifiant de son droit à bénéficier de la réduction jeune entreprise innovante.

Dès lors, le rappel de cotisations par l'URSSAF de l'Île-de-France était fondé portant sur la différence entre le taux plein que l'entreprise avait décidé d'appliquer et le taux réduit que l'URSSAF de l'Île-de-France estimait applicable, antérieurement au contrôle qui a conclut à l'absence de possibilité de procéder à toute exonération, sans qu'il y ait lieu de discuter de la période à prendre en compte avant la dégressivité de l'exonération.

Il convient en conséquence de fixer la créance de l'URSSAF de l'Île-de-France au passif de la SARL [8] exerçant sous l'enseigne [7] représenté par Me [Y] [F], pris en sa qualité de liquidateur, à la somme de 44 128 euros de cotisations, les majorations de retard étant annulées du fait de la liquidation judiciaire.

La SARL [8] exerçant sous l'enseigne [7], qui succombe, sera condamnée aux dépens d'appel, la demande formée au titre des frais irrépétibles étant rejetée.

PAR CES MOTIFS

LA COUR,

DÉCLARE recevable l'appel de l'URSSAF de l'Île-de-France ;

INFIRME le jugement rendu le 28 juin 2017 par le tribunal des affaires de sécurité sociale de Créteil ;

Statuant à nouveau ;

FIXE au passif de la liquidation judiciaire de la SARL [8] exerçant sous l'enseigne [7] représentée par Me [Y] [F], pris en sa qualité de liquidateur, la somme de 44 128 euros ;

DÉBOUTE l'URSSAF de l'Île-de-France de sa demande formée en application de l'article 700 du code de procédure civile ;

CONDAMNE la SARL [8] exerçant sous l'enseigne [7] aux dépens d 'appel.

La greffière Le président


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 6 - chambre 12
Numéro d'arrêt : 17/11944
Date de la décision : 18/11/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-11-18;17.11944 ?
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