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16/11/2022 | FRANCE | N°21/00847

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 5 - chambre 1, 16 novembre 2022, 21/00847


REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS







COUR D'APPEL DE PARIS



Pôle 5 - Chambre 1



ARRET DU 16 NOVEMBRE 2022



(n° 177/2022, 9 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : 21/00847 - N° Portalis 35L7-V-B7F-CC5LI



Décision déférée à la Cour : Jugement du 1er Octobre 2020 -Tribunal de Commerce de Paris - 3ème chambre - RG n° J202000310





APPELANTE



Société DIGITAL EDITORS POSTPRODUKTIONS

Société de droit allemand au

capital de 50 000 euros

Immatriculée au registre des sociétés de MUNICH sous le numéro HRB 113929

Agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés ès qualités audi...

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 5 - Chambre 1

ARRET DU 16 NOVEMBRE 2022

(n° 177/2022, 9 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : 21/00847 - N° Portalis 35L7-V-B7F-CC5LI

Décision déférée à la Cour : Jugement du 1er Octobre 2020 -Tribunal de Commerce de Paris - 3ème chambre - RG n° J202000310

APPELANTE

Société DIGITAL EDITORS POSTPRODUKTIONS

Société de droit allemand au capital de 50 000 euros

Immatriculée au registre des sociétés de MUNICH sous le numéro HRB 113929

Agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés ès qualités audit siège

Duringstrasse 22

[Localité 7]

Représentée et assistée de Me Sébastien LACHAUSSEE de la SELEURL Lachaussée Avocat, avocat au barreau de PARIS, toque C0292

INTIMEES

SA EUROPACORP

Société au capital de 41 514 758,54 euros

Immatriculée au Registre du Commerce et des Sociétés de BOBIGNYsous le numéro 384 824 041

Prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés ès qualités audit siège

[Adresse 5]

[Localité 11]

Représentée par Me Luca DE MARIA de la SELARL PELLERIN - DE MARIA - GUERRE, avocat au barreau de PARIS, toque : L0018

Assistée de Me Isabelle GIMONET du cabinet Arnaud LACROIX de CARIES de SENILHES, avocats au barreau de PARIS, toque : C2338

S.E.L.A.R.L. FHB

Prise en la personne de Me Hélène BOURBOULOUX,

[Adresse 2],

[Adresse 12]

[Localité 9]

Es qualités d'administrateur judiciaire avec mission d'assistance

Représentée par Me Luca DE MARIA de la SELARL PELLERIN - DE MARIA - GUERRE, avocat au barreau de PARIS, toque : L0018

Assistée de Me Isabelle GIMONET du cabinet Arnaud LACROIX de CARIES de SENILHES, avocats au barreau de PARIS, toque : C2338

S.E.L.A.F.A. MJA

Prise en la personne de Maitre Axel CHUINE,

[Adresse 1]

[Localité 10]

Es qualités de mandataire judiciaire

Représentée par Me Luca DE MARIA de la SELARL PELLERIN - DE MARIA - GUERRE, avocat au barreau de PARIS, toque : L0018

Assistée de Me Isabelle GIMONET du cabinet Arnaud LACROIX de CARIES de SENILHES, avocats au barreau de PARIS, toque : C2338

SCP D'ADMINISTRATEURS JUDICIAIRES Patrice BRIGNIER

Immatriculée au Registre du Commerce et des Sociétés sous le numéro 347 464 752

[Adresse 4]

[Localité 10]

Es qualités d'administrateur judiciaire avec mission d'assistance

N'ayant pas constitué avocat

PARTIES INTERVENANTES

S.E.L.A.R.L. FHB,

Prise en la personne de de Maître Hélène BOURBOULOUX

[Adresse 3]

[Localité 8]

Es qualités de commissaire à l'exécution du plan de sauvegarde de la société EUROPACORP

Représentée par Me Luca DE MARIA de la SELARL PELLERIN - DE MARIA - GUERRE, avocat au barreau de PARIS, toque : L0018

Assistée de Me Isabelle GIMONET du cabinet Arnaud LACROIX de CARIES de SENILHES, avocats au barreau de PARIS, toque : C2338

S.E.L.A.F.A. MJA,

Prise en la personne de Maitre Axel CHUINE,

[Adresse 1]

[Localité 10]

Es qualités de commissaire à l'exécution du plan et de mandataire judiciaire à la procédure de sauvegarde de la société EUROPACORP

Représentée par Me Luca DE MARIA de la SELARL PELLERIN - DE MARIA - GUERRE, avocat au barreau de PARIS, toque : L0018

Assistée de Me Isabelle GIMONET du cabinet Arnaud LACROIX de CARIES de SENILHES, avocats au barreau de PARIS, toque : C2338

SELARL BALLY MJ

Prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés ès qualités audit siège

[Adresse 6]

[Localité 10]

Es qualités de mandataire judiciaire

Représentée par Me Luca DE MARIA de la SELARL PELLERIN - DE MARIA - GUERRE, avocat au barreau de PARIS, toque : L0018

Assistée de Me Isabelle GIMONET du cabinet Arnaud LACROIX de CARIES de SENILHES, avocats au barreau de PARIS, toque : C2338

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l'article 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 04 octobre 2022, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Mme Françoise BARUTEL, conseillère, et Mme Isabelle DOUILLET, , présidente, chargée d'instruire l'affaire, laquelle a préalablement été entendue en son rapport.

Ces magistrates ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Mme Isabelle DOUILLET, présidente de chambre

Mme Françoise BARUTEL, conseillère

Mme Déborah BOHÉE, conseillère.

Greffier, lors des débats : Mme Karine ABELKALON

ARRÊT :

par défaut

par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

signé par Isabelle DOUILLET, Présidente de chambre et par Karine ABELKALON, Greffière, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

EXPOSÉ DU LITIGE

La société de droit allemand DIGITAL EDITORS POSTPRODUKTIONS (ci-après, la société DIGITAL) a pour activité la post-production et le montage de films cinématographiques ; elle a été fondée par M. [T] [N].

La société EUROPACORP est une société française de production et distribution de films, fondée notamment par M. [L] [G], côtée à la bourse de Paris, qui se présente comme le plus grand studio de cinéma européen.

Par contrat signé le 1er avril 2016, la société EUROPACORP a confié à la société DIGITAL des missions de post-production d'un long métrage intitulé Miss [R] qui est sorti en salles le 7 mars 2017.

La société EUROPACORP indique avoir réglé, au titre des prestations de service effectuées par la société DIGITAL et du remboursement de frais en lien avec la mission de post-production, une somme globale de 185 280,78 €.

La société DIGITAL a estimé qu'un solde lui restait dû et que la société EUROPACORP avait par ailleurs unilatéralement et à son insu appliqué à son gérant, M. [N], un statut de salarié pour la partie des prestations fournies en France, alors que ces prestations avaient toujours été fournies par M. [N] au nom de sa société et non à titre personnel, et qu'elle lui avait en conséquence indûment réclamé un formulaire 'A1" à fournir à l'administration fiscale française en cas de travail détaché.

C'est dans ce contexte que, par acte du 7 mars 2018, la société DIGITAL a assigné la société EUROPACORP devant le tribunal de commerce de Paris afin d'obtenir le paiement d'un solde de 4.307,92 € qu'elle estimait lui rester dû, outre le versement de dommages et intérêts à hauteur de 8.629,60 € en réparation de son préjudice né de la violation, selon elle, par la société EUROPACORP de ses obligations contractuelles.

La société EUROPACORP ayant fait l'objet d'une procédure de sauvegarde en vertu d'un jugement du tribunal de commerce de Bobigny du 13 mai 2019, les mandataires judiciaires ont été mis en la cause et les procédures ont été jointes.

Par jugement du 1er octobre 2020, le tribunal de commerce de Paris a :

- fixé au passif de la société EUROPACORP le montant de 132,82 € au titre du solde de la créance dû à la société DIGITAL sur l'ensemble de ses factures,

- condamné la société EUROPACORP aux dépens,

- fixé au passif de la société EUROPACORP le montant de 3 000€ dû à la société DIGITAL au
titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- débouté les parties de leurs demandes plus amples, autres ou contraires,

- ordonné l'exécution provisoire.

Le 8 janvier 2021, la société DIGITAL a interjeté appel de ce jugement.

Dans ses uniques conclusions transmises le 8 avril 2021, la société DIGITAL demande à la cour :

- d'infirmer le jugement en ce qu'il a :

- fixé' au passif de la société EUROPACORPS le montant de 132,82 € au titre du solde de la créance due à la société DIGITAL sur l'ensemble de ses factures,

- débouté la société DIGITAL de ses demandes plus amples, autres ou contraires,

- statuant à nouveau,

- de constater qu'EUROPACORP a violé ses obligations contractuelles stipulées aux articles 2, 3, 5 et 7 du contrat du 1er avril 2016,

- de juger qu'EUROPACORP a agi de manière fautive et de mauvaise foi en violant ses obligations contractuelles,

- en conse'quence,

- de condamner EUROPACORP à verser à la société DIGITAL la somme de 4.307,92 € au titre du solde restant dû, augmenté des intérêts de retard,

- de condamner EUROPACORP à verser à DIGITAL EDITORS la somme de 8.629,60 € au titre de re'paration du pre'judice qu'elle lui a causé,

- en tout état de cause,

- d''ordonner l'exécution provisoire du jugement à intervenir',

- de condamner EUROPACORP à verser à DIGITAL EDITORS la somme de 10.000 euros, sauf à parfaire, au titre de l'article 700 du code de proce'dure civile,

- de condamner EUROPACORP aux entiers de'pens de la premie're instance et de l'appel.

Dans leurs uniques conclusions transmises le 8 juillet 2021, la société EUROPACORP, la SELARL FHB, prise en la personne de Me BOURBOULOUX, en qualité de commissaire à l'exécution du plan, la SELAFA MJA, prise en la personne de Me CHUINE, en qualité de commissaire à l'exécution du plan et de mandataire judiciaire, et la SELARL BALLY MJ, en qualité de mandataire judiciaire, demandent à la cour :

- de confirmer le jugement en toutes ses dispositions sauf en ce qu'il l'a déboutée de sa demande reconventionnelle pour proce'dure abusive,

- de débouter la société DIGITAL de ses demandes,

- statuant à nouveau,

- de condamner la société DIGITAL à lui verser la somme de 3.000 euros de dommages et intérêts en réparation des préjudices que lui cause cette action manifestement abusive,

- en tout état de cause,

- de condamner la socie'te' DIGITAL au paiement de la somme de 6.000 euros au titre de l'article 700 du code de proce'dure civile et aux de'pens.

L'ordonnance de clôture est du 31 mai 2022.

MOTIFS

En application des dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, il est expressément renvoyé, pour un exposé exhaustif des prétentions et moyens des parties, aux conclusions écrites qu'elles ont transmises, telles que susvisées.

Sur la demande en paiement de la société DIGITAL résultant de l'exécution du contrat

La société DIGITAL soutient que la société EUROPACORP reste lui devoir une somme globale de 4 307,92 € en règlement de trois factures, soit :

' une facture DE 23/16 du 27 juillet 2016 d'un montant total de 1.354, 63 € (frais pour matériel de travail) sur laquelle resterait dûe une somme de 45,98 € ;

' une facture DE 29/16 du 4 octobre 2016 d'un montant total de 17 640 € (correspondant à des prestations de post-production sur la période du 5 septembre au 1er octobre 2016) sur laquelle resterait dûe une somme de 3 099 € ;

' une facture DE 31/16 du 4 octobre 2016 d'un montant de 1 876, 09 € (dépenses engagées en juillet 2016 par DIGITAL et « handling fees ») sur laquelle resterait dûe une somme de 1 162,94  €.

Sur la facture DE 23/16 du 27 juillet 2016

Le tribunal a constaté que la société EUROPACORP reconnaissait devoir 41,98 € et a retenu cette somme dans le calcul de la somme globale de 132,82 € fixée au passif de la société défenderesse. La société DIGITAL demande la confirmation du jugement sur ce point (page 11 de ses écritures) tout en mentionnant la somme de 45,98 € au titre de ses réclamations (page 16 de ces mêmes écritures), l'indication de ce dernier montant ne pouvant relever que d'une erreur matérielle.

Sur la facture DE 29/16 du 4 octobre 2016

La société DIGITAL indique que cette facture correspond à des prestations de post-production réalisées en France par son gérant, M. [N] au nom de la société, comme le prévoyait le contrat de prestation de services conclu entre les parties (article 3 du contrat) ; que la société EUROPACORP a unilatéralement et arbitrairement considéré ces prestations comme étant réalisées par M. [N] en tant que son employé, alors qu'aucun contrat de travail n'a été conclu entre M. [N] et la société EUROPACORP ; que c'est à tort que le tribunal a retenu que la rémunération de la prestation sous forme de salaire en France avait finalement été acceptée ; que M. [N], employé à temps plein au sein de la société DIGITAL EDITORS, n'aurait d'ailleurs jamais pu s'engager parallèlement en tant que salarié d'une autre société ; que la société EUROPACORP a donc indûment procédé au paiement, sur le compte bancaire de la société DIGITAL EDITORS, d'une partie de cette facture 'par virement et par bulletin de salaires' après déduction des charges qu'elle reversait, sans son accord, aux organismes sociaux français ; que les sommes concernées étant des revenus réglés sur facture par virement bancaire sur son compte, déclarés comme tels en Allemagne, et non pas des revenus perçus à titre personnel par M. [N], il lui est impossible de recouvrer à titre personnel auprès du fisc allemand la somme retenue en France par la société EUROPACORP ; qu'elle est donc bien fondée à réclamer le paiement des sommes déduites par cette dernière.

La société EUROPACORP répond qu'elle a procédé au paiement de la facture de 17 640 euros par virement et bulletin de salaires en accord avec la société DIGITAL EDITORS ainsi que le tribunal l'a retenu ; que la retenue à la source à laquelle elle a procédé sur le salaire de M. [N] ne saurait faire l'objet d'un remboursement au bénéfice de la société DIGITAL, laquelle pourra, en vertu de la convention fiscale conclue entre la France et l'Allemagne le 21 juillet 1959, déduire cette somme de sa déclaration fiscale en Allemagne.

Ceci étant exposé, la somme de 3 099 € réclamée au titre de la facture d'un montant de 17 640 € correspond à la retenue à la source opérée par la société EUROPACORP sur les salaires de M. [N].

C'est à juste raison que le tribunal a estimé que le principe du paiement de la facture sous forme de salaire versé à M. [N] avait été accepté par la société DIGITAL au vu (i) du courriel envoyé le 7 juillet 2017 par la société EUROPACORP à M. [N] indiquant : 'Comme convenu, nous avons remboursé 3 885,07 € correspondant aux charges sociales françaises retenues sur les factures' DE2016 et ' DE29/16. Par contre, nous avons précompté une retenue à la source, acompte sur impôt, d'un montant de 3 099€. Cette somme devra être déduite de votre déclaration d'impôt. Nous avons relancé le fisc français afin d'avoir le certificat', (ii) du 'certificat de recette' en date du 19 juillet 2017, émis par la direction générale des finances publiques à la demande de la société EUROPACORP, portant certification du paiement de la retenue à la source concernant M. [N] résidant en Allemagne pour un montant de 2 423 €, (iii) de la réponse du conseil de la société DIGITAL à la société EUROPACORP, le 25 juillet suivant : 'Je vous remercie pour l'envoi des justificatifs fiscaux (...)' et (iv) du courrier du conseil de la société DIGITAL du 9 janvier 2018 mentionnant le fait que la société EUROPACORP avait finalement consenti à 'communiquer un document fiscal permettant à DIGITAL EDITORS le remboursement de certaines sommes auprès du fisc allemand'.

Il n'est pas contesté qu'en vertu de la convention fiscale conclue entre la France et l'Allemagne le 21 juillet 1959 (article 20 - '(...) Sous réserve des dispositions des alinéas b et c, sont exclus de la base de l'imposition allemande les revenus provenant de France et les éléments de la fortune situés en France qui, en vertu de la présente Convention, sont imposables en France (...)'), les retenues sur salaires opérées par un employeur français peuvent être déduites de déclarations fiscales effectuées par le salarié allemand en Allemagne.

La société allemande DIGITAL, qui a consenti au règlement des factures sous forme de salaires versés à son gérant, ne produit aucun élément venant confirmer l'impossibilité qu'elle allègue d'obtenir de l'administration fiscale allemande, directement ou indirectement par l'intermédiaire de son gérant, la déduction, de sa déclaration fiscale, des sommes correspondant aux retenues opérées par la société EUROPACORP. Elle ne peut, dans ces conditions, prétendre au remboursement des sommes concernées.

Sur la facture DE 31/16 du 4 octobre 2016

La société DIGITAL fait valoir que cette facture correspond à des frais avancés par elle pour les besoins de la post-production du film entre juillet et septembre 2016 et justifiés (soit 803,99 €), ainsi qu'à des 'handling fees' (frais de dossier), à savoir des frais de gestion, couramment pratiqués dans le secteur de la post-production cinématographique, s'élevant à 20% des dépenses totales avancées par elle (soit 1 072,10 €) ; que ces frais de gestion avaient été prévus dans ses conditions générales soumises à l'approbation des producteurs du film et avaient été acceptés par la société EUROPACORP ; que la facture demeure partiellement impayée, le solde restant dû s'élevant à 1.162, 94 €.

La société EUROPACORP conteste devoir toute somme au titre de 'handling fees' et indique avoir réglé la somme de 713,15 € correspondant à des frais dûment justifiés par la société DIGITAL.

C'est à juste raison que le tribunal a retenu que, le contrat prévoyant un remboursement des frais sur justificatifs, la somme réclamée au titre des 'handling fees' (1 072,10 €), non justifiés, n'était pas due et que, compte tenu du versement déjà effectué à hauteur de 713,15 €, la somme restant due par la société DIGITAL s'élève à 90,84 €. La société DIGITAL ne produit aucun élément établissant que le paiement de 'handling fees' avait été accepté par la société EUROPACORP, ses pièces 11 et 12 auxquelles elle renvoie montrant au contraire le refus du département comptable de la société EUROPACORP de prendre en charge ces frais de dossier.

Il résulte de ce qui précède que le jugement sera confirmé en ce qu'il a fixé au passif de la société EUROPACORP le montant de 132,82 € au titre du solde de la créance dû à la société DIGITAL sur l'ensemble de ses factures et la société DIGITAL sera déboutée du surplus de ses demandes de ce chef.

Sur la demande indemnitaire de la société DIGITAL fondée sur la responsabilité contractuelle de la société EUROPACORP

La société DIGITAL soutient que la société EUROPACORP a violé ses obligations contractuelles stipulées aux articles 2, 3, 5 et 7 du contrat et agi de mauvaise foi en ce qu'elle a refusé sans raison valable de lui verser la somme correspondant à des services rendus et des frais avancés en pleine conformité avec les engagements issus du contrat, et en ce qu'elle n'a pas respecté le contrat en appliquant unilatéralement et malgré l'opposition de son cocontractant, à M. [N] un statut de salarié, ce qui a entraîné des conséquences préjudiciables pour elle sur le plan comptable et fiscal. Elle ajoute que la mauvaise foi de la société EUROPACORP, acteur majeur du secteur de la production cinématographique, est indéniable et a entraîné pour elle des 'frais extraordinaires' afin de faire valoir ses droits.

La société EUROPACORP répond qu'elle a parfaitement respecté les obligations qui étaient les siennes conformément au contrat et que seule la somme de 132,82 € est due à ce jour, ajoutant que la société DIGITAL a fait preuve de négligences et d'approximation dans l'émission de ses factures et de retard dans la communication des justificatifs de frais.

C'est pour de justes motifs que le tribunal a rejeté la demande de la société DIGITAL, retenant que les frais engagés par la société DIGITAL pour faire valoir ses droits relèvent essentiellement d'un suivi administratif et comptable de factures et de leur règlement. Il sera ajouté que le bien fondé extrêmement partiel des prétentions de la société DIGITAL quant au paiement de ses factures ne peut caractériser une faute intentionnelle ou même seulement de négligence de la part de sa cocontractante dans l'exécution du contrat.

Le jugement sera donc également confirmé en ce qu'il a rejeté la demande de la société DIGITAL fondée sur la responsabilité contractuelle de la société EUROPACORP.

Sur la demande de la société EUROPACORP pour procédure abusive

L'accès au juge étant un droit fondamental et un principe général garantissant le respect du droit, ce n'est que dans des circonstances tout à fait exceptionnelles que le fait d'exercer une action en justice est susceptible de constituer un abus.

En l'espèce, le bien fondé, même seulement très partiel, des prétentions de la société DIGITAL fait obstacle à la reconnaissance d'une faute quelconque de sa part ayant fait dégénérer en abus son droit d'agir en justice.

Le jugement sera donc également confirmé en ce qu'il a rejeté la demande formée par la société EUROPACORP pour procédure abusive.

Il n'est pas plus établi que le présent recours a revêtu un caractère abusif qui ouvrirait droit à indemnité compensatoire. La demande en ce qu'elle porterait sur l'appel interjeté par la société DIGITAL sera également rejetée.

Sur les dépens et les frais irrépétibles

La société DIGITAL, partie perdante en appel, sera condamnée aux dépens de cet appel et gardera à sa charge les frais non compris dans les dépens qu'elle a exposés à l'occasion de la présente instance, les dispositions prises sur les dépens et frais irrépétibles de première instance étant confirmées.

La somme qui doit être mise à la charge de la société DIGITAL au titre des frais non compris dans les dépens exposés par la société EUROPACORP et ses mandataires judiciaires, peut être équitablement fixée à 3 000 €.

PAR CES MOTIFS,

LA COUR,

Confirme le jugement du tribunal de commerce en toutes ses dispositions,

Y ajoutant,

Déboute la société EUROPACORP de sa demande pour appel abusif,

Condamne la société DIGITAL aux dépens d'appel et au paiement à la société EUROPACORP et à ses mandataires judiciaires de la somme de 3 000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

LA GREFFIÈRE LA PRÉSIDENTE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 5 - chambre 1
Numéro d'arrêt : 21/00847
Date de la décision : 16/11/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-11-16;21.00847 ?
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