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02/11/2022 | FRANCE | N°21/14698

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 5 - chambre 1, 02 novembre 2022, 21/14698


REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS







COUR D'APPEL DE PARIS



Pôle 5 - Chambre 1



ARRET DU 02 NOVEMBRE 2022



(n° 170/2022, 9 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : 21/14698 - N° Portalis 35L7-V-B7F-CEGLY



Décision déférée à la Cour : Ordonnance du juge de la mise en état du 22 Juin 2021 -Tribunal Judiciaire de PARIS - 3ème chambre - 3ème section - RG n° 20/05064





APPELANTS



Madame [C] [B]

née le 31 Août 1

963 à LE CANNET

De nationalité française

Biographe familiale

Demeurant [Adresse 6]

[Localité 1]



Représentée par Me Véronique DE LA TAILLE de la SELARL RECAMIER AVOCATS ASSOCIES, avoc...

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 5 - Chambre 1

ARRET DU 02 NOVEMBRE 2022

(n° 170/2022, 9 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : 21/14698 - N° Portalis 35L7-V-B7F-CEGLY

Décision déférée à la Cour : Ordonnance du juge de la mise en état du 22 Juin 2021 -Tribunal Judiciaire de PARIS - 3ème chambre - 3ème section - RG n° 20/05064

APPELANTS

Madame [C] [B]

née le 31 Août 1963 à LE CANNET

De nationalité française

Biographe familiale

Demeurant [Adresse 6]

[Localité 1]

Représentée par Me Véronique DE LA TAILLE de la SELARL RECAMIER AVOCATS ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, toque : K0148

Assistée de Me Marie RAMOS de l'AARPI SCHMIDT GOLDGRAB, avocat au barreau de PARIS, toque : P391

Monsieur [R] [H]

Né le 08 septembre 1961 à PARIS

De nationalité française

Assistant réalisateur

Demeurant [Adresse 3]

[Localité 7]

Représenté par Me Véronique DE LA TAILLE de la SELARL RECAMIER AVOCATS ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, toque : K0148

Assisté de Me Marie RAMOS de l'AARPI SCHMIDT GOLDGRAB, avocat au barreau de PARIS, toque : P391

INTIMEES

Société ROCKET RECORD COMPANY LIMITED

Société de droit britannique

Immatriculée sous le numéro 01078650

Prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés ès qualités audit siège

[Adresse 2]

[Localité 9]

(ROYAUME-UNI)

Représentée par Me Arnaud GUYONNET de la SCP AFG, avocat au barreau de PARIS, toque : L0044

Assistée de Me Charlotte HADDAD de EVERSHEDS SUTHERLAND FRANCE LLP, avocat au barreau de PARIS, toque J0014

PARAMOUNT PICTURES FRANCE SARL

Société au capital de 693 000 euros

Immatriculée au Registre du Commerce et des Sociétés de PARIS sous le numéro 702 053 323

Prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés ès qualités audit siège

[Adresse 4]

[Localité 8]

Représentée par Me Arnaud GUYONNET de la SCP AFG, avocat au barreau de PARIS, toque : L0044

Assistée de Me Charlotte HADDAD de EVERSHEDS SUTHERLAND FRANCE LLP, avocat au barreau de PARIS, toque J0014

S.A.S. UNIVERSAL MUSIC FRANCE

Immatriculée au Registre du Commerce et des Sociétés de PARIS sous le numéro 414 945 188

Prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés ès qualités audit siège

[Adresse 5]

[Localité 7]

Représentée par Me François TEYTAUD de l'AARPI TEYTAUD-SALEH, avocat au barreau de PARIS, toque : J125

Assistée de Me Elizabeth BOESPFLUG, avocat au barreau de PARIS, toque : E0329

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l'article 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 20 septembre 2022, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Mme Isabelle DOUILLET, présidente et , Madame Brigitte CHOKRON, magistrat honoraire exerçant des fonctions juridictionnelles, chargée d'instruire l'affaire, laquelle a préalablement été entendue en son rapport.

Ces magistrates ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Mme Isabelle DOUILLET, présidente de chambre,

Mme Françoise BARUTEL, conseillère,

Mme Brigitte CHOKRON, magistrat honoraire,

Greffier, lors des débats : Mme Karine ABELKALON

ARRÊT :

Contradictoire

par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

signé par Isabelle DOUILLET, Présidente de chambre et par Karine ABELKALON, Greffière, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

Vu l'ordonnance contradictoire rendue le 22 juin 2021 par le juge de la mise en état du tribunal judiciaire de Paris qui a :

-dit le juge de la mise en état incompétent pour statuer sur les demandes adressées au tribunal,

-déclaré irrecevables comme prescrites les demandes de Mme [C] [B] et M. [R] [H],

-condamné in solidum Mme [C] [B] et M. [R] [H] à payer à chacune des sociétés Rocket Record Company Ltd et Universal Music France la somme de 3.000 euros au titre des frais irrépétibles et aux dépens.

Vu l'appel de cette ordonnance interjeté par Mme [C] [B] et M. [R] [H], suivant déclaration d'appel remise au greffe de la cour le 27 juillet 2021,

à l'encontre de la société Rocket Record Company Ltd (de droit anglais), de la société Paramount Pictures France (SARL) et de la société Universal Music France (SAS).

Vu les dernières conclusions des appelants, remises au greffe et notifiées par voie électronique le 17 mai 2022, qui demandent à la cour, au visa des articles L.211-4 et suivants et L.212-4 et suivants du code de la propriété intellectuelle, 2219, 2224 et 2232 du code civil,de :

-les déclarer recevables et bien fondés en leur appel,

-infirmer l'ordonnance entreprise en toutes ses dispositions,

Statuant à nouveau,

-débouter les sociétés intimées de toutes leurs demandes,

-les condamner in solidum à payer à chacun des appelants la somme de 5.000 euros et en tous les dépens.

Vu les dernières conclusions des sociétés intimées Rocket Record Company Ltd (de droit anglais) et Paramount Pictures France (SARL), remises au greffe et notifiées par voie électronique le 21 février 2022, qui demandent à la cour, au visa des articles 122, 699 et 700 du code de procédure civile, 2219 et 2224 du code civil, de :

Sur la prescription,

A titre principal :

-rejeter les demandes de Mme [C] [B] et M. [R] [H] en ce qu'ils considèrent avoir agi conformément au délai de prescription de droit commun,

-confirmer l'ordonnance du juge de la mise en état du tribunal judiciaire de Paris du 22 juin 2021,

En conséquence,

-dire et juger que l'ensemble des demandes et prétentions de Mme [C] [B] et M. [R] [H] sont irrecevables comme prescrites,

A titre subsidiaire,

En cas d'infirmation, par extraordinaire, de l'ordonnance déférée à la cour,

-dire et juger que Mme [C] [B] et M. [R] [H] sont irrecevables en leur action à l'encontre de la société Rocket Record Company Ltd antérieurement au 26 février 2016 en raison de la prescription dont elle est atteinte,

Sur le défaut de qualité à défendre de la société Rocket Record Company Ltd,

-dire et juger que Mme [C] [B] et M. [R] [H] sont irrecevables en leur demandes et prétentions, faute de qualité pour défendre de la société Rocket Record Company Ltd,

Sur les demandes de fond adressées au tribunal,

-dire et juger que ces demandes ne relèvent pas de la compétence du juge de la mise en état,

-confirmer l'ordonnance déférée en ce qu'elle dit le juge de la mise en état incompétent pour statuer sur les demandes adressées au tribunal,

Sur les dépens et frais irrépétibles,

-condamner Mme [C] [B] et M. [R] [H] à régler à la société Rocket Record Company la somme de 10.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procedure civile et aux entiers dépens sur le fondement de l'article 699 du même code.

Vu les uniques conclusions de la société intimée Universal Music France (SAS), remises au greffe et notifiées par voie électronique le 18 février 2022, qui demande à la cour de :

-en cas d'infirmation de l'ordonnance déférée, dire et juger Mme [C] [B] et M. [R] [H] irrecevables en leur action à l'encontre de la société Universal Music France antérieurement au 29 décembre 2015 en raison de la prescription dont elle est atteinte,

-condamner Mme [C] [B] et M. [R] [H] à payer à la société Universal Music France une indemnité de 4.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens dont distraction dans les conditions de l'article 699 du code de procédure civile.

Vu l'ordonnance de clôture prononcée le 13 septembre 2022.

SUR CE, LA COUR :

Il est expressément renvoyé, pour un exposé complet des faits de la cause et de la procédure, à l'ordonnance entreprise et aux écritures précédemment visées des parties.

Il suffit de rappeler que Mme [C] [B] et M. [R] [H], revendiquant des droits d'artiste-interprète pour avoir participé, en tant que danseurs, sous la direction de M. [X] [D], à l'enregistrement audiovisuel en 1983, sur la Côte d'Azur, d'un vidéoclip destiné à illustrer la chanson d'Elton John 'I'm still standing', ont fait assigner le 4 mai 2020 devant le tribunal judiciaire de Paris les sociétés Rocket Record Company Ltd, Universal Music UK Sound Foundation et Paramount Pictures France.

Faisant valoir que le vidéoclip aurait été produit puis exploité, en particulier lors des concerts publics d'Elton John et, récemment, en 2019, pour la réalisation du film cinématographique 'Rocketman', sans qu'ils aient donné la moindre autorisation ni perçu la moindre rétribution, ils invoquent une violation de leurs droits patrimoniaux d'artistes-interprètes, outre une atteinte à leurs droits moraux, dont ils demandent réparation.

Les demandeurs à l'instance se sont ensuite désistés à l'égard de la société Universal Music UK Sound Foundation ( de droit anglais) et ont fait attraire en la cause, par assignation du 29 décembre 2020, la société Universal Music France.

Par des conclusions du 30 novembre 2020, la société Rocket Record Company Ltd, en présence de la société Paramount Pictures France, a saisi par voie d'incident le juge de la mise en état aux fins de voir déclarer Mme [C] [B] et M. [R] [H] irrecevables en toutes leurs demandes et prétentions, en premier lieu comme prescrites, en second lieu comme mal dirigées à l'encontre de la société Rocket Record Company Ltd qui n'a pas qualité pour défendre.

Pour sa part, la société Universal Music France, ayant rappelé qu'elle a été assignée le 29 décembre 2020, a conclu que l'action des demandeurs à l'instance se trouvait prescrite mais seulement pour la période antérieure au 29 décembre 2015.

Mme [C] [B] et M. [R] [H], aux termes de leurs dernières conclusions d'incident du 26 avril 2021 ont exposé, dans deux paragraphes distincts, leurs demandes au juge de la mise en état, aux fins de le voir déclarer leur action recevable et ordonner la communication de pièces comptables et financières afférentes à l'exploitation litigieuse, et leurs demandes au tribunal, en précisant qu'il s'agit de demandes 'en l'état', tendant à obtenir diverses condamnations à paiement de dommages-intérêts en réparation des atteintes portées à leurs droits patrimoniaux et moraux d'artistes-interprètes.

Le juge de la mise en état, selon l'ordonnance entreprise, a déclaré les demandes de Mme [C] [B] et M. [R] [H] irrecevables comme prescrites, et constaté, en conséquence, n'y avoir lieu de statuer sur la fin de non-recevoir tirée du défaut de qualité à défendre de la société Rocket Record Company Ltd. Il s'est dit par ailleurs incompétent pour connaître des demandes adressées au tribunal.

En cause d'appel, force est d'observer que si les appelants poursuivent, dans le dispositif de leurs dernières conclusions, l'infirmation de l'ordonnance entreprise en toutes ses dispositions, ils se bornent à demander à la cour, statuant à nouveau, de 'débouter les sociétés intimées de toutes leurs demandes'. Les sociétés intimées maintiennent quant à elles leurs demandes et moyens de défense tels que soutenus en première instance sauf à observer que la société Rocket Record Company Ltd, aux côtés de laquelle conclut la société Paramount Pictures France, se range à titre subsidiaire à la position de la société Universal Music France pour demander que l'action soit déclarée prescrite pour la période antérieure au délai de cinq ans précédant la date de délivrance de l'assignation en justice.

Sur la prescription,

Pour déclarer irrecevables comme prescrites l'ensemble des demandes de Mme [C] [B] et M. [R] [H], le juge de la mise en état a relevé que ces derniers 'ne peuvent soutenir avoir été dans l'ignorance de leurs droits alors même que le régime nouvellement créé relativement aux artistes-interprètes est d'origine légale et qu'ils avaient eux-mêmes participé au fait juridique ayant ouvert la créance sollicitée, à savoir leur interprétation, en tant que danseurs, au tournage du vidéoclip litigieux' et a retenu, ainsi que le soutenait la société Rocket Record Company Ltd, que 'le délai de prescription opposable aux demandeurs a donc commencé à courir à compter de l'entrée en vigueur de la loi du 3 juillet 1985 et s'est, en tous les cas, achevé au plus tard cinq ans après la réforme (de la prescription) du 17 juillet 2008.'

Les appelants critiquent cette décision en ce qu'elle aurait pour conséquence de faire tomber le vidéoclip litigieux dans le domaine public alors que la loi du 3 juillet 1985 prévoit que la durée des droits patrimoniaux des artistes-interprètes (article L. 211-4 du code de la propriété intellectuelle) est de cinquante années à compter du 1er janvier de l'année civile suivant celle de l'interprétation et, quand l'interprétation est fixée dans un vidéogramme, de cinquante années après le 1er janvier de l'année civile suivant sa mise à la disposition du public, par des exemplaires matériels, ou sa communication au public. Ils rappellent en outre, quant au droit moral des artistes-interprètes, que la loi du 3 juillet 1985 le déclare, à l'instar de celui des auteurs, imprescriptible.

Or, force est de préciser qu'il convient de distinguer entre le droit conféré à l'artiste-interprète et l'action visant à sanctionner une atteinte portée à ce droit.

En la cause, n'est pas discutée la durée de la protection conférée par les droits attachés à la qualité d'artiste-interprète mais la recevabilité de l'action en justice tendant à voir constater que ces droits ont été violés au préjudice de Mme [C] [B] et M. [R] [H] et fixer les réparations.

Il est en effet constant que si le droit moral de l'artiste-interprète est imprescriptible, et son droit patrimonial ouvert pendant cinquante ans, les actions en paiement des créances nées des atteintes portées à l'un ou à l'autre de ces droits sont soumises à la prescription de droit commun de l'article 2224 du code civil qui prévoit que les actions personnelles ou mobilières se prescrivent par cinq ans à compter du jour où le titulaire d'un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l'exercer.

En l'espèce, les faits articulés au fondement de l'action en justice exercée par Mme [C] [B] et M. [R] [H] sont constitués des atteintes portées à leurs droits d'artistes-interprètes à raison de l'exploitation sans autorisation du vidéoclip 'I'm still standing' à l'enregistrement duquel ils ont participé en qualité de danseurs.

Il n'est pas discuté que ce vidéoclip a fait l'objet, dès sa fixation en 1983, d'une communication au public à l'occasion des concerts publics d'Elton John et à la télévision, qu'il a été commercialisé sous forme de DVD à partir de 1995, diffusé sur internet à partir de 2010 et utilisé par extraits dans le film 'Rocketman' sorti en salles en 2019. Mme [C] [B] et M. [R] [H] admettent avoir eu connaissance de ces différents actes d'exploitation mais prétendent, sans pertinence au regard du principe selon lequel nul n'est censé ignorer la loi, n'avoir appris que récemment l'existence de la loi du 3 juillet 1985 et de ses dispositions protectrices des droits des artistes-interprètes.

En conséquence de ce qui précède, et par application de la prescription quinquennale résultant des dispositions de l'article 2224 du code civil, l'action de Mme [C] [B] et M. [R] [H] doit être déclarée prescrite pour les faits antérieurs au délai de cinq ans précédant les assignations en justice respectivement délivrées le 4 mai 2020 aux sociétés Rocket Record Company Ltd et Paramount Pictures France et le 29 décembre 2020 à la société Universal Music France. En revanche, et par infirmation de l'ordonnance entreprise, l'action n'est pas prescrite à l'égard des intimées en ce qu'elle concerne les actes d'exploitation commis dans les limites du délai de la prescription quinquennale soit dans la période des cinq années précédant l'assignation en justice.

Sur la qualité à défendre de la société Rocket Record Company Ltd,

La société Rocket Record Company Ltd conteste la qualité, que lui prêtent les demandeurs, de producteur du vidéoclip litigieux. Elle soutient ne pas être titulaire de droits sur ce vidéoclip, ces droits appartenant à la société HST Recording Limited ainsi qu'il ressort des crédits mentionnés au générique du film 'Rocketman'.

Force est de constater que Mme [C] [B] et M. [R] [H] n'opposent à la société Rocket Record Company Ltd aucun élément justificatif susceptible de permettre de retenir sa qualité de titulaire des droits sur le vidéoclip litigieux.

Ils se bornent à soutenir (page 12 de leurs écritures), en se référant à leur pièce 55, que 'la mention de la société Rocket Record Company Ltd comme titulaire des droits sur le vidéoclip s'impose en l'absence de toute mention de la société HST Recording Limited sur plusieurs supports'. Outre que la logique de l'argumentaire est sujette à caution, la cour relève qu'ils ne versent aux débats aucun support tel CD ou DVD du vidéoclip et que la pièce 55 est constituée, comme indiqué au bordereau, d'une 'capture d'écran sur videoclip 'Elton John-I'm still standing', site de Smootradio et site Imdb'.

Ils font en outre observer (page 12 de leurs écritures) que 'dans un e-mail en date du 24 septembre 2019 (pièce 24), la société Paramount indique que celle-ci bénéficie d'une licence accordée par la société HST Recording Limited, tout en précisant de contacter, à cet effet, M. [E] [U] à une adresse e-mail qui était manifestement celle de la société Rocket Record Company Ltd'.

Toutefois, l'observation des demandeurs, fondée sur le fait qu'il leur aurait été demandé de prendre l'attache d'une personne dont l' adresse électronique correspond à celle de la société Rocket Record Company Ltd, est dénuée de toute pertinence en ce qu'elle ne permet pas de démentir la société Paramount Pictures France qui leur affirmait expressément, aux termes du courrier invoqué, disposer d'une licence d'utilisation des séquences du vidéoclip litigieux pour le film 'Rocketman', concédée par la société HST Recording Limited.

Cette affirmation de la société Paramount Pictures est au demeurant corroborée par les mentions portées au générique du film 'Rocketman' et libellées comme suit : 'Original I'm still standing Music Video directed by [X] [D] & choregraphed by [J] [G], Courtesy of HST Recording Limited'.

C'est en vain que les demandeurs prétendent que ces mentions ne concernent que la 'musique originale de la vidéo'. Selon les pièces de la procédure, à l'encontre desquelles n'est apportée aucune preuve contraire, les termes 'Music Video' se traduisent par 'Clip Vidéo', tandis que l'expression 'Courtesy of' correspond à la formule 'avec la permission de' ou 'avec l'autorisation de'. En conséquence, le crédit porté au générique du film 'Rocketman' s'énonce comme suit dans la langue française : ' Le Clip Vidéo original de I'm still standing, dirigé par [X] [D] et chorégraphié par [J] [G], avec la permission de HST Recording Limited'. Les demandeurs ne sauraient le contester , qui indiquent eux-mêmes, dans l'exposé des faits au soutien de leur assignation, que le tournage du vidéoclip a été réalisé sous la direction de M. [X] [D].

Il s'ensuit que la société Rocket Record Company est fondée en sa fin de non-recevoir tirée du défaut de qualité pour défendre.

Les demandes de Mme [C] [B] et M. [R] [H] sont dès lors irrecevables en ce qu'elles sont dirigées à son encontre.

Sur les autres demandes,

Le juge de la mise en état s'est à juste titre déclaré incompétent pour connaître des prétentions de fond invoquées par Mme [C] [B] et M. [R] [H] dans leurs conclusions d'incident et dont il n'était pas, au demeurant, saisi, les demandeurs à l'incident ayant expressément précisé dans leurs conclusions qu'elles étaient adressées au tribunal.

L'équité commande de débouter Mme [C] [B] et M. [R] [H] de leur demande formée au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile et de les condamner à ce même titre, in solidum,en sus de la condamnation prononcée en première instance, qui est confirmée, à payer à chacune des sociétés Rocket Record Company Ltd et Universal Music France une indemnité de 2.000 euros.

En outre, le sens de l'arrêt conduit à confirmer l'ordonnance sur le sort des dépens de première instance et à condamner in solidum les appelants aux dépens d'appel qui pourront être recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS:

LA COUR,

Confirme l'ordonnance déférée sauf en sa disposition déclarant les demandes de Mme [C] [B] et M. [R] [H] irrecevables comme prescrites,

Statuant à nouveau sur ce chef,

Déclare les demandes de Mme [C] [B] et M. [R] [H] irrecevables comme prescrites pour la période antérieure au délai de cinq ans précédant les assignations en justice respectivement délivrées aux sociétés intimées,

Ajoutant,

Déclare les demandes de Mme [C] [B] et M. [R] [H] irrecevables à l'encontre de la société Rocket Record Company Ltd pour défaut de qualité à défendre,

Déboute Mme [C] [B] et M. [R] [H] de leur demande formée au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile et les condamne à ce même titre, in solidum, à payer à chacune des sociétés Rocket Record Company Ltd et Universal Music France une indemnité complémentaire de 2.000 euros,

Condamne Mme [C] [B] et M. [R] [H] in solidum aux dépens d'appel qui pourront être recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

LA GREFFIÈRE LA PRÉSIDENTE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 5 - chambre 1
Numéro d'arrêt : 21/14698
Date de la décision : 02/11/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-11-02;21.14698 ?
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