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02/11/2022 | FRANCE | N°20/03832

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 6 - chambre 4, 02 novembre 2022, 20/03832


Copies exécutoiresREPUBLIQUE FRANCAISE

délivrées le :AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS



COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 4



ARRET DU 02 NOVEMBRE 2022



(n° , 8 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 20/03832 - N° Portalis 35L7-V-B7E-CB6JR



Décision déférée à la Cour : Jugement du 28 Mai 2020 -Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de CRETEIL - RG n° 18/00468



APPELANT



Monsieur [P] [R]

[Adresse 3]

[Localité 4]

ReprésentÃ

© par Me Sophie GRÈS, avocat au barreau de PARIS, toque : D2162



INTIMEE



SAS ONET SERVICES Prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit s...

Copies exécutoiresREPUBLIQUE FRANCAISE

délivrées le :AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 4

ARRET DU 02 NOVEMBRE 2022

(n° , 8 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 20/03832 - N° Portalis 35L7-V-B7E-CB6JR

Décision déférée à la Cour : Jugement du 28 Mai 2020 -Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de CRETEIL - RG n° 18/00468

APPELANT

Monsieur [P] [R]

[Adresse 3]

[Localité 4]

Représenté par Me Sophie GRÈS, avocat au barreau de PARIS, toque : D2162

INTIMEE

SAS ONET SERVICES Prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

[Adresse 2]

[Localité 1]

Représentée par Me François TEYTAUD, avocat au barreau de PARIS, toque : J125

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 13 Septembre 2022, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Madame Anne-Ga'l BLANC, conseillère, chargée du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, entendu en son rapport, composée de :

Monsieur Bruno BLANC, président

Madame Florence MARQUES, conseillère

Madame Anne-Ga'l BLANC, conseillère

Greffier, lors des débats : Mme Victoria RENARD

ARRET :

- contradictoire

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Madame Florence MARQUES, conseillère, pour le président empêché et par Victoria RENARD, Greffière, présente lors de la mise à disposition.

RAPPEL DES FAITS, PROCÉDURE ET MOYENS DES PARTIES :

La société SAS ONET SERVICES a pour activité le nettoyage sous toutes ses formes.

M. [P] [R], a été engagé par la SAS ONET Services, suivant contrat de travail à durée indéterminée à compter du 1er avril 2014 en qualité de responsable d'exploitation, statut cadre, coefficient 300, catégorie CA1.

Les relations contractuelles entre les parties étaient soumises à la convention collective nationale des entreprises de propreté et services associés du 26 juillet 2011.

La société emploi plus de 11 salariés.

Le 13 janvier 2017, M. [P] [R] a été placé en arrêt de travail, prolongé jusqu'au 15 septembre 2017.

A l'issue de deux visites médicales de reprise qui se sont déroulées les 4 et 13 octobre 2017, le médecin du travail a déclaré le salarié inapte avec cette précision : « inapte au poste, l'état de santé du salarié fait obstacle à tout reclassement dans un emploi dans l'entreprise et dans le groupe .

Inapte au poste de responsable d'exploitation. Pas d'exposition à des situations stressantes ».

Par lettre datée du 15 novembre 2017, M. [R] a été convoqué à un entretien préalable fixé au 24 novembre 2017.

M. [P] [R] a ensuite été licencié pour inaptitude et impossibilité de reclassement par lettre en date du 7 décembre 2017.

M. [P] [R] a saisi, le 29 mars 2018, le conseil de prud'hommes de Créteil afin de voir juger son licenciement nul, son inaptitude ayant pour origine un harcèlement moral et subsidiairement sans cause réelle et sérieuse. Il a également sollicité la condamnation de la société à lui payer diverses sommes.

Par jugement du 28 mai 2020, le conseil de prud'hommes de Créteil a :

- DIT que le licenciement n'est pas nul,

- DIT que le licenciement pour inaptitude est pour cause réelle et sérieuse,

- DÉBOUTE Monsieur [P] [R] de toutes ses demandes,

- DÉBOUTE la société ONET SERVICES de sa demande reconventionnelle d'article 700 du code de procédure civile,

- DIT que chaque partie supportera ses propres dépens.

Par déclaration du 30 juin 2020, M. [P] [R] a régulièrement interjeté appel de cette décision.

Dans ses dernières conclusions adressées au greffe par le réseau privé virtuel des avocats le 1er août 2020, M. [P] [R] demande à la cour de :

INFIRMER le Jugement en ce qu'il a :

- dit que le licenciement n'est pas nul

- dit que le licenciement pour inaptitude est pour cause réelle et sérieuse

- débouté Monsieur [P] [R] de toutes ses demandes

ET STATUANT A NOUVEAU

A titre principal :

- CONDAMNER ONET SERVICES à payer à Monsieur [P] [R] les sommes suivantes au titre du licenciement est nul en raison de l'inaptitude ayant pour origine un harcèlement moral commis par la société ONET SERVICES :

' 48 700.56 € à titre d'indemnité pour licenciement nul ;

' 12 175.14 € à titre d'indemnité compensatrice de préavis ;

' 1 217.51 € à titre de congés payés afférents ;

A titre subsidiaire : CONDAMNER ONET SERVICES à payer à Monsieur [R]

la somme de 48 700.56 € à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.

En toute hypothèse :

- CONDAMNER ONET SERVICES à payer à Monsieur [R] les sommes suivantes avec intérêts au taux légal à compter de la réception par la société ONET SERVICES de la convocation en Bureau de Conciliation et d'Orientation (30/03/2018) :

' 5 522.64 € à titre de rappel d'indemnité légale de licenciement ;

' 12 000 € à titre de Dommages intérêts pour violation de l'obligation de sécurité ;

' 16 000 € à titre de dommages intérêts pour harcèlement moral ;

' 10 000 € à titre d'indemnité pour inexécution de bonne foi du contrat de travail ;

' 1 773.68 € à titre de rappel de salaire entre le 18 et le 30/09/2017 ;

' 177.36 € à titre de congés payés afférents ;

' 8 459.39 € € à titre de rappel d'heures supplémentaires pour 2015 et 2016 ;

' 845.93 € à titre de congés payés afférents ;

' 681.49 € à titre de rappel d'heures de nuit ;

' 68.14 € à titre de congés payés afférents ;

' 24 350.28 € à titre d'indemnité pour travail dissimulé.

- ASSORTIR ces sommes des intérêts légaux capitalisés en vertu de l'art 1343-2 du Code Civil ;

- ORDONNER à la société ONET SERVICES la remise d'un bulletin de salaire récapitulatif et de l'attestation POLE EMPLOI conformes à l'arrêt à intervenir sous astreinte de 50 € par document et par jour de retard à compter de la notification de la décision à intervenir ;

- CONDAMNER la Société ONET SERVICES à rembourser les indemnités de chômage à POLE EMPLOI par application de l'art L. 1235-4 du Code du Travail ;

- Condamner la société ONET SERVICES à payer à Monsieur [P] [R] la somme de 3 000 € sur le fondement de l'art. 700 du Code de Procédure Civile et aux dépens.

Dans ses dernières conclusions adressées au greffe par le réseau privé virtuel des avocats le 2 novembre 2020, la société ONET Services demande à la cour de :

- confirmer le jugement du Conseil de prud'hommes de CRETEIL du 28 mai 2020 dans toutes ses dispositions sauf en ce qu'il n'a pas fait droit à sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile:,

' Sur la rupture du contrat de travail :

- A titre principal, constater que Monsieur [R] n'a pas fait l'objet d'agissements de harcèlement moral et que son licenciement n'est pas nul ;

En conséquence,

Le débouter de ses demandes ;

- A titre subsidiaire, constater que la société ONET SERVICES n'a pas manqué à son obligation de sécurité de sorte que son licenciement n'est pas dénué de cause réelle et sérieuse ;

En conséquence,

Le débouter de ses demandes

- A titre infiniment subsidiaire, réduire les demandes de Monsieur [R] à de plus justes proportions

S'agissant de l'indemnité de licenciement pour licenciement nul, la fixer à 6 mois de salaire ;

S'agissant de l'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, la fixer à 3 mois de salaire ;

' Sur les autres demandes indemnitaires de Monsieur [R] :

- Constater que la société ONET SERVICES a exécuté le contrat de parfaite bonne foi et débouter Monsieur [R] de sa demande d'indemnités au titre d'une prétendue exécution déloyale du contrat ;

- Constater que Monsieur [R] n'a effectué aucune heure supplémentaire et débouter ce dernier de ses demandes ;

- Constater que la société ONET SERVICES n'a jamais eu la volonté d'en faire effectuer à Monsieur [R] et le débouter de sa demande d'indemnités au titre de l'existence d'une prétendue relation de travail dissimulé ;

- Débouter Monsieur [R] de sa demande d'indemnité de licenciement spéciale ;

- Débouter Monsieur [R] de l'ensemble de ses demandes ;

' Débouter Monsieur [R] de sa demande de condamnation de la société ONET SERVICES au remboursement auprès de Pôle emploi des allocations qu'il a perçues ;

' Infirmer le jugement entrepris qu'il n'a pas fait droit à la demande de la société ONET SEVICES au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

' Statuant à nouveau,

' Condamner Monsieur [R] à la somme de 2.500 € au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ;

' Y ajoutant

' Condamner Monsieur [R] à payer à la société ONET SERVICES en cause d'appel la somme de 2.500 € au titre de l'article 700 du Code de procédure civile

' Condamner Monsieur [R] aux entiers dépens dont distraction au profit de Maître François TEYTAUD dans les conditions de l' article 699 du CPC.

L'ordonnance de clôture est intervenue le 14 juin 2022.

Pour un plus ample exposé des faits, des prétentions et des moyens des parties, la cour se réfère à leurs conclusions écrites conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile.

MOTIFS DE LA DECISION :

1 - Sur les heures supplémentaires

En application de son contrat de travail, le salarié est soumis à un horaire mensuel de 151,67 heures de travail.

Aux termes de l'article L. 3171-2 alinéa 1er du code du travail, lorsque tous les salariés occupés dans un service ou un atelier ne travaillent pas selon le même horaire collectif, l'employeur établit les documents nécessaires au décompte de la durée de travail, des repos compensateurs acquis et de leur prise effective, pour chacun des salariés concernés.

Selon l'article L. 3171-4 du code du travail, en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail accomplies, l'employeur fournit au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié. Au vu de ces éléments et de ceux fournis par le salarié à l'appui de sa demande, le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles. Si le décompte des heures de travail accomplies par chaque salarié est assuré par un système d'enregistrement automatique, celui-ci doit être fiable et infalsifiable.

Il résulte de ces dispositions, qu'en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail accomplies, il appartient au salarié de présenter, à l'appui de sa demande, des éléments suffisamment précis quant aux heures non rémunérées qu'il prétend avoir accomplies afin de permettre à l'employeur, qui assure le contrôle des heures de travail effectuées, d'y répondre utilement en produisant ses propres éléments. Le juge forme sa conviction en tenant compte de l'ensemble de ces éléments au regard des exigences rappelées aux dispositions légales et réglementaires précitées. Après analyse des pièces produites par l'une et l'autre des parties, dans l'hypothèse où il retient l'existence d'heures supplémentaires, il évalue souverainement, sans être tenu de préciser le détail de son calcul, l'importance de celles-ci et fixe les créances salariales s'y rapportant.

Il a été jugé que constituent des éléments suffisamment précis des tableaux mentionnant le décompte journalier des heures travaillées, peu important qu'ils aient été établis par le salarié lui-même pour les besoins de la procédure.

Par ailleurs, même en l'absence d'accord exprès, les heures supplémentaires justifiées par l'importance des tâches à accomplir ou réalisées avec l'accord tacite de l'employeur, qui ne pouvait en ignorer l'existence et qui ne s'y est pas opposé, doivent être payées.

En l'espèce, au soutien de ses prétentions, le salarié produit un tableau établi par ses soins récapitulant non pas ses horaires de travail sur la période contractuelle, mais mentionnant le nombre des heures supplémentaires hebdomadaires ( y compris de nuit) qu'il prétend avoir exécuté avant 9 heures ou après 18 heures, sans aucune référence aux horaires collectifs.

Ce faisant, il ne produit pas d' éléments suffisamment précis quant aux heures non rémunérées qu'il prétend avoir accomplies, ce qui ne permet pas à l'employeur, qui assure le contrôle des heures de travail effectuées, d'y répondre utilement en produisant ses propres éléments.

Dès lors le salarié ne peut qu'être débouté de sa demande de rappel de salaire au titre d'heures supplémentaires y compris pour les heures supplémentaires de nuit.

Le jugement est confirmé sur ce point.

2 - Sur la demande de dommages-intérêts pour travail dissimulé

L'article L.8221-5 du code du travail dispose qu'est réputé travail dissimulé par dissimulation d'emploi salarié le fait pour tout employeur :

1° Soit de se soustraire intentionnellement à l'accomplissement de la formalité prévue à l'article L. 1221-10, relatif à la déclaration préalable à l'embauche ;

2° Soit de se soustraire intentionnellement à la délivrance d'un bulletin de paie ou d'un document équivalent défini par voie réglementaire, ou de mentionner sur le bulletin de paie ou le document équivalent un nombre d'heures de travail inférieur à celui réellement accompli, si cette mention ne résulte pas d'une convention ou d'un accord collectif d'aménagement du temps de travail conclu en application du titre II du livre Ier de la troisième partie ;

3° Soit de se soustraire intentionnellement aux déclarations relatives aux salaires ou aux cotisations sociales assises sur ceux-ci auprès des organismes de recouvrement des contributions et cotisations sociales ou de l'administration fiscale en vertu des dispositions légales.

L'article L.8223-1 du même code dispose quant à lui que, en cas de rupture de la relation de travail, le salarié auquel un employeur a eu recours dans les conditions de l'article L. 8221-3 ou en commettant les faits prévus à l'article L. 8221-5 a droit à une indemnité forfaitaire égale à six mois de salaire.

Débouté de sa demande au titre des heures supplémentaires, le salarié ne peut qu'être débouté de ce chef.

3 - Sur la demande de dommages-intérêts pour harcèlement moral.

Aux termes de l'article L.1152-1 du code du travail, aucun salarié ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel.

L'article L.1154-1 du même code prévoit, dans sa version applicable à la cause, qu'en cas de litige, le salarié concerné établit des faits qui permettent de présumer l'existence d'un harcèlement et il incombe alors à l'employeur, au vu de ces éléments, de prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs d'un tel harcèlement et que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement.

En l'espèce, le salarié soutient avoir été victime de harcèlement moral de son employeur ayant nuit à sa santé, caractérisés par :

1-une charge de travail excessive,

2-Une mutation sur l'agence de [Localité 8] opérée de façon désorganisée,

3-l'engagement abusif d'une procédure disciplinaire de licenciement le 19 juillet 2017,

4-des pressions en vue d'obtenir la rupture de la relation de travail,

5-des mutations vers des « agences fantômes », puis qu' à deux reprises , il a été muté vers une agence fermée, caractérisant sa mise à l'écart.

Le grief n° 1 n'est pas établi ainsi qu'il a été dit plus haut.

En ce qui concerne la mutation du salarié sur l'agence de [Localité 8], l'annonce par mail du 6 décembre 2016 aux deux plus importants clients de l'agence de [Localité 6] n'a rien d'indélicat : le salarié, préalablement informé ( au plus tard le 29 novembre 2016) a été en copie et un rendez-vous a été fixé pour le 12 décembre 2016 suivant. Les deux mails produits aux débats ne démontrent pas que M. [R] avait fait part de ses craintes sur les « insuffisances organisationnelles », puisque d'une part l'absence inopinée de M. [X] [I] n'a rien à voir avec l'organisation de la mutation par la société et d'autre part la société a accepté de retarder sa prise de fonction à temps plein sur [Localité 8] au retour de M . [I] ( le 12 janvier 2017, à priori). Ce grief n'est pas établi.

En ce qui concerne le grief n° 4, le salarié qui évoque 4 appels téléphoniques de la part de son employeur, fin août 2017, ne rapporte d'aucune manière la preuve de la réalité de ces appels, l'employeur reconnaissant un seul appel de la DRH ni qu'il a fait l'objet de pression afin de le pousser au départ. Ce grief ne peut être retenu.

En ce qui concerne le grief n° 5, la mutation de M. [P] [R] sur l'agence de [Localité 8] a été décidée un an avant sa fermeture. Le salarié procède par affirmation lorsqu'il soutient qu'à la date du 9 mars 2017, date à laquelle il devait, s'il était revenu de congé maladie, en prendre la direction, cette agence était en instance de fermeture.

Par ailleurs, la responsable RH a indiqué par mail du 18 septembre 2019 que cette agence avait déménagé dans les locaux de celle de [Localité 7]. Si le salarié verse aux débats un document laissant penser que cette agence était fermée depuis le 15 septembre 2017, le courrier du conseil de la société en date du 28 septembre 2017 en réponse à celui du conseil du salarié informe ce dernier que la partie administrative y est toujours temporairement traitée.

Ce grief n'est pas retenu.

Le grief n° 3 est établi mais ne peut à lui seul laisser supposer l'existence d'un harcèlement moral.

Par ailleurs, si le salarié justifie de la dégradation de son état de santé ayant abouti à son arrêt maladie du 13 janvier au 15 septembre 2017, le grief retenu est postérieur à son arrêt maladie et ne peut justifier « l'état d'épuisement professionnel » invoqué ayant pour origine des faits de harcèlement moral de la part de l'employeur.

Dès lors la demande de dommages-intérêts de ce chef est rejetée et le jugement confirmé sur ce point.

4 - Sur la demande de dommages-intérêts pour violation de l'obligation de sécurité

En application de l'article L 4121-1 du code du travail, l'employeur prend les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs, ces mesures comprenant notamment des actions de prévention des risques professionnels, des actions d'information et de formation, la mise en place d'une organisation et de moyens adaptés.

Le salarié soutient que la société a manifestement violé son obligation de sécurité puisque la santé de Monsieur [P] [R] s'est dégradée en raison des manquements de celle-ci.

La constatation de la dégradation de l'état de santé d'un salarié ne peut, à elle seule, laisser supposer une violation par l'employeur de son obligation de sécurité. Il est à souligner que la preuve du lien de causalité entre l'état dépressif du salarié et ses conditions de travail n'est pas rapportée.

Le salarié est débouté de sa demande de chef et le jugement confirmé.

5 - Sur la demande de dommages intérêts pour violation de l'obligation d'exécuter de bonne foi le contrat de travail

Le salarié soutient que son employeur a mis en 'uvre de manière abusive la clause de mobilité de son contrat dans la mesure où sa mutation n'a pas été soumise à son accord alors qu'elle impactait la part variable de sa rémunération. Le salarié expose que sa mutation a, en réalité, été décidée en représailles en raison de sa moindre disponibilité du fait de son mi-temps thérapeutique imposé jusqu'au 4 décembre 2016 , suite à son accident du travail du 1 er septembre 2016.

Il soutient également que la société n'a pas pris en compte ses impératifs familiaux. Il explique à cet égard que sa première mutation vers [Localité 8], annoncée fin 2016 et officialisée en février 2017 l'avait conduit à changer son fils handicapé d'institution spécialisée pour l'inscrire dans un établissement scolaire situé à mi-chemin avec son domicile en Seine et Marne afin d'être en mesure de l'y conduire et ramener chaque jour mais que sa mutation finale à l'Agence de [Localité 7] , sans délai de prévalence, a mis à mal cette organisation.

Le mi-temps thérapeutique dont il est fait état a été décidé pour la période allant du 29 novembre 2016 au 4 décembre 2016, soit pendant 4 jours ouvrés (les 3 et 4 décembre 2016 correspondant au week-end). Il est dés lors très peu probable que la mutation soit une mesure de rétorsion de la part de l'entreprise.

Par ailleurs, rien n'établit que cette mutation allait impacter la part variable de la rémunération du salarié, lequel ne s'est pas opposé à ce changement.

Enfin, la cour constate que le salarié ne justifie d'aucune façon qu'il a été amené à changer son fils d'établissement suite à l'annonce de sa mutation sur [Localité 8], le certificat produit aux débats étant daté du 9 septembre 2016, soit bien antérieurement à l'annonce de cette mutation, étant précisé que l'établissement se situe à [Localité 5].

La demande du salarié ne peut prospérer. Le jugement est confirmé.

6 - Sur les retenues de salaires du 18 au 30 septembre 2017

Le salarié n'a pas rejoint son poste de travail à l'issue de la fin de son arrêt de travail. Il ne peut prétendre à un rappel de salaire sur la période considérée.

Le jugement est confirmé.

7 - Sur la rupture du contrat de travail.

7-1- Sur l'origine de l'inaptitude

Le salarié soutient qu'elle est due au harcèlement moral qu'il a subi de la part de son employeur et est ainsi d'origine professionnelle.

L'employeur soutient que rien n'établit l'origine professionnelle de l'inaptitude.

Il a été jugé plus haut que le salarié n'a pas été victime de harcèlement moral de son employeur. Dès lors l'inaptitude est d'origine non professionnelle.

7-2- Sur le licenciement

Le 13 octobre 2017, à l'issue de la seconde visite de reprise, le médecin du travail a déclaré M. [P] [R] inapte en ces termes « « inapte au poste, l'état de santé du salarié fait obstacle à tout reclassement dans un emploi dans l'entreprise et dans le groupe .

Inapte au poste de responsable d'exploitation. Pas d'exposition à des situations stressantes »

Le licenciement pour inaptitude non professionnelle de M. [P] [R] et impossibilité de reclassement est ainsi fondé sur une cause réelle et sérieuse.

Le salarié est débouté de sa demande tendant à voir juger son licenciement nul et subsidiairement sans cause réelle et sérieuse et de l'ensemble de ses demandes financières subséquentes.

Le jugement est confirmé de ce chef.

8- Sur les demandes accessoires.

Le jugement est confirmé sur les dépens et l'article 700 du code de procédure civile.

Les parties seront déboutées de leurs demandes fondées sur 700 du code de procédure civile en cause d'appel.

M.[P] [R] supportera les dépens d'appel.

PAR CES MOTIFS :

La cour,

Confirme le jugement déféré en toutes ses dispositions,

Y ajoutant,

Déboute les parties de leurs demandes fondée sur l'article 700 du code de procédure civile,

Condamne M. [P] [R] aux dépens d'appel.

LA GREFFI'RE LA CONSEILL'RE

POUR LE PR''SIDENT EMP'CH''


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 6 - chambre 4
Numéro d'arrêt : 20/03832
Date de la décision : 02/11/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-11-02;20.03832 ?
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