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27/10/2022 | FRANCE | N°22/05912

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 1 - chambre 2, 27 octobre 2022, 22/05912


Copies exécutoiresREPUBLIQUE FRANCAISE

délivrées aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS





COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 1 - Chambre 2



ARRET DU 27 OCTOBRE 2022



(n° , 6 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 22/05912 - N° Portalis 35L7-V-B7G-CFQDA



Décision déférée à la Cour : Ordonnance du 11 Février 2022 -Président du TJ de BOBIGNY - RG n° 21/01952





APPELANTS



M. [M] [O]



HOPITAL [10],

[Adresse 2]

[

Localité 7]



S.A. MMA IARD (RCS Le Mans n° 440 048 882), prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège



[Adresse 3]

[Localité 5]



MMA IARD ASSURA...

Copies exécutoiresREPUBLIQUE FRANCAISE

délivrées aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 1 - Chambre 2

ARRET DU 27 OCTOBRE 2022

(n° , 6 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 22/05912 - N° Portalis 35L7-V-B7G-CFQDA

Décision déférée à la Cour : Ordonnance du 11 Février 2022 -Président du TJ de BOBIGNY - RG n° 21/01952

APPELANTS

M. [M] [O]

HOPITAL [10],

[Adresse 2]

[Localité 7]

S.A. MMA IARD (RCS Le Mans n° 440 048 882), prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

[Adresse 3]

[Localité 5]

MMA IARD ASSURANCES MUTUELLES (RCS Le Mans n°775 652 126), agissant poursuites et diligences en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

[Adresse 3]

[Localité 5]

Représentés par Me Dominique DUFAU, avocat au barreau de PARIS, toque : C1249

Assistés par Me Pauline DEIDDA, avocat au barreau de PARIS

INTIME

M. [W] [G]

[Adresse 6]

[Localité 8]

Représenté par Me Pierre LUMBROSO de la SELARL SELARL L&A, avocat au barreau de PARIS, toque : B0724

Assisté par Me Manane MBAPANDZA, avocat au barreau de PARIS

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l'article 805 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 22 Septembre 2022, en audience publique, les avocats des parties ne s'y étant pas opposés, devant Marie-Hélène MASSERON, Présidente de chambre, et Michèle CHOPIN, Conseillère chargée du rapport.

Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Marie-Hélène MASSERON, Présidente de chambre

Thomas RONDEAU, Conseiller

Michèle CHOPIN, Conseillère

Greffier, lors des débats : Saveria MAUREL

ARRÊT :

- CONTRADICTOIRE

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Marie-Hélène MASSERON, Présidente de chambre et par Saveria MAUREL, Greffier, présent lors de la mise à disposition.

*****

EXPOSE DU LITIGE

M. [G] a subi une arthroscopie du genou gauche en 2005 et du genou droit en 2007 pour soigner une arthrose fémoro-patellaire bilatérale, puis une patelloplastíe pratiquée par le docteur [O] en avril 2010.

Estimant que cette dernière opération était un échec compte tenu de la gêne et des douleurs subies, M. [G] a fait assigner en référé devant le président du tribunal judiciaire de Bobigny, par exploits des 13 et 18 octobre 2021, le docteur [O], la société MMA IARD Assurances Mutuelle, ainsi que l'Hôpital [10] aux fins de voir :

'désigner un expert avec pour mission d'évaluer les préjudices découlant de cette opération ;

'condamner solidairement les trois défendeurs au paiement d'une provision de 10.000 euros à valoir sur la réparation de son préjudice corporel, et de la somme de 2.000 euros au titre des frais irrépétibles, outre les dépens.

Par exploit du 13 décembre 2021, M. [G] a fait assigner la CPAM de Seine-Saint-Denis.

Par ordonnance de référé réputée contradictoire du 11 février 2022, le président du tribunal judiciaire de Paris a :

- constaté la jonction de l`affaire enregistrée sous le numéro 22/26 avec celle enregistrée sous le numéro de répertoire général 21/1952 prononcée à l'audience du 12 janvier 2022 par simple mention au dossier ;

- renvoyé les parties à se pourvoir sur le fond du litige ;

- par provision, tous moyens des parties étant réservés ;

- ordonné une mesure d'expertise médicale et désigné pour y procéder M. [E] [F], [Adresse 4] [Localité 9], port : [XXXXXXXX01], email : [Courriel 11], lequel s'adjoindra si nécessaire tout sapiteur dans une spécialité distincte de la sienne, avec la mission classiqueen la matière ;

- déclaré la présente ordonnance opposable à la CPAM de Seine-Saint-Denis ;

- condamné solidairement M. [O], la société MMA IARD, la société MMA IARD Assurances Mutuelles à payer à Monsieur [W] [G] la somme totale de 4.000 euros à titre de provision à valoir sur son préjudice corporel ;

- condamné solidairement M.[O], la société MMA IARD, la société MMA IARD Assurances Mutuelles à payer à Monsieur [W] [G] la somme de 800 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, et les dépens.

Par déclaration du 21 mars 2022, les sociétés MMA IARD et M. [O] ont relevé appel de cette décision en ce qu'elle a :

- condamné solidairement M. [O], la société MMA IARD et la société MMA IARD Assurances Mutuelles à payer à M. [G] la somme totale de 4.000 euros à titre de provision à valoir sur son préjudice corporel ;

- ainsi que la somme de 800 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile outre les entiers dépens.

Dans leurs dernières conclusions remises et notifiées le 14 juin 2022, les sociétés MMA IARD et MMA Assurances Mutuelles ainsi que le docteur [O] demandent à la cour de :

- les recevoir en leur appel et les y déclarer bien fondés ;

- infirmer l'ordonnance rendue par le juge des référés ce qu'elle a condamné solidairement les sociétés MMA IARD, MMA Assurances Mutuelles et M. [O] à payer à M. [G] la somme totale de 4.000 euros à titre de provision ;

- infirmer l'ordonnance rendue en ce qu'elle a condamné solidairement des sociétés MMA IARD MMA Assurances Mutuelles et M. [O] à payer à M. [G] la somme de 800 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, et aux dépens ;

En conséquence et statuant à nouveau,

- déclarer que la demande provisionnelle formée par M. [G] ne franchit pas le seuil d'évidence requis en référé dans la mesure où la responsabilité pour faute du médecin est contestée et contestable ;

- juger n'y avoir lieu à allocation d'une indemnité provisionnelle au profit de M. [G]

- débouter M.[G] de sa demande de provision à l'encontre des sociétés MMA IARD, MMA Assurances Mutuelles et M. [O] ;

- ordonner en tant que de besoin la restitution de la somme de 4.800 euros versée à M.[G] ;

En tout état de cause,

- rappeler que l'arrêt infirmatif à intervenir constitue le titre ouvrant droit à la restitution des sommes versées en exécution du jugement.

- juger n'y avoir lieu à condamnation solidaire de M. [O], les sociétés MMA IARD, MMA Assurances Mutuelles à payer à M.[G] la somme de 800 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, et aux dépens

- débouter M. [G] de sa demande au titre des frais irrépétibles ;

- réserver les dépens

- déclarer que chacune des parties conservera la charge de ses propres dépens engagés dans la présente instance.

Les sociétés MMA IARD, MMA Assurances Mutuelles et M. [O] soutiennent en substance que :

- la responsabilité d'un médecin suppose l'établissement d'une responsabilité pour faute, tandis que le juge des référés n'a pas compétence pour statuer sur le fond du litige,

- l'existence d'une faute médicale, la caractérisation d'un manquement aux règles de l'art dans le domaine médical relève globalement de l'appréciation des experts médicaux, raison pour laquelle le M. [G] sollicite, avant toute discussion au fond une mesure d'expertise judiciaire confiée à un expert médical ;

- l'argument selon lequel les préjudices laissent présager une faute ne saurait prospérer, M. [G] pouvant souffrir de préjudices sans que pour autant la responsabilité pour faute du praticien puisse être retenue ;

- c'est donc à l'expert judiciaire désigné par le tribunal de déterminer si une faute a été commise par le docteur [O], d'autant que la commission de conciliation et d'indemnisation des accidents médicaux a déjà rendu un avis négatif dans ce même dossier ;

- accorder dans ces conditions une provision à une personne s'estimant victime d'un accident médical supposerait qu'avant même de trancher sur le caractère fautif ou non de l'intervention du docteur [O], les sociétés MMA IARD et son assuré seraient tenues d'indemniser alors qu'il est impératif qu'une faute à l'encontre du patricien soit retenue ;

- la mesure d'expertise sur le fondement de l'article 145 du code de procédure civile n'est pas discutée en revanche ;

- il est donc nécessaire d'attendre les conclusions de l'expert saisi, qui devra se prononcer sur l'existence ou non de fautes imputables au docteur [O], pour accorder une quelconque indemnisation à M. [G], fut-il atteint de séquelles consécutives à l'intervention médicale réalisée.

Dans ses dernières conclusions remises et notifiées le 3 mai 2022, M. [G] demande à la cour de :

- confirmer l'ordonnance rendue par le tribunal judiciaire de Bobigny, statuant en référé le 11 février 2022 en ce qu'i1 a été prononcé une condamnation solidaire du docteur [O], la société MMA IARD, la société MMA Assurances Mutuelles à payer à M. [G] la somme totale de 4.000 euros à titre de provision.

M. [G] soutient en substance que :

- l'existence de l'obligation n'est pas sérieusement contestable dans le cas présent, les préjudices laissant présager une faute, et il convient seulement de déterminer leur origine ;

- la provision est une somme par laquelle une partie sollicite que son adversaire soit condamné à lui verser à titre provisoire, pour que ce règlement lui permette de faire face aux frais que la procédure va entraîner, la destination finale des sommes en question dépendra du débat sur le fond et notamment des conclusions du rapport d'expertise médicale ;

- c'est en effet à l'expertise d'établir l'existence d'une faute ;

- il ressort des examens postérieurs à l'opération qu'il existe un doute sérieux quant au professionnalisme des soins prodigués.

Pour un plus ample exposé des moyens des parties, il est renvoyé à leurs conclusions susvisées conformément à l'article 455 du code de procédure civile.

SUR CE, LA COUR

La cour n'est saisie que de l'appel du dispositif de la décision relatif à l'octroi d'une provision au profit de M. [G].

L'article 835 du code de procédure civile dispose que, dans les cas où l'existence de l'obligation n'est pas sérieusement contestable, le président du tribunal judiciaire ou le juge des contentieux de la protection dans les limites de sa compétence peut accorder une provision au créancier, (...)

Une contestation sérieuse est caractérisée lorsque l'un des moyens de défense opposé aux prétentions du demandeur n'apparaît pas immédiatement vain et laisse subsister un doute sur le sens de la décision au fond qui pourrait éventuellement intervenir par la suite sur ce point si les parties entendaient saisir les juges du fond.

En l'espèce, il ressort des débats et des pièces produites que :

- la commission de conciliation et d'indemnisation des accidents médicaux d'Ile de France a été saisie par M. [G], l'expert désigné ayant déposé son rapport le 23 novembre 2013 et indiqué que le diagnostic de chondropathie fémoro- patellaire a été porté dans les règles de l'art, le choix du traitement est conforme, la réalisation de l'intervention et des contrôles post opératoires n'appellent aucun commentaires,

- il expose que le dommage est un échec par rupture précoce survenue dans les suites de la chirurgie initiale puis rupture itérative de la tentative de reconstruction tendineuse,

- la commission de conciliation et d'indemnisation des accidents médicaux a rendu le 19 mars 2014 un avis de rejet, en précisant que "la responsabilité du professionnel de santé mis en cause n'étant pas engagée et le dommage en cause ne remplissant pas les conditions ouvrant droit à réparation au titre de la solidarité nationale, la demande d'indemnisation de M. [G] ne peut être accueillie",

- M. [G] produit pour sa part les éléments de son parcours médical, dont il ne ressort pas que le docteur [O] aurait commis une faute dans l'élaboration du diagnostic, dans le choix du traitement, ou la réalisation de l'intervention pratiquée.

Dès lors, il en ressort bien que d'une part, l'existence d'une faute commise par le docteur [O] est dépourvue de l'évidence requise en référé et relève incontestablement de l'appréciation du juge du fond et, d'autre part, que la demande formée par M. [G] au titre de l'indemnisation du préjudice qu'il invoque excède les pouvoirs du juge des référés, de sorte qu'il n'y a pas lieu à référé sur cette demande qui nécessite la caractérisation d'une faute et d'un préjudice en lien de causalité direct avec celle-ci, la demande de paiement d'une provision étant au surplus fondée sur une obligation sérieusement contestable.

L'ordonnance rendue sera infirmée sur ce point.

Le présent arrêt constitue le titre en vertu duquel les appelants peuvent obtenir la restitution de la provision versée en exécution de l'ordonnance dont appel.

En conséquence, la demande de restitution par les appelants de la somme de 4.800 euros versée en exécution de l'ordonnance dont appel est sans objet.

L'ordonnance rendue sera également infirmée quant au sort des dépens et des frais irrépétibles.

Les dépens de première instance et d'appel seront mis à la charge de M. [G]. Il n'y a pas lieu de faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile en première instance et en appel.

PAR CES MOTIFS,

Statuant dans les limites de l'appel,

Infirme l'ordonnance entreprise en ce qu'elle a alloué à M. [G] une somme de 4.000 euros à titre provisionnel à valoir sur son préjudice corporel ;

Statuant à nouveau,

Dit n'y avoir lieu à référé sur la demande de provision de M. [G] ;

Y ajoutant,

Rappelle que le présent arrêt constitue le titre en vertu duquel les sociétés MMA Iard, MMA Assurances Mutuelles et le docteur [O] peuvent obtenir la restitution de la provision versée en exécution de l'ordonnance dont appel ;

Dit, en conséquence, sans objet, la demande de restitution de la somme de 4.800 euros versée en exécution de l'ordonnance dont appel ;

Déboute les parties de leurs prétentions plus amples ou contraires ;

Dit n'y avoir lieu à application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile en première instance et en appel,

Condamne M. [G] aux entiers dépens de première instance et d'appel.

LE GREFFIER LA PRESIDENTE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 1 - chambre 2
Numéro d'arrêt : 22/05912
Date de la décision : 27/10/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-10-27;22.05912 ?
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